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25/04/2013

KR'TNT ! ¤ 141. / NO HIT MAKERS / BIG WIREMAN / RIVERSIDETRIO / MATHIAS RICHARD LESTER BANGS

 

KR'TNT ! ¤ 141

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

LITTERA.INCITATUS@GMAIL.COM

 

25 / 04 / 2013

 

 

THE BIG WIREMAN / NO HIT MAKERS / RIVERSIDE TRIO / MATHIAS RICHARD

 

 

ROCKERS KULTURE

 

LES COMBUSTIBLES / PARIS / 20 /04 / 13

 

 

THE RIVERSIDE TRIO / NO HIT MAKERS /

 

THE BIG WIREMAN

 

 

La teuf-teuf mobile hennit au paddock, l'a compris qu'elle ne salirait pas ses pneumatiques dans les plaines fangeuses de la Brie mais qu'elle allait mordre le bitume de la N. 4, direction Paris. On ne la retient plus, se prend pour un pur-sang à l'arrivée de Longchamp. Dès que l'on débouche dans les encombrements de la banlieue, elle se lance dans une course à tombeau ouvert entre les feux rouges avec une porsche. Mister B se cramponne à son siège à chacun des arrêt brutaux et des démarrages foudroyants. Remporte la mise d'une courte tête au dernier poteau.

 

 

Une fois garée on lui tapote les ailes en la priant de ne pas faire la folle en nous attendant. Et l'on s'en va se faire un bel Hellène. Epargnez-nous vos réflexions sur une supposée sexualité déviante, en des termes moins smarts nous nous jetons comme des lions affamés sur un sandwich grec. Un chacun, car les rockers en sortie ne lésinent pas sur la dépense.

 

 

Reste à retrouver la rue Abel. Le garçon poissonnier à qui nous demandons le renseignement nous sort son sourire de requin marteau rusé N° 15, avant de s'enquérir sur notre exacte destination : «  Je suppose que vous dirigez vers les Combustibles », que zoui, que zoui, gazouillons-nous avant que ne tombe sa définitive sentence «  Je m'en doutais ! » tandis que ses yeux ricochent sur nos blousons. Quand bien même se confondrait-il avec les murs, un rocker ne passe jamais inaperçu.

 

 

LES COMBUSTIBLES

 

 

C'est le seul endroit de Paris où l'on n'organise pas une chasse hystérique envers les fumeurs. Au contraire, on en prend soin, on les protège, on les chouchoute, on les parque sous un auvent bâché. A peine vous êtes-vous éloigné de cet abri précaire qu'un videur vous enjoint poliment de regagner la zone de sécurité ultime. Aux étages supérieur une mémé acariâtre qui n'aime pas le rock laisse à intervalles réguliers tomber des seaux d'eau ou de javel sur les imprudents qui stationnent hors du périmètre de protection. C'est le lot habituel du rocker de vivre dangereusement.

 

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Passage à la caisse – dix-huit euros, tarif capitale, pour trois groupes, en fait deux et demi – coup de tampon – une jolie marguerite hippie, pour des rockers ils auraient pu trouvé une tête de mort - ce qui vous permet de sortir et de rentrer à volonté, sans supplément ajouté pour la douche gratuite. Nous montons à l'étage nous en jeter un au comptoir du resto, clientèle séparée pas très rock, genre bobos qui viennent d'encanailler sans risque. Tout compte fait, malgré de tenaces légendes le rocker est un être pacifique. Maintenant ne vous essuyez pas non plus vos mains sur son blouson.

 

 

Descente aux Enfers. La cave est une fournaise. Devant la scène est minuscule, au fond le bar est trois fois plus large. Que voulez-vous, dans la vie il y a des priorités. Pour vous aider à consommer plus, l'on a dû installer un chauffage d'appoint vers le service boisson car la température y dépasse allègrement les quarante degrés. Celsius. Doit y avoir des amateurs de chaleur tropicale car l'espace ne désemplit pas.

 

 

THE BIG WIREMAN

 

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The Big Wireman n'est pas si gros que son appellation incontrôlée le laisse accroire. L'est tout seul. Se déguise sous le nom un peu ronflant de OneManBand. En rock dès qu'on sort un mot d'anglais ça en jette, mais lorsque l'on traduit le résultat de l'équation ne varie pas, le groupe à un seul homme. C'est une tradition qui remonte à loin, le chanteur de blues et de rue qui essaie de survivre avec sa guitare. S'y est greffé des aspects que j'aime moins : l'homme orchestre, regardez tout ce que je sais faire à moi tout seul, numéros de médecine-shows fauchés et la dérive music-hall. L'extraordinaire prestation de l'artiste-total qui finira dans les attractions foraines, les clowns s'en empareront.

