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19/12/2011

KR'TNT ! ¤ 78. FRANCK TENOT / SHAKE MOURADIAN.

 

KR'TNT ! ¤ 78

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

A ROCK LIT PRODUCTION

22 / 12 / 2011

Avertissement

Juste pour signaler aux esprits distraits, qui oublieraient de parcourir la soixante-dix-septième, que cette soixante dix-huitième livraison de KR'TNT datée du 22 est mise en ligne dès ce lundi 19 décembre !

EDITO

On vous le dit parce que c'est vous, mais c'est notre dernière séance. De l'année, refermez cette fenêtre, ne vous laissez pas emporter par le désespoir et reprenez courage, vous aurez encore à nous supporter tout le long de l'an 2012. Par contre le 29 décembre, entre deux réveillons, il ne faut pas compter sur nous, nous serons à quatre pattes essayant tant bien que mal de nous souvenir de notre nom.

Il y a aussi le fait que l'on a intérêt à se faire oublier de vous pauvres lecteurs, car des coups foireux comme celui qui se profile sous l'édito, il vous en sera difficilement arrivé en votre vie. Le coup du poignard dans le dos, longtemps que nous le méditions, une livraison consacrée au jazz voilà ce que nous avions préparé pour nous faire haïr davantage. Et ne croyez pas que vous allez vous en tirer avec Love Supreme de Coltrane, nous sommes beaucoup plus vicieux ! Après tout le mal que nous en avons dit nous nous penchons avec délectation sur le jazz français. C'est comme le champagne de Californie mais en pire. Faut pas oublier que le premier rock français a piqué dans le milieu french-jazzy les musicos capables de tenir un rythme sans trop de mal.

Enfin, on a pensé à notre cadeau de Noël, rien que pour vous, une jolie jeune fille – tout de suite vous nous trouvez plus sympathiques – elle fait de la musique mais cette fois on s'est intéressé à son premier roman – un road-thriller haletant. Elle s'appelle Shaké Mouradian, c'est la petite-fille de Jean Renard qui écrivit entre autres pour Hallyday, Mitchell et Rivers. Ouf ! On retombe sur nos pattes rock !

Damie Chad.

 

 

Celui qui aimait le jazz

frank tenOT

Fondation FRANK TENOT / EDITION DU LAYER.

 

Nous l'avons trouvé chez notre bouquiniste préféré. Sans le disque. Car à l'origine il était livré avec un CD. Sans surprise : contenait les titres qui servent de titres au chapitre. L'on ne voudrait pas être méchant mais pour un spécialiste du jazz Ténot ne s'est pas foulé : Billie Holiday, Django Reinhart, Glenn Miller, Ella Fitzgerald... j'en passe et je termine sur Louis Armstrong, pas vraiment des inconnus, enfin qu'importe la fiasque pourvu que l'on ait le whisky.

Nous ne sommes pas ce qu'on appelle des dingues de jazz mais il y a de quoi être déçu. Le jazz n'occupe pas plus de trois pour cent des 190 pages du bouquin. Frank Ténot nous raconte sa vie. Depuis tout petit il collectionne les disques de jazz, il ne parle que de jazz avec ses copains, il est inscrit au Hot Club de France de Bordeaux, il assiste à tous les concerts de jazz qu'il peut, il présente des spectacles de jazz, il écrit des articles sur le jazz, il fait des émissions de radio sur le jazz... mais tout ce que vous voudriez savoir sur le jazz jamais il ne vous le dira. Toutes les dix pages il lâche du bout des lèvres un nom de musicien de jazz et c'est tout. Ce qu'est cette musique, et l'effet qu'elle produit sur sa petite personne vous n'en saurez rien.

 

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En fait dans Celui qui aimait le jazz, Monsieur Ténot parle surtout de Celui qui, l'amour du jazz s'en contrefiche plus que s'en contrebasse. Le pire c'est que l'individu n'est pas sympathique. Sort d'un milieu un peu protestant coincé du cul par sa mère, et très gauche molle par son père. N'a pas aimé les Allemands qui envahirent la doulce France après une guerre pas si drôle que ça. Veut bien écouter de Gaulle à la radio, mais n'est pas prêt à sortir les grenades camarade ou la mitraille de sous la paille.

Pourvu qu'il puisse organiser ses petites soirées bordelaises jazz-hot il n'en demande pas plus. Note que les Allemands ne sont pas farouchement contre le swing si on leur cache qu'il a, à l'origine, été enfanté par des négroïdes de race inférieure... ce serait plutôt les partisans de la collaboration pétainiste qui ne supportent pas le modernisme de cette musique. Notre patrie possède une indécrottable musicalité accordéo-franchouillarde qui vient de loin.

Y revient plusieurs fois : n'aime pas les zazous. Trop vulgaires pour lui, s'entêtent à préférer les soli de batterie et les parties chantées. Sont aussi un peu trop remuants, pas très politiquement corrects. Rappelons que pour certains historiens les zazous passent pour les précurseurs des teddies britanniques. Pour ma part je parlerai davantage de rencontres parallèles que de filiation, les teddies provenant de milieux beaucoup plus populaires.

La guerre terminée, Ténot monte à Paris, il y rencontrera deux figures tutélaires : Boris Vian et Daniel Filipacchi. Boris Vian c'est l'esthétique zazou sans le costume, l'intello qui a tout compris et qui ne se prend pas au sérieux. Mais c'est aussi l'imbécile bourré de préjugés esthetico-petits-bourgeois qui a laissé passer le rock'n'roll et l'a rabaissé, avec la complicité de Michel ( qui joue au ) Legrand compositeur moderniste, et Henri Salvador visiblement mal inspiré, au rang d'une farce grossière.

Daniel Filipacchi est d'une autre trempe. Se sont souvent entrevus. Tous deux adorent le jazz. Via Vian, Ténot est branché collège de Pataphysique, Filipacchi beaucoup plus attiré par la poésie surréaliste. Deux univers assez proches qui finiront par se mélanger avec des gens comme Noël Arnaud et Raymond Queneau. Nous sommes ici plus près de la littérature que de la musique. Mais c'est bien le jazz qui va réunir nos deux mercenaires. Filipacchi place des photos à Paris-Match et Ténot écrit des chroniques de disques pour Radio-Cinéma, la première mouture de Télérama...

Pour faire bouillir la marmite Ténot est entré au Commissariat de l'Energie Atomique, se dépêche de se faire élire délégué du personnel à la CFTC. Difficile de trouver un syndicat plus à droite. Cela lui permet de s'absenter à volonté de son travail et n'a pas l'air de lui déplaire politiquement... plus tard il sera encore à la table de négociation, mais de l'autre côté, en tant que patron de presse...

