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18/11/2010

KR'TNT ! ¤ 27.

 

KR'TNT ! ¤ 27

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIMES !

LIVRAISON DU 18 / 11 / 2010

A ROCK LIT BLOG'N'ROLL

 

 

 

 

RAPPEL

Bandes : ¤ 5 ¤ 6 ¤ 17

Blues : ¤ 21

Concerts : ¤ 1 ¤ 2 ¤ 3 ¤ 9 ¤ 12 ¤ 17 ¤ 26

Country : ¤ 22 ¤ 23

Disques : ¤ 25

Gene Vincent : ¤ 4 ¤ 7 ¤ 8 ¤ 10 ¤ 11 ¤ 13 ¤ 15 ¤ 18 ¤ 19 ¤ 27

French Rockab : ¤ 1 ¤ 2 ¤ 9 ¤ 25 ¤ 26

Films : ¤ 6 ¤ 21

Livres : ¤ 4 ¤ 5 ¤ 7 ¤ 8 ¤ 10 ¤ 11 ¤ 13 ¤ 14 ¤ 15 ¤ 17 ¤ 18 ¤ 19 ¤ 20 ¤ 22 ¤ 27

Pionniers : ¤ 20

Rock Anglais : ¤ 12 ¤ 14

Rock Français : ¤ 3 ¤ 16 ¤ 24

 

GENE VINCENT

 

THERE'S ONE IN EVERY TOWN

 

MICK FARREN

 

publié au Fiercely Independent Publishing www.thedonotpress.com

The Do-Not Press ( gene ) 16 The Woodlands, London SE 13 6TY ( UK )

or email us : gene@thedonotpress.com

 

Le titre pourrait être ambigu. Avec Gene Vincent on ne sait jamais. Des gars comme lui, pour certains, quand il y en a un dans une ville c'est déjà trop. Il suffit de regarder la jaquette intérieure pour être fixé, un gars qui s'est exilé du Royaume-Uni pour ne pas respirer le même air que Miss Tatcher ne saurait être tout à fait mauvais. Et si en plus il a donné comme titre à son autobiographie Give The Anarchist A cigarette, il nous devient, sans jamais l'avoir rencontré, éminemment sympathique.

 

numérisation0004.jpgBel objet. Sa jaquette noire, souvent reprographiée sur les sites de vente par correspondance, ne lui rend pas justice. Non, ce n'est pas un pisseux format A4 autoproduit à la gesterner comme je l'avais subodoré, mais un livre petit format aux agréables proportions, solidement broché, qui attire la main et le regard. Plusieurs amis en visite qui ignoraient jusqu'à l'existence de notre chanteur fétiche n'ont pas résisté à la tentation de s'en emparer en poussant des exclamations du genre « C'est quoi ce bouquin, il est super chouette ! »

Se sont pas trompés. Gene était un drôle d'oiseau. De nuit. De ceux qui ne se laissent pas attraper par la lumière des projecteurs. Et pourtant des projos, il en a eu sur la gueule, le Gene. Courait même après. Ne pouvait pas rester plus de deux mois auprès de sa Darlene chérie sans repartir sur sa rocky road very bluesy. Mais un homme d'une solitude extrême, séparé des autres par un nuage d'alcool et rongé de l'intérieur par de mystérieux chagrins.

 

Nous n'allons pas refaire le chemin de sa vie. Nous l'avons déjà commentée à plusieurs fois sur KR'TNT !. Mick Farren le fait très bien, et si vous ne savez pas, procurez vous son opuscule. Il fourmille de renseignements et suit très fidèlement la trajectoire de l'idole noire. Nous nous intéresserons plutôt à la méthode de notre auteur, qui nous livre un très beau portrait de Gene. Mais de l'intérieur. Pas de Gene, mais du sien. L'on ne connaît bien les autres qu'en se connaissant soi-même et la meilleure manière d'apprendre à se connaître c'est encore de regarder vivre – et mourir – les autres.

