15/03/2012
KR'TNT ! ¤ 89. SHARON SHEELEY / EDDIE COCHRAN
KR'TNT ! ¤ 89
KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME
A ROCK LIT PRODUCTION
15 / 03 / 2012
SUMMERTIME BLUES
A TRUE ROCK'N'ROLL ADVENTURE WITH
EDDIE COCHRAN
SHARON SHEELEY
Un banal accident d'automobile. Mais c'est la tragédie fondatrice du rock'n'roll européen. Que ne s'est-il dit ou écrit sur la disparition d'Eddie Cochran depuis plus d'un demi-siècle ? Pourtant à y réfléchir les faits sont d'une extrême limpidité. Un taxi déboulant un peu trop rapidement sur un virage un peu trop recourbé, et une des plus grandes voix du rock'n'roll qui s'éteint à tout jamais. Pas de quoi en faire un drame. D'autant que beaucoup, pour ne pas dire la plupart, des protagonistes de l'histoire, un par un, plus ou moins discrètement, s'en sont allés à leur tour se coucher sous les dalles funéraires de la grande faucheuse.
Oui mais voilà, la mort d'Eddie Cochran n'en finit pas à chaque nouvelle génération qui s'en vient prendre sa place sur le devant de la scène du monde d'étendre ses ravages psychologiques. Eddie qui est parti avant tout le monde – enfin presque – nous a fait la grâce de ne pas être en âge d'entrer dans le fameux club des 27. L'on se doit d'être toujours seul face à la mort. La malédiction des rockers n'est qu'un mythe. Ce qui tombe très bien puisque nous, les fans nécrophiles que nous sommes, nous nous nourrissons exclusivement de mythes.
Hélas le phénix immortel de nos rêves ne renaît pas toujours de ses flammes destructrices et c'est pour cela que nous éprouvons sans cesse le désir et le besoin de fouiller les cendres froides d'un passé qui nous échappe …
LE CAS SHEELEY
C'est en 2002 que Sharon Sheeley consentit dans son livre Summertime Blues à lever le voile sur ses rapports les plus intimes avec Eddie Cochran. Quoique déjà en août 1960 elle donnât une première version de ses relations avec son Eddie dans une longue interview parue dans le magazine Photoplay... Le problème avec Sharon Sheeley, c'est qu'elle est un témoin irrécusable. Non pas parce qu'elle se trouvait avec Cochran dans la fatale voiture, non pas parce que nombreux sont les témoignages des tiers, ou mêmes photographiques qui nous la, présentent durant de longs mois aux côtés d'Eddie, car il est facile à un esprit averti d'interpréter cela à la lumière de personnelles investigations, mais pour sa contribution à l'un des standards les plus importants de l'histoire du rock'n'roll. Tout nouveau fan d'Eddie Cochran qui tombe par hasard pour la première fois sur un de ses disques ne manque pas de relever la signature de Sharon Sheeley au bas d'un de ses plus morceaux. La voix d'Eddie, la guitare d'Eddie certes, mais surtout cette ponctuation rythmique destructrice, cette batterie de feu, ce riff percussif ravageur, sur lequel s'élèvent toute la puissance de l'orchestration et la subtilité rageuse du chant. Le diamant de la couronne de la reine.
Avec Somethin Else, Sheeley peut se vanter d'avoir jeté à la face de tout prétendant à une quelconque appropriation admirative de l'oeuvre de Cochran un indubitable certificat d'authenticité rock'n'roll. A un strict niveau musical Sharon Sheeley peut se prévaloir du titre de Mme Cochran, mais quant au reste...
SWEET LITTLE SIXTEEN
Sharon Sheeley se raconte, en cent quarante pages. Mais ne se livre pas. Faut apprendre à lire entre les lignes. Ne jamais céder à son charme, tout ce qu'elle dit est si vivement raconté – elle possède à la perfection l'art de piquer votre curiosité - que vous vous hâtez de lire la suite. C'est à la fin du chapitre que vous vous apercevez qu'elle a tu l'essentiel de ce que vous aimeriez savoir. Avec Sharon, vous êtes au plus près des stars. Et attention, pas de n'importe lesquelles ! Mais jamais dans leur intimité. Ne nous retranchons point derrière l'excuse du puritanisme américain. A plusieurs reprises Sharon, d'origine irlandaise, tout comme Eddie, se prévaut de sa foi catholique. Pas besoin d'être hypocrite quand on est sûre qu'en bout de course le Dieu qui vous aime vous pardonnera vos errances. Peut-être que Sharon Sheeley fait tout simplement confiance à l'intelligence de son lecteur !