 

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La chance va venir du côté où il l'attend le moins. De la radio, non pas de Radio-Luxembourg ou de Paris-Inter qui lui ont déjà ouvert leurs micros mais d'Europe 1, on lui demande d'animer une émission sur le jazz, six jours par semaine, deux présentateurs en alternance, Ténot et Filipacchi. Tout de suite, ce dernier capte l'entourloupe, pas de gué-guerre entre eux qui finirait immanquablement par le renvoi de celui qui serait jugé le moins apte. Seront tous les deux à l'antenne, en même temps. Pour Ceux Qui Aiment le Jazz deviendra une émission culte... qui serait oubliée depuis longtemps si quatre ans plus tard en 1959 nos deux compères ne réalisaient une OPA sur un petit programme destiné à grandir, Salut Les Copains !

C'est ainsi que le jazz devint le cheval de Troie du rock'n'roll auprès de notre saine jeunesse. Filipacchi qui a su surfer du jazz au rock passera de celui-ci au yé-yé en douceur. Mais le présentateur vedette a compris que l'avenir était aux média de masse. En 1962, débute une autre aventure : le journal Salut Les Copains s'arrache dans les kiosques...

 

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Ténot et Filipacchi laissent l'émission ronronner et s'interrogent sur l'afflux de capitaux qui leur tombent dessus... De la musique qui vous fait remuer le cul ils bifurqueront sans états d'âme vers le cul tout court : ce sera la création de Lui... qui dégagera tant de bénéfices qu'en 1976 Filipacchi est en mesure de racheter Paris-Match... En 1981, avec Lagardère il s'offrira le groupe Hachette...

Remarquons que Filipacchi revient à son milieu d'origine, son père fut le co-créateur de La Bibliothèque de la Pléiade qu'il revendit à Gallimard avant de travailler pour... Hachette. Se fit surtout remarquer au début de l'Occupation pour la liste des 1000 titres de l'édition française en contradiction avec l'idéologie des Occupants... Filipacchi est aussi le filleul d'Hugues Panassié, celui qui fonda en 1932 le Hot Club de France, qui imposa le jazz en France mais qui refusa le modernisme du be-bop, cantonnant la musique noire au hot-jazz que l'on a fini par surnommer New-Orleans...

Daniel Filipacchi n'eut pas les préventions de son parrain... Parti du jazz pur pour en arriver au rendement financier de la culture massifiée, difficile d'être au plus loin de l'esprit des premiers souffleurs de bugles des descendants d'esclaves d'outre-Atlantique... Une leçon à méditer pour tous les fans de base : la musique qui nous libère est aussi celle qui forge nos chaînes. Normal puisque nous l'achetons au lieu de la créer.

Les lecteurs voudront connaître la fin de l'histoire de Frank Ténot, en queue de poisson, il a acheté une belle maison à Marnay pas très loin de Provins et est mort en 2004. Riche et heureux. Avec la grosse tête : dans les trente dernières pages du bouquin il nous raconte ses rêves, vachement passionnants, dans lesquels il rencontre de Gaulle, Kenedy et Mao. Tout le monde s'en fout. Sauf lui. Pour que son nom ne soit pas oublié il a créé La Fondation Franck Ténot qui soutient financièrement le CAMAC, Cente d'Art de Marnay Art Center, dédiée à l'art contemporain. Sous toutes ses formes. Pour l'avoir visité à plusieurs reprises, je dirais que je n'ai pas été souvent convaincu par les expositions présentées... Cela aurait besoin d'un grand coup de balai rock'n'roll. Ou à défaut jazz.

Damie Chad.

 

LOOK BOOK !

JUDE R. SHAKE MOURADIAN

MY MAJOR COMPANY BOOKS / XO Editions

 

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J'avais envie d'écrire Salement Rock. Mais non, j'ai dû revoir ma copie. Salement Jazz.

C'est vrai que ça déménage sec. Des cadavres comme s'il en pleuvait. Avec un tueur inaltérable. Aux States en plus. On the road. And in the South. Chaleur moite et fillette en froid avec l'existence. Que demander de plus, sinon de s'asseoir sur la banquette arrière usée et satinée de crasse de la Chevrolet pourrave de Jude, de prendre l'R de celui qui comprend tout et d'attendre que le problème se décante avec les miles avalés.

Vais pas vous donner de fausses joies. Au début plus on avance, plus ça devient glauque. Petit à petit le lecteur un peu finaud finit par comprendre. Je suis grand seigneur, vous donne un indice, c'est le même genre de poursuite que celle de Complot à Memphis de Dick Rivers ( chroniqué dans notre livraison N° 29 du 02 / 12 / 10 ). Si vous n'avez pas lu, pas la peine de sortir votre mouchoir. Je vais essayer de vous aider à y plus clair dans les noirs. C'est l'Amérique qui se penche sur son passé. Poisseux, avec du sang sur les mains.

Ce qu'il y a de déroutant dans ce road-movie-book, c'est que l'héroïne – non ce n'est pas un livre sur le trafic de drogue – rêve de rencontrer le jazz. Nous sommes pourtant en 1970, elle pourrait faire un effort et rêver de rock, mais non notre post-pubère ne kiffe que le son de la New-Orleans et les clandés plus louches les uns que les autres. Ambiance torride : la moitié de la ville a décidé de décaniller l'autre. En plus dans l'ombre, en cherchant bien vous ne manquerez pas de renifler la présence de la CIA, avec le cheval de retour du FBI sur la piste, z'avez intérêt à faire gaffe aux tirs instinctifs. Surtout ceux qui sont préparés de longue date.

Apparemment ça swingue beaucoup plus méchant dans l'univers impitoyable de Dallas. Car nos deux tourtereaux s'y dirigent à tombeaux ouverts. Ils ont troqué la Chevrolet contre une Ford Mustang. Blanche, comme le cheval du prince qui à la fin du conte à dormir couché.. mais nous sommes aux USA, et comme dans tout western qui se respecte nous pénétrons dans le saloon pour une sympathique partie de cartes. Un poker d'enfer, plutôt. Mais on s'en fout, on a la quinte flush dans la manche. La petite Lipi qui joue comme une grande.

Un père et passe ! Les jeux sont faits. Attention la fin de l'histoire sort des rails contrôlés de la morale. Ca risque de jazzer dans les milieux du politiquement correct. Shaké Mouradian coupe et mélange les cartes de l'intrigue avec dextérité et les abat en professionnelle. Mais elle ne triche pas. Pas plus de prisonniers que de rédemption. Pour les bons sentiments vous repasserez. Pas de happy end. Pour la simple et bonne raison qu'il n'y a pas de fin. N'y a que la faim du lecteur qui est rassasiée.

America, la dernière frontière du mythe. Beau comme du Steppenwolf. Idéal pour les kr'tntophiles qui dévorent les livres comme l'aiguille parcourt les sillons du disque. Ni rock, ni jazz. Blues. Mais très noir.

Damie Chad.

