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20/06/2013

KR'TNT ! ¤ 149. MIDNIGHT ROVERS / KING PHANTOM / KOFFIN' KATZ

 

KR'TNT ! ¤ 149

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

LITTERA.INCITATUS@GMAIL.COM

 

2 0 / 0 6 / 2 0 1 3

 

 

MIDNIGHT ROVERS / KING PHANTOM / KOFFIN' KATS / ORVILLE NASH /

NICK TOSHES / PERMAFROST / IN ALBERT LEA

 

 

LA MIROITERIE / PARIS / 18 - 06 - 2013
MIDNIGHT ROVERS / KING PHANTOM /
KOFFIN' KATS

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Rue de Ménilmontant, c'est tout en haut et avec la chaleur écrasante l'on préfèrerait que ce soit vers le bas. La Miroiterie, en ai entendu beaucoup parlé par Frédéric Atlan alias Sonic Surgeon ( voir notre livraison N° 25 du 25 / 11 / 10 ) qui y a eu pendant des années son atelier de peintre. C'est un des tout premiers squats arty-punky, s'y déroulent très souvent des concerts – les parisiens ont de la chance de pouvoir fréquenter de tels lieux de vie et de création. La Mairie ne l'entend pas de la même oreille qui se débarrasserait volontiers de cette pustule par trop folâtre. Un projet d'expropriation survole depuis quelques mois les locaux, un peu comme ces vols de vautours de mauvais augure dans les westerns. Gageons qu'un jour ou l'autre les charognards finiront par l'emporter.

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L'est sûr que ce n'est pas tout neuf, suffira de mettre le bulldozer en marche pour que tout s'effondre, mais ce n'est pas l'état des locaux qui pose problème, ce sont les pratiques de vie peu conformistes qui gênent. C'est fou comme le libéralisme n'est pas vraiment libéral avec ceux qui s'essaient à des modes d'existence parallèles et qui tentent de se libérer du carcan de l'exploitation salariées au rabais.
Passez la grille, longez la voie d'accès, les bâtiments sont tout en longueur. Ressemble un peu à l'architecture des typiques longères de notre Brie post-natale. Suis pas venu pour faire le guide mais pour voir les Midnight Rovers. Juste avant de partir m'aperçois en quêtant quelques renseignements sur le net qu'ils passent en première partie devant Koffin' Kats, et comme sur une table l'on vend le 45 tours des King Phantom, j'en déduis que pour notre plus grande satisfaction nous aurons droit à trois groupes, plus on est de fous, plus on rit.

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Deux ou trois stands de disques et de badges. Modèles boutons de chemises, ce serait bien de relancer comme dans les années 70, la mode des cinq centimètres de diamètre qui permettaient d'arborer beaucoup plus fortement choix esthétiques et goûts musicaux intempestifs à la face du monde.
MIDNIGHT ROVERS
L'est temps de renter surtout qu'ils sont en train d'achever le deuxième morceau. La salle n'est pas grande, mais la scène n'est pas exiguë. Un parallélépipède assez haut de plafond, les murs couverts d'inscriptions, derrière les musiciens un visage turgescent nous contemple. Au fond, une galerie surélevée abrite la sono. Autant le dire tout de suite, l'acoustique n'est pas merveilleuse, le son s'écrase sur les parois, et ne rebondit pas. Sur le plateau, les retours doivent être une énorme marmelade de sons compressés et congelés. Pour les trois groupes, ce sont surtout les parties vocales qui souffriront d'un tel phénomène. Pour les instrus c'est moins grave, il passent en force.

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Premier régal, avant même de jeter un regard c'est le marteau de Torz qui vous fracasse les oreilles. Une frappe comme je les aime, puissante, lourde mais trop en prise d'énergie pour devenir lassante. Au centre, au fond, comme tout batteur qui se respecte, on ne l'entrevoit que par intermittence, par contre je peux vous jurer qu'il envoie en continue. Pourrez jamais dire mieux vaut Torz que jamais, car il omni-présent sur tous les coups.

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De loin avec Manu et sa contrebasse et la gretsch orange de Cidou ca ressemble à un groupe de rockab des plus trads, mais au bout de douze secondes ( pour les esprits lents ) vous les classez vite dans les adeptes du psychobilly, eux-mêmes se définissent comme un groupe de suburb rock. Oui mais sachez ouïr la différence, de temps en temps au détour d'une séquence rentre dedans vous percevez la ligne claire d'un riff, c'est Cidou qui nous la joue quinze secondes à la Hank Marvin mais tout de suite après ce sont toutes les tribus indiennes qui jettent leurs cris de guerre à Little Big Horn, et pas du tout si doux que cela, il nous pulse des flèches d'acier qui nous transpercent sur place.

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Nico est au micro. Ou plutôt aux micros, car à certain moment il double sa voix sur un deuxième appareil. Me demande dans ma tête si c'est un plan piqué à Eric Burdon quand il imite par un tel stratagème la CB des voitures de police poursuivant un présumé tueur... Pour les paroles voir plus haut, mais la voix est belle et sonore, assez ample pour s'éviter de crier et de s'égosiller. Sort aussi son harmonica, assez frénétiquement bluesy, là-haut au mixage, z'auraient pu le mettre plus en avant.

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J'aurais aimé vous parler plus longuement de Manu et de son slappin'game mais juste au moment où je vais me concentrer sur lui, le set se termine. Même qu'ils ont déjà passé en force leur deux derniers morceaux. Trop tard, trop court, juste au moment où les doigts commencent vraiment à se dévérouiller, la voix à se chauffer et l'énergie à circuler, faut qu'ils arrêtent, nous laissant sur notre faim comme des orphelins abandonnés.

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Vous aurez un lot de consolation, la semaine prochaine, la chronique de leur vinyl. On essaiera de mieux cerner leurs implications projectales. En tout cas ce qui est sûr c'est que c'était bien parti, et que s'ils repassent dans le quartier je serai au rendez-vous et pas pour une demi-part de gâteau.

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KING PHANTOM
Ne les connaissais pas, mais j'ai vite appris. Pas plutôt sorti, suis allé rafler leur record, la kronic comme pour les Midnight Rovers, la semaine prochaine. Sont pas nés de la dernière pluie, chacun traîne un pédigrée à rendre un chien jaloux. Johnny Rival a même longtemps joué aux States avec The Evils d'Atlanta.

