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25/02/2012

KR'TNT ! ¤ 87. NEW YORK DOLLS

 

KR'TNT ! ¤ 87

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

01 / 03 / 2012

 

 

ATTENTION !

Cause départ en vacances nous postons ce dimanche 26 février la livraison du jeudi 01 mars. N'oubliez donc pas de regarder notre compte-rendu du 23 féfrier des fabuleux concerts de Ruby Ann et Ghost Highway. Nous reprendrons nos livraisons coutumières dès le jeudi 09 mars. En attendant Keep Rockin' Till Nest Time !

 

 

 

POUPEES BRISEES

 

 

THE NEW YORK DOLLS / NINA ANTONIA

 

Camion Blanc / Janvier 2012

 

 

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TOO MUCH TOO SOON

 

 

Cela s'est passé il y a longtemps, plus de quarante ans, juste après la mort de Gene Vincent. L'on pensait que le rock était mort lui-aussi, et voici que l'on n'avait pas tourné la page que déjà il renaissait. Pas du tout ! J'en connais certains qui déjà froncent les sourcils et déclarent que je me mélange les pinceaux, que nous sommes tout juste au début des années soixante dix et que le rock est au contraire en train d'atteindre son niveau le plus haut, que les seventies sont réputées pour être son acmé triomphal et que, enfin reconnu de tous comme un vecteur culturel de très grande ampleur, il touche à une plénitude qu'avant lui aucune autre musique n'avait pu se targuer de revendiquer.

 

 

C'est ce que l'on appelle l'histoire officielle. En vérité, comme disait l'autre cloué sur son morceau de bois, le bon côté des choses n'est jamais celui que l'on croit. Certes entre la disparition de Morrison et l'envol du Dirigeable le rock semblait parti pour une incroyable aventure. Sa récupération. Oui, l'on se doit d'appeler un wild cat on the tin heat roof un chat domestique sur le canapé de la salle-à-manger. L'on ne s'est jamais autant ennuyé qu'en ce début de la septième décennie. Bien sûr qu'il y avait de quoi se mettre entre les oreilles ! La souris du rock'n'roll avait accouché d'une montagne. Trop grosse à digérer. Le maudit rongeur ne venait plus semer ses crottes sur notre moquette et cette incivilité notoire nous manquait. L'infatigable bestiole s'était faite à elle toute seule aussi grosse qu'un troupeau de dinosaures. Tout le monde mettait chapeau bas.

 

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Bref du rock à tous les étages. Vous ne pouviez plus y échapper. Faisait désormais partie des meubles. Rien de plus terrible que la reconnaissance officielle. Ca vous tue votre authenticité en moins de rien. Lorsque le parfum du rebelle est enfermé dans un flacon stérilisé et vendu en grande surface, ce n'est plus qu'un produit de seconde nécessité.

 

 

C'est alors qu'un super groupe est arrivé et a salement secoué le cocotier sur lequel Keith Richard s'était - on ne saura jamais pourquoi - juché. Vous aimeriez que le conte pour le grand enfant sage que vous n'avez jamais cessé d'être, commençât ainsi. Pas de chance, tout le monde descend – sauf Keith – l'on va vous dérouler une pellicule d'un tout autre calibre. Une histoire de gaminos, comme on en fait plein encore, mais ceux-là se sont trompés, ont commencé à jouer avec les poupées de leur grande soeur et ils n'ont pas su s'arrêter. Désordre.

 

 

NEW YORK, NEW YORK

 

 

The big apple. A croquer de toutes ses dents. Attention, elle est plus dure qu'il n'y paraît. Un régal pour les immigrants. Les parents de Billy Murcia viennent de Colombie et ceux de Syl Sylvain d'Egypte. Ce qui est rassurant, comme quoi le pays des pyramides aux quarante siècles ne se sera pas contenté de refourguer Claude – alexandrie-alexandra - François à la fée du vinyl. Y avait aussi du lourd en rayon. Deux gamins inséparables. Laissez vos mouchoirs dans la poche, ne crèvent pas de faim, sont entourés d'amour et d'affection. Pour Johnny Gensale – un petit gars du tonnerre – c'est un peu moins cool, mais il y a le baseball et puis très vite la guitare. Arthur Kane, c'est le petit chaperon rouge de l'histoire, le loup a bouffé sa maman, ne s'en remettra jamais, alcool, dope et rock'n'roll seront les seuls médicaments qu'il trouvera. David Johansen est fils d'ouvrier, mais tendance arty, feuillette la poésie beat, joue de l'harmonica et de la plume. D'autres potes autour, mais à la fin ces cinq là seront les New York Dolls.

 

 

Se sont rencontrés petit à petit. Se sont reconnus plutôt. Ils tripent sur la fringue. Billy et Sylvain monteront leur petit commerce. Pour le fric, mais surtout pour le fun. L'allure, le désir non pas de plaire mais d'attirer le regard. Avant les oreilles. Ils osent. Tout. Ils assument. N'ont pas peur de passer pour des pédés. Pour la simple et bonne raison qu'ils guignent surtout l'élégance des filles. Jusqu'au bout. Plus putes que pèdes. N'ont pas encore le band que déjà ils ont l'image.

 

 

S'amusent beaucoup. Petites copines, sapes incroyables, alcools, drogues douces. Nos futurs pistoleros du rock ont le pétard à la main plus souvent qu'à leur tour. Commencent à répéter. Composent des morceaux, jouent partout où ils peuvent, bars, caves, locaux... Ne sont pas spécifiquement géniaux, mais ils ont des idées. Un public se forme, beaucoup de filles qui adorent ces mecs habillées en gonzesse au sexe si baladeur. Un groupe dans son quartier, le groupe du quartier. Le problème c'est qu'ils sont quelques milliers dans ce pays à régner sur les quatre rues du bloc d'immeubles où ils crèchent. Nous sommes en 1971.

 

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Sont quand même arrivés à deux résultats : à jouer au GBCB le club mythique où se retrouve toute la connexion Andy Warwohl / Chesea Hôtel et à être précédés, partout où ils passent, d'une sacrée réputation de sympathiques fouteurs de merde. Et de bon combo aussi. Progressent, vitesse grand V, et prennent conscience de ce qu'ils veulent au juste. Et au faux.

 

 

Ne doutent de rien. Devenir les Rolling Stones américains. C'est la formule basse. En clair, les papies du rock à la retraite et les New York Dolls en haut de l'affiche. Un petit bémol à la problématique : faudrait tout de même enregistrer une galette. Ce n'est pas que les maisons de disques ne sont pas intéressées, mais avec cette bande d'énergumènes indomptables, elles préfèrent ne pas prendre de risques. Nos apprentis sorciers sont un peu à la ramasse, pas le genre à passer un veston cravate lorsque se pointe un ponte d'une major. Pétés comme des coings à vomir derrière les amplis et à commencer le concert avec trois heures de retard... Le professionnalisme tant vanté des américains prend avec eux un sacré coup dans l'aile... Rock'n'roll, certes. Mais un peu trop.

 

 

JACK POT... DE MERDE

 

 

Vont quand même décrocher le jack pot. Enfin manière de parler. Chez Mercury. Une major. Peut-être la seule où il n'aurait pas fallu mettre les pieds. Mais comme toutes les autres se sont défilées en voyant les phénomènes... On n'est pas spécialement rock destroy chez Mercury. On est pour la musique pépère. Des artistes qui obéissent au doigt et à l'oeil et on vous leur bichonne un plan de carrière jusqu'à la retraite. Du solide. On a signé les Dolls parce que la rumeur disait que... mais l'on ne sait pas trop quoi en faire. Pour gagner du temps on les envoie en Angleterre. D'un seul coup les poupées changent d'échelle, concert devant 8000 personnes en première partie de Rod Steward. La presse est unanime. Un set désastreux.

