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31/01/2013

KR'TNT ! ¤ 129. JALLIES / POSTERS ROCK / JOSE MARTINEZ

 

KR'TNT ! ¤ 129

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

31 / 01 / 2013

 

 

THE JALLIES / POSTERS ROCK / JOSE MARTINEZ

 

 

ON THE ROAD AGAIN !

 

 

Quel est donc cet éclair vif-argent qui fonce sur la chaussée neigeuse parmi l'écume tourbillonnante des flocons et les plaines ombreuses de la Brie profonde ? Le lecteur attentionné aura reconnu la teuf-teuf mobile lancée à toute vitesse sur les routes gelées pour emmener l'équipe de choc de Keep Rockin' Till Next Time vers son premier concert de l'année, très loin, là-bas, à l'autre bout de la nuit.

 

 

Mais pourquoi tant de hâte et d'imprudence à chevaucher la tempête hivernale déchaînée ? Volent-ils vers Paris assister aux prestation des Ghost Highway, des Spunyboys et de Yan The corrupted ? Au Rock'n'Boat, au pied du zouave du Pont de l'Alma ? Que nenni, braves kr'tntreaders, ils délaissent les lumières de la ville capitale pour s'aventurer, sans une nano-seconde d'hésitation, dans les confins de l'Oise sauvage, sous les frondaisons de la froide forêt de Chantilly.

 

 

C'est que nos intrépides chevaliers-servant du rock accomplissent une mission sacrée. Tiennent une promesse solennelle, gravée en lettres de sang mémoriel sur le marbre noir de la nuit du premier décembre 2012, sur la terrasse du pub Le Be Bop, à Montereau sur Yonne... que les mécréants incrédules se rapportent à notre livraison KR'TNT 121 du 08 / 12 / 12. Bref, ils courent à leur rendez-vous, avec trois beaux brins de filles. Mesdames, Messieurs, nous avons nommé,

 

 

THE JALLIES

 

 

26 / 01 / 13 / BAR ST VINCENT /

 

60 740 / SAINT MAXIMIN

 

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Faut se rendre à l'évidence. La file de voitures stationnées le long de la rue nous indique que l'on ne sera pas les seuls à êtres venus malgré les frimas de l'hiver entendre les Jallies. La curiosité et la rumeur ont emmené la foule des grands soirs. Le bar n'arrête pas d'accueillir de nouveaux arrivants. Bikers, cats, amateurs, gens du coin, enfants qui courent partout, rires, discussions, retrouvailles, alcools, chili con carne, petits prix, concert gratuit, staff plein d'humour, règne une joyeuse ambiance sympathique, un lieu que l'on retrouve avec plaisir.

 

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Les Jallies montent sur scène. Hellboy le discjockey arrête sa musique. Le public se pousse vers l'estrade. Elles ont casé le garçon derrière elles. Dans le coin, sa contrebasse le cache déjà à moitié. L'on ne voit de lui que sa figure et sa casquette qui lui mange le visage qu'il appuie contre la tête joliment sculpté de son instrument. Ne le prenez pas pour un meuble de famille dont on aurait un peu honte et dont on n'oserait se débarrasser pour ne pas peiner Tante Edwige. Il est un peu le pilier central, la poutre maîtresse, supprimez-la et tout s'écroule. C'est qu'avec les trois sauvageonnes devant, Julios a un sacré boulot. Faudrait pas que les oiselles s'envolent trop haut. Faut de temps en temps leur tenir le caquet et leur fournir l'assise mouvante du swing. Le mouvement si perpétuel qu'il se confond avec le moteur immobile d'Aristote.

 

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Devant on en prend plein les mirettes. Savons plus où donner des yeux. Céline, silhouette gracile toute longue dans sa robe rouge, princesse énigmatique échappée d'une toile de Bernard Buffet, ses boucles qui retombent comme deux ailes de papillon énervé. Vanessa, cheveux blonds de petite fille au regard mutin, feu d'artifice de vivacité, tambour major qui tape sans faillir sur sa caisse claire, donne le rythme, l'envol et la fantaisie. Ady, lionne au sein généreux, voix rauque et griffes acérées de velours, panthère sur Gretsch aux yeux aigus comme des flèches. Si Vanessa est la fauvette joyeuse, Ady est le fauve hiératique au coup de patte mortel. Toutes trois se savent belles et fascinantes. En jouent. Juste pour s'amuser. Sans ostentation ou orgueil déplacé. Simples, naturelles. Tout au service de leur chant.