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Des tatouages partout, batteur torse poil, casquette camouflage pour le chanteur, les trois guitares en première ligne, le tambour derrière qui fragmente à la Bo Diddley. Ne font pas dans la dentelle, construisent un mur, et comme ils auront tout le temps nécessaire vont nous édifier une muraille de Chine.

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Dès les premières notes c'est déjà très bien ce qui ne les empêche pas de s'améliorer à chaque morceau. En rajoutent à chaque fois, vous surprennent toujours, simple et efficace mais pas le genre à vous répéter deux fois les mêmes structures. Innovent, ne vous ennuient jamais. Jay et Johnny sont à la guitare, ne vous amusez pas à savoir qui est le lead. Ce n'est manifestement pas comme cela qu'ils posent le problème. Entremêlent leurs propositions, foncent à toute allure, distribuent l'énergie à tout venant. Ca crépite d'électricité. Le public commence à pogoter gentiment, mais sûrement.

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Patclass ne joue pas de la basse électrique mais de la guitare si vous voyez ce que je veux dire. Le truc n'est pas pour lui de ponctuer une assise rythmique mais d'amener tout le speed nécessaire à ses coreligionnaires. Derrière ses futs Rumble Tom concourt au même challenge. Ne construit pas une assise mais une ligne de feu qui se déplace à la même vitesse que la trajectoire des guitares. Avec tout de même des breaks incessants qui éclatent comme des morceaux d'écorces trop sèches jetées dans une fournaise.

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Généreux, ont sans arrêt un titre en rabe à caser. Parfois l'on se dit cette fois ce sera le dernier, ne pourront pas filer plus loin, plus fort. Et blang vous en refilent trois de suite en constante gradation. Oublié de dire qu'ils sont les champions de la fausse fin. Vous n'imaginez même pas qu'après tel plan de crème fouettée l'on puisse apporter une suite au morceau en cours, vous pensez que c'est la fin coda, tout le monde s'arrête, mais non eux ils repartent à l'assaut et vous démontrent que le champ des possibles n'a pas encore été totalement labouré. Sortent épuisés, sous les applaudissements.
Rien à redire. Tout à admirer.
KOFFIN' KATS
Si vous traduisez par petits chats mignons endormis dans leur couffin, c'est une erreur. Prenez plutôt trois tigres enfermés dans un cercueil et qui vous défoncent les planches à coups de griffes. Sont des Américains, vous n'aimez peut-être pas mais faut reconnaître qu'ils ne trichent pas sur la qualité de la marchandise. Les amerloques qu'ils vous envoient un obus Tomahawk sur votre quartier ou qu'ils délèguent un groupe de psychobilly, dans les deux cas, après le passage de l'ouragan faudra penser à numéroter vos abattis. Bande d'abêtis.

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Des mecs cools, sont restés deux heures assis pénardos à une table à vendre leurs T-shirts, parlent un sabir incompréhensible que mes profs d'anglais ne m'ont jamais appris, heureusement qu'il y avait trois américaines à l'accent aussi prononcé qu'eux pour discuter avec, mais quand ils sont montés sur scène, l'on a tout de suite vu que l'on avait affaire à des seigneurs. Rien qu'à la manière de diriger la balance, l'était certain qu'ils connaissaient la musique.

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Les States c'est grand, mais eux ils ne viennent pas du Sud Rural Profond, le rockabilly des bouseux, très peu pour eux. Traînent pas leur contrebasse dans le crottin de cheval. Eux ce sont les flaques d'huile visqueuses, les carburateurs kramés et le moteur en feu. Viennent de Detroit. Motor City. Z'ont attapé des gènes stoogiennes dans leur biberon. Et ça s'entend.

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Au début, l'on a l'impression d'une cocote minute qui explose. Même pas des morceaux. Des plans de feu d'enfer que l'on bazarde à la tête du public. A côté les titres des Ramones s'inscrivent dans une longueur symphonique. Le batteur s'en donne à coeur joie. Dommage que par la suite il se soit contenté d'un beat ultra violent mais trop métronomique.

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Ensuite l'on ne peut pas dire que ça s'assagisse. Oh que non, ça gagne en dureté et en brutalité. Des morceaux plus longs mais d'une telle inventivité qu'ils passent comme un bâton de dynamite dans une poudrière. Le public se lance dans un pogo, sans sournoise volonté de faire mal à son voisin mais qui suivra une courbe exponentielle durant tout le set. Corps porté à bout de bras, embruns de bière, fièvres et emballements.
Psychobilly si vous voulez, mais il y a de tout dans cette tornade, parfois ça brûle comme du Iggy, parfois ça bastonne comme du Rammstein, ça fond comme du blues, ça cavale comme du rock'n'roll, empruntent ce qu'il y a de plus intense dans chaque genre, et vous le rendent en dix fois plus méchant.

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Eric est comme cloué sur sa caisse claire, jamais un beat de retard, jamais une demi-seconde de trop. Implacable, imbattable. Vic brandit sa contrebasse et la fait tournoyer. Plus tard Tommy entreprendra de l'escalader tout en nous délivrant une marée de lave qui s'écoule de sa guitare comme d'un volcan. Pas le temps de s'arrêter. Tous deux échangent leurs instruments en plein vol comme des pilotes de chasse qui sauterait de cockpick en cockpick. Vic tire sur les cordes du bas de la double bass tandis qu'en haut du manche Tommy se sert de sa guitare comme d'un archer. Mais ne vous laissez pas séduire par les acrobaties.
Toujours à fond la caisse, intraitables. Je commence à comprendre pourquoi j'ai toujours préféré le rock américain au son anglais. Ne tournent pas autour du rock pour arriver à l'heure. Sont d'une efficacité ouranienne. Sont partout à la fois. Ne laissent rien au hasard. Ces ripées de métal sur la guitare, difficile de trouver mieux, et chaque fois Johnny vous en redonne une mouture supérieure. Jouent longtemps, sans temps morts, sans respiration. Pas du genre à économiser les cartouches. Des tueurs qui vous découpent en rondelles au hachoir.
En plus ils osent nous demander si l'on aime le rock'n'roll. Pas du tout, nous ce que l'on aime c'est les Koffin' Kats. Et le jour où je mourrai offrez-moi un cercueil de ce bois-là.
Splendide.
Damie Chad.
La salle est emplie de buée et de fumées diverses. Près de moi une jolie maman attrape ses deux filles dans ses bras protecteurs et se dépêche d'entraîner les deux sweet little lycéennes sixteen vers la sortie. «  Comment peut-on faire tant de bruit en un tel lieu ? » demande-t-elle les yeux baignés d'angoisse. Voudrais bien lui expliquer, mais elle est décidément trop vieille. Dans sa tête.
( pour les documents iconographiques voir le facebook des artistes. Seule photo du concert la première qui illustre Koffin Katz, elle est signée de Carnage Punk Rock, qui ont aussi un facebook )

