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10/07/2012

KR'TNT ! ¤ 106. MILTON MEZZ MEZZROW

 

 

KR'TNT ! ¤ 106

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

12 / 07 / 2012

 

 

 

LA RAGE DE VIVRE

 

 

MILTON MEZZ MEZZROW

 

+ THOMAS WOLFE

 

 

livre de poche N° 1341 / 1342

 

 

pour Patrick Geffroy parce que page 294 cette citation de T.S. Elliot :

 

 

Dans un monde de fugitifs

 

Celui qui va dans le sens opposé

 

Aura l'air de s'enfuir

 

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Salement rock'n'roll ! N'y a qu'un problème c'est du jazz. Peut-être pas le genre de friandise que vous vous mettez tous les soirs entre les esgourdes, mais nous sommes ici dans la préhistoire du rock'n'roll, avant même l'apparition des dinosaures. C'est un copain bouquiniste amateur de jazz – nul n'est parfait en ce bas monde – qui m'a refilé le bouquin en me disant que ça pouvait m'intéresser. A vrai dire il n'avait pas tort.

 

 

Mezzrow est né si l'on décompte les centaines il y a presque trois siècles de cela, en 1895, était donc là au tout début avant même le premier enregistrement de musique jazz légalement authentifié. D'ailleurs il ne parle pas de jazz mais de blues. En langue américaine son livre s'intitule Really The Blues, le titre français dû à Marcel Duhamel, le promoteur de la Série Noire, est de 1952, il est donc un peu en avance sur La fureur de vivre de James Dean et quelque part très prémonitoire.

 

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MADE IN USA

 

 

Le jeune Milton Mezzrow issu de la petite bourgeoisie juive avait tout pour être heureux. N'était pas né avec une véritable golden spoonfull in the mouth mais avait tout pour filer directement vers une solide retraite de petit commerçant, sauf que le destin imposa un sacré changement de direction. Se fit stupidement prendre à bord d'une voiture qu'un copain venait d'emprunter lors d'un banal contrôle de police. Ce fut la chance de sa vie.

 

 

On l'aurait directement envoyé à l'Université de Yale qu'il n'aurait pas autant apprécié. Le voici dans l'Ecole de Redressement de Pontiac. L'amour de sa vie. N'aurait pas pu trouver mieux. En prise directe avec la lie de la société. Certes l'on est au Nord des USA mais la considération dont jouissent les Noirs dans cette société pas du tout ségrégationniste ( ! ) n'est pas des plus hautes.

 

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D'instinct, il se sent chez lui. Les Noirs se bougent d'une manière si parfaite, ils font preuve d'un humour si caractéristique, ils appellent un cul, un cul, avec un tel naturel que notre jeune homme sent fondre ses préventions de blanc bec bien éduqué en quelques secondes. Il doit en convenir : son corps de visage pâle est habité par une âme aussi noire que la nuit.

 

 

Bleu noir si l'on veut exprimer la nuance du ripolin. C'est que les Noirs chantent et jouent de la musique comme personne d'autre. C'est en prison que Mezzrow apprend à souffler dans un saxophone et qu'il se sent habité par cette indescriptible musique qui vient de la Nouvelle Orléans et qu'il s'obstine à appeler le blues. Sera très vite un inconditionnel de Bessie Smith.

 

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Lui faudra du temps, plus de dix ans pour mettre de l'ordre dans ses idées et comprendre le phénomène dans lequel il est emporté tel un fétu de paille. Ses dix-sept mois de pénitence accomplis, Mezzrow ne sait qu'une chose : il sera musicien. Ce ne sera pas facile. Passons sur les aléas du métier : sera un adepte de la marijuana, consommateur et revendeur. Dans le premier quart du vingtième siècle, l'article n'est pas considéré comme un produit illicite, ce n'est que plus tard que les pouvoirs publics condamneront son usage ce qui lui vaudra deux autres années de prison... S'adonnera aussi à un poison bien plus pernicieux, l'Idole Noire chère à Laurent Tailhade, les terribles perles d'opium, une accoutumance de plus de quatre années dont il aura un mal fou à se séparer.