 

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Car elles chantent, et c'est pour cela qu'on les regarde. Rockabilly, mais avec touches de jump, relents de boogie, éclats de swing. Trois voix distinctes mais qui se mélangent avec une telle souplesse que la soliste devient choriste et que celle-ci prend la place de la lead-voice si adroitement que vous vous en apercevez avec un temps de retard. Plus des morceaux qu'Ady présente comme étant davantage rock'n'roll.

 

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De toutes les manières, les deux sets seront menés à train d'enfer. Et le public ne se fait pas prier pour monter dans les wagons. Applaudissements nourris à la fin de chaque morceau, participation collective aux refrains. Des reprises, mais aussi leurs propres compos. Ce sont ces dernières qui – nous donnons notre avis – doivent se retrouver sur le mini CD de présentation qu'elles comptent enregistrer dans les semaines qui viennent. D'abord parce que ces titres comme Shave your pussy – dédié aux Spunyboys, il y a des garçons qui ont de la chance – passent très bien la rampe, ensuite et surtout parce qu'autant une reprise permet d'étoffer un répertoire live, autant elle devient vite un piège une fois figée dans un disque. Trop proche de l'original, elle n'apporte rien de nouveau, trop éloignée elle attire les critiques des puristes à cheval sur les tables de la loi.

 

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Leurs versions de Be Bop a Lula et de Money Honey, un savant conglomérat ni jazz ni rock ( mais beaucoup des deux ) foutrement balancé qui emportera l'adhésion de la salle – pas étonnant que nos Jallies les reprennent puisque la première rock song est un savant démarquage de la seconde – seront-elles aussi efficaces sur un CD ? C'est que les Jallies bousculent les genres et les époques, l'on saute d'un morceau Chalerston Swing très années 20 à une adaptation de Rehab d'Amy Winehouse sans prévenir.

 

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S'installent en filles dans une musique que l'on dit taillée pour les mecs. Bousculent un peu les genres de l'intérieur. Opèrent de savants mélanges. Transgression assurée. Mais avec la grâce et la légèreté. Si intelligemment présentés que vous ne pouvez pas dire non. Il y a de la finesse dans leur façon de doser les ingrédients. Peuvent reprendre du Presley comme des Stray Cats, dans les deux cas elles essaient de garder l'esprit du morceau sans se demander si elles sont les héritières d'une pureté originelle à conserver dans le formol des traditions ou les adeptes forcenées d'une modernité destructrice. Se contentent d'être hommagiales sans se poser trop de questions. Des fonceuses qui tirent toujours leur épingle du jeu. Qu'elles vous plantent dans votre coeur de rocker comme s'il était un vulgaire coussinet.

 

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Leurs interprétations sont à l'image de leur pratique instrumentale. Chacune a sa préférence. Mais elles sont sans cesse dans le don et l'échange. Guitares et baguettes passent de main en main, à tous les morceaux l'on assiste à une redistribution des rôles. Pas de pose machiste à la guitar hero qui s'accroche solitairement à son manche. Elles ne jouent pas, elles s'amusent. Que dis-je ? Elles musent. Et nous inspirent.

 

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Un petit défaut. Qui est passé inaperçu dans la fièvre du set. Vu les progrès qu'elles ont fait en moins de deux mois, suis sûr qu'elles vont le corriger en vitesse. Et puis si on ne dit que des compliments aux filles, elles deviennent vite insupportables. Les guitares sont utilisées comme des rythmiques. Jeu pas assez marqué. Les riffs mériteraient davantage d'ampleur. S'il existe une continuité rock entre le rockabilly et le hard rock elle réside dans la distinction du riff. Est mis en avant. Se découpe selon le pointillé des notes. C'est que les voix de nos trois coccinelles montent haut. Comme un filet aérien, sensible à la moindre brise, c'est en ces moments somptueux et harmoniques que Julios les ramène sur le plancher instable du rythme dont elles ne doivent point se départir. C'est en ces instants que devrait intervenir le riff salutaire qui ponctue et distribue en sectionnant le territoire musical.