 

 

L'histoire des Dolls s'arrête là. Après ce concert à Wembley en 1972, c'est la dégringolade. Ne retrouveront plus jamais une telle occasion. Ils ont foiré le plan. Au-dehors et au-dedans. Johansen commence à prendre la grosse tête. Mais le véritable coup de Trafalgar c'est Billy Murcia qui l'assène. Meurt d'overdose suite à une trop grande absorption de produits divers. Retour à New York, sans tambour ni trompette. Mercury fait la gueule, les Dolls se sont conduits en grands seigneurs, n'ont pas lésiné sur les notes d'hôtel et les frais de bouche, surtout les boissons chaudes.

 

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A part que. Le buzz est énorme. Même moi, du plus profond de l'Ariège à 10 000 kilomètres de New York, je sais que les Dolls existent et sans avoir jamais entendu une note de leur musique, je n'ignorent pas qu'ils jouent comme des Dieux. Je vous la joue modeste, je ne suis pas le seul, en fait dans les milieux rock de la planète entière, ils ont déjà l'aura des Rolling Stones. Toute ressemblance avec une autre histoire ayant existé n'est pas due au hasard : l'un des rares spectateurs enthousiastes qui assiste à la prestation de Wembley n'est pas un inconnu. Retenez son nom, il aura un rôle crucial dans la suite des évènements. Il s'appelle Steve Jones. En France c'est Rock'n'Folk, qui mois après mois nous tiendra au courant des épisodes suivants.

 

 

ACTE II

 

 

Rentrent au bercail la queue entre les jambes nos donzelles, mais la mort de l'une fera le bonheur de cinq autres et de quelques milliers de fans de la planète Rock'n'roll. Billy Murcia l'avait déjà repéré comme un super batteur. Plus la dégaine, l'expérience et le savoir faire. Jerry Nolan était le batteur que les Dolls attendaient. Pas besoin d'être un expert pour le comprendre. Dès la première répétition, le groupe devient supersonique. Jerry Nolan et Johnny Thunders sont faits pour tricoter ensemble. Le premier émet un roulement de caisse stratophérique qui fait ressembler la frappe jazzique de Charlie Wats , toujours en retard d'un dixième de temps, à un moteur de deux-chevaux. Nolan, l'est du genre à avoir six tuyères d'avance et en plus il ne laisse pas de trou dans le gruyère. Faut sacrément se pousser les doigts pour poser des notes entre les intervalles, surtout qu'avec Nolan les temps morts n'existent pas. Les tue tous systématiquement. L'open-tunning à la Keith Richards – t'inquiète pas j'assure comme une bête – est à réviser. Les Stones balancent un rythme hypnotique, ils charment votre cerveau reptilien et vous procure le charme extatique. Les Dolls vous agressent. A chaque corde de sa guitare Johnny vous concocte le tonnerre d'une morsure de mamba. Les Rolling sont léthargiques, les Poupées sont carrément létales.

 

 

Puisqu'ils ont trouvé un nouveau batteur, Mercury ne peut plus les reculer. Direction les studios. Producteur imposé. Todd Rungren. Le même qui était aux manettes de I'm back, I'm proud de Gene Vincent. Indéniablement il connaît son boulot, mais a un peu tendance de faire sonner ses artistes, non pas comme du Tod Rungren, mais comme Tod Rungren aimerait qu'ils sonnent. Pas vraiment un partisan de la libre expression et encore moins de l'expression libre. Première fois que les Dolls entrent dans un véritable studio. Un peu intimidés au début. Se relâcheront bientôt. Mais Tod ne laisse jamais le chaos s'installer totalement.

 

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En cette année 1973 nous serons 110 000 à nous jeter sur la précieuse galette. Je la ramène chez moi en courant. Pochette kitch. Du genre l'on effraie les bourgeois. Pas de chance, suis un rocker. Un peu toc, un peu glamour, un peu décadent. A choisir le canapé je préfère celui de la pochette du Morrison Hôtel, les Doors y sont beaucoup plus inquiétants. Ces gars déguisés en filles, esthétique camp, nul besoin d'être docteur en psychanalyse pour piger qu'il y a longtemps qu'ils ont viré Oedipe de son complexe et qu'ils se foutent de notre gueule. Tape-à-l'oeil. Mais tapageur. Dans les sillons ce n'est plus la même graine. Dru de bite. Vous envoie les morceaux en pleine gueule. Du beau, du bon, mais il faut l'avouer rien d'exceptionnel. L'on se prend à penser que ce sont d'excellentes démos pour préparer les concerts. L'on vous livre le plan de bataille, mais pour la tuerie généralisée faudra attendre la scène.

 

 

Il y a des gens un rien les effraie. Le monde entier a tremblé lorsque à la télé ils ont montré le raz-de-marée qui a englouti le Japon. Une centrale nucléaire en vrille, quelques milliers de morts, une dizaine de villes emportées par les flots en trois minutes. Une gnognote, pour les chochottes. Si vous aviez déjà entendu le premier 33 des Dolls, vous auriez ricané de mépris devant tant d'émotion soulevée par un si léger incident nipponique.

 

 

Car c'est alors que Frankenstein est arrivé. Non, ce n'est pas parce que j'écris un article sur les Poupées que je me suis un peu chargé et que je n'ai plus de suite logique dans mes propos. Me suis toujours étonné que l'on est accordé dans les encyclopédies du rock si peu de mérite à ce morceau de Frankenstein que les Dolls nous livrent en tranche saignante façon steak tartare. N'y a que Nina Antonia qui attire l'attention dessus. Pouvait pas faire moins pour une bio des NYD !

 

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Restait plus qu'une plage, j'avais déjà saisi la pochette pour y renfiler le disque dès que celui-ci serait terminé. Je ne savais pas qu'il me restait peu de temps à vivre. Non, ce n'était pas la fin du monde. Bien pire que cela : la fin du rock'n'roll ! Y en a qui vous font un foin parce qu'ils connaissent A Love Supreme de Coltrane. Pauvres handicapés mentaux, n'ont jamais reçu Frankenstein en visite sur leur teppaz.

 

 

Antonia nous apprend que Thunder s'est brûlé les doigts en tentant d'apprendre le morceau. C'est rassurant. Parce que voyez-vous Frankenstein, c'est un riff, immédiatement suivi d'un autre riff, immédiatement suivi d'un autre riff, immédiatement suivi d'un autre riff – vous pouvez aller faire pipi comme quand les pubs passent à la télé, parce que là c'est parti pour dix minutes. Quand je parle de riff je ne parle pas de décortiquage de notes à la Black Dog de Jimmy Page, entre deux ré bémol qui se suivent il reste encore assez d'espace pour faire entrer une locomotive et un orchestre symphonique, non là chez Frankenstein tout est occupé. Pouvez plus rien rajouter. Ce qui m'a paru évident dès la première audition, c'est que le rock vivait son apogée sur cette face. Impossible de faire mieux, impossible de faire pire. La forme musicale – eidétique pour parler comme Platon – du rock'n'roll s'achève-là sur cette fin de 33 tours et la plupart de mes contemporains ne s'en sont jamais aperçus. Je préfère ne pas leur parler du final, avec cette reprise à la Bird Doggin', Did you ever meet with Frankenstein ?

 

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Après les Dolls, il y eut les punks, si vous n'avez jamais inouï ce Frankenstein des Dolls vous ne comprendrez jamais que le Never Mind The Bollocks des Pistols, cette façon sursaturée de ne pas jouer les riffs mais de les écraser à la moulinette de l'urgence du speed n'est qu'un pastiche de ce sombre opus des Dolls, dérisoirement hommagial. Car lorsque l'on ne peut plus en pleurer de frustration, le plus agréable c'est de faire semblant d'en rire. Mais n'anticipons point.