LE BATEAU IVRE
 ROUEN / 02 - 06 - 2012

 

LE PANACHE D'ORVILLE NASH

 

 

Nous avions naguère à Rouen un lieu saint, le Bateau Ivre. Saint aux yeux des noctambules, des amateurs de musique vivante et des ivrognes, faut-il le préciser ? Chaque fin de repas aviné s'achevait sur le même cri de ralliement : «Une mousse au bateau !» Pratique, car ça fermait à 4 heures du matin. Le patron s'appelait Michel. Grand, tête de boxeur, un physique à la Tom Jones, cet homme pouvait vous réciter d'un trait La Chanson du Mal-Aimé de Guillaume Apollinaire en vous fixant dans le blanc des yeux. J'y eus droit le soir où je lui avouais un faible pour le Flâneur des Deux Rives. Faut-il qu'il m'en souvienne.

 

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Michel programmait des groupes pour tous les publics. Groupes de reggae pour les lycéens, métal pour les métaleux locaux, garage pour les garagistes locaux, goguette le mercredi soir pour les amateurs de chanson française, soirées blues et même du rockabilly. Eh oui, il existe encore une petite scène rockab à Rouen et un public de puristes.

 

C'est lors d'une de ces soirées rockab que j'échouai au bar du Bateau, flof, aussi flasque qu'un veau marin. Accoudé dans une mare de bière, parfaitement disposé à fanfaronner, j'entamai la conversation avec mon voisin, un pépère coiffé d'un chapeau de cow-boy. Il ne pouvait être qu'Orville Nash, programmé ce soir-là. Aucun rouennais n'aurait osé porter un tel chapeau de cow-boy. Je me crus obligé d'attaquer en anglais, forcément, mais j'éprouvais d'immenses difficultés à donner l'illusion de la fluidité. Je cherchais mes mots en vain, par contre, je voyais bien deux Orville. On a causé rockab pendant un temps qui m'a semblé infini. Jusqu'au moment où Michel lui demanda s'il voulait un autre verre de vin et ils échangèrent tous les deux quelques mots en français, une langue qu'Orville Nash parlait couramment. Il m'a salué en rigolant et il s'est dirigé vers la petite scène où l'attendaient les musiciens.

 

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Orville Nash attaqua ce soir-là avec, je crois bien, «Tongue Tied Jill». Fini de rigoler, on avait sous les yeux une légende du rockab, un fabuleux survivant, capable de chanter à la demande. Quand on réclamait «One Hand Loose», il le prenait au débotté. Une vraie voix. On sentait que le bonhomme avait du métier. Il avait ce truc que les musiciens locaux n'auront jamais : cette aisance scénique, une sorte de classe innée, une façon de bouger les pieds, et les radiations. Sur scène, Orville Nash dégage quelque chose de très spécial : sous les apparences country se tapissent les vieux réflexes d'un bopper de premier choix.

 

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Peut-être avez-vous la chance de posséder l'album qu'il enregistra jadis pour Rolling Rock, «Nashin' Around». J'en ai déniché une copie d'occasion chez Born Bad peu de temps après le concert et là, je dois dire que je suis tombé de la chaise en l'écoutant. C'est l'un des classiques obscurs du genre, un rockab atmosphérique, hanté et pour ainsi dire moite (si on veut pousser la métaphore marécageuse), mâtiné de swamp-blues. D'ailleurs, le premier morceau s'intitule «Swamp Blues». On entre dans ce disque comme on entre dans un lieu chargé de mystère : le cœur battant et tous les sens en alerte. Il vaut mieux être sur ses gardes parce que le second morceau, «Hot Dog», vous cueille au menton. Bing ! Un rockab swingué jusqu'à la moelle des os. Du bopping haut de gamme qui semble rôder par derrière. Excellent, au delà de toute conjecture. Deux fantastiques musiciens accompagnent Orville Nash : Mitch Vogel à la guitare et Frank Gadotti, «Dog House Bass», comme l'indique la pochette. Avec «New Orleans Woman», Orville boppe le chant comme le faisait si bien Charlie Feathers.

 

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Sur ce disque, tout est savamment calibré, comme les seraient les éléments d'un art secret. On tombe ensuite sur la septième merveille du monde : «Austin City Limits». Riffage fantomatique. L'un des accompagnements les plus crépusculaires de l'histoire du rock. Orville Nash pose sa voix sur un tapis de magie swampy. C'est du pur voodoobilly. Appelons ça un coup de génie fatidique, si vous voulez bien.

 

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La face B réserve elle aussi son lot de bonnes surprises. Orville Nash met une pincée de sauvagerie dans le titre qui donne son titre à l'album. Puis il prend «Sweet Rockin' Mama» par en-dessous, avec des Hello baby d'anthologie. «I'm Out» sonne comme un classique intemporel. Orville Nash est vraiment le roi des atmosphères étranges. Il lance un «Hey Guitar !» et on entend une espèce de solo mou et duveteux, monté sur une ligne de basse ouatée. Tout cela dans le respect des traditions du laid-back tel qu'on le pratique dans les zones reculées du bayou. «Heart Breakin' Mama» est un rockab pur et dur, Orville le boppe à outrance. Tout y est, comme chez Charlie Feathers ou les frères Burnette. Quand on entend «Willing And Ready», on réalise enfin qu'Orville Nash est une vraie star. Dans «Bootlegger», il se permet toutes les audaces vocales, et il ferme ce bal des vampires avec un stupéfiant «Dr Jekyll & Mr Hyde», chef-d'œuvre boogaloo. Mais d'où sort ce type ?

 

Tout s'éclaire lorsqu'on lit les notes au dos de la pochette : il fréquentait Huey P. Meaux dans les années soixante. Et là, on ne rigole plus.