 

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Mais voici que Vanessa, tout sourire enjôleur, tout fou rire and rolleur, vous découpe au chalumeau de sa voix rauque, de sa voix rock, et Céline qui renvoie comme giclée de balles sur blindage d'échos, ou alors c'est Ady qui nous rajoute un shoot de blues hurlé, rentre dedans et en avant la musique, poussée d'adrénaline et la salle qui chavire de bonheur. L'on batifole sec avec ces babies folles.

 

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Tout le monde était sous le charme. Le charisme mais pas l'esbroufe. Il y a le talent, mais aussi l'envie, l'entrain et le plaisir de partager. On n'a pas voulu les laisser partir. C'était trop bien. Hot and cool, in the same time. Nous ont tout de même quittés sur un dernier cadeau, le Jump, Giggles and shout, de Gene Vincent. Se sont éclatées sur les cassures rythmiques, et envolées sur les reprises survitaminées. Un gâteau fondant avec un coulis de lames de rasoir à vous rendre maboul boy. Suis sûr que si Gégêne les avait vues il les aurait embauchées comme clapper girls.

 

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Bref après un tel délice on a bien été obligé de les voir s'éloigner dans la nuit froide et inhospitalière. On aurait mieux fait de les kidnapper et de les garder rien que pour nous, mais on n'est pas comme ça, nous les rockers. On sait se tenir avec les demoiselles. De toutes les manières on a décroché un rendez-vous. Le huit février, au Saint Sauveur ( 4, rue Saint Sauveur ) à Ballainvilliers dans le 91. Ne le dites à personne. Il risque d'y avoir trop de monde.

 

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Damie Chad.

 

P.S. : Saint Vincent, Saint Maximin, Saint Sauveur, comme quoi pour écouter du bon rock'n'roll il vaut mieux se fier aux seins des Jallies qu'au Dieu de la Bible ! Tudieu, encore un blasphaime !

 

P.S. : pour les images on a fauché des photographies des anciens concerts des Jallies que l'on a fauchées sur leur facebook.

 

 

 

Attention jeunes gens. L'article qui suit n'est pas illustré par des posters sortis tout droit du bouquin lui-même. Avons pris la décision, dans le seul but d'accroître votre culture graphique, de vous donner à voir quelques encres de chine réalisées par un ami, le peintre JOSE MARTINEZ. Une infime partie de son travail, mais qui nous semble teintée d'un esprit rock-psychédélique en accord avec l'esprit de bien des oeuvres présentées dans son livre par Mick Farren et Dennis Loren. Nous vous parlerons une autre fois de JOSE MARTINEZ.

( Certaines images seront peut-être coupées au montage, mais nous vous les redonnerons in extenso dans un prochain article si nécessaire )

 

 

 

CLASSIC ROCK POSTERS

 

1952 – 2012

 

60 ANS D'AFFICHES ROCK

 

 

MICK FARREN and DENNIS LOREN

 

 

( Editions Stéphane Bachès / Octobre 2012 )

 

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Ne circulez pas, il y a à voir. C'est du lourd. D'ailleurs pour le tirer en notre noble langue françoise les Editions Stéphane Bachès sont allés à Londres chasser l'Eléphant. Ne croyez surtout pas que la fumée dans les yeux un plantigrade me regarde. Quoique avec les effets secondaires... C'est que les Editions Elephant sises à Londres semblent s'intéresser de très près aux inhalations bienfaisantes, si je m'en réfère au titre évocateur d'une de leur collection Majijuana & Medical Majijuana – mais oui doctor, je me soigne – et pour les non-fumeurs dans le rayon Pop Culture ils offrent aussi The incredibily strange history of Ectasis.

 

 

C'est un peu la jungle en folie chez Elephant avec des zèbres comme les Beatles et Jimmy Hendrix qui se promènent sur les rayons. L'on ne s'étonnera donc pas d'y retrouver Mick Faren – pour les amnésiques se reporter à notre livraison 122 du 13 / 12 / 13 – l'activiste rock par excellence que l'on aperçoit depuis quarante ans dans tous les mauvais coups concoctées au sein de ces engeances malsaines engendrées par l'apparition de cette musique diabolique.

 

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Chez Stéphane Bachès l'on s'est amusé à refaire la couverture. Z'ont aussi dû embaucher Stan Cuestas pour les traductions. Pas un inconnu ce Stan Cuestas, auteur, chanteur, traducteur... spécialiste de la chanson française et s'intéressant à des tas d'artistes « rock » dont on ne parle jamais dans KR'TNT. Premièrement parce que l'on ne peut pas causer de tout, deuxièmement, et surtout, parce que l'on ne les aime pas. Du tout.