 

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Mais autant il présente ses célèbres reefers qu'il clope à tout bout de champ comme une drogue culturelle, les boulettes d'opium seront avant tout un succédané à ses angoisses. Car la musique qu'il aime – celle qu'il vient du blues – ne coule pas dans le bon sens du Mississippi. Mezzrow a atterri à Chicago, comme tout le monde serait-on tenté de dire. Très loin du Delta et très loin de la New Orleans. Déjà qu'il avait tiqué sur les premiers enregistrements de jazz ! A peine croyable ! Mais les premières faces gravées de la musique noire le furent par des... blancs. The Original Dixieland Jazz Band c'est sympa, mais il n'y a pas photo, nos blancos musicos jouent comme s'ils avaient un balai enfoncé dans le trou du cul. Les blancs auront tout pris aux Noirs, jusqu'à leur mode d'expression musicale.

 

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Mezzrow aura l'impression d'avoir raté le premier acte. Cette passation du blues au jazz, qui se déroula dans l'ancienne cité corsaire de Jean Lafitte, il ne l'a point vécue. Comment les chants des travailleurs sur les digues, les refrains des prisonniers dans les camps de travail, se sont peu à peu mêlés aux marches militaires de transfert ou d'apparat, donnant au blues originel cette lente cadence répétitive, et comment une fois arrivés dans la ville les populations noires entassées dans les quartiers les plus mal famés y ont insufflé la joyeuse naïveté des misérables qui sont si pauvres qu'ils ont compris qu'ils ne peuvent plus rien perdre et comment ce regroupement urbain leur a permis sinon d'en prendre conscience mais du moins de ressentir la future germination de leur puissance, Mezzrow le théorisera peu à peu.

 

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En attendant il vit le jazz avec un groupe de potes, en osmose avec la communauté noire mais assez conscient qu'il est des interdits à ne pas franchir. Jammer en toute liberté avec des musiciens noirs chez soi ou en des lieux semi-privés, oui. Il s'adjuge même la paternité de l'expression «  jam-session ».Mais se produire dans les théâtres, les clubs, les bars, en orchestre mixte, non.

 

 

Plus le temps passe, plus le jazz des origines s'estompe. Aux petits combos de six ou sept musiciens ont succédé dès la seconde moitié des années vingt, les grands orchestres de musiciens blancs. Ou noirs. Mais jamais mélangés. Finies les improvisations sauvages. L'on écrit les arrangements. Debussy et Ravel embourgeoisent le jazz dans leurs partitions. Mezzrow dénonce cette acculturation de la musique noire populaire américaine. Il prononce des condamnations d'une dureté impitoyable à l'encontre des virtuoses classiques à qui il reproche de ne pas exploiter toutes les possibilités de leurs instruments.

 

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Mezzrow est un visionnaire. Il pressent ce que doit être le jazz, mais ses doigts sur la clarinette ne courent pas assez vite. Il défend son ami Louis Armstrong, mais ne sera jamais capable de jouer comme lui. Il dirigera quelques sessions pour Louis, il aura durant quelques mois son propre orchestre, mais chacun s'en ira jouer là où les contrats sont les plus juteux. L'on oubliera souvent de lui renvoyer l'ascenseur que ce soit pour les engagements ou pour les enregistrements, mais son addiction à la drogue n'agit point en sa faveur.

 

 

Quand enfin il parviendra à réaliser son rêve d'un sextet composé de trois musiciens blancs et de trois souffleurs noirs, la formule ne sera pas viable. Comme par hasard les actionnaires préfèreront fermer le club dans lequel ils se produisaient en invoquant une mésentente avec le gérant...

 

 

MADE IN FRANCE

 

 

Ne nous faisons aucune illusion, Mezzrow ne serait aujourd'hui connu que par une centaine d'amateurs éclairés de jazz trad si un personnage bien de chez nous n'avait croisé sa route. Nous avons déjà rencontré cette figure légendaire dans notre soixante dix-huitième livraison du 22 / 12 / 11 consacrée à Frank Ténot, le très controversé Hugue Panassié.

 

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En 1938, Hugue Panassié débarque en Amérique. Il a découvert depuis quelques années le jazz et il vient boire à la source. Sa fortune personnelle et familiale le lui permet. En notre douce France l'on ne l'aime guère. Il est vrai qu'il fut en relations conflictuelles avec Boris Vian – icône intouchable de l'intellingentzia de gauche, ou de la bêtisentzia social-démocrate comme je préfère dire. Panassié est affublé d'un mal bien français. C'est un puriste. Il ne peut y avoir qu'une seule sorte de jazz. Celui de la New-Orleans, pas tout à fait le trad, pas tout à fait le swing, exactement le hot. D'ailleurs dès 1935 il créera la revue Jazz Hot et aura été au chevet de la création du Hot Club de France. Pour lui le be bop est une musique à part entière qui n'appartient pas au jazz. J'en connais pour qui les Yarbirds ou les Animals ne sont pas du rock'n'roll à part entière. Etrange de voir comment l'on défriche un nouveau territoire pour l'entourer aussitôt de frontières infranchissables.