Certains êtres naissent à de meilleures époques que d'autres. Sharon Sheeley a cette chance incroyable d'avoir seize ans en 1956 ! 1956 – 1960, l'âge d'or ( grand public ) du rock'n'roll américain ! Nous pourrions chichiter et regretter la période 1954-1956 de gestation germinatoire mais si Sharon arrive un peu après la bataille, elle ne rate pas les folles années de triomphe. Emportée par le tourbillon elle ne s'apercevra qu'à la mort d'Eddie que le reflux avait commencé dès 1958. Avec le départ de Presley pour le service militaire.
Reste à comprendre comment dès 1956, Sharon Sheeley, petite inconnue surgie de nulle part se retrouve dans l'entourage immédiat d'Elvis. Pas toute seule puisqu'elle emmène de surcroît avec elle sa petite soeur et sa meilleure amie Hope. Etrange que la mère les laisse batifoler dans la chambre du King sans y trouver rien à redire. Elle leur prête même sa voiture ! Le coup des fans transies et innocentes qui se faufilent dans l'hôtel dans l'espoir insensé de rencontrer leur idole, et qui parviennent à leurs fins sans trop de difficulté, est difficile à admettre.
Faut imaginer que maman Sheeley n'est pas totalement opposée à ce genre de relations. N'était apparemment pas du genre à pousser sa fille à devenir sténo-dactylo. A vingt ans la chère petite est incapable de préparer une tasse de café, vu l'adorable minois de sa brunette Mme Sheeley a dû rêver d'un avenir plus prometteur que serveuse dans un milk-bar... plutôt mannequin, actrice de cinéma ou tout autre casting de rêve du même genre. Nous sommes à Los Angeles et à Hollywood et Elvis est en train d'entamer la longue série de tournages de ses films – il travaille sur les dernières scènes du Cavalier du crépuscule... Quand on sait que plus tard à l'armée Elvis sera horrifié de trouver une photo dénudée plus que suggestive de la camarade Hope dans un magazine, l'on en vient à douter de la pureté de la naïveté de nos jeunes filles...
Rassurez-vous ! Si l'on en croit Sharon il ne se serait rien passé de répréhensible. Elvis est un garçon charmant. L'officielle petite amie du King de l'époque Dottie Harmony n'a t-elle pas expliqué, bien plus tard, en une postérieure interview, que la nuit, elle et le King passaient le temps à lire et commenter des passages de la Bible. Peut-être Le cantique des cantiques avec exercices spirituels à l'appui ! Ce n'est pas que nous trouverions le moindre reproche à adresser à Elvis, Dottie et Sharon – ils ont bien eu raison de batifoler à leur guise, et à leur place nous en ferions autant – mais c'est que pour la suite des aventures de Sharon qui nous préoccupent, cela sonne comme un avertissement à ne pas dédaigner : les témoignages de Sharon sans être sujet à caution, sont à réinterpréter.
MILIEU ROCK'N'ROLL
Introduite dans l'entourage de Presley, elle découvre Tommy Sands patronné par le Colonel Parker, et qui enregistrera chez Capitol une demi-douzaine de morceaux avec les Blue Caps comme backing group. Faut-il s'étonner si dans le même chapitre Sharon rencontre pour la première fois Gene Vincent – gentil mais déjà porté sur l'alcool – et son manager qu'elle surnommera Jerry-dents-de-lapin. Ni plus ni moins qu'un certain Jerry Capehart surtout connu de nos jours comme le producteur d' – voyez comme le monde est petit – Eddie Cochran.