 

 

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Huey P. Meaux est l'un des personnages légendaires de la scène texane. Il exerçait ses talents de découvreur, de producteur et d'escroc dans une région marécageuse située au Sud du Texas appelée le Triangle d'Or, une contrée hérissée de puits de pétrole et de raffineries. Meaux tenta de lancer les frères Winter sous le nom de The Great Believers, mais dans la région, les gens craignaient encore les Albinos et la manœuvre échoua. Il se tailla une réputation en produisant des groupes cajun qui chantaient en patois français, ce qu'on appelait le zydeco. On baptisa son style «swamp pop» (pop du bayou) et parmi les artistes qu'il produisait, on trouvait Big Mama Thornton, Clifton Chenier et Lightnin' Hopkins. Il lança la carrière de Doug Sahm. Huey recevait les candidats au succès dans son salon de coiffure de Winnie, un patelin situé entre Port Arthur et Beaumont, au Texas. Il sortait un 45 tours d'une petite caisse couverte de mèches de cheveux coupés et disait au candidat : «Écoute ça et reviens me voir dans six mois !». Quand les Beatles déferlèrent sur l'Amérique, Huey P. Meaux déguisa le Sir Douglas Quintet en groupe anglais et leur donna l'ordre de ne pas parler entre les chansons. Le public devait croire qu'ils étaient anglais. Et ça a fonctionné. Ils partageaient l'affiche avec les Stones, James Brown ou les Beach Boys et, pendant un petits laps de temps, le public est tombé dans le panneau.

 

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Surnommé the Crazy Cajun, Huey P. Meaux aura pas mal d'ennuis avec la justice américaine. Il fera quelques stages au ballon et il sera très fier, en 1967, d'être blanchi par le président Jimmy Carter. Il connaîtra par la suite d'autres ennuis judiciaires. Augie Meyers (organiste du Sir Douglas Quintet) et Jerry Wexler (tête pensante du label Atlantic) feront partie de ses fidèles correspondants et jusqu'au bout, Huey P. Meaux restera un découvreur de talents. En 1998, atteint d'un cancer de la gorge, il affirmait avoir découvert le nouveau Freddy Fender.

 

En  1964, Orville Nash enregistra des démos pour Huey P. Meaux. Au dos de la pochette de «Nashin' Around», on nous dit que ces démos sont restées inédites mais qu'elles risquaient de réapparaître un jour.

 

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Apparemment, c'est chose faite, sur un CD intitulé «The Early Years». Deux des fameuses démos enregistrées au Goldstar studio de Huey P. Meaux à Houston s'y trouvent. Il démarre justement avec une reprise de Charlie Feathers, «Tongue Tied Jill». Orville boppe comme un fou et Johnny Jaxon envoie ses gimmicks avec l'ardeur d'un cueilleur de coton. «Awite JJ !» Dans «Let's Go Boppin' Tonight», on savourera la parfaite rondeur du slap. Orville sonne comme un petit Elvis, il respecte l'esprit du rockab Sun à la lettre. Rien qu'avec ces deux titres, on grimpe directement au paradis.

 

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Mais là encore, d'autres surprises guettent le badaud. Avec «Hillbilly Boogie Stomp», on change d'époque et de son. Orville lâche sa bombe boogie bardée d'entrain, il y a là de quoi faire sauter toutes les bananes du Texas. Train d'enfer et coups de violon ici et là. L'animal n'en finit plus de nous surprendre. Il pompe l'intro de «Folsom Prison Blues» pour son «Wells Fargo Trail» et «Tombstone Gun» sonne comme un magistral clin d'œil à Johnny Cash. Pour Orville, pas de problème : il a le bon timbre. Nash fait du Cash. C'est carrément du cinémascope. On sent la dramaturgie de la frontière, le poids de la violence et de la solitude, sous l'immense voûte étoilée. «Boogie Woogie Cajun Girl» est, comme son nom l'indique, un boogie violent, serré, malsain et vénéneux, superbe et hargneux, Orville se montre digne des plus crasseux péquenots venus enregistrer chez Meteor. Quand il lance «Awite Bobby !», le Bobby en question décoche un chorus meurtrier. Comme Jerry Lee, Orville Nash sait déterrer la hache de guerre au bon moment. Avec un titre comme «Hollywood Glamour Girl», Orville montre qu'il sait faire le crooner et ça passe plutôt bien, grâce au gras de l'accent américain. «Bourbon Street Belle» est solide comme ce n'est pas permis. C'est du garage-punkillbilly des enfers. Orville chevauche son riff sauvage à travers la plaine immense. Il sait faire monter la température. On a là un truc admirable, digne des grands hits d'Eddie Cochran. Orville envoie ça avec une sourde assurance. Il plonge au plus profond de sa glotte pour évoquer les bas-fonds de la Nouvelle Orleans. Avec ses quelques accents à la Jerry Lee et ses coups de baryton, Orville Nash casse la baraque. Aouh ! Il embarque «Warning Shadows» avec le tacotac de Johnny Cash et fait autorité. «Montana Wildcat» est digne de tous les juke-boxes de Tupelo : «I'm the Montana wildcat, I don't wanna seduce. You'd better treat me good, but since I met you honey, I wanna compromise !» Absolument génial. Pur jus. Un bopping trié sur le volet. Irrémédiablement brillant. «Bayou Beast» est une pièce rampante digne des Cramps. Dommage que Lux n'ait pas chopé cette abominable merveille de swamp pop. Good Lord ! Le festival se poursuit avec «Everyday Has His Day», un boogie blues violent et des plus spectaculaires. Vous ferez comme moi, vous vous pincerez pour être sûr que ce n'est pas un rêve.

 

Ce disque d'une incroyable qualité ne vous lâchera pas. À chaque réécoute, il mord encore plus profond dans le gras du mollet.

 

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Les admirateurs d'Orville Nash sont gâtés, puisqu'il existe aussi un show filmé en Suède disponible sur DVD, «Live In Sweden». Ne vous fiez pas aux apparences. En voyant la photo ornant la pochette, on croit tomber sur un concert de country insipide. Orville tape dans son répertoire de reprises rockab, avec «Tongue Tied Jill», «Let's Go Bopping Tonight» d'Al Ferrier et «If I Had A Woman» de Mac Curtis, «from the King label», comme il le précise en guise d'introduction. Il tape aussi dans des merveilles du style «His Latest Flame» de Mort Shuman, rendu célèbre par Elvis et il s'en sort admirablement bien. L'animal sait crooner et on peut même dire qu'il excelle dans le genre. Orville Nash est un artiste complet. Avec ses syllabes mouillées et ses dérapages à la Jerry Lee, sa version d'«Ubangui Stomp» est probablement l'une des meilleures qui soient.