 

KRONIKROCK

MA DERNIERE SEANCE / EDDY MITCHELL

 

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C'est pourtant vrai / C'est un rocker / Nashville ou Belleville / Sur la route de Memphis / Il ne rentre pas ce soir / L'esprit grande prairie / Tu parles trop-Daniela-Be bop a Lula / La dernière séance / Avoir 16 ans aujourd'hui / Alice-Je vais craquer bientôt-A crédit et en stéréo / Au bar du Lutetia / Vieille canaille / M'man / Laisse le bon temps rouler / J'ai oublié de l'oublier / Toujours un coin qui me rappelle / Le blues du blanc / J'aime avril à Paris / Rio Grande / 18 ans demain / Le cimetière des éléphants / Lèche-botte-blues / Couleur menthe à l'eau / The last train / Pas de boogie woogie / C'est pourtant vrai / Come back

Cadeau d'une admiratrice, impossible de refuser. Me dévoue toujours pour le plaisir des dames. Pouvait pas mieux tomber après notre livraison 75 dédiée aux premières années du grand Schmall. Double disque enregistré à l'Olympia les 3, 4, 5 septembre 2011. La dernière tournée, celle des grands ducs. Remettra pas le couvert. A raison. Ai entraperçu une petite vidéo sur le net où Mitchell esquisse un pas de deux. N'ai pas pu m'empêcher de penser qu'il avait l'allure d'un vieillard. N'empêche que la voix est sûre et que le père Eddy a mis le paquet.

Un bel emballage. Cartonné, à l'intérieur simili-bande dessinée avec une très belle pose à la Gene Vincent, micro incliné, jambe en avant, genoux à terre... Be Bop A Lula cantonnée au medley Chaussettes Noires, merci pour l'hommage, mais on l'aurait aimé en dernier morceau.

 

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Premier disque, tous les grands succès d'Eddy Mitchell se suivent. Faut contenter le public. Pas de surprise donc. Un résumé de carrière, parcours obligé. Orchestre policé sous la direction de Michel Gaucher, déjà au saxo dans 7 Colts pour Schmall en 1967. De la belle ouvrage mais trop de cuivres pour nous. Trop pale blue eyed soul à notre goût. Plus près des orchestrations de Stevie Wonder que des cataractes de Muscle Schoals. Je crois l'avoir déjà reproché...

Disque 2 : même limonade, l'instrumental The last Train n'apporte rien et les cinq minutes et demie de Pas de Boogie Woogie au clavier écrasé par les trompettes en devient fatiguant. Revient une dernière fois pour nous dire qu'il ne nous fera pas le coup du come back... Honnêteté professionnelle jusqu'au bout des ongles. Cadeau final : six duos de morceaux déjà sur le disque. Préférons nettement les versions en solitaire. Un harmonica d'honneur a Jean-Jacques Milteau qui nous revisite version quasi cajun La route de Memphis, celle du rock'n'roll que Mitchell n'aurait jamais dû abandonner.

Pour nostalgiques qui se sont vus vieillir.

 

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Damie Chad.

 

 

 

 

 

 

 

 

15/12/2011

KR'TNT ! ¤ 77. DICK RIVERS.

 

 

 

KR'TNT ! ¤ 77

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

15 / 12 / 2011

 

 

 

DICK'N'ROLL !

 

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C'est le mal aimé du rock'n'roll français. Le Poulidor de la troisième position. Et encore souvent on le place derrière Ronnie Bird. Faut dire que les deux grands frères, Mitchell et Hallyday, depuis le jour qu'il s'est cassé avec la caisse, lors d'un spectacle à trois, font tout pour ne jamais le citer. Tu peux marcher sur mes pompes de daim bleu, mais ne touche pas au fric !

 

 

Et puis Dickie c'est l'empêcheur de rocker en rond. S'est radiné du fond de sa province natale pour jouer les trouble-fêtes dans un mini-périmètre qui englobait le berceau du rock français : au sud pas plus bas que Créteil, au nord pas plus haut que l'Eglise de la Sainte-Trinité, à l'ouest pas plus loin que le Golf-drouot. Y avait tout juste de la place pour deux, alors le troisième larron il était un peu de trop.

 

 

Et teigneux avec ça. Une voix de velours et un sale caractère. Déjà rien que dans son groupe, il griffait un max. S'en est plus vite dégagé qu'Eddy de ses vieilles chaussettes, sans compter que sur scène avec ses Chats Sauvages, il se la pétait grave, capable de faire le répertoire en langue anglaise, comme un grand. Un fils de petit-bourgeois avec de l'instruction diront les mauvaises langues. Plutôt un gamin fou d'Elvis qui faisait tout ce qu'il pouvait pour donner l'illusion d'être comme lui.

 

 

Bon, arrêtons les pleurs. C'est quand même lui qui – dans la série j'aime que l'on me haïsse - vient de déclarer : «  Je ne suis pas riche mais je paye l'impôt sur les grands fortunes ». L'a tout de même tiré son épingle du jeu le grand garçon ! Doit être plus futé qu'il n'y paraît. Je ne suis pas là pour vous parler du dernier Rivers – bonnes critiques un peu partout – ni du premier, genre virée dans la folie des early sixties où tout le monde était beau et gentil. Non je veux simplement revenir sur des années cruciales pour le rock français, celles du tout début des seventies.

 

AVANT 70

 

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Commençait à patiner dans la choucroute l'ami Dick, après mai 68. L'avait bu à toutes les sources les années précédentes. Couleurs un peu de folk à la Donovan, Qui se cache, du sitar à la George Harrisson, du proto heavy-rock avec C'est ça la vie emprunté aux Animals, et du pompier pompéïen avec Les Portes de la Nuit, avec attention George Martin le preneur de son des Beatles in person à la console. S'était même très bien tiré de sa session cuivrée au Muscle Schoals Studio que lui avait refilée Mitchell qui revenait d'enregistrer Alice et six autres petits frères qui feront le succès de son 33 De Londres à Memphis.

 

L'avait eu un déclic salvateur en mai 68. L'avait mis en boîte une version de Summertime Blues d'Eddie Cochran, un peu sauvage, un peu déjantée, brouillonne mais qui avait du punch, assez proche dans l'esprit de celle des Blue Cheer. Elle passa de rares fois sur Europe 1, et ne fut disponible l'année suivante que pour les encartés de l'officiel Fan Club Dick Rivers, la fameuse Rivers Connection. Un coup d'épée dans l'eau ?

 

 

C'est qu'à l'époque Rivers cherchait un peu la quadrature du rock, un truc rythmé avec des violons, un accompagnement symphonique avec des cuivres qui rockent. Une espèce de rythm'n'blues qui fasse musique de chambre et opéra wagnérien. Un monstre introuvable, mais l'époque était farcie d'électricité qui pétouillait dans tous les sens. La moindre idée devenait un double-album, tout était permis puisque rien n'était interdit.

 

 

Le pire c'est qu'à force de tourner autour du pot en l'an de grâce 1969, Dick Rivers va accoucher du chef d'oeuvre. L'en a vendu quinze mille exemplaires en quarante ans de L'? ! Ca vous interroge ? Normal, c'est un trente-trois tours intitulé L'Interrogation. La pochette ressemble à une pissenlit mauve que l'on vous suggèrerait d'effeuiller. Un peu, beaucoup, n'allez pas jusqu'au bout, vous n'aimerez pas du tout.