 

 

Rien à voir avec le folkleux et sa guitare irrémédiablement umplugged qui mime le Dylan des tout débuts. Une tradition qui se perd, par ces temps-ci. Que voulez-vous depuis l'électrification des campagnes, ma pauvre dame, le monde n'est plus pareil. L'on est ailleurs, à mi-chemin entre le courage et l'esbroufe. Je ne cache pas quelques préventions envers ce mode opératoire. Autant j'admire le côté seul est l'indompté, un contre tous, moi contre le monde entier, postulation sans faille du héros romantique, autant au niveau musical j'émets en général quelques doutes sur la validité rythmique des résultats obtenus.

 

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Guitare sèche électrifiée et tambour à pédale pour le pied droit. Wireman donne dans la sobriété, ne se promène pas avec grosse caisse sur le dos, ni une cymbale sur la tête. Ni harmonica autour du cou, ni pipeau dans les narines. Généralement c'est le genre d'artiste qui ouvre les festivals. Ca permet au public de s'installer, ça meuble le fond sonore et ça ne coûte pas cher à défrayer. Mais arrêtons d'être méchant.

 

 

The Big Wireman s'en tire bien. J'ai l'impression que toute une partie du public s'est déplacée pour lui. Preuve qu'il a ses fans. Ne chante pas mal, gratte plutôt fort et tape avec un minimum de subtilité. Beaucoup de hoquet-hou pour ponctuer les morceaux et reprendre souffle qui auront tendance à disparaître une fois que la voix sera chauffée. Ne sonne pas country, malgré le chapeau de cow-boy - qui fait un peu ustensile de scène artificiel et couleur locale garantie - mais beaucoup plus moderne avec tout de même un léger parfum roots. L'on sent que le bonhomme est passé par de multiples aventures avant d'en arriver à usiner en solitaire.

 

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Ne joue pas au malheureux, a la répartie facile, manie l'humour et l'auto-dérision avec dextérité. Avec ses favoris qui lui mange la moitié des joues, il arbore une gueule sympathique. Le comble c'est que l'on préfèrerait le voir en invité unique pour une soirée qui lui serait spécialement consacrée. En début de concert son apparition crée de facto une espèce de déséquilibre, un peu comme si l'on nous mangeait la moitié de notre hors-d'oeuvre.

 

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A la fin de la prestation je retrouve Mister B qui partage le même avis, sympathique en soi-même mais pas transcendant. Ca manque d'épaisseur pour une ouverture de concert. Davantage une erreur de programmation que la faute de notre loner. Dans un tel contexte The Wireman n'aura convaincu que ses propres aficionados. Avant de quitter la scène, il rappelle son CD en vente pour la modique somme de cinq euros avec des morceaux à la guitare électrique. Peut-être aurait-il été plus judicieux d'emmener la cafetière à micro pour cette prestation.

 

 

THE RIVERSIDE TRIO

 

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Je pressens la mal-donne alors qu'ils sont en train de s'installer. Deux grands-pères s'affairent su le côté gauche. Un papy gentil derrière ses caisses et son absence de rasage poivre et sel - le préféré des enfants, celui qui leur passe tout - et le vieux bougon devant qui surveille sa fender d'un oeil mauvais – lui il doit distribuer les punitions et pas les bonbons. Un organisateur monte sur la scène un disque à la main. Explique que ce trente-trois a changé son existence. En 1985, ce qui ne rajeunit personne. Surtout pas le chanteur qui sur la pochette de ce Flat Broke, Songs for A new Depression – beau sous-titre - ressemble comme deux gouttes d'eau à Brian Setzer, pas celui d'aujourd'hui, celui de la couve du premier album judicieusement baptisé Stray Cats, banane outrageante, moue dédaigneuse, tatouages colorés... L'en est passé de l'eau dans la rivière depuis ces anciens temps. Tellement qu'aujourd'hui ils sont quatre sur scène.