 

Héritier d'un passé prestigieux, cet homme sait se rendre accessible puisqu'il tourne partout en France. Si par chance il vient jouer par chez vous, allez l'applaudir. Vous goûterez au privilège de voir un très grand artiste, vous pourrez même discuter le bout de gras (en Français) avec lui après le set et vous lui ferez plaisir en lui achetant son CD et son DVD. Il vous les dédicacera et, un sourire malicieux au coin des lèvres, il dessinera un petit bonhomme dans le O d'Orville.

 

Signé : Le Marécageux Cazengler

 

 

Orville Nash. The Early Years. CD. www.orvillenash.com

 

Orville Nash & the High Jacks. Live In Sweden. DVD. www.orvillenash.com

 

Orville Nash with Mitch & Frank. Nashin' Around. LP Rolling Rock (Switzerland) 1990

 

 

C O U N T R Y

 

L E S  R A C I N E S  T O R D U E S

 

D U   R O C K ' N ' R O L L

 

 

 

N I C K  T O S C H E S

 

 

( A L L I A / 2 0 0 8 )

 

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Avec ce premier livre de Nick Tosches, y a un truc qui cloche. Ce qui est sûr c'est que le bouquin est aussi tordu que les fameuses racines qu'il recherche. Part dans tous les sens. Rebondissement à chaque chapitre. Déjà un mal de coyote à fixer la ligne de départ. Commence par les premiers colons débarqués d'Angleterre. Mais il abandonne vite le tableau idyllique. 1607, paraît une bonne date, manifestement le millésime ne lui suffit pas. Si vous croyez en être quitte avec les vieux crin-crins d'Irlande, vous êtes loin de vous douter de ce qui va vous tomber sur le coin de la figure.

On se calme, l'on se retrouve en eaux connues, tous les groupes rockab l'ont à leur répertoire, Black Jack David de Waren Smith. Un pionnier, un vrai, de chez Sun, la reverbe, Sam Phillips, etc... vous connaissez la musique. Dommage, c'est les paroles qui sont importantes. Sont un peu moins bâclée que Baby, I love You, Baby I want you. Black Jack David invite une jeune femme mariée à délaisser son mari et ses petitous pour le suivre. Jusqu'où ? Jusqu'au bout. Dans les bois, dans la tombe.

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Snif ! Snif ! Waren Smith avoue qu'il a bâclé le titre sur un coin de table, au dernier moment. Comme beaucoup. Ce qui explique pourquoi de nombreux morceaux de rock'n'roll sont un peu mous du texte. Mais le Black Jack David se défend dans le lot. Normal nous dit Nick Tosches, l'a sorti de son cerveau le Waren mais l'était imbibé de tas de chansons populaires, anglaises et irlandaises et même américaines qui véhiculaient le même thème. Le problème c'est que les auteurs anonymes de ces ballades avaient eux-mêmes un peu trop démarqué les poètes romantiques de la grande culture british. Zoui, mais les Keats, Shelley, Byron, Lamb et toute la sainte famille étaient fortement influencés par les auteurs latins et grecs... Et que les aèdes Hellènes s'inspiraient de la figure originelle et mythologique d'Orphée... L'on ne peut pas accuser Nick Tosches de ne pas remonter assez loin dans son étude généalogique !

HONKY TONK

C'est après que ça se met à tanguer salement. L'on s'encanaille dans les Honky Tonk, Tosches batifole un peu dans l'étymologie. Pour honky je ne m'aventurerai pas, mais pour tonk du haut de ma profonde méconnaissance de l'argot américain je proposerais une allitération du mot tank, réservoir, ce qui me semble en harmonie connotative avec ce que l'on peut attendre d'un bar. Quoi qu'il en soit c'est Al Dexter qui composa en 1937 Honky Tonk Blues avec un certain James B. Paris. Plus tard Al Dexter composera tout seul, Pistol Packin Mama que reprendra Gene Vincent. Ne brûlons pas les étapes. Tout est question d'ambiance - dans les honky tonk, dans les années 30 et 40, on ne jouait pas du rock'n'roll, mais l'on avait déjà les deux premiers termes de l'équation, les filles un peu trop chaudes et l'alcool un peu trop raide. Ne fallait pas en conter aux marloufs qui fréquentaient ce genre de boîte, depuis les années 20 les chansons étaient déjà pleines de my baby rocks me, et croyez-moi qu'elles tricotaient surtout en-dessous de la ceinture...

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Tout le monde s'y mit, même le gospel connut ses réunions de Holy Rollers qui en proie à sainte transe chrétienne se roulaient par terre. L'histoire ne dit pas ce qu'ils faisaient exactement avec leurs soeurs après leurs cérémonies expiatoires, mais on peut supputer que les feux de l'amour divin devaient exacerber bien des frénésies... Surtout que ces fidèles n'hésitaient pas à saisir à pleines main des reptiles venimeux. Tonton Freud n'aurait pas hésité à parler de manipulations phalliques, les Holy Rollers eux déclaraient que leur foi les préservait de toute morsure intempestive. Même en leur accordant notre confiance nous ne pouvons nous empêcher de penser que dès que ça rolle un peu dans les coins, la queue du diable n'est pas très loin.

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L'on n'a pas encore hissé les couleurs. Indéniablement ce fut la population noire davantage délurée que la blanche un peu puritainement coincée du postérieur qui mit du rock'n'roll dans sa musique. Ensuite c'est un peu la couse à l'échalote, Fats Domino dès 1949, devancé de peu par Hank Williams en 1947, des titres épars certes mais en avance sur l'imminence de la nouvelle ère qui allait s'ouvrir : celle du rock'n'roll.

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Tosches n'est pas un fervent de Bill Haley, mais il fut la première star du rock'n'roll blanc, même s'il lui en coûte de l'avouer. En 1954, Rock Around the Clock passe inaperçu, l'aura droit à sa session de rattrapage lorsque son compositeur parviendra à le faire adopter pour le film Blackboard Jungle. C'est aussi en 1954 qu'Alan Freed baptise son émission de radio Rock and roll Party, l'année même où un certain Elvis Presley entre dans le studio Sun... Vous raconte pas la suite.