Mais avant d'en arriver à Eddie, Sheeley connaîtra Ricky Nelson pour qui elle écrira son premier succès Poor Little Fool qui finira N° 1 au Billboard mais que Ricky n'aimait pas du tout... Ricky lui présentera les Everly Brothers. A mots couverts Sharon laisse entendre qu'une plus que tendre amitié la lia à Don... c'est d'ailleurs en rendant visite à Don dans sa chambre d'hôtel en compagnie de son frère Phil qu'elle se trouve nez à nez avec le plus beau garçon qu'elle n'ait jamais vu. Plus beau que l'étalon-or Elvis. Eddie Cochran ! Qui ne manifestera aucun intérêt envers sa personne, passant son temps à dégainer et rengainer un superbe colt de collection qu'il venait d'acquérir.
Microcosme du rock ! Malgré l'immensité du territoire, nos idoles se côtoient à longueur d'année. Toujours par mots et par vaux ils tournent ensemble et n'en finissent pas de se croiser les uns les autres. Si Eddie Cochran sera terriblement affecté par la mort de Buddy Holly, c'est qu'il s'en sent responsable. C'est lui qui insistera pour que Holly qui vient de se marier l'accompagne dans sa tournée. Ironie du sort, Liberty, sa maison de disques, obligera Cochran à annuler la veille du premier show sa participation, l'on vient de lui dégoter un passage à l'Ed Sullivan Show. Qui finalement sera reporté de trois semaines. Entretemps l'avion de Buddy se sera crashé...
L'on a souvent accusé Liberty d'inconséquence pour ne pas avoir tout de suite sorti Three Stars le morceau qu'Eddie écrivit au lendemain de la disparition de Buddy Holly, de Ritchie Valens et de Big Bopper. Sharon nous apporte l'explication de l'inconséquente attitude de la Major. C'est Eddie qui interdit sa sortie sur le marché refusant de faire de l'argent sur la mort de ses amis. De même, malgré les hurlements de Capehart, Eddie ne participa pas à l'Ed Sullivan Show. La fêlure que l'on sent grandir entre Jerry et Eddie tout au long de l'année 59 prend vraisemblablement naissance en ces instants. Capehart commençait à entrevoir un plan de carrière pour son protégé. Un deuxième Colonel Parker était en train de naître. Mais le poulain Cochran était apparemment moins docile que le foal Elvis. Lorsque Gene Vincent proposera à Eddie de s'inclure dans sa nouvelle tournée anglaise, l'on comprend pourquoi le créateur de C'mon Everybody s'empresse d'accepter. L'éloignement est le début de l'indépendance. Tout le restant de sa vie Vincent se mordra les doigts de son amicale invitation.
L'on sent une grande tendresse de Sharon pour Buddy. La rock star était d'une timidité maladive avec les filles. Sans moquerie aucune elle laisse entendre que son premier rendez-vous avec Maria Elena fut son premier avec une fille et qu'il la demanda en mariage dès le second. Elle remet aussi les pendules à l'heure : si Buddy Holly fut le seul des pionniers à avoir deux contrats, l'un sous son propre nom et l'autre sous celui de Buddy Holly and the Crickets, ce n'était pas parce qu'il était deux fois meilleurs que les autres mais parce que son manager avait pris la décision de manager deux artistes pour le prix d'un, Buddy Holly d'un côté, The Crickets de l'autre. D'une pierre deux coups. De salaud. La séparation ne se fit pas sans anicroche ni rancoeur. Jerry Allison et Joe Maudlin, comprenant qu'ils étaient victimes d'un coup monté décidèrent de faire la paix avec Buddy et de repartir sur des bases clarifiées. N'en pouvant plus, impatients, ils décident de rejoindre Buddy au plus vite. Ce trois février, ils attendent Buddy à l'hôtel de la tournée... c'est un flash radio qui leur apprend le fatal accident.
Après la mort de Ritchie Valens et de Buddy Holly, Allison et Maudlin tâchèrent d'embaucher un certain Trini Lopez de Dallas comme chanteur. Qu'en fin de compte ils jugèrent ne pas faire l'affaire. Mais nous n'allons pas passer un par un tous les chanteurs que Sharon Sheeley a côtoyés de loin ou de ( très ) près. Mention spéciale pour ce PJ Proby à qui elle fournit et son nom de scène et un job des plus affriolants : enregistrer les démos des chansons que l'on présentait à Elvis pour qu'il fasse ses choix. Beaucoup qui ont connu Proby en ses débuts, avant que la folie ne le gagne doucement mais sûrement, estiment qu'il était aussi bon que Presley. Nous n'irons pas jusque là, mais le personnage vaut le détour. Regrettons aussi le peu de mots qu'elle consacre aux frères Burnette.