 

 

L'on peut ne pas aimer ce prosélytisme à tout crins en faveur du vieux jazz, mais on ne peut lui dénier ses qualités de militant. Il ne faut pas non plus oublier que le Hot Club de France fit beaucoup pour la gloire de Django Reinhart. Le hot, c'est aussi le cri de ralliement de Mezz Mezzrow qui ne jure que par le hot, pour lui c'est un peu le Graal perdu que l'on cherche partout mais duquel personne ne parvient à recouver la formule. Beaucoup d'idées que l'on attribue à Panassié lui ont été communiquées par Mezzrow.

 

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Nos deux lascars s'entendront comme larrons en foire. C'est grâce à Panassié que Mezzrow enregistrera avec Sydney Bechet et Tommy Ladnier quelques uns de ses plus beaux morceaux. A la fin de la guerre il viendra en France où il acquerra une véritable notoriété. La Rage de Vivre est traduite par Marcel Duhamel et Madeleine Gautier qui n'était autre que la secrétaire personnelle de Panassié. A tel point que l'on finira par rapprocher à Panassié son parti-pris en faveur des artistes de jazz de couleur qui recoupe l'admiration que Milton Mezz Mezzrow portait aux musiciens noirs... Dans les années 80, le fondateur du Hot Club fut accusé de racisme par les populations bien-pensantes de la douce France. Ce qui est un peu gros lorsque l'on pense à la joie ressentie par de nombreux jazzmen étonnés par l'accueil qui leur fut prodigué en Europe dans les années quarante et cinquante. A tel point que certains adoptèrent notre pays comme résidence d'exil volontaire. Sans des intercesseurs comme Hugue Panassié il est à penser qu'il en aurait été certainement tout autrement. Il n'y a qu'à voir l'empressement avec lequel nos concitoyens accueillent de nos jours les sans-papiers venus d'Afrique noire pour moduler les grandes indignations anti-panassières... Faut voir comment les noirs suivirent au téléphone les tournées d'Armstrong en Angleterre et en France conscients que les honneurs qui lui étaient rendus étaient autant de pas vers une reconnaissance future en leur propre pays.

 

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LA RAGE DE VIVRE

 

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Bien sûr ce n'est que du jazz ! Mais la rage avec laquelle Milton Mezz Mezzrow recherche la source perdue du jazz n'est pas tellement différente de tous les rockabs d'aujourd'hui qui remontent aux ruisseaux taris du country pour recréer the original sound du real rockabilly.

 

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Et puis surtout, il y a cette cat attitude, de se foutre de tout sauf de ce qui l'intéresse, ce désir de ne jamais reculer et de se lancer dans les tentatives les plus désespérées. Le raid sur New York est un morceau d'anthologie. L'on est tout près d'En route pour la Gloire de Woody Guthrie, ou de la montée des Chats Sauvages sur Paris. Jusqu'au bout des désillusions. Même si parfois l'on a l'impression de toucher la lune de la main.

 

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Milton ne triche pas. Ne se présente pas propre sur lui. Assume tous ses choix. Son rapport à la marijuana enfonce de mille coudées celui de Bob Marley à l'herbe. Pas question de se défoncer mais d'enfoncer le poignard jusqu'à la garde dans le coeur de l'ennemi. Aucune trace de puritanisme refoulé chez Mezzrow. L'homme n'est pas religieux. Le sens du péché lui est inconnu. Ignore jusqu'au mot gospel. Ne revendique jamais sa judéité en tant que membre d'un peuple élu. Il est juif comme d'autres sont blancs ou noirs. Ce n'est qu'un épiphénomène. L'identité de l'individu ne réside pas en ses origines mais en la manière dont il inscrit celles-ci dans sa réalisation sociale. Qui n'a rien d'une réussite. Traite les honnêtes travailleurs de toutes les couleurs qui dorment la nuit pour mieux travailler le lendemain, d'esclaves.