 

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Se jettent à dans l'onde rock sans retenue. Difficile de les suivre. Tantôt western swing, tantôt pionniers, tantôt rockab, tantôt rock'n'roll, forties, fifties, sixties, toute la gamme est déployée, certes toutes ces étiquettes sont mouvantes, mais l'on dirait une formation toute jeune qui n'arrive pas à se cantonner dans un style défini. J'ai prononcé le mot qu'il ne fallait pas, excusez-moi. Sont au point, quoique Mister B parlera d'approximation dans le jeu des guitares. Mick le lead singer se la donne à fond pour faire monter la mayonnaise. Mais elle ne prend pas. Belle voix tout de même, guitare rythmique d'acier et même deux morceaux à l'harmonica. Essaie de communiquer avec le public, mais son anglais à couper au couteau reste lettre morte pour nos oreilles de franchouillards peu doués pour les langues étrangères. Si je devais n'en sauver qu'un ce serait lui. Le contrebassiste est trop passe-muraille, assure avec sérieux mais sans un brin de fantaisie. Le groupe manque d'un vecteur essentiel : la fougue et l'énergie de la jeunesse.

 

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Je ne peux m'empêcher de penser à la semaine précédente, l'est sûr que le Riverside Trio en a dans la bouteille, mais combien ils sont loin d'un combo aussi juvénile que les Whacks. Leur reprise de Diddley est vachement mieux foutue que les passages de jungle beat qui ponctuaient le set des Whacks - faut reconnaître que quand le méchant pépé Chris s'en donne la peine il ne tricote pas mal du tout sur sa machine - mais avec les Whacks, il y avait en plus les orang-outans en folie qui saccageaient le paysage et des tigres altérés de sang qui déchiraient leur proie pantelante sous les arbres. C'était wild à souhait. Ici les singes géants et les gros chats rayés se sont endormis, roupillent comme des marmottes et ronflent avec régularité.

 

 

Après le concert Mister B évoquera les Stargathers ( voir notre livraison 115 du 25 / 10 / 12 ), déjà une légende vivante tellement ennuyante que les neuf dixièmes de la salle étaient sortis pour discuter le coup... Le Riverside Trio s'épargnera un tel camouflet, mais leur honnête prestation ne satisfera pas grand monde. Deux rappels un peu téléguidés par les organisateurs, mais l'on ressentira leur fatigue et leur soulagement à la fin du deuxième. Ce n'est pas qu'ils furent mauvais, c'est qu'ils ne furent pas bons. Un peu pathétiques, peut-être.

 

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Auraient dû passer en deuxième position, en un set un peu plus ramassé. Ou alors en soirée hommagiale avec guest stars invités, spécialement conçue pour les âmes nostalgiques qui courent après leur jeunesse perdue sans espoir. Les combos s'étant succédés à de courts intervalles, à minuit et quelque tout était terminé. Nous reste un goût amer d'une nuitée ratée, trop tôt achevée et qui n'a pas tenu ses promesses.

 

 

NO HIT MAKERS

 

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N'ai pas voulu trop vous déprimer. J'ai interverti les numéros afin de rallumer la flamme de l'espérance éteinte dans votre coeur mélancolique. No Hit Makers sont passés en deuxième position mais je vous les offre en final. Possédaient tout ce qui manque à leurs acolytes d'un soir, l'impact du nombre et l'énergie du rock'n'roll.

 

 

Leur nom est déjà une provocation. Ne revendiquent pas la première page de journaux lus par Monsieur Tout le Monde. Ce n'est pas qu'ils n'ont pas confiance en eux-mêmes – ils en débordent – mais ils savent que leur parti-pris d'un rock ravageur leur ferme les portes des hit-parades de notre époque. Ne feront peut-être pas de hit mais rallieront le public des connaisseurs.

 

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Frenchies comme leur nom ne l'indique pas. Eric est au chant, casquette et boucle d'oreille, pas très grand mais une présence et une vitalité sans borne. Tient la rythmique – Gretsch sèche à l'ouverture triangulaire – tête de serpent ou sexe de femme je vous laisse choisir entre le yin et le yang - mais peut se reposer sur Vince le lead guitar. Ce tueur doit se jacker directement sur le 6000 volts car il envoie méchant. Une guitare qui sonne et un maestro qui combine les plans plus osés. Avec un seul branché de cette espèce dans un combo de rock, vous êtes déjà certain de vous classer vers le haut du panier.