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Tosches s'attarde sur Jerry Lee... une trentaine de pages pour une biographie non-autorisée sur le Killer, je ne résume même pas, puisque j'ai dans les cartons le compte-rendu sur Hellfire le livre que notre auteur lui a consacré. Vous refilerai cela prochainement sur le site. Disons que nous avons droit ici à la première mouture de ce brûlot sorti tout droit de l'enfer. L'on termine en beauté avec l'évocation de Gene Vincent et la mort de Buddy Holly et les enregistrements d'un certain Thumper Jones. Cela devrait vous rappeler la dernière livraison ( N° 149 ) que l'inaltérable Cazengler a nécrologisée en l'honneur de George Jones, l'autre grand nom du country avec Johnny Cash et Lefty Frizzell... Le rock and roll vient de vivre ses meilleures années. Les ligues de vertu auront sa peau. En 1959, ce sera déjà la fin. L'est temps de remonter à ses racines.

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OBSESSION

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Ce que c'est que de ne pas suivre l'ordre chronologique. Tosches s'attaque à une énigme qu'il résoudra dans un futur livre, Blackface, que nous avons chroniqué dans notre cent quarante-troisième livraison, sur la piste d' Emmett Miller le yodeleur fantôme qui influença Jimmie Rodgers... Nous ne sommes plus sur les racines tordues du rock'n'roll, l'aiguilleur Rodgers nous a mis sur la ligne qui conduit vers les sources de la country music. L'on repasse par des stations déjà visitées, Jerry Lee Lewis and Hank Williams. Pas pour rien que ces deux-là sont des monuments de la musique populaire américaine, soit ils ont crée, soit ils ont recréé, soit ils ont tout revisité.

L'ESPRIT ET LA LETTRE

 

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Dans la série plus-rock'n'roll-que-moi-tu-meurs ou la-country-a-tout-inventé, Nick Tosches redécouvre quelques chanteurs oubliés de par chez nous. Commence par Jimmie Davis, contemporain de Jimmie Rodgers qui ne se contentait pas de siffler les filles, regardaient de près dans leurs petites culottes et étaient un expert autorisé pour commenter les traces suspectes par de salaces lyrics à double-sens. Le sexe fut bien la première mamelle de la country.

Sur ses vieux jours Jimmie Davis se refit une nouvelle virginité en se croisant de la ceinture de chasteté de la religion. N'est pas le seul à se revendiquer d'une nouvelle naissance. Reportez-vous aux errements christologiques de Johnny Cash. La dérive de Roy Acuff n'est pas à dédaigner non plus. Mystique à ses débuts, religieux, républicain, rétrograde, raciste, anticommuniste, et j'en passe. Le chantre de l'idéologie arriérée qui présida aux destinées du Grand Ole Opry. C'est avec Roy Acuff que la country music se teinta d'une coloration idéologique white trash people qui pour beaucoup lui colle encore à la peau, même si depuis et avant elle a su se couvrir de bien d'autres oripeaux.

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Faudrait pas que l'arbre de la morale cachât la forêt des sexes dressés et des buissons ardents de l'entrejambe féminine, dieu merci il existe tout un fonds de morceaux pornographiques des mieux lotis. Dans les années cinquante l'on assistera au retour du refoulé culpabilisateur, je suis triste j'ai trompé ma femme. Remarquez dans la vie il n'y a pas que le sexe, il y a aussi la drogue. Je vous rassure, les vedettes country ne sont pas restées insensibles aux séduction de la benzédrine. Et autres dérivés.

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Un dernier petit chapitre pour nous rassurer tout à fait. En 1961 Spade Cooley le roi du western swing force sa fille à le regarder tuer – lentement mais sûrement – sa femme qui le trompait... Nous sommes soulagés par ce merveilleux exemple. Tout comme le rock'n'roll, la country music charrie son lot de violence...

BLACK AND WHITE

Retour à la case départ. Ménestrel et Black Face. Durant tout le dix-neuvième siècle le violon est l'instrument roi. L'on retrouve dès 1737 la mention d'esclaves noirs jouant de l'instrument. L'on entend le roi de l'orchestre symphonique sur les premiers disques de blues, de Charlie Patton à Muddy Watters. De même les premiers groupes de jazz privilégient le violon avant le banjo et la trompette.

Ce sont les prédicateurs noirs qui firent reculer l'emprise du violon. Le jeu de l'archet sur le corps hanché et les miaulements obtenus devaient leur rappeler le pêché de chair, c'est pour cela que l'on commença par utiliser dans la seconde moitié du dix-neuvième siècle la guitare dite hawaïenne dont on frotte les cordes avec un peigne. C'est que les mauvaises habitudes ne se perdent pas facilement. A l'archet turgescent l'on substitua le goulot de bouteille ou le tube de métal plus discrets mais qui permettaient toutefois de reproduire les bienheureux gémissements de la femelle en rut.

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Bottleneck pour les noirs, steel guitar pour les blancs, certains jouent assis en tenant la guitare couchée à plat sur leurs genoux. De cette pratique naîtra la pedal-steel guitar si caractéristique du son d'une certaine country grand public. Au début blues et country marchent ensemble, pas vraiment main dans la main, mais l'on s'inspire les uns et les autres et le hasard et la nécessité font qu'un chanteur blanc comme Al Dexter peut se faire accompagner par des noirs. Mais il ne faut pas exagérer, un jour de grande cuite Bob Wills embaucha un trompettiste noir qu'il congédia le lendemain matin sitôt les vapeurs de l'alcool dissipées. L'était plus facile pour un musicien blanc d'accompagner un chanteur noir. Rappelons-nous la surprise d'Eddy Mitchell lors de sa première session en 1967 au Muscle Shoals à Memphis, tous les musicos sont des blancs. L'avait pourtant engagé les session-men les plus réputés du Rhythm and Blues, à la Otis Redding.

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Encore un chapitre sur l'industrie phonographique, du cylindre au 78 tours à la création en 1947 d'Atlantic par Herp Abramson et Ahmet Ertegun et d'Aristocrat que les frères Chess rebaptiseront de leur patronyme en 1950... Plus un retour sur Emmett Miller, ce chanteur blanc au phrasé si noir...