 

 

ACTE III

 

 

Les ventes n'étant point mirobolantes ( ni Marcbolantes ) Mercury les renvoie en Europe. Se conduisent comme ce qu'ils ne sont pas. Des rock'n'roll stars. Ce n'est pas de leur faute si le staff de Mercury qui possède de l'or en barre se contente de le monnayer en piécettes de cuivre. Des concerts épiques. Consomment à eux tous seuls autant de drogues et d'alcools que la moitié de l'Angleterre. Des déjantés. Addiction confusion. Beaucoup de sexes. Parfois ils joent comme des dieux. Souvent comme des héros fatigués. Leur venue à Paris galvanise le milieu rock parisien. Une gigantesque party de trois jours pleins. Après leur passage plus rien ne sera comme avant. Toute une génération de nos rock-critics ne s'en remettront pas. Après leur départ l'on pourra continuer à déclarer que we want the world now et que nous venons de l'avoir hier et que nous l'avons laissé repartir.

 

 

Quand ils reviennent au pays Mercury tire une gueule d'enterrement de trente kilomètres. L'affaire ne s'avère pas rentable. Déficit abyssal. La compagnie perd de l'argent par camions entiers. Dernière chance, un deuxième trente-trois tours.

 

 

ACTE IV

 

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Ce n'est pas la peine de l'écouter. D'abord un disque des Dolls ne peut pas être mauvais. Ensuite, il suffit de s'arrêter au titre. Too much, too soon. Formule magique. La conjuration absolue du bonheur et de la réussite. Mot à mot approximatif : trop loin, trop tôt. Vous saisissez l'allusion. Le meilleur groupe du monde ne pouvait pas être compris par son époque. En vendront dix mille exemplaires de moins que le premier. Pourtant la pochette était beaucoup plus classe. Un peu trop près du Kick out the Jams des MC 5, peut-être.

 

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Retour à la case départ. Tournée des petits clubs et des arrière salles de bars. Fini la grande vie, squattent des caravanes et des bungalows, bouffent des chips, se disputent, se droguent, boivent... Ils sont cornaqués par un admirateur de toujours, un certain – l'arnaque se précise - Malcom Mclaren. Exunt les décolletés avantageux et les boas emplumés à la quetzalcoatl, seront des garde-rouges, vêtus de latex rouge... laisse tomber Malcom en Amérique l'idée communiste ne cadre pas avec la mentalité... Un jour de grande dispute Nolan et Thunders se cassent. Le rêve est fini. 1975.

 

 

TOO MUCH TOO SOON

 

 

En Angleterre Nolan et Thunders se rendent compte que s'il en est un qui a tiré les leçons des Dolls, c'est leur ami Malcom. Les Dolls sont entrés dans la mythologie rock'n'roll. Des gamins s'apprêtent à rejouer la pièce. Ce ne sont plus les Dolls qui courent après les majors mais les Pistols qui font monter les enchères quand les majors font la queue.

 

 

Le punk n'est qu'une copie conforme du mode de vie des Dolls. Sex, drugs and rock'n'roll. Tout le reste n'est que foutaise. Le punk aussi. Et le rock'n'roll aussi.

 

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A New York, Thunders et Nolan avaient récupéré Richard Hell chantre du punk New Yorkais, ami de Patti Smith. Ils fondent à Londres les Heartbreakers – ils feront partie du célèbre Anarchy Tour de 1977 - et sortent un super 33. Ils jouent plus vite et plus fort que les punks mais la drogue et les différentes manières d'entrevoir la suite cassent l'aventure. Dommage, Like A Mother Fucker ( L.A.M.F ) reste l'un de mes albums préférés.

 

 

Nolan disparaît en 92 d'une méningite, Kane casse sa pipe en 2004 excès, dépression christique et leucémie, Thunders, héroïnomane à mort, les a devancés en 1991, entre temps il est devenue une icône rock, pour beaucoup plus importante que Jimmy Hendrix, vous conterai sa légende une autre fois.

 

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Episodiquement depuis 2004, les Dolls se reforment. Ce qu'il en reste. Pour le fun et évoquer l'esprit des disparus. Ont réussi à renégocier leur contrat avec Mercury qui était propriétaire des paroles, de la musique, des droits d'édition et de reproduction... Des centaines de milliers de dollars qui ne furent pas perdus pour tout le monde...

 

 

Mais l'on s'en fout. Vaut mieux crever jeune et destroy comme Johnny Thunders que survivre en vieux beau comme Mick Jagger.

 

 

It's was only rock'n'roll but we liked it.

 

 

And now, again.

 

 

Petit à petit l'oiseau fait son N.Y.D.

 

 

Damie Chad.

 

 

LA SALAMANDRE N° 16.numérisation0033.jpg

 

Hiver 2012.

 

 

La revue littéro-gothique La Salamandre dirigée par Marc-Louis Questin sort son seizième numéro. Une revue qui dure, toujours prête à mourir mais qui s'accroche, comme un vampire à son cercueil – pour ne pas descendre dans la tombe.

 

 

Les rockers se précipiteront sur les illustrations, affiches de films, repros de peintres symbolistes, gravures diverses mais toujours fortement teintées d'érotisme. De bonnes idées à laisser germer pour de futures pochettes de 45 tours. Pas de CD musical, cette fois-ci, dommage on n'y a trouvé des trucs invraisemblables dessus.

 

 

Quand vous aurez fini de zieuter les images, vous pouvez vous lancer dans la lecture des poèmes et des nouvelles fantastiques au programme. Je vous conseille Les temps imaginaires de Myke Hell, une longue phrase de deux pages qui resserrera ses volutes d'angoisse sur votre cerveau effrayé et Cours Heather Cours dédiée à Johnny Thunder ( quel hasard ! ) d'Eric Tessier, construite sur une idée originale. Par contre évitez l'imbécile de de service, en l'occurrence, Paul Sanda qui gâche deux pages à nous raconter son amour pour Diamanda Galàs, certes tous les goûts sont dans la nature et l'oeuvre chantée de Diamanda ne vous laissera pas indifférent. Une espèce de Nina Hagen américaine qui glapit, crie, hurle et chuchote au croisement du bruitisme, des avant-gardes arty, du satanisme, de Baudelaire, de l'esthétique funérale et autres joyeusetés du même genre. La grande prêtresse de l'underground gothique pour résumer. Sur You Tube vous trouverez moult vidéos de la bête féroce. Amis rockers vous privilégierez sa version de I put a spell on you qui malgré ses outrances vocales n'arrive pas à la hauteur de Screamin' Jay Hawkins.

 

 

Bref après deux pages de galimatias-intello-poético-sous-surréalisto-pacotillo-merdique, notre Paul Sanda rajoute une note à la fin de son texte pour nous avertir que son texte annule les précédentes versions de 2001 et 2004 de cette même prose, ce dont tout le monde se fout puisque personne ne les a lues. Ah ! Les poseurs déposent toujours leurs étrons là où il ne faut pas ! L'a dû confondre gothique avec crottique !

 

 

Damie Chad.

 

 

 

 

22/02/2012

KR'TNT ! ¤ 86. GHOST HIGHWAY / RUBY ANN

 

 

KR'TNT ! ¤ 86

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

22 / 02 / 2012

 

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MENNECY ROCK'N'ROLL PARTY

 

 

RUBY ANN / GHOST HIGHWAY

 

 

18 / 02 / 2012

 

 

 

 

L'on aurait pu rester tranquillement chez nous à astiquer nos vinyls d'Eddie Cochran, mais ces rôdeurs de la plaine que sont les gars de Ghost Highway – rencontrés la semaine dernière au concert Spunnyboys / Nelson Carrera, nous avaient menacé d'une irrémédiable fatwa rockabillesque si nous n'étions pas présents à vingt heures tapantes les doigts sur la couture du perfecto, et comme en plus cela faisait quatre ans qu'Alain brûlait de voir Ruby Ann, l'on a fait le plein de la teuf-teuf mobile et hop en piste pour le prochain rodéo.