 

 

Un truc innommable. Un concept-album, une comédie musicale, un pot-pourri de rythmes divers, de la samba à Pierre Henry, cent pour cent variétoche, mais boursoufflée à en crever. L'histoire de monsieur tout le monde qui se demande pourquoi il vit puisqu'il finira comme tout le monde par crever. D'ailleurs sans surprise il meurt sur le dernier morceau qui nous refait le Crépuscule des Dieux de Wagner en moins bien, mais avec quatre-vingt musiciens qui déchirent. Entre les morceaux vous entendez la voix funèbre de Gérard Manset qui joue le Monsieur Loyal du Destin.

 

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En son style unique c'est insurpassable. Et je ne crois pas que dans les deux siècles futurs qui se profilent à l'horizon temporel quelqu'un osera se lancer dans la compétition. Les jours où l'envie de vous tirer une balle dans le caisson rôde d'un peu trop près autour de votre cervelle, je vous en conjure ne l'écoutez pas, même si vous pensez qu'après, plus jamais une question angoissante ne viendra vous inquiéter.

 

 

C'est tout ce que vous voulez, mais ce n'est pas du rock. Deux ans après, en mai 71 Dick nous refile, la queue entre les jambes, un lot de consolation. Pas très fameux. Rien que le titre phare Bye by Lili avec son pseudo-arrangement Paris-Accordéon vous colle des boutons en trente-sept secondes. Pauvre Dick, le soldat perdu du rock'n'roll.

 

 

DICK'N'ROLL

 

 

Ce qu'il y a de bien, c'est que le soldat Rivers va se sauver tout seul. Comme un grand. Sans crier gare. Tout seul, pas vraiment. Avec Labyrinthe. Pour le grand public un de ces nouveaux groupes des années 70 qui ont les dents longues et qui font de la pop-music. Par quel miracle vont-ils se retrouver avec Dick Rivers sur le Dick'n'Roll ? C'est que Labyrinthe ne sort pas du néant. A l'origine dans les années 60 nous avons Jean-Pierre et les Rebelles, puis les Rebelles et au gré de multiples ramifications et scissions et ajouts divers nous passons par les Tarés qui accompagnèrent Ronnie Bird, puis les Problèmes qui furent derrière Antoine et qui devinrent les Charlots. Une grande bouffonnade qui aurait pu se terminer tristement si de tout ce magma n'était sorti Labyrinthe.

 

 

Le milieu rock français est minuscule : les mêmes noms se retrouvent partout. L'on se repasse les bons plans et l'on se refile les bonnes adresses. C'est Madame Andrée David-Boyers, la future belle-mère de Dick Rivers qui logera dans sa villa les Rebelles. N'est pas que la belle-maman de Dickie, l'est aussi la principale réalisatrice – plus de cinq cents tournages à son actif – des films Scopitone. C'est chez elle que seront filmées les plus belles images de Vince Taylor. Les Chaussettes noires aussi.

 

 

Dans notre mini-hexagone l'on se soucie peu de nos cousins canadiens. Dick a remporté ses plus beaux succès en ces lointains arpents de neige. Il y emmènera les musiciens de Labyrinthe en tournée. Bernard Photzer à la guitare, Donald Rieubon à la batterie, Raymond Bureau à la basse, Claude Arini aux claviers, Rivers au chant. Le succès est au rendez-vous chaque soir. Revenu en France le même phénomène se reproduit. C'est un véritable groupe soudé qui carbure à fond et qui fait la différence. Une évidence s'impose, pour corriger les errements sirupeux de sa récente discographie, un retour au rock s'impose.

 

 

C'est ici que le génie de Rivers nous surprend. Il aurait pu se lancer dans n'importe quelle aventure. La pop-musique lui tendait les bras. Le public lui aurait tout pardonné. Pourvu que ça pulse et que ça déménage. Les oreilles sont grandes ouvertes et prêtes à recevoir le nouveau rock'n'roll. Mais non, ce sera le retour à la case départ. Quinze vieux rock comme on n'en fait plus. On ressort les partoches de Buddy Holly et de Little Richard. Ce que Mitchell avait réalisé après s'être débarrassé des Chaussettes, Rivers va-t-il nous le refaire dix ans après avoir lâché les Chats ?

 

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En plus, il prend tous les risques, Eddy in London sonne tout de même mieux que Dick à Toulouse. Car Rivers emmène son monde dans la capitale du cassoulet. L'on sent le roussi, les heures de studio sont moins chères en province, un disque enregistré à la va-vite, à l'économie. Stupeur dans les bacs à galettes. Dès le mois de septembre Dick'n'Roll est disponible chez les disquaires.

 

 

Question pochette, rien à redire. Salement rock'n'roll. Même Mondino qui par la suite habillera souvent les 33 de Rivers ne la surpassera. J'avoue avoir tiqué en étudiant le dos. Un bon point pour la Harley, un peu convenue tout de même, une tracklist cent pour cent rock'n'roll, mais Labyrinthe reste le gros point d'interrogation. Sont bien les mêmes qui ont commis une reprise de Jacques Brel ? Attention danger !

 

 

A première vue tout est correct. La plupart des morceaux ne dépassent pas les deux minutes. L'on pressent le un, deux, trois partez boogie à fond, quatre, c'est terminé. Du vite-fait bien fait. Sans fioritures ni chiures de mouches. Le chanteur devant et le combo qui donne la chasse par derrière. Du classique. Pour un peu on ne l'écouterait pas. On l'a déjà entendu dans la tête, ce n'est pas la peine de perdre du temps. Le rock'n'roll est une musique platonicienne, vous pouvez atteindre à son étincelante beauté rien qu'en imaginant l'épure du morceau avec votre intellect.

 

 

En fait ça, ce sont les théories que je sors pour impressionner ma copine qui prend des cours de piano au conservatoire mais qui n'avait jamais entendu parler de Jerry Lee Lewis. C'est son prof qui a été surpris quand elle le lui a fait écouter : «  C'est un très bon pianiste ! » a-t-il déclaré. Mais on le savait déjà.

 

 

Bref à peine chez moi, me suis précipité sur le pick up pour juger de la bête. Aujourd'hui, l'on comprend mieux. Enfin si vous arrivez à l'écouter in extenso, car ce n'est pas le disque de Rivers le mieux mis en avant sur le Net. C'est surtout un disque que l'on a passé à la trappe de l'Histoire du Rock'n'roll français. Que voulez-vous ce n'est que du rock'n'roll !

 

 

C'est beaucoup plus que cela. Rien de plus que le chaînon manquant entre le rock des pionniers et les Stray Cats. Je n'ai ni nommé les Cramps ni les Flamin'Groovies. Exactement ce que Lennon aura été incapable de faire sur son Rock'n'roll qui n'est qu'une copie conforme sans âme et sans originalité des disques originaux. Malgré l'imagerie du Star-Cluberienne l'ensemble pue la contrefaçon et le faussaire sans génie.