BILAN

Si vous ne connaissez rien au Country, ce livre vous fascinera. L'est tout de même un peu fouillis, regorge de mille anecdotes passionnantes mais est construit un peu en dépit du bon sens. Est constitué de morceaux de bravoure qui ne s'articulent pas vraiment ensemble. Nick Tosches s'y cherche plus qu'il ne trouve. Work in progress.

A sûrement ouvert lors de sa première parution en 1977 une brèche dans la représentation iconologique que les amerloques se faisaient de la country music en tant qu'institution nationale. En ce sens-là, il a vieilli car nombreux furent ceux qui s'engouffrèrent par la suite dans l'ouverture. Mais pas toujours avec la même dévotion, et par trop souvent politiquement schématiques, du style le bon blues opposé à la mauvaise country.

Vaudrait mieux s'en référer à la version de How I Love Them, Old Songs de Gene Vincent sur son dernier trente-trois tours... En trois minutes toute la poignante beauté de cette musique est exhumée et jetée à la face du monde assoupi en ses stupides certitudes.

Damie Chad

REVUES

 

PERMAFROST. N° 1

NO EXIT / TOMAHAWK / HOBOES & WOBBLIES / CARYL FEREY / ALBERTINE SARRAZIN / PLUS QUE DES MOTS / VOL A L'ETALAGE / VIRGIL FINLAY / PUSTAKA SEMESTA / Zr / 4HCI... / ROCK AGAINST POLICE / SINGE DES RUES.

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Nom de Zeus, ils nous ont piraté deux articles, ah ! les infames capitalos, ah ! les dignes représentants de la bourgeoisie qui détroussent le travailleur inorganisé, Keep Rockin' Till The Next Time victime d'une OPA boursière, détroussé de plein fouet par un Hedge Fund de rédacteurs sans scrupules, mais que font les masses, pourquoi ne sont-elles pas dans la rue en train de brûler les coupables, mais où sont passés Bakounine et Ravachol ?

Calmez-vous cher Damie Chad, ce n'est pas ce que vous croyez, ce n'est pas le Grand Capital qui vous attaque, au contraire ce sont les gentils anarchistes, les sympathiques militants, les placides autonomes, qui diffusent gratuitement et sans contrepartie le contenu de vos colonnes ( du temple ) ( du rock'n'roll ).

Diantre, vous me rassurez, peuvent prendre tout ce qu'ils veulent, même que que je vais faire l'effort de tout lire. Cent pages, un pavé parisien en quelque sorte. Couverture en sérigraphie, et pagination à l'offset. Ne mettent même pas de prix dessus. Un vrai fanzine, une philosophie du non-profit très peu libérale.

 

N'ont pas le discours policé du Grand Orient mais sont franchement orientés. Dans le bon sens. Celui de la révolte et de la colère. Des lascars qui n'aiment rien, ni les prisons, ni les cages dorées ni les délices de la propriété privée. Ecoutent de la musique peu harmonique, entre punk et rap, lisent des romans policiers très noirs et sans sucre, mirent des images pas du tout sages, se préoccupent des démarches collectives, ont le souci du social, et parlent à tout moment de réappropriation.

Z'ont tout de même quelques beaux défauts. Qui jettent un froid. Pas pour rien qu'ils s'appellent Permafrost. Piaffent d'impatience. Ne théorisent pas. Sont pour l'expérimentation. N'aiment guère ceux qui se mettent sur leur chemin. Seraient du genre à se méfier de la police, à médire de la mentalité d'ilote des braves citoyens en route pour l'abattoir de l'école de Chicago, ne même pas mine de croire à la justice de classe. Des rebelles. Du front culturel. Car la pensée doit marcher main dans la main avec l'action.

A lire. Esprit rock & roll.

BLUES MAGAZINE. N° 69

Juillet-Août-Septembre 2013.

Petit format, moins de cent pages, bien illustré, se débrouillent tout de même pour donner un aperçu de l'actualité blues nationale. Pas cent pour cent franchouillarde car ils ne ratent jamais le bluesman venu d'ailleurs qui pose ses boots sur notre sol. Ce que j'apprécie chez eux, c'est la qualité des interviews, rien à voir avec ces pensums répétitifs qui sont le lot commun de toutes les revues de hard rock aux questions et réponses tellement interchangeables que j'ai de plus en plus de mal à finir leur numéro. Un peu comme si l'expérience blues laissait subsister une plus grande part d'individualité chez des artistes qui ne sont pas métallisés à la chaîne.

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Ceci dit, j'avoue avoir surtout tripé sur le troisième et dernier volet de la trilogie : Du blues dans le Rock'n'roll en Arkansas. Après Billy Riley et Sonny Burgess, un troisième pionnier est passé au détecteur. Ronnie Hawkins, nous vous en avons parlé dans notre livraison N° 145. Contents de nous, n'avions pas fait de boulette car la recension est assez fouillée, nous y relevons la figure initiatrice de l'oncle violoniste Delmar. Heureux homme – un peu trop porté sur la bouteille mais qui inspira à lui tout seul deux de nos pionniers, son fils Dale Hawkins, immortel créateur de Suzie Q, et Ronnie. Insiste un peu sur le travail de Ronnie chez Sun en tant que musicien de session, notamment pour Johnny Cash, Charlie Rich, Conway Twitty, jamais crédité car trop jeune. Et donne le numéro Roulette 4228 pour l'enregistrement de Bo Diddley en 1959, mais cette reprise ne peut être la création originale du morceau revendiquée par Ronnie Hawkins.

Les amateurs de blues ne manqueront pas Taj Mahal qui eut son heure de gloire dans les années soixante-dix, il raconte son parcours de bluesman qui s'en fut fricoter avec ses racines africaines.

SOUL BAG. N° 211

Juillet – Août – septeembre 2013.

Muddy Waters en couverture. Superbe article de Gérard Herzhaft. Huit pages irremplaçables. La carrière et surtout la personnalité de Muddy Waters résumée avec une élégance inégalable. Chaque phrase amène son lot de connaissances. Au passage notre auteur réhabilite la figure de John Work qui accompagna ( Voir KR'TNT N° 119 ) Alan Lomax dans ses pérégrinations dans le Sud et qui fut l'irremplaçable interface entre le petit blanc curieux et la communauté noire. Est-il utile de préciser qu'en plus de ses talents de musicologue John Work était noir ? Le vilain Lomax dans un souci de gloriole toute personnelle aurait mis l'étouffoir sur le rapport de son collègue qui ne sera publié qu'en 2005, juste soixante ans de retard !