EDDIE AND SHARON
Le moins que l'on puisse dire c'est que Sharon ne fit pas sur Eddie le coup du coup de foudre. Au bout d'un an, Sharon n'était pas plus avancée qu'au premier jour. Elle y mit pourtant de la bonne volonté, s'arrangeant pour être toujours là où il était, s'incrustant à ses séances d'enregistrements, s'immisçant dans son entourage, faisant peu à peu partie des meubles mais ne lui causant pas plus d'effet que le bahut Louis quinze de votre grand-mère sur vos érections printanières.
Non pas insignifiante, mais transparente, Eddie ne lui adressant jamais la parole, notre Sharon se morfond et se désespère. Il y eut bien un soir où, Bob Cochran ne pouvant raccompagner son frère chez lui – Eddie détestait conduire – Sharon se retrouva au côté Eddie qui se montra particulièrement attentionné. Mais le lendemain il ne fit aucune allusion à l'incident. Si notable fut-il dans la vie de notre héroïne !
For a great date, c'est une date dont il est facile de se souvenir. C'est entre le soir du 31 décembre 1958 et les premières heures de premier janvier 1959 qu'Eddie avoua à Sharon qu'il l'aimait. Comme je n'étais pas sous le canapé, je ne puis certifier l'authenticité des faits. Mais Eddie posa ses conditions : leur engagement devait rester secret et dans les semaines qui suivirent il mit le holà à l'envahissante présence de sa fiancée, il lui interdit de le suivre en tournée et lui expliqua qu'il devait passer beaucoup de temps avec sa guitare... Un jour où elle s'accrochait un peu trop à ses basques, il la fit descendre de sa voiture et la planta au milieu de la route... Une autre fois qu'elle s'était obstinée à l'accompagner malgré lui, il refusa de s'asseoir à côté d'elle dans l'avion pour finalement lui faire parvenir dans le but de quémander son pardon un petit cadeau. La curiosité des passagers fut satisfaite lorsqu'elle ouvrit le modeste paquet : un tampax taché de rouge ! Peut-être qu'en partant en tournée en Angleterre avec son ami Gene Vincent, Eddie voulait-il fuir quelqu'un d'autre que Jerry Capehart.
LA DERNIERE TOURNEE
Nous ne reviendrons pas sur l'importance musicale de cette tournée qui fut fondatrice pour le rock anglais. Toute une génération de musiciens apprit le métier avec cette véritable master class continue que furent les shows d'Eddie et de Gene. Nos deux compères furent vraisemblablement les seuls à ne pas partager une telle vision idyllique. Certes le succès remporté auprès du public et l'admiration que leur prodiguaient leurs homologues britanniques leur réchauffaient le coeur. Mais le climat brumeux de l'hiver calédonien n'est en rien comparable avec la mansuétude du soleil californien.
Au choc climatique s'ajouta un autre civilisationnel : l'Angleterre n'était pas un pays de cocagne. Elle se relevait péniblement de la guerre. Pour nos deux américains, qu'ils étaient loin les néons de l'Amérique et ses bars, ses cafés, ses drive-in ouverts toute une longue partie de la nuit, les hamburgers dégoulinant de graisse, les glaces gorgées de sucre, les alcools forts à portée de main ! Toute cette profusion procurée par l'american way of life commençait à leur manquer. D'autant plus que devant l'enthousiasme général la liste des concerts ne cessaient de s'allonger...
Nous ne saurons jamais si un soir de déprime cafardeuse et nostalgique Eddie a demandé à Sharon de venir le rejoindre sur sa tournée. Sharon rajoute même qu'il lui promet le mariage lors de leur retour au pays natal. La voici qui débarque toute pimpante... Elle raconte comment elle doit brader l'interdiction de sa mère qui refuse de lui payer le voyage, mais elle obtient la permission de la grand-mère et ses premières royalties lui serviront à acheter le billet d'avion.