Pas bêtes l'on s'était méfié – voir notre livraison précédente – l'on s'était donc muni d'un radar ce qui nous a permis un travail d'approche relativement serein, n'y a qu'arrivé sur Mennecy que la bestiole s'est piquée un trip nostalgie circuit Indianapolis et s'est systématiquement amusé à nous faire tourner trois fois de suite comme des dératés sur tous les ronds-points du patelin, l'on commençait à désespérer lorsque sur le fond de la nuit noire au milieu de nulle part se sont détachées sur un immense drap de lit les lettres noires du seul mot béni par les Dieux : Rock'n'Roll !

 

 

Tout de suite, le super standing, grilles de fer forgé, allées goudronnées, arbres et pelouses à perte de vue, des emplacements d'un demi-hectare pour garer la voiture, avec à trois cents mètres le bloc d'une énorme construction éclairé de l'intérieur. L'on a monté le grand escalier, l'on s'est fait tamponner le poignet gauche et l'on a eu le droit de rentrer dans la place. Même qu'il y avait un vestiaire pour ceux qui voulaient poser leur doudoune et leur parapluie. Comme l'on n'avait ni l'un ni l'autre l'on a économisé 2 euros. Chacun.

 

 

Pour une salle c'était une salle, immense, haute de plafond avec une chouette charpente apparente peinte en vert, une fois les yeux baissés vous n'y croyez pas : une véritable scène surélevée, avec au fond quatre rangées de sièges pour les fatigués de naissance, un espace de quoi permettre à cinquante couples de s'adonner en même temps à la passion du rock acrobatique, une rangée de stands à dépenser vos économies des deux dernières années en une soirée, n'y avait que la boisson qui accrochait un peu, le coca et le jus d'orange, vous ont quand même des aspects d'adolescence pré-pubère un peu affligeants. Un peu de bière certes, mais pas d'alcool fort. Faudrait tout de même que la législation booze un peu.

 

 

RUBY ANN

 

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Z'ont dû nous entendre soupirer car d'entrée les trois musicos nous offrent une Tequila rayonnante avec un peu de Champs pour les fins gosiers. C'est l'intro, la diva n'est pas encore là, doit être encore backstage à se prélasser sur le divan, profitons-en pour admirer notre trio de feu fourbir les fours de l'enfer. Sur votre gauche le bassiste, costume de maquereau marron rayé, de fort mauvais goût, serre contre lui une contrebasse de la couleur et du bois dont on fait les cercueils, le weekend il s'en sert pour jouer mais le reste de la semaine, il doit y planquer les cadavres de ceux qu'il a refroidis. N'est peut-être pas méchant, mais il vous baffe sa sulfateuse à grands coups de battoirs qui font mal, le genre solitaire qui n'aime pas qu'on vienne le déranger. Vous tire trois balles dans le buffet et ne songe pas une seconde à venir s'excuser. D'ailleurs les deux autres semblent s'en méfier. L'on a l'impression que la section rythmique passe par la batterie et la guitare solo.

 

 

 

Le batteur c'est une pièce de théâtre à lui tout seul. Inutile de l'écouter, il suffit de le regarder. Grandeur et servitude musicale à lui-tout seul. Semble toujours surpris de tomber pile-poil à l'endroit exact où il doit être. Il ne joue pas, il mime. Un peu comme vous, devant votre glace, à part que son miroir à lui c'est le public qui exulte. Avec ses cheveux coupés au sécateur plaqués en arrière qui viennent battre sa figure, il a une allure pas possible. Pantin désarticulé et rafales de caisse claire comme s'il en pleuvait. Compose des figures plus qu'il ne marque le beat. Chaque passe est construite comme un scénario froidement exécuté. Un régal.

 

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Celui qui lui renvoie le punchin-ball, c'est le guitariste. Hyper électrique. Vous bazarde des riffs au fil de fer barbelé sur la gueule, l'air de rien. N'avez pas le temps de vous dépatouiller du cadeau qu'il est déjà ailleurs, sur un autre plan, encore plus vicieux. Relance sans arrêt la machine. Il brode ses motifs à la balle traçante. Qui a dit que rockabilly ne rimait pas avec électricité !

 

 

Trois personnalités, mais le band est sur la même longueur d'ondes. Complicités et émulations. De temps en temps on cherche à pousser l'autre dans ses retranchements mais pas en traître on avertit d'abord d'un coup d'oeil et c'est parti comme en 14. Se connaissent un peu puisque ce n'est autre que Nico Duportal et deux de ses acolytes. Pour ceux qui ne connaissent pas, l'on vous en reparlera des Rhythm Dudes une autre fois. Car voici Ruby Ann.

 

 

Vient tout droit de Californie. C'est plus compliqué que cela, d'origine portugaise elle a vécu en région parisienne avant de s'envoler pour la côte ouest. D'ailleurs son prochain concert est programmé pour le 26 février à New York... Mais la voici qui entre sur scène. Quelle classe ! Quel style ! Un sourire qui bluffe tout le monde. Se plante simplement devant le micro, sur ses plat-form boots et son pantalon noir serré très haut, bout de femme et grande dame, paraît toute jeune même s'il elle est dans le métier depuis une quinzaine d'années, un charme indéniable. Rien qu'à la voir vous lui donneriez le rockabilly sans confession.

 

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Dépêchez-vous de le faire avant qu'elle n'ouvre sa petite bouche rouge, car alors c'est déjà trop tard. Tranchant comme un rideau de fer et froid comme le fil du rasoir. Les flammes de l'enfer vous enveloppent et vous voici parti pour le jardin des délices. Dès le deuxième morceau elle demande avec un sourire irrésistiblement démoniaque qu'on lui apporte un petit whisky pour se réchauffer. A entendre ce qu'elle chante l'on devine qu'elle ne boit pas que de l'eau de Vichy.

 

 

Le set ne dure qu'une heure, hélas ! L'on sent que derrière le combo, chauffé à mort, ne demanderait qu'à lâcher les fauves, quant à la panthère noire qui est devant s'il ne tenait qu'à vous vous ne la relâcheriez plus jamais de cette scène qu'elle a transformée par la magie de sa voix métal guillotine en cage dorée. Juste le temps de même pas vingt morceaux ! Avons préféré la première moitié du set plus dur, violent, menaçant. La deuxième n'en est pas moins intéressante quelque part plus western swing, plus honky tonk, mais avec toujours cette facilité et ce plaisir de chanter qui arrachent l'approbation.

 

 

Chaque morceau est un petit bijou ciselé au lance-flamme, Nico et sa bande lui fondent de l'or pur que sa voix transforme en le mythique orichalque, ce fabuleux métal perdu depuis la plus haute antiquité. Sûr que tant qu'elle chante on la suivrait au bout du monde comme des petits chiens, je vous le jure Ruby Ann sur l'ongle.

 

 

Elle nous quitte trop vite, laissant derrière elle une salle conquise. Elle reviendra signer son dernier disque et poser pour les photos, joyeuse, heureuse de vivre. Du grand art.

 

 

 

GHOST HIGHWAY

 

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Neuf mois que nous n'avions pas vu les Ghost Highway sur scène. Mais pourquoi nous privons-nous si facilement des petits plaisirs de la vie ? Sont tout de même passés plusieurs fois sur Paris et nous n'étions point là. Tant pis pour nous ! Ce soir nous le regrettons. Mais commençons par le commencement. Nous n'étions pas là depuis un quart d'heure que l'on a pu assister à la balance. Rien de bien génial, vite expédiée, juste de quoi équilibrer le son, mais sans la frite et le feu sacré.

 

 

Ah ! Les cachottiers. Z'ont pas démarré depuis trois secondes que l'on se prend le sound en pleine poire, convaincus, balayés, atomisés en cinq sec. Sortent le grand jeu et cela ne fera que s'amplifier tout le long du set. C'est une vague qui emporte tout sur son passage. Le groupe n'a pas progressé, il a atteint un nouveau palier, davantage d'énergie et de prégnance. La set-list n'a que très peu variée mais la façon d'accrocher et d'uppercuter les morceaux a gagné en intensité.