 

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Contrairement à beaucoup de rockabilly drummer Dan s'est aperçu que sa batterie ne comportait pas uniquement une caisse claire. Se sert de tous les toms et ça vous envoie des tonnes dans les oreilles. Vince peut expectorer du jus par devant sur sa Gretsch orange mécanique, pas de problème il y a quelqu'un derrière à la réception qui bétonne un barrage sonore afin que rien ne se perde.

 

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Larbi ne perd pas une seconde. Il slappe avec méthode et furie. Pas le temps de faire son cinéma, sa main tape et rebondit sans arrêt sur les cordes. Concentré et comme en pilotage automatique dans un rêve intérieur dont nous ignorons tout, mais dans lequel ça doit bastonner dur car on le sent préoccupé par une inaccessible bagarre dont il traduit la chorégraphie intime à grands coups de battoirs rageurs. Tourne presque le dos à ses acolytes tellement il est penché sur sa contrebasse. Combat avec l'ange.

 

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L'ensemble dépiaute sévère. Une onde de choc qui se précipite à votre rencontre comme les chevaux de Poseidon et vous submerge. Pas psycho, mais presque. Un plein wagon de vitamines punk par en-dessous, afin d'arracher les poils de la bête sauvage à pleines poignées. Si vous désirez imiter, faites-nous la grâce de ne pas oublier les accointances rhythm and blues d'une telle musique. Ont Her Love Rubbed Off de Carl Perkins à leur répertoire, le morceau a aussi été repris par les Cramps. C'est un peu cela No Hit Makers, le grand écart entre les racines et l'électricité. Je reviens sur Vince, dans le final, son auriculaire ganté de son étui métallique qui glisse en slide tandis que les autres doigts de la même main traquent les cordes à toutes vitesse. Un pianotage d'orfèvre pour un grondement de mammouth en rut.

 

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Johnny Burnette bien sûr ( existe-t-il un groupe de rockab qui ne reprend pas du Burnette ) mais à leur manière, rugissante. Reculent un peu les frontières puisqu'ils vont chercher le, All I Can Do Is Cry de Wayne Walker - Burnette et son trio se feront les dents sur son Sweet Love On My Mind – comme s'ils voulaient remonter aux racines du rock'n'roll pour mieux lui faire subir un traitement de choc. Offrent le même traitement au Boogie Chillen de John Lee Hooker, mais la modernisation est peut-être moins apparente sur ce titre, le blues bien plus que le rock - quelque part plus proche du jumpin' swing - est par ricochet à l'origine de l'électrification à outrance du rock'n'roll. No Hit Makers ont opéré un choix judicieux. Un son néo-rockabilly résolument moderne.

 

 

Lorsque la prestation s'achève ça râle dur dans la salle. On les aurait bien gardés une petite heure de plus. Quittent la scène sous les acclamations du public qui n'en revient pas de cette maîtrise supersonique qui leur permet d'allier déluge de feu et sobriété élégante. Un set sans équivoque ou bavure. Parfaitement en place du début à la fin. Rien à reprocher. Tout à applaudir.

 

 

RETOUR

 

 

Un petit détour pour dire au revoir aux copains avant de partir. Mumu et Billy en retard comme d'habitude, mais ce coup-ci les Dieux du rock les ont punis puisqu'ils se seront privés de No Hit Makers, n'ont assisté qu'au Riverside Trio. Billy prend la chose avec placidité, de toutes les manières ils jouent mieux que moi !

 

 

Voici Eddie des Ol' Bry dont j'avais oublié de signaler la présence la semaine passée au concert des Howlin Jaws. Puisque je parle des Hawlin, l'on me fait remarquer que j'ai transformé le prénom du guitariste Lucas en Eddie. C'est vrai que Lucas est bien sa dénomination officielle, mais lorsqu'il crapahute sur sa Gretsch je lui trouve la même mine concentrée que Cochran, et comme il joue foutrement bien mon neurone fatigué l'a surnommé Eddie. Acte inconscient et révélateur.

 

 

Toujours les mêmes, et toujours des nouveaux. Notamment un fort pourcentage de présence féminine cette fois. Me fais féliciter plusieurs fois pour mon T-shirt Gene Vincent, mais la teuf-teuf mobile nous attend, et nous repartons vers de nouvelles aventures que nous ne manquerons pas de vous rapporter une prochaine fois.

 

 

Damie Chad.