Il court une autre version, celle d'un Jerry Capehart qui n'aurait pas eu envie que loin de lui le jeune Eddie ne se lâchât un peu trop. Dans la prude and old England un scandale est vite arrivé. Tout le monde se souvient de la carrière de Jerry Lee Lewis sabordée par la révélation de l'âge de sa ( très ) jeune épouse. Dans la série, il vaut mieux prévenir que guérir, envoyer à Eddie un chaperon qui lui servirait de fiancée officielle dans le but d'écarter de sa personne les journalistes trop curieux et les adolescentes par trop entreprenantes ne serait pas un mauvais plan.
Nous ne connaîtrons jamais la vérité. Gene Vincent a toujours affirmé que Cochran n'avait aucune envie de se marier et ne s'est pas gêné pour traiter Sharon de mytho(wo)mane. L'attitude d'Eddie reste ambivalente, l'on sent qu'il est bien content d'avoir Sharon à son entière disposition, mais que souvent il préfèrerait rester avec les copains... Sharon ne se privera pas de se plaindre de la mauvaise influence de Gene sur Eddie. Elle lui reproche de vouloir garder Eddie pour lui tout seul.
Au soir du seize avril 1960, Gene, Eddie et Sharon s'engouffrent dans un taxi pour prendre quelques jours de repos at home. Eddie et Sharon se seraient-ils mariés ? Il ne semble pas que les familles respectives aient été au courant, nulle part il n'est fait mention de préparatifs... De toutes les manières le 17 avril, Eddie Cochran succombe à ses blessures.
ET APRES ?
Durement touchée, Sharon restera de longs mois à l'hôpital. Les chirurgiens lui prédisent qu'elle ne marchera jamais plus... Il n'en sera rien. Elle parle de ses prières qui auraient permis une guérison qu'elle ne veut pas miraculeuse... Nous opterons plutôt pour les soins prodigués par sa mère et son père – qui apparaît ainsi quasi-mystérieusement pour la première fois et qui semble tel qu'il est décrit en six rapides lignes un biker dans la lignée Marlon Brando-équipée sauvage - accourus à son chevet, la sollicitude du personnel, d'une partie des malades, et de la presse qui s'émeuvent de cette belle jeune fille isolée en un pays étranger dont la mort cruelle a emporté le fiancé. De quoi faire pleurer Margot dans les chaumières.
N'oublions pas la présence constante de Billy Fury secrètement amoureux – enfin, il aurait tout de même lors de la tournée demandé à Eddie si Sharon était libre, preuve que le couple Sharon-Eddie devait présenter quelques fissures – et depuis lors chevalier servant et sans espoir de la belle dame sans mercy... De sa propre initiative Billy retirera de la main glacée de Cochran l'anneau qu'il portait en signe d'alliance avec Sharon, à qui il le remettra.
Le livre s'achève lorsque Sharon s'apprête à rentrer chez elle, dans sa maison, panser les blessures de son âme dans son univers familier...
AND THEN ?
Elle n'ira pas plus loin dans ses confidences. Tout au plus savons-nous - puisque le livre débute par l'évocation de sa surexcitation après un concert des Kiss auquel il vient d'assister – qu'elle possède un fils nommé Shannon.
La petite histoire nous apprend qu'elle se maria en août 1961 avec le présentateur de télévision Jimmy O' Neil – origine irlandaise assurée – dont elle divorcera en 1967. Elle continuera à écrire notamment en partenariat avec Jackie DeSchannon. Il suffit de lire le nom de ceux qui reprirent certains de ses morceaux pour mettre chapeau bas ; Jeff Beck, Tom Petty, The Who, Keith Richard, Led Zeppelin, Pistols... Elvis bien sûr...
Dans les années 70 Sharon s'éloigne, on retrouve une très belle photo d'elle en 1990 compagnie d'Alan Clark ( et d'autres avec Alice Cochran la mère d'Eddie ) – qui écrivit sur Eddie, et enregistra avec les Kellyfours – et puis plus rien jusqu'à sa disparition en 2002 d'une hémorragie cérébrale, il me semble que l'on a parlé aussi d'une addiction à l'alcool et d'un certain repliement sur elle-même et le souvenir d'Eddie... Il est parfois difficile de survivre à son passé.