 

 

Beaucoup plus rentre dedans. Le fond est toujours inscrit sur une dominance roots, mais l'on sent que le groupe a envie de booster la mécanique. Mister Jull aborde le chant beaucoup plus abruptement, les morceaux sont envoyés direct, la voix en avant, la guitare en support, rock'n'roll en quelque sorte. Se lâche carrément et n'hésite plus à hurler et à lancer le groupe dans de fantastiques chevauchées.

 

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Zio semble avoir rajeuni. L'avions jamais vu jouer avec tant de hargne et de plaisir. Un véritable gamin qui fait mille tours pendables avec sa contrebasse. S'amuse comme un petit fou, sourire radieux aux lèvres, se lance à plusieurs fois en des solos qui soulèvent l'enthousiasme du public. Traverse la scène, emmêle les fils, fait tomber les micros, intenable, incapable de se tenir tranquille, et toujours cette assise de grondement de basse qui permet au groupe de foncer droit devant, balayant tout sur son passage.

 

 

De l'autre côté Phil ouvre la route. Il scande les pistons de la machine et ses roulements de chasse-buffle vous disperserait des troupeaux de bisons comme un vol de mouche. Faudra le voir à la fin du set lorsqu'il impose deux dernières cavalcades au bout de la nuit, tapant comme un forcené sur sa caisse, battant en même temps le rappel et la charge héroïque, une force brute que personne ne pourrait stopper. Non, que personne ne voudrait stopper.

 

 

Car dans la salle c'est un peu le délire. N'y a pourtant qu'un tiers de rockers ( toutes obédiences confondues ) et donc deux-tiers de tout venant qui sont venus là pour passer une soirée agréable qui les change de la TV et qui pour beaucoup prennent leur baptême rock'n'roll et qui marchent à fond dans la combine, tout surpris de se retrouver, aussi à l'aise que des piranhas dans l'eau de feu, en une telle ambiance de folie.

 

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C'est que ce soir, les fantômes de l'autoroute sont vraiment meurtriers, assoiffés de speed et de carambolage. Se sont débarrassés de la pédale de frein au premier échangeur. Je préfère ne pas vous parler de la rythmique infernale d'Arno sur sa Martin's, a dû avoir le bout des doigts qui fumaient jusqu'au lendemain matin. Sacré boulot de fond, peut-être pas le plus évident pour l'auditeur mais indispensable à la cohésion du groupe.

 

 

 

Une seule halte, le Country Heroes de Hank Williams, troisième du nom, petit-fils du grand ancêtre du rock'n'roll, mais l'on n'en respire pas mieux pour autant, l'harmonica d'Arno qui pleure le blues des occasions perdues et puis la modulation sifflée de Phil qui vous emmène au lieu exact du passage entre la vie et l'esprit, entre le bout de la piste et les squelettes perdus des derniers survivants...

 

 

Mais l'on repart au triple galop, Mister Jull moins galluppant que d'habitude mais éblouissant de concision et d'efficacité. Pas de démonstration, juste les solutions qui s'imposent. La fin du show est éblouissante. Une montée en puissance rarement entendue. Une force brute dévastatrice qui force le respect et l'admiration.

 

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Ghost Highway s'impose comme un des meilleurs groupes français. C'est déjà beaucoup mais ce n'est rien quand on comprend que le combo n'a pas encore donné tout ce qui fermente en lui. Ghost Highway est un grand groupe davantage par ce qui lui reste à accomplir que par tout ce qu'il a déjà réalisé.

 

 

Dans un premier temps Ghost Highway a revisité le legs historial du rockabilly remontant aux racines country et explorant des espaces musicaux américains - largement méconnus en notre pays d'accordéon baguette de pain – du temps où l'électrification n'était pas encore prépondérante dans les campagne appallachiennes. Y ont puisé et gagné un indéniable sceau d'authenticité qui leur assure comme une prépondérance morale et historiale sur la plupart des groupes nationaux. Si vous êtes attentifs à la presse nationale, vous trouverez comme des échos de ce que nous avançons. Pas encore des pleines pages, mais de ces encadrés pour amateurs curieux.

 

 

Le groupe aborde un virage prometteur : celui de la création, des compos persos, qui feront de lui une référence obligatoire. Attention, n'importe qui est capable de griffonner sur un coin de table un vieux rockabilly des familles qui ressemblera comme deux goutte d'eau à s'y méprendre à une piste originale de Ronnie Self. Mais c'est justement l'écueil à éviter. Il ne s'agit pas d'imiter mais de créer au sens plein du terme, c'est-à-dire apporter un peu de nouveau, un je-ne-sais-quoi qui fasse toute la différence.

 

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Et s'il est un groupe qui nous semble capable de passer l'obstacle avec succès, c'est bien Ghost Highway. Certes sa maîtrise scénique lui permettra d'imposer cette nouvelle voie, mais nous comptons surtout sur ses connaissances, et sur sa compréhension des anciennes formes pour qu'il réussisse à passer l'obstacle majeur du rock français sur lequel les groupes frenchies viennent se casser systématiquement les dents les uns après les autres.

 

 

Ce que nous avons vu hier soir, outre une prestation sans défaut qui fit l'unanimité – et après l'impact de la féminité incandescente de Ruby Ann ce n'était pas donné – c'est un groupe sur le point de muer. Le serpent du désert est prêt à quitter sa peau pour devenir encore plus furieusement crotale qu'il ne l'a jamais été. Le rockabilly français est à la croisée des chemins. Ghost Highway qui a su si bien ressuscité les fantômes du passé est le mieux taillé pour nous embarquer en une croisière fatidique taquiner les ombres du futur, là-bas en bout du ruban goudronné...

 

 

Les passagers se bousculent déjà pour prendre un ticket de place arrière, soucieux de ne pas rater une miette de l'aventure. N'importe où avec Ghost Highway ! pourvu que ce soit droit devant vers le pays du rock'n'roll où l'on finira bien par arriver un jour.

 

 

RETOUR A LA MAISON

 

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L'on est repartis à la maison, comblés. Avec notamment deux petits 45 tours de Gene Vincent qui manquait à ma collection de fétichiste. Mais surtout convaincus qu'au no future punk l'on pourra bientôt opposer un avenir rockabilly.

 

 

DAMIE CHAD.

 

 

KROCKNIKROCK

 

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TRAIN TO SATANVILLE. RUBY ANN.

 

RHYTHM BOM RECORDS. LTD LONDON. Www.rythmbomb.com

 

Train to Satanville. Dynamite. Ain't that lovin' you baby. That's the way I feel. I want a lover. I hear you talkin'. Just for you. Look at that moon. Eeny-Meeny-Miney-Moe. The big bouce. Don't call me Honey. King of my heart.

 

 

Gautier Gelab : lead guitar / Iggy Garcia : Acoustic bass / Jeff Gerow : drums / Rhythm guitar : Luis Arriaga / H and claps & percussions / Cavamen Leo

 

 

Attention il s'agit de la réédition de 2010 de Bomp Records, tiré à 1000 exemplaires et non l'édition originale parue chez Wild Records en 2007et enregistré à Hollywood. Le titre éponyme qui ouvre le CD ne laisse planer aucun doute sur la direction à prendre. Reprise d'un mystérieux 45 tours de Gin Gilette que l'on situe au début des années 60. Certains l'enrôlent dans la production US Garage pré-MC 5. Le thème gospellien en diable nous inciterait à opter pour un enregistrement du tout début des années 60.