 

 

STORY OF THE ROCKERS

 

 

Pendant longtemps le rock a été une affaire terriblement simple. Tout le monde s'en foutait. Lorsque vous aviez réussi à réunir dix quarante-cinq tours et trois articles découpés dans la presse, vous étiez le roi de la ville. Mais cinquante ans plus tard les choses ont bien changé. Le paysage hillbillique originel et paradisiaque s'est transformé en zone industrielle. Les révolutions technologiques se sont succédées. L'électrification à outrance des années soixante, puis la frappe à grande échelle des métaux lourds dans les seventies ont donné naissance à des milliers de petites entreprises individuelles dont certaines sont devenues des trusts conglomériques. Diversifications et multiplication par 10 000 de la production... Le rock est partout, il est enseigné dans les universités et les artistes de toutes tendances s'en sont emparé... Ont été précédés et suivis par les marchands du temple...

 

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Aujourd'hui les fameux serpents de Jim Morrison se mordent la queue. Sucent aussi la vôtre. Sont trop gras, trop gros, pour être encore méchants. A plus de soixante balais, sponsorisé par la génération des baby-boomers qui l'ont reçu dans leurs premiers biberons, le rock, tel un vieux combattant rescapé de la dernière guerre indienne, n'en finit plus de raconter sa légende. L'on enchaîne les rééditions de disques – quand elles ne sont pas jubilatoires toute leur qualité documentaire réside en leur historicité. C'est bien connu, le client qui passe à la caisse enregistreuse finit par l'avoir dans le cul.

 

 

Faut pas rigoler. Faut transmettre l'héritage aux jeunes. Et chacun de taper sur son ordinateur ses souvenirs pieux. L'on racle les fonds de tiroirs et l'on révise, une dernière fois, les généalogies. Travail de tricheur. Ou d'orpailleur. Les choses ne se sont jamais passées exactement comme on vous le jure. C'était beaucoup plus chaud que les repros sur papier glacé. L'on essaie de faire cadrer notre reflet distordu dans le miroir. Qui réfléchit de son côté. Toujours se méfier des intellectuels. Sont moins bêtes que la moyenne. Plus vicieux, si vous préférez.

 

 

AFFICHES

 

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Donc une nouvelle histoire du rock'n'roll. Mais sans rentrer dans le saint des saints de la salle de concert. L'on reste devant à bader les affiches. Un beau découpage en huit parties. Tous styles appréhendés. N'aurais pas fait mieux. Signe d'intelligence et de grande réflexion avec en plus une grande adéquation entre le titre et les images choisies. J'aurais bien aimé me transformer en petite souris d'ordinateur pour assister aux discussions et aux échanges d'e-mails entre Mick Faren et Dennis Loren qui fut et qui reste le chef de file du poster psychédélique dans les années soixante à San Francisco.

 

 

LES DEBUTS DU R&B, DU ROCK'N'ROLL,

 

ET DE LA SOUL

 

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Peu de pages. Les affiches des pionniers et ceux qui les précédèrent ont leur charme. Rustique dirons-nous. Ce sont de simples affiches informatives. Pas des oeuvres d'art. Du lettrage avant tout. Sans fioritures. Le jaune et le rouge – couleurs voyantes par excellence dominent. Fonds blancs ou noirs. Photos d'identité des artistes format timbre-poste, parfois l'on se contente de la tête seule découpée, décapitée. Seul Elvis a droit à son entière silhouette, mais il est vrai qu'il est le roi.

 

 

Dès 1956 les Anglais emboîtent le pas avec Tommy Steele et toute l'écurie Parnes. Imitation des américains. Mais avec une touche de légèreté et de fluidité que l'on ne remarque pas chez les Amerloques. L'on s'apitoiera sur l'affiche du concert de Jerry Lee Lewis. La plus laide de toutes. Mais Jerry Lee ne sera pas sur la scène de Doncaster ce 17 juin 1958, obligé de rentrer chez lui lorsque les rosbeefs indignés auront appris qu'il était marié avec sa jeune cousine de treize ans.