Son autobiographie est sortie en 2010. Pourquoi si tard ? A-t-elle voulu qu'il ne reste d'elle post-mortem que ce monument élevé à la gloire de son amour et du premier rock'n'roll ? Les années de jeunesse et d'innocence, comme si elles seules valaient la peine d'être vécues ?
Que Sharon and Eddie se soient oui ou non mariés ne change rien à l'affaire. Sans doute auraient-ils fini par divorcer tout aussi vite ! Le problème c'est qu'il nous reste si peu de choses d'Eddie que l'on remâche sans arrêt les rares données qui nous tombent sous la main essayant d'en extraire une ultime signification secrète et cachée comme si la clef de l'univers ou du rock'n'roll se retrouvaient au bout de la route.
Aujourd'hui une plaque funéraire dédiée à Sharon repose à quelques mètres de celle d'Eddie. La mort les aura peut-être réunis davantage qu'elle les aura séparés.
Damie Chad.
P.S. : Près de soixante-dix pages de photos closent ce livre que tout amateur de pure rock'n'roll se devrait de lire. Sharon est un témoin important qui a su se poster à la bonne place du carrefour du diable !
KROCKROCKDISC
SKKEETS McDONALD.
You Oughta see Grandma Rock. Hertbreakin' Mama.
Single vinyl. SLEAZY RECORDS.
Le nom ne vous dit rien. Rassurez-vous à nous non plus. Petit mensonge, bien sûr que nous ne connaissons que cela puisque le guitariste solo n'est autre qu'Eddie Cochran. Il s'agit d'une réédition sur un label espagnol Sleazy records de Malaga en Espagne. Depuis Franco et le Black is Black de Los Brincos, les espagnols ont tout de même fait des efforts.
Attention du beau monde Ken Nelson à la production – le même qui dans les mêmes jours mettra en boîte les premières sessions de Gene Vincent et des Blue Caps, et Joe Maphis comme second guitariste ce qui nous permet de comprendre que très tôt Cochran est reconnu comme un talentueux musicien de studio à part entière.
Skeets McDonald est né en 1915 – vingt ans avant Gene – d'une autre génération donc que la jeune garde rock'n'roll qui est en train de prendre le pouvoir – ce qui ne l'empêche pas de rocker comme un beau diable. Bye bye le country, bonjour le rockabilly. Deux petites bijoux que vous vous surprendrez souvent à faire tourner sur votre pick up.
Damie Chad.
TROYCE KEY.
Watch your Mouth. Baby Please don't go.
Vinyl Single. SLEAZY RECORDS.
Quand ça fait du bien par où ça passe, autant ne pas se priver d'un double plaisir. Même maison, même série, même soin apporté à la pochette cartonnée, plus la la poche papier intérieure pour préserver les fragiles sillons. N'y a que sur l'étiquette centrale que nous renâclons, ils auraient quand même pu refiler le truc à un véritable graphiste qui pour cinquante pesetas et douze anisettes leur aurait dessiné un véritable logo, et qui n'aurait pas oublié ses crayons de couleurs.
Né dans une plantation en Louisiane, petit blanc qui a regardé de côté du blues Troyce Key est né un an avant Cochran. Baby Please don't go sonne surtout ryhthm'n'blues voire gospel avec ces cheurs féminins qui tirent toute la couverture à eux. L'on en oublierait presque d'admirer le travail de Cochran à la guitare. Pour Watch your mouth impossible de rester insensible à l'intro du maître, une descente à la Chuck Berriff qui sonne déjà Stone. Du coup le chant de Troyce Key en devient un peu obsolète, la reprise du choeur masculin – les Sharps tout de même - n'est pas la hauteur, trop anecdotique et quasi rigolard. Quel dommage qu'Eddie ne se soit pas chargé du vocal !
Indéniable héritage des racines noires du rock'n'roll !
Damie Chad.
16:03 | Lien permanent | Commentaires (0)
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