 

 

Difficile de s'attaquer à un morceau culte d'une telle ampleur. La version plus western de Ruby Ann nous agrée davantage, Gin Gilette ne parvenant pas à garder tout le long de son interprétation la fougue qu'elle y insuffle au début. Pour la suite vous buvez comme du petit lait, enfin comme un tord-boyaux de derrière l'alambic car ça dégoise sec. Douze titres, douze pépites. Difficile de faire un choix. C'est comme les oeufs, vous emportez la douzaine et vous les gobez tous illico sans sourciller.

 

 

Un défaut ? Peut-être une production un peu trop bien léchée, comme si l'on n'avait voulu maintenir une frontière nette et imperméable entre le new-rockab et le psychobilly. Ce qui fait peut-être la différence entre certains titres ( Psycho, pour ne pas le nommer ) d'Imelda May et les attaques lance-dedans de Ruby Ann. D'un autre côté on peut comprendre ce parti-pris de production comme un clin d'oeil aux premiers enregistrement de chez Sun, toujours si clean, même si l'on en est tout de même assez loin. Par le son résolument moderne, mais aussi par la sensibilité éruptivo-latine que notre chanteuse infuse à toutes ses interprétations.

 

 

Dernier regret : je n'ai pas pris le dernier CD enregistré il y a à peine deux mois. En guise de consolation, je vous refile la carte promotionnelle. Une autre forme de ticket pour l'enfer. Hot rockabilly.

 

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Damie Chad.

 

FLAT-BROKE TIME WITH GHOST HIGHWAY.

 

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JULL RECORDS.

 

 

Flatbroke Time. That's what Daddy wants. Where the rio De Rosa Flows. Poor Charlie. Tally Ho. Lost Highway.

 

 

numérisation0017.jpgIls en rêvaient depuis longtemps, un bel objet pour les après concerts – à 13euros numérisation0021.jpgl'exemplaire se sont envolés comme des petits pains – ont eu un peu de mal à obtenir le son qu'ils voulaient, mais se sont obstinés, c'est que pour la première production du label Mister Jull ne voulait pas d'un truc foireux enregistré à la va-vite. Ont pris leur temps, ont peaufiné le bébé. Alain Chenevière a assuré la pochette : photo peinte pour le verso et un très beau recto qui a su allier efficacité et sobriété. Bref un 25 centimètres comme on en faisait au bon vieux temps du rock'n'roll et comme l'on en refait de plus en plus en ces nouveaux temps de rockabilly.

 

 

Great Ghost Highway ! Pour ceux qui ne connaissent pas, posez tout droit l'aiguille sur That's What Daddy wants, vous trouverez tout ce ce que voulez, le groupe qui joue ensemble avec un petit solo de derrière les fagots pour chacun, manière de vous rendre compte qu'ils n'ont pas de l'arthrite dans les articulations, un plaisir crémeux juste ce qu'il faut pour que vous en demandiez encore.

 

 

Sacrés veinards, il vous reste encore cinq sucreries pure malt à déguster. Where the Rio de Rosa flows , après la version de Carl Perkins, ils ont osé et ils ont gagné. Sont allés dégotés le Tally Ho d'Ernie Nowlin enregistré en 1957, difficile d'être plus près du coeur du rockabilly. Z'en donnent une version plus musclée, davantage taillée dans le rock, si vous voyez ce que je veux dire. Le pire c'est que au niveau des voix ils s'en tirent mieux que le cat de 1957. Plus nerveux. Plus incisif.numérisation0022.jpg

 

 

Flat-broke Time et Poor Charlie, tous deux bien envoyé, pas le temps de s'ennuyer. Mister Jull s'en donne à coeur joie et les autres ne boudent pas leur plaisir. L'on se quitte sur Lost Highway écrit par Leon Payne, mais diamantisé par Hank Williams et plus tard par Jimmy Horton, un peu l'hymne officiel des Ghost Highway qui colle si bien à leur musique que l'on dirait qu'il a été composé pour eux.

 

 

Vous avez compris, si vous ne l'avez pas, il ne vous reste plus qu'à vous le procurer.

 

 

Damie Chad.

 

 

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     QUE FAIRE SAMEDI SOIR ?

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16/02/2012

KR'TNT ! ¤ 85. SPUNYBOYS / NELSON CARRERA

KR'TNT ! ¤ 85
KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME
A ROCK LIT PRODUCTION
15 / 02 / 2012

ROISSY LIVE !

11 / 02 / 2012

SPYKERS / SPUNYBOYS /

NELSON CARRERA & THE HOT ROCKS

    L'on a ressorti la teuf-teuf mobile du garage et on the road again, vers Roissy. Pas l'aéroport, l'autre moins connu en-Brie. Sympathique bourgade, construisent des routes  au kilomètre, tellement qu'ils n'ont plus de maisons à mettre de chaque côté. On a tourné pendant deux heures le long de boulevards désertiques qui s'entremêlent à qui mieux-mieux. N'affichent pas non plus le nom des rues, l'on a tout de même trouvé une indication vachement utile sur une pancarte plantée sur un des nombreux ronds-points qui indiquent systématiquement les quatre mêmes directions,  ColwynBay  835 km. Manque de chance, nous n'avions prévu qu'un malheureux concert de rockab à Roissy-en-Brie ! L'on a torturé une quinzaine de passants anonymes tous incapables de cracher le morceau. L'on a laissé le dernier en vie, nous avait filé le sésame universel «  Facile vous rentrez dans un parking plein de voitures, ne vous inquiétez pas de ne rien voir, c'est là. ». L'on a suivi les indications à la loupe, l'on s'est vautré dans une espèce de no man's land labyrinthique, l'on a continué à pieds, l'on est tombé sur la cour intérieure d'une ancienne ferme. C'est en s'approchant de trois gus qui discutaient dans un coin que l'on s'est aperçu que derrière eux se profilait une porte aussi étroite qu'un cercueil. Pile-poil, l'endroit adéquat. Le pub que c'était marqué dessus, comptez pas sur moi pour faire de la pub.

    L'on est rentré au chaud, la température frisait les – 10°, surprise ! Nous croyions arriver sur une planète inconnue, eh, bien non, que des têtes connues, à croire que le milieu rockab de la Seine-et-Marne s'était donné rendez-vous. Je vous épargne la série salut les copains, j'ai foutu mon GPS par la portière, l'on s'est tout de suite - tels des rémoras au nez soudés à la coque des navires transocéaniens - accoudé au bar. Jolies serveuses et bibine à deux euros la conso, de quoi vous réconcilier avec l'humanité. C'est rempli comme un oeuf, un quart de comptoir, un quart de scène, une demi espace de canapé et de ciment. De vieux rockers à la banane grisonnante, des gosses qui courent partout, des meufs flamboyantes de tatouages plus sélects les uns que les autres, des jeunes, un peu tout le monde, du cuir et des insignes Sun sur tous les revers de manche. Etroit le local, tout en langueur, murs peints en orange criarde et sanguine, à part une fresque africaine dessinée par une classe de maternelle sous acide. Mauvais goût à l'économie. Ce n'est pas grave, les rockers ne sont pas particulièrement réputés pour leur sens développé de l'esthétisme petit-bourgeois. Bonne ambiance. En plus ils ont attendu que tout le monde ait déniché l'endroit pour commencer.


THE SPYKERS

    On pourrait peut-être prendre l'habitude de hurler dans un micro le nom du groupe qui va jouer. Je sais que je demande l'impossible, mais enfin.  Bref voici les Spyker ; sympathiques, appliqués mais un peu mou du genou. En place, mais rien n'est jamais plus rigolo que le désordre et l'anarchie. Au bout du huitième morceau j'ai décroché, trop américain dans le mauvais sens du terme, lorsque la copie ne vaut pas l'original. Suis allé traîné du côté des stands de disques. Une crise de collectionnite aigüe à ne pas confondre avec un cancer aggravé de consumération. Ai le temps de revenir, n'ont pas bougé d'un poil. Ce n'est pas mauvais, mais ce n'est pas bon, leur manque un truc. L'expérience de la folie sûrement. Le rockabilly psychosé n'est peut-être pas une option à éliminer. A quoi bon reprendre une fois de plus Johnny Cash en essayant de faire du Johnny Cash ? Les racines peuvent aussi sortir de terre.