 

(Pour les photos des No Hit Makers on a choisi sur leur facebook dans une série signée par Audrey Wnent, allez voir sur son facebook personnel ses séries punk, squat, concert et pin-up, la demoiselle est douée, il n'y a pas photo ! )

 

Look books !

 

 

MATHIAS RICHARD

 

 

MACHINE DANS TÊTE

 

 

( editions vermifuge / 2012 )

 

 

Tout se passe dans la tête. Pouvez faire un petit tour dehors si vous le désirez, cela ne changera rien. Le livre en est une parfaite illustration. Commence dans la bonne ville de Tours pour se terminer à Tours. Entretemps l'on s'est payé du mauvais temps, une petite boucle en Croatie aller-retour.

 

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Petit voyage en Europe. Pas organisé par un operator-tour, plutôt au bout de la nuit. C'est à l'intérieur que l'obscurité du monde est la plus sombre. Vous fais grâce du couplet initiatique. Le jeune Dorian Durand n'en sait pas plus quand il revient que quand il est parti. Ironie du destin : pourquoi s'infliger tant de peine pour n'en rien retirer ! Pourquoi se donner un mal de chien à courir après d'improbables horaires d'avion, de bus, ou de train pour n'en réaliser aucun bénéfice !

 

 

C'est que Dorian Durand vit à côté de notre monde marchand. Proclamation de rébellion à la fin du livre. Ne marche pas dans la combine de l'échange monétaire. Pas de tiers payant entre les rapports humains, rapports d'individus à individus, selon les trois mamelles de tout contact. Indifférence, amitié, sexe. Avec des chemins qui se tracent de l'un à l'autre pour mieux se rapprocher ou s'éviter. Tout dépend des circonstances, que nous ne sommes pas les seuls à vouloir maîtriser. Les autres ont aussi leur mot à dire. Savonnent ou obstruent la pente plus souvent qu'ils ne la facilitent.

 

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Parce que Goran lui propose de venir le retrouver au festival de Motovun en Croatie, Durand s'y rend. L'appel de l'amitié a bon dos. Dorian file à Motovun pour mieux se fuir. Ne le présente pas tout à fait comme cela. D'autant plus que dans la valise de sa boîte crânienne il ne lui vient même pas à l'idée de se séparer d'un ou deux axes de sa problématique existentielle. Emporte tout avec lui. Situation critique mais pas de rupture envisageable. Car rompre serait casser les amarres de la réalité et basculer dans la folie. Du monde ou de désespoir.

 

 

Dorian a souscrit à la double option. Kaos partout. Peut traverser tous les cercles, reste toujours en enfer. Peut-être parce que c'est là qu'il se sent le mieux. A débattre. Pays ravagé par la guerre et jeunesse sans futur. Génération after-after-after punk mais toujours sans une once d'avenir. Le monde est malade et Dorian tombe malade. A son tour. Ne peut plus parler. Simple angine ou impossibilité de déclarer quelque chose qui fasse sens. Les antibios guérissent le symptôme mais pas le cancer de la vie qui court vers sa propre mort. Processus imparable, auquel Dorian n'a rien à opposer. Que des corps convoités de jeunes filles qui ne sont pas au rendez-vous, ou alors des mots. Des mots comme la dernière barrière que l'écrivain peut dresser entre lui et l'absurdité du monde moderne. Mais quand on y repense à tous les âges, le monde a toujours semblé moderne à ses contemporains.

 

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Le monde est le cadavre, et nous sommes les vers. Mais il y a pire. Nous aussi nous sommes cadavres, et nous avons un gros ver dans la tête. Même que certains l'appellent le cerveau. Mais cette dénomination fleure bon l'ancien temps. Entretemps nous avons bricolé. C'est une machine qui occupe notre tête. En pilotage automatique. Deux ou trois boutons à notre disposition. Mais sans trop d'interactions possibles. Nous bombarde de programmes que nous ne souhaitions pas vivement.

 

 

Le plus terrible c'est que l'on ne peut pas l'éteindre. Flot continu. Pouvez baisser le son mais les images vous manipulent et même pas à votre insu. Le vieil animal raisonnable de Descartes a perdu la raison, mais pas la conscience. Ruine de l'âme ! Alors en fin de compte ne vous reste plus qu'à accepter la défaite de votre impuissance.