 

 

Tout le contraire du Dick'n'Roll. Tous les morceaux sont revisités et réinterprétés. Les frères Jacques et Pierre Ploquin jouent des cuivres. Pas question d'une section à la Stax, l'on privilégiera les aboiements de meutes et les trompettes de jugement dernier. Pas d'instrumentation, mais un son. Mirifique et pourrave. Vous pouvez ne pas être d'accord. Mais chaque piste est un coup de poing sur la gueule. Une pêche terrible. L'esprit du rock'n'roll est là. Avec en plus le bruit et la fureur. La voix est trafiquée, la réverb est utilisée à contre-emploi, non pour acérer le son et le rendre coupant et rebondissant, ici au contraire elle l'écrase et le fragmente en mille chuintements. Même Led Zeppe sur ses bootlegs n'a su faire preuve d'autant d'imagination lorsqu'ils se lancent dans un meddley de reprises de Cochran ou de Presley.

 

 

Le problème c'est que leDirigeable ne fait que des reprises. Plus tard Rivers nous donnera tout un disque de reprises de Buddy Holly et même qu'il l'adaptera par la suite en langue française. Mais avec Dick'n'Roll, nous sommes hors du champ hommagial. C'est plutôt du dynamitage. Le but n'est pas de reprendre mais de métamorphoser. Jamais le vieux rock n'aura alors sonné comme cela. Même le Summertime blues des Blue Cheer – voyez comme nous retombons sur nos pieds – malgré sa démesure sonique n'est parvenu à un tel point de désintégration phonique.

 

 

THE ROCK MACHINE

 

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L'année suivante en avril 1972, Rivers nous livre le tome 2. La donne a quelque peu changé. Dick'n'Roll s'est écoulé à plus de soixante dix mille exemplaires. Bashung a rejoint l'équipe. Restera des années avec Rivers à apprendre les finesses du métier. Donnera un superbe morceau de sa propre plume, le titre ronfle comme un tube des années rock, Hold on qui emporte la mise et propulse l'ambiance très haut. Malgré cela ce deuxième volume est légèrement inférieur au Dick'n'Roll. L'album est bâti sur le même principe. Il n'en est que plus étoffé et quelque part plus sage.

 

 

Vous pouvez préférer ce dernier et même vous abandonner aux volutes du Dick Rockin' along... The Rivers, mais Dick a changé le fusil d'épaule. Pente country, de la belle ouvrage, en anglais, Bashung aux manettes, mais je préfère chouchouter les trois quarante-cinq tours suivants aux pochettes superbement dessinées par David Rochline. Trois des plus originales covers de simples français.

 

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Du cousu main. Des textes mijotés à la virgule près par Bashung, Koolen et Mya Symille, nostalgie rock et revival à tout berzingue. Avec les deux trente-trois précédents, ils ont dû salement impressionner deux de nos héros qui moulinent depuis quelques temps sur braquet de pédalos asthmatiques. En 1974 Eddy s'envole pour les USA et revient avec son Rocking in Nashville. Comme l'on ne prête qu'aux riches les journalistes s'extasieront sur ce rocker qui le premier de sa génération est retourné au rock. Si j'avais été Dick je l'aurais encore mauvaise. En 1975 c'est autour de Johnny de pousser ses petits couplets sur Rock à Memphis.

 

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Sans compter dès 1972, le dernier retour de Vince Taylor, sur le devant de la scène. Bientôt suivis de Bill Haley, Fats Domino, Little Richard, Chuck Berry et jusqu'à Jerry Lee Lewis, le gentleman sudiste, à la Fête de l'Humanité en septembre 1972.

 

 

En attendant repassez-vous et caressez Marilou et Sherry dans le sens du poil pubien et surtout goûtez la guitare électrique de Jean-Pierre Alarcen sur Rock'n'roll Star. Un de nos rares guitar-héros qui se perdra dans les méandres du prog et du jazz rock. L'emmènera avec lui Rieubon et Arini du Labyrinthe. Mais un inconditionnel à sa manière. Un pur qui préfèrera sa musique à l'argent facile. Et que l'on a fini par oublier alors qu'il est un de nos musicos les plus talentueux.

 

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Vous raconterai une autre fois la suite des aventures de Monsieur Rivers comme s'amusait à l'appeler Gérard Klein un des rares animateurs de France-Inter – viré après 68 - qui ait tenté de le programmer un peu systématiquement. Je vous laisse sur le single Brother Jack + There ain't no blues sky qui accompagnait la sortie de The Rock Machine. Retenez toutefois l'essentiel, le rock français remis sur orbite grâce à l'irremplaçable legs des pionniers. Ce n'est pas un hasard si les Stray Cats ont trouvé la gloire en France. Dick'n'Roll avait préparé les oreilles.

 

 

C'était dans la série : les très riches heures du rock'n'roll français : Dick Rivers !

 

Damie Chad.

 

 

 

 

 

URGENT, CA PRESSE !

 

 

 

JUKEBOX MAGAZINE. H.S. N° 16.

 

Les Années Rock & Twist. 1960 6 1964.numérisation0022.jpg

 

Trimestriel : Volume 1 : de A à F.

 

 

 

S'y entendent chez Jukebox pour vous faire cracher plus d'une fois par mois vos 10 euros ! Le genre de bouquins qui ne fait pas plaisir. D'abord il y a tout ce que vous savez déjà depuis belle lurette et vous vous dites que vous auriez mieux fait de ne pas l'acheter. Et ensuite, c'est le coup de l'iceberg, les quatre-vingt dix pour cent que vous ignorez et votre moral tombe en capilotade. Z'avez envie de tout laisser filer. Bien sûr ce ne sont que des quatrièmes ou des cinquièmes couteaux du rock'n'roll et parfois carrément de la variété française.

 

Il y avait du monde au portillon entre 1960 et 64, car c'est un peu cela le hic pour la plus grande partie des artistes la chronique s'arrête au 31 décembre 64, pour la suite faudra attendre... parfois c'est rageant car beaucoup quitteront la route du succès avant la fin des sixties. L'on aimerait aussi savoir ce qu'ils sont devenus. Dur, dur de reprendre la vie de tous les jours après les feux de la rampe.

 

Chaussettes, Chats Sauvages et Ronnie Bird en couverture. Epatant la manière dont on nous appâte ! L'est vrai qu'aussi on retrouve Richard Anthony, le pantouflard du blues qu'on le surnommait à l'époque. L'a tout de même réussi à faire de la prison aux USA, le gros Richard et à mon avis pas dans l'idée d'avoir droit un jour à un concert gratuit de Johnny Cash.

 

Je vous lance quelques noms pour que vous saliviez un peu : les Aiglons, Ralph Bernet ( super nom de rocker ! ), Jean-Claude Berthon ( question rock patronyme laisse béton ! ), Burt Blanca ( fume, c'est du Belge ), Lucky Blondo ( le sympathique crooner flegmatique ), les Fingers ( mon petit doigt me dit que je les évoquerai très bientôt), je peux arrêter là ? Quoi ? Ah ! vous êtes déjà devant le présentoir à revues. Je vous dérange, vous n'avez plus besoin de moi.

 

Damie Chad.