 

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Très belle traduction du Cat, ce n'est ni le chat, ni le minou, ni le matou, encore moins le minet. Reprise du vieux vocable anarchiste : le Cat c'est l'Affranchi. Celui qui a brisé les chaînes qui le retiennent au vieux monde. Celui qui crée ses propres valeurs pour mieux en adopter d'autres si elles se révèlent plus appropriées, celui qui impose ses propres codes et qui refuse de se battre avec les armes de l'ennemi. Rien à voir avec l'intellectuel situationniste européen qui se place de lui-même dans les choeurs pour dénoncer la société du spectacle. Une manière comme une autre de commenter le combat sans y prendre part. Le vieil adage américain du do it yourself est appliqué à la lettre. Tout ce que vous ne ferez pas, les autres le mettront en pratique à votre place, et à votre détriment. Non pas qu'ils vous en veuillent personnellement mais chacun poursuit son propre chemin. La route est davantage pavée de dollars que de mauvaises intentions, mais le résultat est le même. Ne déléguez jamais vos propres pouvoirs à autrui. Ceci devrait être la règle numéro un de tout système démocratique bien compris. Mezzrow montera sa propre maison de disques. Inutile de vous lamenter sur le rôle des majors si vous n'êtes pas capable de créer votre propre minor.

 

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C'est lors de sa seconde incarcération alors qu'il dirige l'orchestre de la prison que Mezzrow subit son illumination définitive. Alors qu'il se donne un mal de chien pour transformer la pépère formation en véritable combo, il passe un palier. Des ouvertures se font dans sa tête. Une espèce de transe mystique sèche, dénuée de tout pathos christique, qui le met en relation directe avec une compréhension intime de l'essence de sa musique. Il devient le maître de l'élève qu'il avait été jusques à lors.

 

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Le livre se termine sur deux petits additifs dans lesquels Mezzrow analyse les différences de style entre le New Orleans et le Chicagoan dont il fut le promoteur. Insiste beaucoup sur le rôle rythmique dévolu au piano. C'est lorsque cet instrument s'émancipera de cette base originelle que le jazz s'éloignera de ses racines, qu'il deviendra une musique de concertistes. Qui ne supporte pas les boursouflures du jazz rock comprendront mieux en quoi cette musique est dépourvu de grâce et d'ingénuité.

 

 

Toujours dans les additifs, une traduction d'un chapitre déjà traduit dans le corps de l'autobiographie. Une version blanchie, nettoyée des nombreuses expressions argotiques qui émaillaient la première version. Etrange parti pris ! Comme si le lecteur français des années cinquante n'avaient jamais lu Céline et qu'il était nécessaire de lui donner une transcription expurgée d'un des passages les plus savoureux du bouquin. Milton Mezz Mezzrow a autant milité pour l'épanouissement du jive que du hot. Le jive était ce nouvel idiome, cette espèce de cockney amerloque que les noirs du nord inventèrent pour mieux se réapproprier la langue des maîtres. Cette manière de se faire entendre tout en restant incompréhensible n'est pas sans rappeler le traitement que Joyce fera subir à la prose britanique.

 

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Le texte de Milton est précédé d'une préface d'Henry Miller dont les livres dans les années cinquante et soixante furent de véritables catalyseurs à la révolution sexuelle qui secoua les sociétés occidentales. Musique et sexe mêlés. Le rock'n'roll se chargera des derniers coups de buttoir.

 

 

Damie Chad.

 

 

LOOK BOOKS

 

 

AVEC LE DIABLE. JAMES KEENE. HILLEL LEVIN.

 

Sonatine Editions. Juin 2011.

 

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Sérieux correctif aux culturels séjours en prison de Milton Mezz Mezzrow. Ce n'est pas un thriller, plutôt un témoignage. L'on répète souvent que les prisons d'un pays sont à son image. Ne lisez pas ce bouquin si vous avez prévu cet été de faire un petit tour sur la road 66. Vous risquez d'annuler votre voyage.

 

 

James Keene n'est pas un innocent injustement mis à l'ombre. L'est arrêté par les stups et condamné à dix longues années de réclusion. Le juge a été sévère mais il est un très gros dealer qui ne nous cache rien de son trafic. L'a commencé au lycée puis a continué car la drogue rapporte gros et vous évite l'aliénation du travail. Son père ferme les yeux et monte des sociétés qui ratent à tous les coups. Même au pays de la libre entreprise n'est pas buiness man qui veut. Connaît pourtant la musique le papa puisqu'il fricote avec les caïds du milieu et les politiques. Un binôme des plus efficaces, les premiers fournissent les fonds et les seconds les protections.

 

 

Mais ce n'est pas le sujet du livre. Notre anti-héros se voit proposer un superbe marché : libération contre dénonciation. La morale est sauve car l'on ne veut pas le nom de ses complices qu'il a refusés de donner mais qu'il fasse ami-ami avec un tueur de jeunes filles afin de lui arracher des aveux sur tous les meurtres qu'il a commis. L'est bien en prison, mais pour un seul crime, et son avocat est un retors capable de le sortir de là.