THE SPUNYBOYS

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    Entracte. Je looke depuis un moment la contrebasse abandonnée sur la scène. Pas un vieux meuble ciré à la naphtaline, mais un petit air de profilé de calandre de chevrolet. L'intuition était bonne. Trois lascars déboulent sur scène. Pas du tout l'air d'avoir froid aux yeux. Me font déjà chaud au coeur sans avoir joué une note. Celui qui à la plus belle banane – mesdemoiselles ne rougissez pas, cet appendice caudal est strictement capillaire – s'empare de sa doublebass comme l'on monte dans un char d'assaut. Me trompe pas, dès les premières notes le son est là vibrant et claquant à souhait.

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    Rémi se hâte de foutre à mal l'un des mythes du rock'n'roll, celui du contrebassiste triste qui joue perdu dans un songe intérieur qu'il n'achèverait jamais. Prenez le en photo dès que vous l'apercevez en position du joueur académique, debout légèrement incliné, lui chatouillant le ventre, dans le but de la faire ronronner de plaisir. Car ce n'est pas du tout son style à lui, préfère lui tirer les poils du pubis pour la faire miauler de volupté. Je vous parle pas des positions, carrément couché sous elle sur le plancher, ou alors grimpé dessus en de dangereux équilibres malsains – ne vous inquiétez pas il maîtrise la situation - même lorsqu'elle se réfugie au milieu du public et qu'il lui court après afin de lui faire subir les derniers outrages. Y a même des volontaires qui montent sur scène pour la tenir fermement tandis qu'il la fourrage méchamment entre les cordes. De temps en temps il l'empoigne par le manche et la fait tourner en bourrique vers le plafond. Bien sûr qu'il continue de jouer de l'autre main. Et puis j'ai oublié un petit détail essentiel, c'est lui le chanteur. Place son organe en force et ne rate pas un si bémol.

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    Dans le public c'est un peu la fièvre du samedi soir. Pour une fois que l'on enlève la poussière des étagères du rockabilly, l'on ne va pas s'en plaindre. Ils osent tout nos Spunyboys, aussi bien les classiques du rock'n'roll que les reprises 80 des teddies, mélangent allègrement les genres et n'oublient pas d'ajouter leurs compos à eux. Je ne passerai pas sous silence les quatre reprises de Gene Vincent. Nous sommes le onze février et c'est ce même jour de 1935 que l'ange noir de Norfolk est venu sur terre pour nous apporter la tempête... Les Spunyboys ont compris qu'ils n'étaient pas là pour nous refiler de l'identique. Authentique certes mais passé à leur propre moulinette. C'est le moment de se rencarder sur Eddie, qui essaie de passer inaperçu derrière sa Télécaster Squier ( plus si Affinity ) blanche. N'y parvient pas, car il aligne trop bien et trop fort. N'essaie pas de passer les notes en revue une par une, se contente d'interventions fulgurantes et de phrasés aux petits oignons. Ceux qui font pleurer.  Sait compter jusqu'à trois, je veux simplement dire qu'il a compris l'essence du trio – bonjour Burnette – ne jamais jouer pour soi tout seul mais toujours une oreille sur chacun des deux autres. Non pas pour attendre le train qui passe mais pour buster la loco. De la broderie du fait tout main, mais l'aiguille est électrifiée. Je ne sais pas d'où il sort, musicalement parlant, mais il apporte du neuf et de l'invention.

    N'oublions pas le troisième tout au fond. S'amuse comme un petit fou. Caisse donc ? Un boucan d'enfer, encore un qui ne joue pas à l'économie. D'ailleurs sa console de jeu comporte beaucoup plus d'additifs que le strict minimum rockab. C'est le frère de RémI, connaissent par coeur le tempo de l'autre. Se surprennent jamais. Savent d'instinct où le frérot va se retrouver quand il aura fini ses tours de passe-passe. Rythmique de tous les diables jamais en défaut. Un petit côté Jim Jones Revue pas du tout déplaisant.

    Un set bourré d'énergie et décapant. Un véritable groupe de scène avec cette once de folie sans laquelle le rock'n'roll n'est que la facétie d'un clown triste.

NELSON CARRERA & THE HOT ROCKS

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    En moi-même j'ai pensé qu'après l'énergie des Spunyboy Nelson Carrera avait intérêt à assurer. Venait pas sans biscuit puisqu'il devait être accompagné par les Hot rocks, hélas manquait à l'appel Red Denny l'ancien batteur des Sprites, un groupe rockab mythique des années 80 qui a connu à ses tout débuts Gilles Vignal qui accompagna Gene Vincent avec le Rock'n'roll Gang...

    Par contre Alexis Mazzoleni était présent. Un tilt, chez les lecteurs fidèles, c'est bien lui qui accompagnait en septembre dernier Johnny Ghee lors du concert hommage à Vince Taylor ( voir notre soixante-troisième livraison de  KR'TNT ). Encore un qui est pas tombé à côté de la marmite, a gratté avec tous les grands de Chet Atkins - je ne vous fais pas l'insulte de vous rappeler qu'il était au côté d'Elvis - à Grady Martin celui que l'on retrouve derrière Johnny Burnette... C'est bien simple à eux trois les Hot Rocks ont joué avec à peu près tout le monde.

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    Nelson Carrera vient de loin, du Portugal où à la fin des années cinquante il interprétait des morceaux d'Elvis sous le nom de Carlos Gonzaga. A beaucoup roulé avant que la reconnaissance ne vienne – dans le milieu rockab assez fermé – au milieu de la première décennie du dernier siècle. Arrive sur scène en toute simplicité, cheveux blanc et envie de parler. Un peu trop, répètera dix fois que son dernier CD est en vente à l'entrée...

    Dès qu'il chante, tout en assurant la rythmique, la magie opère. Alexis Mazzoleni lui taille des costards cravate de satin sur mesure. Touche sacrément bien. De la belle ouvrage. Rien à redire. Idem pour le bassiste Francis Gomez qui ne décolle pas sa taille de géant de sa basse, impavide, immobile, mystérieux comme un joueur de blues et décochant une rythmique swinguante  en mille...

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    Un groupe soudé, une belle démonstration. Il n'y a qu'à fermer les yeux pour se croire en 1955... Malheureusement nous sommes en 2012 et depuis de l'eau a coulé sous les ponts du rockabilly. Ils ont le métier, ils ont la technique. Musicalement sont au-dessus des Spunyboys. Et de très haut. Mais les reconstitutions historiques ne font pas l'Histoire. Si le passé se reflète dans Nelson Carrera & the Hot Rocks, l'avenir se mire dans les Spunyboys. L'authenticité roots ne vaut pas l'élan créatif.

    Nous font le coup des mecs sympas, Little Nico vient jouer du haut de ses quatorze ans un morceau d'Eddie Cochran, ne s'en tire pas mal du tout,  mais ce remake Joe Maphis / Larry Collins sent un peu trop le téléguidage. Alexis Mazzoleni s'offre un vocal solo, une voix que je qualifierai d'anglaise beaucoup plus moderne -entendons par là plus sixty que fifty - que son jeu de guitare.

    La suite du concert se déroule sans anicroche, l'on reste scotché devant le savoir-faire et la scène jusqu'au bout.

RETOUR A LA CASE DEPART

    L'on a retrouvé la route totalement par hasard, un unique panneau qu'ils avaient dû oublier de retirer. Discussion dans le froid de la nuit. Alain a préféré Nelson Carrera & The Hot Rocks, je mise sur les Spunyboys. A bâton rompu sur cette musique qui n'en finit pas de mourir.