 

 

 

 

 

 

 

08/12/2011

KR'TNT ! ¤ 76. PATTI SMITH

 

KR'TNT ! ¤ 76

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

08 / 12 / 2011

 

 

 

FAN ADDICTION

 

LE CORPS PLEIN D'UN RÊVE

 

CLAUDINE GALEA

 

 

 

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Ne nous leurrons pas. C'est un peu une mode. Il arrive à la littérature ce qu'il est déjà advenu au rock'n'roll, elle se mord la queue. N'a plus grand chose à dire. A force de se regarder le nombril les écrivains ont fini par lasser le lecteur. Aussi sont-ils obligés de remplir leurs pages avec des sujets neufs qui vont à coup sûr attirer le client. Pourquoi pas le rock'n'roll, coco ! Une belle niche captive, peuplée d'aficionados prêts à sortir leurs portefeuilles dès qu'ils voient le nom de leur idole imprimé sur la moindre feuille de papier...

 

Ca doit marcher, puisque depuis quatre cinq ans ça n'arrête pas, en 2008 nous avons eu, qui avait ouvert le feu, Petit Déjeuner avec Mick Jagger de Nathalie Kuperman, surtout ne perdez pas de temps à le lire, le pauvre Mick se retrouve en couverture uniquement pour accrocher votre fric, l'aurait titré Petit Déjeuner avec Jean Dupont que la diarrhée phantasmatique du bouquin n'aurait pas changé de consistance...

 

Signe des temps, c'est à peu près à la même époque – un peu avant - que roulant à tombeau ouvert sur une route sinueuse j'ai failli rater mon virage ! Mon autoradio qui s'était réglé tout seul sur une des rares fréquences admises dans le paysage de basse montagne encaissée, s'était arrêté, sans me consulter, comme un grand, sur les premières notes de Foxy Lady de Jimmy. Le bonheur parfait. Presque Hot Rod Gang à moi tout seul ! C'est quand le speaker a commencé à blablater que la rupture d'anévrisme m'a menacé. J'étais sur France-Culture ! En plus ce n'était pas une erreur de technicien, une heure d'émission toute entière consacrée à l'Injun Fender. Malédiction ! Quelle récupération ! La marginalité des années 60 qui se fait bouffer par la culture dominante !

 

Je subo(bo)dore que les indices d'écoute de la fréquence cultueuse ont dû progresser de quatre-vingt pour cent, puisque depuis cette opération Jimmy, l'on a pris l'habitude de compiler des heures de grande écoute à la gloire de nos plus grands rock'n'rollers. A tel point que Claudine Galéa qui sévissait depuis plusieurs années dans la station s'est vue pousser à proposer une émission sur Patti Smith. J'avoue qu'à l'époque où elle a été diffusée je ne l'ai point entendue. Devais encore traîner sur Radio Johnny Cash.

 

 

LES SEPT VIES DE PATTI SMITH

 

 

Quand le bouquin est arrivé à la maison je n'étais pas très chaud. Surtout que le Kuperman avait été écrit pour être mis en voix dans la même série, Les icônes du Rock, de radio cul-cul. Mais enfin, que ne ferais-je pas pour Patti Smith, elle a tout de même été mêlée de près et de loin à la vie de deux de mes groupes préférés, le MC 5 et le Blue Oyster Cult. Ah ! Le Culte de l'Huître Bleue, ils ont failli être le plus grand groupe de hard rock on the world, se sont scratchés de belle manière, mais il y avait de l'idée et du génie. Des guitares aussi, et un travail théorique sur le son qui n'a jamais été égalé depuis. Mais vous n'êtes pas non plus obligé de gober tout ce que j'avance, mais c'est comme ça, je ne peux pas m'empêcher de jeter des perles aux pourceaux !

 

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Le Corps Plein d'un Rêve. Claudine Galea. Difficile de faire le rapport avec Patti Smith si l'on ne zieute pas la quatrième de couverture. Faut être franc, le bouquin ne parle pas précisément de Patti Smith, même si sa présence est incontournable. Le sujet du livre c'est Claudine Galea. De laquelle nous n'avons pas grand-chose à espérer. Mais que voulez-vous Claudine a décidé de raconter sa vie et il faut bien se l'enquiller. Comme notre monde n'est pas tout à fait pourri, elle s'est contentée de moins de cent trente pages pour tout nous dire. Et comble de bonheur, elle nous fait l'économie des seize premières années de sa vie, totalement inutiles puisque totalement autistes quant à la connaissance de l'existence même de Patti Smith.

 

Oui, mais à seize ans, au bord de la mer, par un beau jour d'été et de vacances, une copine, plus délurée qu'elle, lui fait entendre Horses le premier trente-trois tours de Patti. La claque. Ne s'en remettra jamais. C'est du moins comme cela qu'elle le raconte. Après vous pouvez douter. Un conseil, vous pouvez passer, au premier carrefour de votre existence, tel Robert Johnson, un pacte avec le diable, mais ne pactisez jamais avec la gent littéraire qui regorge de beaux bonimenteurs et de fieffées menteuses.

 

Elle a des excuses. Une enfance de petite fille couvée et surprotégée par sa maman. Faudra du temps pour tuer la mère. Le père n'existe pas. Claudine est du côté des Amazones. Elle n'écoute plus jamais Patti Smith, mais de ces jamais encore enfantins auxquels on ne peut accorder une pleine confiance. Deux ans plus tard elle assiste au concert parisien de Patti à Pantin. N'en dit que du bien. Je perçois tout de même comme une déception.

 

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Elle vient d'avoir son bac et commence à vivre. Loin de sa mère. N'écoute plus vraiment Patti. Poursuit des études de lettres. Se sent plus proche de Joan Baez et de Jane Birkin. Bonjour la déchéance. C'est le trip intello déjanté. Hardy, Barbara, Guidoni. L'a tout de même un gros faible pour Janis Joplin.

 

Franchit le pas, la voici sur scène à Avignon, elle met en voix un texte de Simone de Beauvoir. De Bavoir rectifiait Céline. L'étudiante vire sa cuti, elle ne sera jamais professeur de lettres, deviendra écrivain. Ce qui nous vaut une rencontre des plus improbables avec la très mitterrandienne Marguerite Duras. Que voulez-vous, si vous voulez devenir célèbre, frappez aux mauvaises portes !

 

Fera un peu de tout, du théâtre, comédienne, du roman, du journalisme jusqu'au jour où on lui commandera les Sept Vies de Patti Smith pour France Culture. Mais ce n'est pas tout. Se veut aussi une femme. Ce n'est pas un hasard si son idole s'appelle Patti. Comme beaucoup de filles de sa génération elle a de sérieux problèmes à régler avec les hommes. Des siècles de domination et l'envie de vivre sa vie jusqu'au bout. Le désir féminin se parachève en son propre miroir. Claudine Galea le conte en mots pudiques mais victorieux. Femme sexe et rock'n'roll.

 

 

 

ET PATTI ?