 

 

BRITISH BEAT, SURF, BLUES & FOLK

 

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Ca ne change guère au début de la suprématie anglaise. Les Beatles aère leur rock'n'roll, le rendant plus policé, plus festif, mais faudra attendre la vague Mods et les Who pour bousculer les habitudes. Pour le moment le seul changement provient du nom de certains groupes qui à lui tout seul mange le tiers de l'affiche. C'est que l'organisation des concerts est en train de se modifier. Ce n'est plus jusqu'à une douzaine d'artistes qui se suivent à la queue leu leu après avoir entonné une à six chansons. Les groupes ont désormais assez de matériel et d'expériences pour tenir plus longtemps. Les affiches vont s'individualiser et très logiquement leurs concepteurs vont s'essayer à traduire graphiquement l'identité musicale de la formation à présenter. La photographie prend de plus en plus d'espace mais c'est surtout toute l'histoire de la peinture moderne de Toulouse-Lautrec à Vasarely qui pointe le bout de son nez. De l'affiche on passe à l'image rétinienne.

 

 

ROCK PSYCHEDELIQUE

 

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Mais l'on a encore rien vu. Brusquement, entre 1965 et 1972, l'affiche rock cesse d'être une affiche. Elle devient une oeuvre d'art. A part entière. La plus belle partie du livre. San Francisco. L'été de l'amour. Les psychotropes. La révolution hippie. Soudainement un élan de créativité emporte tout sur son passage. Temps utopiques. Chacun est un artiste qui a le devoir de ne pas s'ignorer. Des inconnus pondent des images sublimes. Chacun veut faire mieux.

 

 

La musique n'est plus un alignement de sons. Elle est sagesse et philosophie. Elle conduit votre âme, votre crayon et votre pinceau là où ils auraient cru ne jamais pouvoir aller. Les lettres enflent et se gondolent. Elles ne veulent plus rien dire. Elles se contentent d'étaler les méplats esthétiques de leurs contours opulents. Dessinées pour être vues et non pour être lues. La forme prend le pas sur le sens. American Beauty se confond avec American Reality. La beauté du monde l'emporte sur sa triste réalité. Les bulles du rêve englobent l'existence toute entière.

 

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Certains n'en perdent pas pour autant le sens des réalités. Un homme comme Bill Graham qui manage la célèbre salle de concert du Filmore East a compris qu'une superbe affiche attire le public. Il saura laisser venir à lui de jeunes artistes prometteurs. Si certains désirent agir en lonesome cow-boy beaucoup se regroupent en collectif comme la fameuse Family Dog qui leur apporte réconfort et émulation. C'est l'âge d'or de l'affiche rock.

 

 

ROCK GRAND PUBLIC, PROGRESSIF,

 

ET METAL

 

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Les riches heures de la musique rock. Efflorescence de groupes. Le rock se distille. Il devient précieux. Satisfait il se regarde le nombril. Il progresse clament les uns. En fait il s'éloigne de lui-même, mais il ne s'en aperçoit pas. Une aubaine pour les concepteurs d'affiches. Chaque groupe possède son univers. Pratiquement son peintre préféré. Relève anglaise. L'on ne rejette pas l'apport californien mais on l'humanise en y intégrant collection d'objets concrets. Ou de personnages aussi délicieusement pervers que les ombres chinoises d'un conte de Lewis Carroll, mais toujours un pied dans l'opacité terne des existences terrestres. Les ailes multicolores du papillon si vous voulez. Mais le corps noirâtre de l'insecte aussi. Comme la prémonition futuriste de lendemains inquiétants qui ne chanteront pas. Plus on avance vers la seconde moitié de la décennie les nuances du songe s'évaporent. Arêtes froides et métalliques d'architectures futures inquiétantes et menaçantes.

 

 

PUNK ET NEW WAWE

 

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Le rêve s'est évanoui. La crise est là. Souterraine pour beaucoup. Le côté arty est délibérément jeté aux poubelles. Retour infantile à la bande dessinée. Régression esthétique. Mieux vaut se taire que proférer des mensonges mielleux. L'on bâillonne la reine et on lui bande la vue. Plus personne ne veut voir la réalité par ses yeux. Les punks ne mettent pas d'adoucissants dans la machine à rendre les mensonges plus blancs. Retour à l'enfance du rock. Les grosses lettres que l'on découpe dans les journaux. Car l'on ne chante plus, on exerce l'art du chantage. La grande escroquerie du rock'n'roll. Tout est dit. Visages de goules agressives sur les affiches placardées sur les murs ont l'air de vous attendre pour vous mordre. Sinon au mieux silhouettes fantomatiques qui se dressent toutes pâles comme déjà grignotées par le néant.