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Quatrième ou cinquième chronique du coffret The Sun Blue Box que je vois passer ces jours-ci, mais celle de Christophe Mourot est la seule à apporter quelques connaissances. Ainsi, Sam Phillips n'aurait pas arrêté du jour au lendemain d'enregistrer des bluesmen sur son label, dès sa découverte de Presley. L'ai entendu dans une interview sur une radio déclarer que c'était-là son plus grand regret. Mourot explique entre autre que ce n'est pas une partie secondaire voire négligeable du travail entrepris par Phillips. L'a autant apporté par ses techniques d'enregistrement et son intelligence de la musique populaire au blues qu' au rock, même si ce sont les frères Chess qui hériteront de ses efforts. Le gros défaut de Sam Phillips – et cela nous le rend sympathique – aurait été son manque d'appétence pour les aspects financiers de son entreprise. Ne crachait pas sur l'argent mais était tellement obsédé par la dimension artistique qu'il aurait laissé passer bien des opportunités d'enrichissement. Notre homme d'affaires n'était point avisé.

Ai abordé avec circonspection l'article suivant : Le Blues en 100 Albums. Tiens coco, on a un trou si on se faisait une petite récapitulation discographique. Peu d'investissement et ça bouffe des pages à remplir quatre numéros. Mais non, ont bossé avec sérieux, pas moins de quinze collaborateurs qui nous ont pondu une véritable histoire chronologique du blues que nous avons droit de Bessie Smith à Shemekia Copeland.

Avec ces trois contributions nous sommes devant un numéro de référence, et nous n'avons feuilleté qu'un quart du gâteau. Je vous laisse découvrir le reste et les chroniques habituelles. Pour vous mettre une dernière fois l'eau à la bouche : deux pages, extraites d'un livre à paraître à la rentrée de septembre, sur Otis Redding à Paris. Salivez !

Damie Chad.

 

 

F r o m t h e A U S T I N D A I L Y H E R A L D

 

 

Sister of Ritchie Valens to perform with DC Drifters

 

in Albert Lea Saturday

 

Published 5:29am Tuesday, June 4, 2013

 

 

The relatives of a rock ‘n’ roll pioneer will bring the music of the 1950s back to life in an area town.Bird

 

Connie Valens — the sister of Ritchie Valens — will perform with the Austin-based Denny Charnecki and the DC Drifters at Eddie Cochran Days in Albert Lea. The concert starts at 7:30 p.m. June 8 at the Marion Ross Performing Arts Center.

 

The music will be mostly music from the 1950s, including classics from Valens and Eddie Cochran performed in 50s attire.

 

I’m just thinking it would be a great, great time for anybody,” Charnecki said.

 

Charnecki said he sees Valens’ participation as a stamp of approval on the band and its performances.

 

It’s really cool,” he said.

 

This year will be the 27th Eddie Cochran Days held in honor of the Albert Lea-born musician, who died at 21 of a car accident in 1960. Ritchie Valens also died young at age 17 in a plane crash with Buddy Holly in Iowa at 17 in 1959.

 

According to Charnecki, the Cochran and Valens families knew each other, and relatives from each attended the others’ funeral.

 

Charnecki said Connie Valens doesn’t answer many requests for performances, but she performed with Charnecki and the DC Drifters at the Surf Ballroom in February at the show marking her brother’s and Holly’s deaths.

 

Charnecki said this will be a special show for the band.

 

Every now and then, we get these special, special events,” he said.

 

Not only will the show offer a trip down memory lane to the hits of the 1950s, but Charnecki said she will also tell about being on set of the film “La Bamba.”

 

She’s got stories that are incredible about the ‘La Bamba’ movie,” he said.

 

 

ADAPTATION PROPOSEE PAR THOMER

 

 

LA SOEUR DE RITCHIE VALENS VA JOUER AVEC LES DC DRIFTERS

 

SAMEDI A ALBERT LEA

 

 

Publié dans le ''Austin Daily Herald'' le 04 juin 2013

 

 

Des proches d'un des pionniers du rock'n'roll s'apprête à redonner vie à la musique des fifties dans une ville de la région [ndtm: le Minnesota].

 

 

Connie Valens (la soeur de Ritchie Valens) accompagnera le groupe d'Austin Denny Charnecki et les DC Drifters pendant les ''Journées d'Eddie Cochran'' qui se déroulent à Albert Lea. Le concert débutera à 19h30 le 08 juin au Marion Ross Performing Arts Center.

 

Sera jouée principalement de la musique des fifties, dont des grands classiques de Valens et d'Eddie Cochran chantés en tenues d'époque.

 

« Je pense que ce sera un grand moment pour tout le monde », précise Charnecki.

 

Charnecki ajoute que le fait que Connie Valens participe à l'évènement représente pour lui l'approbation de la famille Valens sur ce que fait son groupe.

 

« C'est vraiment cool ! »

 

 

Cette année auront lieu les 27ème ''Journées d'Eddie Cochran'' en l'honneur du musicien né à Albert Lea, décédé en 1960 à l'âge de 21 ans dans un accident de voiture. Ritchie Valens également est mort jeune : d'un accident d'avion dans l'Iowa en 1959, en compagnie de Buddy Holly. Il avait 17 ans.

 

 

Selon Charnecki, les familles Valens et Cochran se connaissaient, et des membres de chaque famille ont assisté aux deux enterrements.

 

 

Connie Valens ne répond pas à énormément de demandes de spectacle, selon Charnecki, mais elle a chanté au Surf Ballroom en février dernier avec les DC Drifters, durant un show en mémoire de son frère et de Buddy Holly.

 

 

Le show à venir sera très spécial pour le groupe de Charnecki.

 

 

« De temps à autre, on fait ce genre d'évènement vraiment, vraiment spécial. »

 

 

Le concert offrira non seulement un voyage au cœur des hits des années cinquante, mais Connie parlera également de son expérience sur le plateau du film ''La Bamba''.

 

 

 

« Elle a des histoires incroyables à raconter sur le film ''La Bamba''. »

 

 

 

 

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