 

 

 

Sympathique la petite Claudine. Vous la prendriez bien pour copine. C'est vrai qu'elle est futée, et qu'elle tire son épingle du jeu de la vie sans trop se faire mal. Attention, ce n'est pas une espingle double à la punk, l'on reste dans un milieu artiste, assez protégé. Ne serait-ce que par cette prétention arty, somme toute assez petite bourgeoise. Mais vous, à ce stade ( comme disait Coubertin ) vous n'avez lu que la moitié du bouquin. L'autre partie c'est la vie de Patti. Par Claudine Galea. Et par Patti Smith. Car elle cite beaucoup. Extraits de livres, de chansons, de poèmes. Même que Patti lui en a donné la permission. Par mail. Elle aurait au moins pu prendre le téléphone. Que voulez-vous, les Amerloques ils sont directs en affaires, perdent pas de temps en bavardages inutiles. Merci pour la pub, bye-bye les fans.

 

Osmose. S'identifie si bien à la star que parfois l'on ne sait plus très bien dans quelle tête on est. Un peu de prétention peut-être : le fan refait l'idole à sa propre image. Le meilleur moyen pour ne pas être déçu. L'on donne à l'icône toutes les qualités. Celles que l'on n'a pas de préférence. Si notre rêve nous permet de nous sublimer, nous touchons à la perfection.

 

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J'adore Patti Smith, suis tout de même le premier à dire qu'elle n'est pas trop claire. Son cerveau me paraît quelquefois en friches. Un petit côté brocante à l'américaine, l'on y trouve tout ce que l'on ne cherche pas. Plus elle vieillit plus elle se rapproche de Dieu, et ce genre de mysticisme me fatigue. Ses textes sont un peu pathos. Sont transcendés dès qu'elle les a dans sa bouche, mais c'est aussi bien de ne pas tout comprendre. Joue un peu à la grande dame de la poésie, la grande prêtresse, le New-Yorkais moyen doit croire qu'elle a été la maîtresse de Rimbaud et que le petit français lui est redevable du succès de son oeuvre. De plus en plus artiste et de moins en moins rockeuse.

 

Rimbaud a très vite compris qu'il ne fallait ressembler à personne. Patti Smith passe son temps à se revendiquer de lui. Même pas de sa révolte. De lui. Corps poétique et christique. Corps de Rimbaud sur la croix de la poésie. La bodyfication de la personne humaine est le dernier avatar du puritanisme. Et Claudine Galea qui entremêle sa vie à celle de Patti avec tant d'assurance que pour un peu on s'y tromperait. La réalité est toujours au-delà du miroir.

 

Ca se lit bien, ça se lit vite. Témoignage générationnel. Grattez notre culture officielle. La rouille du rock apparaît très vite.

 

 

Damie Chad.

 

 

PATTI SMITH. ELECTRY LADY.

 

Hors-Série Les INROCKS.

 

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Le hasard objectif fait bien les choses. Un magazine sur la diva du rock sur la table basse du séjour. Doit y avoir une fanatique sévère dans la maison. Une enquête s'impose. En plus les Inrockuptibles. Vingt-cinq ans qu'ils existent et je n'avais jusqu'alors jamais toléré la moindre intrusion de ce torchon pro-bobo-parti-socialisant-gauche-caviardée dans mes appartements. Certes j'ai les idées larges mais en 1986 les Inrockkuptibles qui prennent leur envol avec la renaissance de la pop britannique comme the Smiths, c'est un peu le coup de couteau dans le dos du cadavre du punk. Aujourd'hui il faut bien savoir que les Inrocks appartiennent à la banque Lazard ( jamais abolie par un coup de dés ) et la mouvance Strauss-Khan-Ségolène-Royal-Manuel-Vals, des ultra-gauchistes comme chacun sait... Donc méfions-nous de ces beaux magazines qui nous permettent de manger dans leurs mains les miettes de la révolution rock qu'ils nous interdisent de faire dans la rue.

 

Ceci étant posé, le numéro n'est pas mal foutu qui retrace la carrière de la chanteuse selon l'ordre chronologique. Insiste bien sur la provenance de Patti Smith. Rien de mieux que la généalogie disait Nietzsche. La musique, bien sûr entendue à la radio, mais surtout la poésie. Un choix très personnel. Dès l'enfance. Inexplicable si l'on croise les théories des déterminismes sociologiques, mais apparemment même si nous sommes tous nés sur la même cime nous ne descendons pas du même arbre. Ne pas confondre Patti Smith et Bob Springsteen. Sortent tous les deux de quartiers pauvres voisins mais ne se sont pas créés dans le même style. Le Boss, c'est du solide, de l'american dream en barre, l'enfant de la plèbe qui s'en sort tout seul, parce qu'il a tout vu, tout compris, et qu'il sait vous le retranscrire avec sa guitare et ses mots mieux que tout autre. Un parfum de réalité, qui vous colle à l'âme comme une scène de western avec tous les poncifs du genre.

 

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Patti a fait le détour. Mille détours. Ne croit pas en la force brute du mot. Tout vocable n'est qu'un mensonge. Le sens qu'on lui attribue n'est qu'un reflet brisé. A chacun de se débrouiller avec la monnaie de singe qu'on lui refile. L'est allée regarder d'un peu près comme les maîtres du bonneteau verbal se débrouillent pour transformer le langage en alchimie du verbe. L'a flashé sur Rimbaud – je ne crois point qu'elle ait tout à fait compris mais ce qui compte c'est ce qu'elle en a fait. L'a quelque peu vadrouillé chez les symbolistes européens et puis s'est retournée sur le trésor national. Normal, c'est l'idiome qu'elle connaissait le mieux, et évidemment en queue de peloton elle est tombée sur la poésie Beat.

 

Mauvaise pioche serait-on tenté de dire. C'est que la beat-generation c'était tout de même un peu branché intello-jazz. La force de Patti Smith c'est justement d'avoir évité le piège. Certes l'exemple de Dylan l'aura marqué, et encore plus près d'elle celui du Velvet Underground - mais elle a eu l'extraordinaire chance de tomber en un New York – un New Ryock - des plus électriques. Celui de l'after Dolls et des Senders - pour ceux qui suivent nos chroniques – dans lequel elle va trouver en le guitariste Lenny Kaye l'intercesseur qui lui ouvrira les portes du rock'n'roll : « Sauf que je nous ai toujours considérés comme étant une émanation des années 50 et 60, de Gene Vincent et des Rolling Stones. » déclarera-t-il en un interview de François Dordor. Rappelons que Lenny Kaye fut le maître-d'oeuvre de la compilation Nuggets qui préfigura la naissance du punk.

 

Patti Smith fut l'annonciatrice, la grande vaticinatrice du punk, elle ne chante pas vraiment, elle énonce, elle dicte, elle psalmodie, elle éructe, elle s'emporte, elle tempête, elle nous naufrage et ne tend jamais la main pour nous aider à remonter sur son bateau qui s'éloigne imperturbable et impérial. Fièvre et transe. Poëte jusqu'au bout du tranchant de la voix.