 

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Cent cinquante pages. Aurait pu faire plus, mais ce n'est pas la peine. Il arrive un moment où vous comprenez que l'on n'arrête pas la terre de tourner, même si votre tête tourne en sens inverse. Pas d'équilibre possible. Une pluie diluvienne d'images et de pensées s'abat sur vous en une longue phrase interminable. La vie ne propose pas de point à la ligne. Des séquences, mais pas d'arrêt sur image. Mathias Richard déclenche l'apocalypse. Dorian Durand ne sortira pas vivant de son mode d'être car il est impossible qu'il s'en évade et surtout impossible qu'il meure dans le sien. L'on ne s'échappe pas de soi-même. Si ce n'est par l'artefact de la rébellion qui n'est qu'un leurre, la carotte pour faire avancer le troupeau d'ânes que nous sommes quand le bâton de l'ordre établi ne suffit plus. Toujours un pas de plus dans le vain espoir insensé de trouver le chemin de la sortie.

 

 

Parfois l'on s'imagine qu'il existe un point focal d'encrage, qu'il serait possible de rebrousser chemin vers le commencement de la vraie vie ou de l'amour. Mais ce n'est qu'une hypothèse d'école ( comme disent les jésuites ) à partir de laquelle nous sommes enclins à échafauder la casuistique de notre victoire, mais la machine tourne, tourne, tourne et nous prouve que nous n'avons ni fin, ni commencement, ni queue ni tête, seulement une machine.

 

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*

 

 

Un livre de Mathias Richard fondateur de Caméras Animales ( allez voir le site ) et du Manifeste mutantiste – un des rares ouvrages théoriques intelligents écrits depuis ces vingt dernières années – un livre ultra-punk – mais un punk / destroy / electro – pour ceux qui veulent se faire idée : voir la chronique de Mister Tomer sur Hocico ( livraison 134 du 07 / 03 / 13 ), qui est le seul des artistes dont nous ayons parlé, qui soit mentionné dans la bande-son proposée en fin de volume. Donc pas très rockabilly, mais foutrement rock'n'roll. Psycho.

 

 

A lire de toute urgence.

 

 

Damie Chad.

 

URGENT, CA PRESSE !

 

 

 

ROCK & FOLK. N° 549.

 

Mai 2013.

 

 

Philippe Manoeuvre fête son anniversaire. Vingt ans qu'il dirige le magazine. Pense qu'il s'en sort pas mal. Moi itou, même si j'ai vomi mon petit déjeuner ce matin à cause de lui. Bien sûr je n'ai pas lu l'interview qu'il consacre à Daft Punk – de toutes les manières à part le topo sur les trente labels prestigieux du rock'n'roll, n'y a pas grand chose à se mettre sous la dent dans ce numéro. Mais je ne lui en ai pas voulu, faut bien vendre et savoir faire des concessions aux maisons de disques, ça permet à l'éditeur d'éponger les grosses factures, et de subsister. En plus parfois les couleuvres doivent être dures à avaler, comme la pub sur M qui bouffait la couverture du 548. Les fourches caudines de la nécessité financière.

 

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Mais lorsque à sept heures vingt et une précise le speaker de la radio annonce Daft Punk, j'omets de tourner le bouton, peut-être est-ce écoutable après tout. Las ! Trois fois hélas ! Un son aigrelet d'engin de chantier qui recule envahit la pièce. Est-ce possible, ce sont ces sortes de plates indigences qu'écoutent nos contemporains ! Je comprends pourquoi aux infos ils viennent de dire que le pays s'enfonce dans la crise. Recul industriel peut-être, mais récession musicale indiscutable !

 

 

Me suis à peine remix de mon malaise que dix minutes plus tard la tentative de démoralisation nationale frape un nouveau coup. Doivent avoir la couve de R&F sous les yeux car maintenant ils annoncent le titre du bas, la huitième merveille du monde, Phoenix – je décide de boire la coupe jusqu'à la lie et je reste. Côte Ouest qu'ils disent fièrement pour appâter l'auditeur, si c'était un livre je dirais que ce serait la collection Harlequin, orchestration cucul la praline, romantisme à l'eau de rose fanée, de très loin ça ressemble aux Beach Boys mais désolé les filles il manque et la plage et les garçons.

 

 

Damie Chad.

 

 

JUKEBOX. N° 317.

 

Mai 2013.