 

Certes c'est un livre de professionnel. Mick Farren a écrit dans de nombreuses publications reconnues comme International Times ou le New Musical Express. Mais cela ne compte pas. C'est un livre de fan. De la première heure. Qui n'a jamais abdiqué la détermination profonde de sa révolte rock'n'roll. Cela se ressent dans l'exigence du style. Merveilleuses pages que celles de cette montée vers un concert de Gene, dans le noir de la nuit britannique. De l'obscurité mentale des earlier sixties.

 

Ce ne sont pas des jeunes gens qui se rendent à un concert, des mais des hordes qui sourdent de la pénombre sociale la plus profonde pour converger vers le point focal de leur origine. Ils partent pour eux-mêmes. Nombreux, multiples et différents seront leurs prochains parcours existentiels. Dans les décennies suivantes ils investiront bien des combats, mais sans cesse du même côté de la barricade. Pour une vie plus haute, plus libre, plus sauvage. Rebelles un jour, rebelles toujours.

 

Crazy Gene, à côté des institutions. Le système ne s'est pas trompé. L'on pouvait limer les ongles d'un Elvis, mais Gene n'était pas prêt à se laisser enfermer dans une cage dorée. Gene c'était un peu, moi et le rock'n'roll contre le monde entier. L'on s'est vite défié de la bête. Sa maison de disques qui dès les seconds enregistrement s'est aperçue que mine de rien, même lorsqu'il cédait aux sollicitations maison, ses productions étaient en décalage avec ce que l'on attendait de lui, puis les radios, les TV qui ont doucement ostracisé ce gêneur qui comptaient davantage sur son public que sur les dessous de table pour grimper dans les charts... Même dans un pays aux limites géographiques aussi étroites que la France, lorsque les portes de nos médias se refermeront sur son nez et que les villes lui interdiront leurs salles de spectacles, Vince Taylor ne réussira pas pas à thésauriser sur son initiale popularité. Imaginez à quelle insupportable tâche s'attelait Gene Vincent dans les immensités américaines. Il lui aurait fallu être partout à la fois...

 

Sans compter que le gouvernement veillait. Vincent affirmera qu'il a été personnellement victime d'une chasse aux sorcières diligentée contre sa personne depuis les plus hautes sphères de l'Etat, comme il buvait comme un trou, l'on a préféré parler de paranoïa... Toujours est-il que dans les milieux conservateurs l'on poussa des soupirs de soulagement lorsqu'il s'en vint en Europe. Très intelligemment Mick Farren met en parallèle le destin de Vincent avec celui d'une de ses idoles, Hank Williams qui ne parviendra jamais à être accepté par les très traditionalistes patrons de l'industrie du spectacle de la country music. Pour Williams la tragédie s'arrêtera assez vite. Gene était beaucoup plus solide et il fallut des milliers de pilules et de litres d'alcool de plus pour l'achever. Devait avoir à la base une santé de fer notre Gene pour perdurer si longtemps avec en plus sa jambe en capilotade. Mais il y avait chez Williams un sentiment de la futilité de la vie, une espèce de découragement désabusé pratiquement métaphysique qui transparaît tant dans le sourire ironique de ses photos que dans l'imperceptible fêlure de la voix, que Gene ne connaissait pas. Une génération les séparait, mais Gene possédait une rage incoercible. Nostalgie country et furie roch'n'roll, deux déclinaisons de l'être au monde. Ceux qui sont remplis de hargne ne vivent pas plus vieux, mais ils survivent plus longtemps.