 

N'a pas supporté le cirque rock'n'roll jusqu'au bout. Au sommet de sa gloire, devant 80 000 personnes enthousiastes, à Florence, elle prend la décision d'arrêter la piste. Elle n'est plus une artiste dont l'on vient écouter la parole prophétique mais une star qui soulève la foule. Le même genre de réunions d'imbéciles qui assurent les triomphes de toutes les Ladies Gaga de notre monde faisandé.

 

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Elle qui recherche l'authenticité a trouvé le bonheur dans les bras de Fred Sonic Smith. Pas un mauvais choix en soi-même. Mais l'on aurait aimé quelque chose d'un peu plus déjanté. Après la mort de Fred, elle reviendra. Toujours la même, mais elle est devenue une icône, inscrite dans le paysage. Mais quand on se rend à la corrida du rock'n'roll, l'on a toujours le secret espoir que le taureau renverse le torero. Mais ne soyons pas trop vache tout de même.

 

Damie Chad.

 

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PS : la revue est livrée avec un CD. Format 35 heures : à peine 20 minutes de concert. Faut pas compter sur les socialos pour qu'ils appliquent le droit à la paresse in extenso !

 

 

 

 

LA DERNIERE SEANCE

 

 

 

DRIVE

 

 

But this light is not for those men.

 

Franchement, on y est allé sans savoir. D’ailleurs, dans la salle, ils avaient majoritairement l’air de s’être trompés de film. Venaient assister à un remake de Fast and Furious. Pas de chance, ça ne manque pas de fureur, Drive, mais question vitesse, c’est raté. Finalement, on était peut-être les seuls à être surpris dans le bon sens. Surpris, ça ne suffit pas, on était plutôt cloués au fauteuil avec l’irrépressible envie d’assommer une fois pour toutes le mec assis à côté. Histoire qu’il se taise. Qu’il nous laisse digérer cette petite joie égoïste, vous savez bien, celle qui ne vous vient que lorsque que les américains vous montrent à quel point il est facile pour eux de vous envoyer un uppercut en plein diaphragme, de vous rappeler qu’après tout, il y a, dans votre détestation pour le grand Capital, une petite, toute petite, part de fascination pour ses héros. Alors, pour être sûrs, on y est retourné une deuxième fois. Mais dans un petit cinéma, de ces salles de banlieue où la place est moins chère qu’ailleurs. A Bobigny, certainement pour éviter une trop grosse déception aux amateurs de puissantes cylindrées, ils avaient pris leurs précautions, le film ne passait qu’en Art et Essai. Pas le même public, du coup. Z’ont pas compris le film pour autant. Trop de violence, trop d’action, trop une belle gueule Ryan Gosling. Désolé mais ce n’est pas parce que le réalisateur est Danois qu’on va subir un film lent, granuleux et qui raconte une impossible histoire d’amour entre un pêcheur borgne et une bourgeoise sur le déclin. Finalement, on a toujours autant envie d’assommer le mec à côté. Ou de lui écraser la tête à coups de pieds dans un ascenseur. Mais ça, il n’y a que Ryan Gosling pour le faire correctement.

 

Du début à la fin du film, il fait tout correctement. Vous me direz que ça n’est pas dur, qu’il suffit pour lui d’afficher un air blasé et un mutisme frigide alterné de deux trois sourires à faire fondre la plus irréductible des chiennes de garde. Trouvez vous qu’il est facile de reproduire la classe imperturbable de Clint Eastwood ? Vous balayez Ryan Gosling d’un haussement d’épaules, jugez la comparaison délirante ? C’est là qu’une fois de plus, vous manquez de clairvoyance. Le nouvel acteur à la mode nous a conquis, nous nous moquons bien qu’il respire ou pas l’intelligence. Ryan Gosling a l’épaisseur suffisante pour incarner le héros de Drive et sa plastique de blondinet colle parfaitement à l’esthétisation lisse et souple du film. Même la ville, dans sa tentaculaire brutalité, se laisse parcourir sans à coups, les néons se reflètent dans les vitres des voitures et toutes les scènes de massacre sont ralenties, différées. La brutalité soudaine qui se dégage du personnage et qui par instant fissure cette sensation de contrôle, de maîtrise, d’assurance le défigure assez à notre goût. Si vous n’aimez pas Ryan Gosling, vous n’aimez pas les scènes de poursuite en voiture sur une électro parfaitement romantique et froide, vous n’aimez pas ce film. C’est une erreur, mais c’est votre droit.

 

« Cette ville est pleine de rue », la première phrase prononcée dans Drive (accrochez-vous parce qu’il n’en compte pas plus d’une douzaine) contient tout le sujet du film. Pas de blague, nous ne nous moquons pas. Pour nous, Drive parle de la solitude. Non, ça n’est pas un film sur Los Angeles, c’est un film sur le désespoir. Si vous avez déjà eu la chance de vous payer un aller-retour aux Etats-Unis, peut-être pourrez vous dire le contraire, peut-être aurez vous reconnu une artère ou un building. Nous n’avons rien identifié. Seulement le morcellement, la froideur, la séparation. Vous êtes dans la merde, tout seul, à coté de plein d’autres qui le sont autant que vous. Et rien ne se passe. Même quand vous entreprenez d’aider le mec de la fille dont vous êtes amoureux, vous ne pouvez pas dépasser ça. Vous avez juste le droit de devenir un « real hero », d’être qualifié du titre honorifique d’ « être humain ». C’est maigre quand vous avez bousillé trois types, quand la mafia veut récupérer le sac de dollars qui vous est arrivé dans les mains, quand la fille qui vous plaisait vraiment ne peut plus vous voir que comme un assassin forcené et quand, comble de malchance, vous avez le bide ouvert et les tripes à l’air. Finalement, c’est juste une trajectoire un peu plus abrupte que les autres. Faut dire que le personnage est un peu abrupt aussi. Capable de la plus terrible des rages mais toujours décidé, d’une détermination presque effrayante. Il sort de nulle part, ce mec là. Il n’a pas l’air d’avoir grand-chose à perdre. Quand on a quelque chose à perdre, on se défend, on se bat. Pas lui, il tombe. En tombant, il en précipite un paquet dans sa chute mais c’est tout. Il n’est pas en train de lutter pour ce qu’il possède, il serait plutôt du genre à tout donner pour ce qu’il n’a pas. Et ce qu’il n’a pas, ce n’est pas vraiment la panacée. C’est la femme d’un autre, l’affection d’un enfant, des miettes d’amour, de lien. Il tombe, donc, et jusque là, rien ne va.

 

Certes, il a la classe. Tout semble couler pour lui, même quand ça ne fonctionne pas. Pourtant, le rêve américain en prend un sacré coup. On survole la ville, on glisse sur des musiques vibrantes, on croise un peu d’amour dans un appart pourri, on admire un beau mec au volant, on y croit un peu quand même. Mais ça finit sur un parking, sur l’abandon d’un gros sac de dollars, sans rupture avec la fatalité. Voilà, c’est dit. Ce film est beau parce qu’au travers d’une forme résolument hollywoodienne, de codes clairement établis par une volonté grand public, il n’esthétise que l’impossibilité d’une résolution, que les contradictions du capital et de ses héros.

 

 

O. Murcie.