 

 

Heureusement que j'ai l'antidote à la maison. Un article sur le Star-Club de Jerry Lee Lewis. Le truc qui vous requinque un cadavre. Un complément indispensable au bouquin de Jo Bonomo de traduit par Patrick Cazengler que nous avons chroniqué dans notre livraison 134 du 07 / 03 / 13, surtout pour les photos couleur, un peu les mêmes que les nôtres...

 

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Sinon les rubriques habituelles, une vieille interview de Giorgio Gomelsky – nous lui devons les Rolling Stones et les Yardbirds – j'avoue que même moi j'ai pas pu faire mieux. Une interview de Jesse Garon qui se la pète à un point inimaginable, et surtout le reprint du N° 2 de Best du 5 octobre 1968, avec l'abécédaire des artistes qui mange la moitié de la pagination et tout de même deux pages de texte sur l'autre moitié.

 

 

Ce qu'il y a de terrible avec Jukebox c'est que même si vous connaissez tout, tout, tout du rock vous tombez toujours sur une information que vous ignoriez. A collectionner.

 

 

Damie Chad.

 

 

BLUES MAGAZINE. N° 68.

 

Avril / Mai / Juin 2013.

 

 

Notre petit trimestriel préféré. Du blues mais aussi du rock. Notamment la suite de la fois précédente : Partie 2 de Du blues dans le Rock'n'roll en Arkansas. Le mot est à prendre au sens métaphorique de tristesse. S'intéresse aux petits pionniers. Ceux qui ont débuté chez Sun sous la férule de Sam Phillips... et qui ont été remerciés plus vite qu'ils ne l'espéraient. Part One Billy Lee Riley, Part Two : Sonny Burgess. Tout le monde n'est pas Elvis Presley. Ni Jerry Lee Lewis. D'ailleurs eux aussi ont fini par quitter le nid. Sais bien que les amerloques sont des entrepreneurs dans l'âme, mais je me mets à la place du US banquier made in 1956 à qui un enregistreur de musique sauvage venait demander des liquidités. Ce n'était pas que la cause était perdue, c'est qu'elle devait paraître bien aléatoire et bien peu rentable... Phillips n'avait aucune garantie à offrir ni biens à hypothéquer. D'ailleurs Sam lui-même se hâtera de réaliser ses bénéfices pour les investir dans les Holyday Inns, un placement beaucoup moins aventureux.

 

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Avec des Si l'on mettrait Memphis + le Tennessee + l'Arkansas dans une même bouteille de Jack Daniel. Il est inutile de s'interroger : si le patron des écuries du Soleil avait mis le paquet sur Billy et Sonny, seraient-ils devenus Presley Bis et Presley Ter ? Ne voudraient pas rabaisser leur talent mais il faut savoir sinon se vendre du moins se laisser acheter. Le problème c'est qu'il n'y a pas eu d'offres en face. Ont donc essayer de survivre comme ils ont pu. A coups de concerts dans les bars et en enregistrant des morceaux que les labels ne prenaient même pas la peine de sortir. La mode du rockabilly n'a été qu'un feu de paille aux USA. Le rock mène à tout à condition de sortir : dans sa plus grande période d'abattement Sonny Burgess se reconvertira en représentant de dentelles pour robes de mariées...

 

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Comme pour Billy Lee Riley c'est l'Europe qui sauva Sonny Burgess de l'oubli. Très symboliquement l'article est écrit par Bernard Boyat à qui nos connaissances hexagonales du rock doivent tant. Fait partie de ce noyau de fans qui ont porté à bout de bras le rock des pionniers et ce dès les années soixante. C'est en 1958 que Bernard Boyat alors en quatrième découvre Little Richard... la qualité et la richesse de ses articles est aujourd'hui reconnue par les spécialistes américains qui disposent pourtant d'une manne de documents incommensurables.

 

 

Donc un article incontournable. Deux interview à lire de près, celui de Jack Bon l'ancien leader de Ganafoul, un des grands groupes de blues rock français des années 70 et l'inusable Little Bob qui évoque Blues Bastards son groupe consacré au blues déjà aussi légendaire que la Story. Ce qui se fait de mieux par chez nous. Et pourtant la nébuleuse blues nationale est d'une richesse insoupçonnée. Vous faudra déjà deux bons mois pour assimiler et enquêter sur tous ces héros méconnus dont Blues Magazine se fait l'écho.

 

 

Damie Chad.

 

 

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