 

Le rock anglais serait-il devenu ce qu'il est si Gene Vincent n'était venu ensemencé les terres de sa très gracieuse majesté ? Mick Farren pose l'insoluble équation d'une manière différente. Que serait devenu le rock anglais si un stupide accident de taxi ( dérapant aux portes de Londres sur la chaussée mouillée ) n'avait anéanti le couple Vincent-Cochran qu'il n'hésite

 

GENE AND EDDIE... TEN YEARS AFTER

 

«  Il avait une girlfriend appelée Sharon Sheeley. Elle a dit qu'elle était fiancée avec lui, ce qui est la plus gros damné mensonge que j'ai jamais entendu de toute ma vie. Je n'ai jamais entendu une telle boule de merde de ma vie. Quoi qu'il en soit, nous étions en Angleterre en partance dans la nuit même pour Londres et Eddie me dit ' Gene, au lieu de prendre le train et d'abattre le trajet d'une seule traite, puisque nous partons avec Sharon, pourquoi ne prendrions-nous pas une voiture ? ' Aussi nous avons commandé un taxi. D'habitude je rentrais en premier, ensuite c'était Eddie et elle. Mais cette nuit, je ne sais ce qui se passa, mais elle rentra la première, puis Eddie et elle. Eddie est mort parce qu'il était au milieu. Sûr, il n'a pu être tué que d'une seule façon. Qui était de la protéger avec son corps. C'était le seul moyen ! Nous avons essayé de tirer cela au clair. Personne n'a réellement dit la vérité ! Si elle avait dit la vérité par exemple. Cet homme était un good cat, mec, et il est mort... Vous savez, son père et sa mère ne m'ont jamais appelé. Ne m'ont jamais parlé. Mais cet homme était comme mon frère. Je le connaissais mieux que personne. Ils ne m'ont même pas appelé. Eddie m'a dit des choses, les chuchotant à mon oreille juste avant de mourir, qu'il voulait que je leur rapporte. M'ont-ils appelé et posé des questions ? Non... J'aurais été heureux de les leur dire. Pourquoi ne m'ont-ils pas questionné ?... Je vais vous dire pourquoi ils ne l'ont pas fait... Nous avions un gars... Nous avons travaillé presque huit mois entiers sur la route. Nous avions avec nous un gars appelé Riley. Nous avions ramassé presque un quart de million de dollars sur la tournée... moi et Eddie... Et nous avons quitté Bristol cette nuit-là. Et Riley il... Maintenant comment faites-vous pour voler un quart de million de dollars ? Voulez-vous que je vous le dise ? Il est entré de son propre chef dans un hôpital psychiatrique, en est ressorti, a ramassé le fric et y est retourné de lui-même. Maintenant vous ne pouvez plus le toucher. Qui est capable de l'attraper ? La police ? »

GENE VINCENT, 1970.

 

( L'intégralité de cet interview est disponible sur le site gene-vincent.iquebec en version audio, papier et traduction ( meilleure que la nôtre ). Nous nous sommes bornés à retraduire cet extrait tel qu'il est rapporté, moins les deux premières lignes, par Mick Farren. )

 

pas à mettre sur un plan d'égalité supérieure, et pour son expérience et pour son inventivité et pour sa créativité, avec les duos Jagger-Richards et Lennon-Mc Cartney ? Vincent la folie et Cochran le génie, avec ces deux-là la bombe atomique du not swinging but rockin' London était entre de bonnes mains. Le sort en décida autrement. La carrière de Vincent se transforma en course folle de plus en plus erratique.

 

Farren est très dur avec les Français. A tel point qu'il ne parle même pas du 33 Tours de Bird Doggin'. Vu de la perfide Albion et de la lointaine San Francisco, les deux dernières tournées françaises peuvent ressembler à des désastres inorganisés. Vues d'ici, elles sont surtout la preuve d'un esprit de résistance sans concession à la cruauté des temps, dans un pays où les fans de Gégène se comptaient sur les doigts d'une grande main, mais à la ferveur mille fois plus électriques que celle qui habitait nos confrères ricains.

 

Mick Farren aborde par la suite un sujet plus délicat. Celle des relations Morrison-Vincent. Le premier étant un fan inconditionnel du second et tous deux s'entendant comme ivrognes en foire. Au beau fixe. Mais Farren s'aventure dans les comparaisons. Souvent délicates, et pose les questions qui fâchent. Pourquoi Jim avait-il plus de succès que Gene, alors qu'en fait tous deux sont sinon interchangeables du moins frères de sang ?