    Tout de même faudrait arrêter de se courser en cadillac rose à tous les couplets avec la baby d'enfer qui entrouvre les lèvres à l'arrière. Certes nous possédons une scène de qualité, en pleine ébullition, avec de sacrés musicos. Si dans sa tournée 69 Vincent avait pu compter sur deux ou trois bands locaux de l'acabit d'aujoud'hui, l'aurait sûrement apprécié... Mais le problème n'est plus là.

    Etre minoritaire n'est pas rédhibitoire. C'est une chance, ce sont les petits groupements d'individus qui tirent en avant les masses silencieuses. Mais le milieu rockab reste bien divisé. Beaucoup de chapelles et peu de communion. Les loups sont dans la bergerie mais ils se mangent entre eux. Faut pas compter sur les pouvoirs publics pour dégeler les opportunités. Le rock'n'roll est une musique qui a toujours fait peur aux gouvernants. C'est un des rares espaces de liberté dans lequel la rue peut encore prendre la parole. Le dernier des arts populaires qui peut se laisser acheter mais qui refuse de se vendre. Imaginez que le mouvement se massifie quelque peu et devienne incontrôlable. Le rockab n'est pas empoisonné par les ferments du nihilisme qui au soulagement de beaucoup ont précipité la mort de la révolte punk. Celle-ci fut beaucoup plus anarchisante mais combien plus fragile et dissolvante que l'esprit mythificateur du rockab qui ressuscite et reconstruit sans arrêt ses propres légendes. Entre le No Future des années 70 et le Rock Never Dies des années 60, il en est un qui s'autorise tout de même un bon shoot d'optimisme militant.

    Ses codes l'ont protégé et en même temps isolé. Parfois jusqu'à l'ossification, jusqu'à l'auto-parodie. Mais le mouvement a toujours su renaître de ses cendres évitant l'on ne sait trop comment le piège d'une trop grande communautérisation. Nous parvenons à un tournant : la génération  des années post-Stray Cats commence à vieillir. Elle a établi la jonction entre pionniers-mouvement Ted-et modernité psychobilly. Le shaker rockabilly a permis d'inventer une multitude de cocktails différents, mais toujours estampillés cent pour cent rock.

    Nous attendons la suite. La relève vers de nouvelles aventures, vers de nouvelles expériences. La clef de tout cela passe sans aucun doute vers de nouvelles compos qui prennent en compte les aspirations de la jeunesse. Car il est sûr qu'elle est un potentiel explosif qui n'a pas encore trouvé le bon détonateur. Le pétard mouillé du rap commence à faire long feu. La situation sociale se tend. Le rockab se trouve depuis la première fois de son histoire sur notre sol dans un terrain des plus propices à exalter sa charge de violence rentrée.
Une chance historiale. Evidemment si vous ne faites pas de politique. Circulez, rentrez chez vous, il n'y a plus rien à entendre.

                                Damie Chad.

SUNSET TO SUNRISE. THE SPUNYBOYS.
CD. BLASSED FAMILY.

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    On n'allait pas partir sans le CD des Spunyboys en poche. Sortis en 2010, attention Rémi n'est pas à la guitare, c'est Kévin avec qui le groupe a commis plus de cent concerts. Le son est différent de ce que nous avons entendu live. Faut prendre le temps de s'habituer. En gros le son est plus roots, plus syncopé que scène. Pas du tout désagréable.

    Musicalement c'est au point et le dénommé Kévin se tire très bien de tous les passages où la guitare se doit de porter ( et d'emporter ) le morceau. Mais je suis surtout rivé sur le travail de Guillaume au chant. Dès le premier morceau l'analogie avec les premiers Mitchell est évidente, cette façon de grossir la voix pour la poser en donnant l'illusion d'une intonation à l'américaine est des plus marquantes. Rajoute sur d'autres morceaux, comme sur Sunset to Sunrise, ce faux ton fatigué du gars qui en trop vu pour avoir trop vécu.

    Comme pour confirmer deux pistes sont chantés en français, une reprise du Tu parles trop des Chaussettes Noires et le Cloques'n'roll qui sonne vocalement comme les groupes des années 6o, comme quoi c'est la langue qui impose d'elle-même sa diction, preuve que les grands ancêtres n'étaient pas tout à fait à côté du panier.

    A peine cinq reprises ( Holly, Burnette, Perkins + les hollandais Ronnie Nightingale & the Haydock ) sur treize, Spunyboys osent le grand saut. Ont compris par où passe la route de l'avenir. Questions parole l'on reste dans l'ambiance rockab de base, fille, orchestre, amitié, guitare, rien de neuf, des poncifs dont il faudrait apprendre à se séparer.

    Plus on écoute plus le travail à la batterie se peaufine, et les contre-points guitare / basse se dessinent plus nettement. Le dernier morceau Won for you Honey est peut-être le plus abouti. De toutes les manières nous sommes face à un disque intelligent qui essaie de marier la maigre tradition française à l'héritage envahissant des amerloques. Le tout dans l'idée de créer non pas un style, mais un son, original.

    D'après ce que j'ai compris, viendraient d'enregistrer un second opus. A surveiller. De près.

                                        Damie Chad.



URGENT, CA PRESSE !


ROCK AND ROLL REVUE. N° 50.
Juillet / Août / Septembre 2009.

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    Cinquante pages pour ce numéro 50 de  Rock'n'Roll Revue, la revue française de rock'n'roll ! Un super article sur Billy Lee Riley dont on minimise par ignorance son importance dans l'histoire de notre musique, plein d'autres gâteries bien sûr, mais cette fois-ci nous préférons nous arrêter sur Big Joe. Non pas Williams ni Turner - quoiqu'il doive à la stature de ce dernier son nom de guerre - mais à notre Big Joe à nous.

    Un véritable militant du rock'n'roll depuis la première heure. Mais Big Joe met très vite dans son interview les poings sur les i. Le mot rock'n'roll n'est  ni un brevet d'innocence, ni un laisser passer de connerie. D'origine berbère, réfugié en France après l'assassinat de son père en Algérie, Big Joe ne supporte ni le racisme ni la bêtise humaine. Les rockers qui écoutent toute la journée de la musique de nègres mis en boîte par des youpins new yorkais et qui n'aiment ni les noirs, ni les juifs et qui fleurent le fascisme ou le kkk à cinquante mètres, il n'aime pas. Pour que les choses bien claires il ajoute qu'il n'a rien non plus contre les pédés. C'est que Big Joe a connu entre 1959 et 1962 les aspects les plus hideux de notre république, les rafles d'immigrés, les ratonnades de notre police bien-aimée et autres joyeusetés nationales, surtout que durant l'Occupation il y avait eu bien peu de monde de l'appareil d'état du côté de la Résistance...
   
    Rentre dans le monde de la musique par la petite porte - celle de la plonge – du cabaret le Blue Note y rencontrant Kurt  Mohr et Franços Postif. C'est la bande à Boris Vian et aux disques Vogue. L'on est surtout tourné vers le Jazz et le Blues. Le rock arrive doucement mais sûrement, Postif est un ami de Bill Haley, Big Joe fait partie d'une bande, regarde Jerry Lee sur le générique de Jeunesse Droguée, manque de peu Elvis Presley lors de son passage à Paris, fréquente le Golf Drouot, rencontre Claude Ciari et Danny Logan...

    Ensuite nous rejoignons l'histoire officielle, l'amitié avec Michel Lancelot de l'émission Campus sur Europe 1 qui n'a pas été sans influence sur Mai 68, l'épopée des radio-libres d'avant l'introduction de la pub, les soirées du Rex-Club, avec enfin en 1996 la création de Rock'n'Roll Revue... une page d'histoire du rock'n'roll français, plus tard on l'apprendra par coeur dans les écoles !

    A lire. Mais Big Joe devrait écrire ses mémoires.

                                    Damie Chad.

PROCHAINEMENT

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