 

 

HIP-HOP & DANCE

 

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Des débuts difficiles. Des affiches noires et blanches. Peu de dessin. Puis les couleurs noires, marron et brunes qui prédominent comme s'il fallait revendiquer une identité tribale dans les quartiers pauvres de Londres. Dans un deuxième temps le hip-hop ramène les couleurs de l'arc-en-ciel. Joie de vivre, exubérance de certains dessins et emprunts à tous les mouvements qui ont précédé. Le grand mix.

 

 

ROCK ALTERNATIF, HEAVY METAL,

 

TRASH, GRUNGE, GOTH, & INDé

 

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1980 – 2000. Tout se mêle et s'entremêle. Les mouvements se suivent et ne cherchent pas à se doter d'un code graphique. L'habitude est prise de se servir dans les placards des prédécesseurs. Chacun prend ce qui lui plait. Point de galvaudage. L'on refait. L'on tient compte des leçons. L'on refuse la parodie. Du sérieux. L'on cherche l'inspiration mais l'on ne copie pas. L'on ne triche pas, l'on ne pille pas. L'on puise des éléments de langage un peu partout mais l'on essaie de parler sa propre langue. Faren et Loren n'hésitent pas à parler d'un second âge d'or. Nous n'irons pas plus loin que le vermeil.

 

 

L'ERE CONTEMPORAINE

 

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Retour à la pleine réalité de notre monde. Retour à l'objet. Travesti. Etiqueté et momifié lorsque la pub impose ses représentations. Sinon l'on emprunte à la bande dessinée. L'on ne cherche pas le scénario signifiant mais l'image seule. Comique ou énigmatique. Et puis retour à un certain classicisme. L'image représente l'objet dessiné. Tout simplement. Mais avec expressivité. L'on recherche l'effet. Surprise et approbation. L'artiste veut qu'on le remarque. Clin d'oeil appuyé.

 

 

ET LE ROCK DANS TOUT CELA ?

 

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Force du merchandising oblige. Les annonces de concert sur le net. L'affiche est inutile. On ne la colle plus sur les murs comme oiseau d'annonce nouvelle. On vous la vend à la fin du concert. L'habitude de consommer est si forte que la musique ressentie ne suffit plus. Faut encore un objet contondant pour se raccrocher à la fugacité des deux heures du spectacle déjà passées. Vous pouvez aussi commander en cliquant directement sur les sites adéquats. Source de revenus pour les plasticiens de tous styles... Ce qui m'a le plus étonné en feuilletant ce très beau livre c'est que plus les années passent plus il apparaît clairement que le rock n'est qu'un prétexte au talent des artistes.

 

 

Faut passer par la médiation du chanteur pour retrouver la dimension rock de toutes ces affiches que l'on ne perçoit plus comme des affiches qu'elles ne sont plus mais comme des oeuvres d'art, voire des reproduction de tableaux, qu'elles sont devenues. Comme si le rock n'était pas encore muséifiable. S'arrête à la porte, mais il s'interdit d'entrer. Preuve qu'il garde encore de sa puissance et qu'il n'est pas tout à fait prêt à se couler sagement dans les petites cases colorées.

 

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Repart dans la rue. C'est seulement du rock'n'roll. Mais c'est pour cela que nous l'aimons.

 

 

Damie Chad.

 

45 TOURS ROCK

 

 

HERVE BOURHIS

 

 

( Dargaud / Novembre 2012 )

 

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Hervé Bourhis, le nom ne me disait rien. J'ai ouvert l'album au hasard, en plein milieu. Après l'éblouissance des Classic Posters Rock que je venais de feuilleter, ces petits croquis rapidement exécutés aux coloriages hâtifs paraissaient pour le moins rudimentaires. J'allais reposer, quand en soulevant la couverture, j'ai aperçu en première page la bouille de jeune Gene Vincent en coin de pochette. Pouvais plus ne pas prendre. Un individu qui pose le Screamin Kid en début de son bouquin mérite respect et intérêt. L'ai acheté sur le champ. Entre parenthèses, pas vraiment cher, onze euros.