 

Elaguez les circonstances secondaires du genre Jim était plus jeune, plus beau, et en meilleure santé. Jim était sur une trajectoire zénithale. Gene était une bête blessée, sur le trottoir d'Hollywood son étoile avait déjà perdu de sa couleur... Mick Farren appuie là où ça fait le plus mal. Pas sur la jambe, mais sur la différence sociale. Jim était un enfant de la bourgeoisie et Gene un gosse de pauvre. Morrison lisait Nietzsche et Gene des comics à trente cents. L'un poussait la chansonnette et l'autre récitait ses poèmes.

 

Difficile d'entendre de telles allégations, facile de les admettre. Juste avant de lire ce bouquin je me faisais la réflexion en terminant une bio de plus de 600 pages sur Rimbaud, que la vie de notre poète national estampillé 100 % rébellion était mille fois plus terne que celle de Gene Vincent. Et là-dessus Farren avec ses gros sabots qui s'en vient expliquer que Vincent était aussi prisonnier de son manque de culture et d'éducation. Qu'avec un peu plus de connaissance il aurait possédé plus d'armes pour se défendre. A l'instinct sauvage qui lui permettait de sentir l'ennemi qui venait l'embrouiller il aurait allié une subtilité de prévenance qui lui aurait évité de tomber dans les pièges d'une colère folle, souvent justifiée, mais toujours auto-destructrice. Vincent a beaucoup pratiqué la politique de la terre brûlée autour de lui.

 

On a dénoncé la blessure, l'alcool, la paranoïa, la schizophrénie, le fisc, les pensions alimentaires, les managers plus ou moins incapables ou carrément revanchard comme Don Arden, l'on a préféré taire l'infatigable et totale révolte du rocker qui avait décidé de n'en faire qu'en sa tête, qui fonçait mufle baissé contre tout ce qui bougeait – ah ! La bêtise du taureau dans l'arène – mais qui fut peut-être dans sa cervelle un des derniers hommes libres de notre modernité. Car la liberté ne consiste pas à choisir sa vie, mais sa mort. Pour chaque erreur, consentir à se rapprocher de l'estocade finale.

 

Gene est allé jusqu'au bout de sa vie de rock'n'roller. Il a avalé des couleuvres et commis des compromissions impardonnables. Comme tout un chacun. Comme vous, comme moi. Mais il a marché droit vers son destin, sans faillir. Toutes ses lâchetés, tous ses manquements à notre terrible condition d'Homme, il les a transmués en chemin de triomphe. Three steps to heaven, trois pas vers le Paradis, chantonnait Eddie. Pour le Paradis je vous laisse aller voir. Mais pour l'enfer sur cette terre, Gene n'a pas mesuré son énergie, ni compté ses pas. Le petit gamin de Norfolk sans instruction, nous a donné une belle leçon.

 

Gene n'a pas raté sa sortie. Grandiose. Hollywoodienne. En France, on ne sait pas faire, à part Pierre Louÿs, qui comme par hasard passe par chez nous pour un poëte peu fréquentable (little girls understand ) et un écrivain mineur. La coupe bue jusqu'à la lie. les vautours chrétiens qui confisquent la cérémonie, les chacals qui pillent l'appartement déjà vidé de ses meubles par Marcia emportant guitares et derniers effets personnels, jusqu'aux fleurs, envoyées du monde entier par les fans éplorés, qui n'arriveront jamais sur la tombe... Seul dans la vie, seul dans la mort. I'm going home to see... nobody.

 

Ne dites surtout pas que tout est consommé. Le feu brûle encore.

 

Damie Chad.

 

 

 

 

Commentaires

Merci pour Gene !
Lee-Loo
Presidente-Fondatrice Lonely Street fanclub
le fan club change d'hebergeur car iquebec capitule ... mais pas nous ! :)
http://genevincentfanclub.ifrance.com

Écrit par : Gene Vincent Fan Club Lonely Street | 24/11/2010

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