 

 

Plus tard quand j'ai commencé à lire, ça m'est revenu. Le dessin me rappelait quelque chose. Mais oui bouffi, j'ai déjà un truc de ce mec, le gros livre rouge et carré qui raconte l'histoire du rock en bande dessinée – ça s'appelle Le Petit Livre Rock - que l'on m'avait offert – il existe encore des bienfaiteurs de l'Humanité – et que je n'ai jamais eu l'idée de chroniquer. Pas mal fait du tout. Tout comme ce dernier. Et qui trahit une bonne connaissance du rock. Assez étonnante d'ailleurs pour un gars qui est nés en 1974. L'on jugerait qu'il a vécu les successives métamorphoses du monstre en direct depuis le début des années soixante.

 

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Un passionné. Sur son site perso, l'espace réservé à l'exposition des 500 pochettes des plus prestigieuses galettes de rock est plus important que celui dans lequel il présente ses propres oeuvres ! Oui, mais sur le net il ne met que la photo de la pochette et n'en dit pas un mot de plus. Alors que là, il s'est fait plaisir.

 

 

D'abord il recrée les pochettes, à l'identique mais avec son cachet à lui. Y met sa patte, un peu tremblée et pseudo-maladroite car il ne copie pas il restitue un équivalent bouhrisien, sa vision intérieure. Puis il se laisse emporter par sa fougue. Un petit texte explicatif rempli d'humour incisif ou de sous-entendus mastodontes. Une bande-dessinée en bas de page, manière de jeter un clin d'oeil imagé à la vie de l'idole susnommée, une petite séquence C'est quoi le rapport ? destinée à nous en apprendre plus, exemple quand c'est autour de Wanda Jackson il en profite pour remémorer la lointaine figure de Lavern Baker. Excellente façon d'ouvrir une deuxième porte dans le labyrinthe rock.

 

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Parfaite introduction pour les néophytes qui s'aventureraient dans le continent rock. Un hit en cache toujours un autre. Cascade de découvertes garanties. Même que parfois il triche un peu. Selon le titre il ne devrait parler que de singles, mais il déborde souvent sur les grands formats. Personne ne s'en plaint. Véritable histoire du rock. Dans le désordre avec des retours vers le futur et des prospections dans le passé. L'ordre chronologique n'est pas son fort. A privilégié l'alphabet. Pas celui des chanteurs. Ce serait trop facile. Celui des titres. Une super idée.

 

 

D'abord cela vous fait tourner les pages à toute vitesse pour retrouver l'idole éternelle de votre coeur, ensuite c'est plus que bien vu. Un grand morceau de rock n'appartient pas par essence à son créateur. Le titre transcende l'interprète. Même si celui-ci se l'est approprié pour l'éternité. Qui pourrait chanter Like a Rolling Stone, mieux que Dylan ? En ai écouté des dizaines de versions, aucune n'égale celle de Bobby, mais le morceau a traversé tant de milliers de coeurs et de cerveau qu'elle ne lui appartient plus. Un bon titre de rock est une entité à part entière.

 

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Très bon choix. Hervé Bourhis a créé un fabuleux jukebox. L'on en oublierait presque qu'il manque la bande son. Indéniablement souveraine. Nécessairement obligatoire. Mais l'on parvient à s'en passer. Ca chante déjà dans notre tête et l'on est vite pris par le jeu des vignettes biscornues qui nous emportent dans un jeu de piste très rock'n'roll. Pouvez chipoter, Big Star méritait-il sa place ? Plus que Neil Young certainement, mais moins qu'Eddie Cochran. L'est vrai que le premier guitar héros de notre favorite musique est cité sur la page Elvis, mais enfin n'est-ce pas une hérésie ?

 

 

Les pionniers, le garage, le punk, l'essentiel du glam et du mod forment l'ossature de la sélection. N'y a pas qu'eux, mais Bourhis a su avantager les virus toxiques par rapport aux brontosaures les plus massifs. Impertinence kamikase et espièglerie suicidaire, l'esprit du rock est respecté. En plus il a – comme nous, voir notre livraison 63 du 08 / 09 / 11 – flashé sur le Do the Bop-Bop de Maynard Horlick présenté par Baru dans son livre CD Rock'n'Roll antédiluvien, un signe qui ne trompe pas.

 

 

Damie Chad.

 

 

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