 

 

Histoire amorale qui vous trimballe dans les pénitenciers les plus durs de toute l'Amérique, là où l'on parque à vie les fous les plus dangereux, les rebelles définitifs, les pervers incontrôlables, et les enragés les plus violents. Les brutes et les révoltés. Vision panoramique sur le système carcéral américain. Les prisonniers reconstituent d'eux-mêmes les rapports de sujétion qui les ont emmenés dans les couloirs de l'emmurement vivant. La justice ne vise à aucune amélioration, se contente de fermer les issues. Mais le plus tragique c'est la fin. Sa mission accomplie Keene retrouve sa liberté non sans mal. L'est devenu respectueux de la loi. Dit merci à tout le monde et retourne sagement à la maison. A traversé l'enfer mais semble n'en garder aucun souvenir. Tout est bien qui finit bien.

 

 

Damie Chad.

 

 

LE PIED-ROUGE. FRANCOIS MURATET.

 

1999. Collection Serpent Noir.

 

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Décevant. Les racines de l'intrigue plongent dans la guerre d'Algérie et l'épopée de la Gauche prolétarienne entre 1969 et 1973 en France. De quoi composer un cocktail molotov des plus explosifs. Mais l'impact du politique a été désamorcé au profit du drame intime. Le meurtre du père et la recherche de l'âme soeur, ça pue un peu la psychanalyse à l'eau de rose. Dommage car la survie de la militance une fois que le parti dans lequel vous militez s'est cassé la gueule est un des sujets essentiels de notre époque. Mais François Muratet contourne le problème. Se contente de raconter une histoire sans même oser poser le constat de la situation à analyser. Une barricade sans défenseur. Ne pas confondre les pieds-rouges avec les gros sabots roses.

 

 

Damie Chad.

 

 

 

Revue des revues

 

 

VINTAGE GUITARE. N° 8.

 

Juillet – Septembre 2012.

 

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Ce n'est pas le père Noël, c'est juste notre magazine préféré. A laisser négligemment traîner sur votre serviette de bain pour exciter la curiosité des demoiselles. L'on vous a fourni l'accroche, à vous de trouver le baratin. Elvis en couverture. Le trimestre dernier c'était Eddie Cochran. Trois pionniers en couve sur huit numéros, faut croire que le rock classique fait encore rêver l'hypothétique acheteur.

 

 

L'Hillbilly Cat n'est pas là par hasard, suite de l'article précédent consacré au rockabilly. Arnaud Legrand profite de son panorama rockabilly pour remettre les points sur les i des guitares. Griffe quelque peu ce qu'il n'aime pas. Mensonge : il éviscère, il déchiquète, il lamine, il agonise et règle ses comptes avec la génération disco et celle qui suivit, des années 80. La massification du public rock dans les années 70 a viré au désastre. D'abord les gros beaufs qui n'écoutaient plus les disques qu'ils passaient mais qui n'avaient d'oreilles que pour la puissance de leurs enceintes, et qui s'imaginaient être super rock'n'roll destroy sous prétexte qu'avec les basses à fond sur leur deux fois cent watts dans leur deux pièces cuisines HLM, ils empêchaient le voisin du sixième étage au-dessus d'écouter le journal télévisé, s'en allèrent former les bataillons des je-m'éclate-en boîte-sur-la-plus-grosse-sono-du-patelin... Ensuite les jeunes hommes modernes, costard cravate d'employé de guichet banque et cheveux courts coupe incorpo qui se précipitèrent sur les sons aigrelets des synthés sous prétexte que la pop insipide était à l'image de leur triste avenir déliquescent. Morale de l'Histoire : ne donnez ni de la confiture aux cochons ni du rock'n'roll à n'importe qui.

 

 

Passe en revue les gens que nous aimons, Johnny Burnette, Carl Perkins, Johnny Cash, Warren Smith, Billy Lee Riley, tique un peu sur la douceur de Buddy Holly, des Everly Brothers et de Ricky Nelson, n'est pas tendre avec Duane Eddy et Link Wray, chipote sur Janis Martin et Wanda Jackson, compare Gene Vincent à Baudelaire vieillissant, reproche à Eddie Cochran de ne survivre que dans le coeur des européens, bref se montre désagréable au possible sans prononcer tant que cela des âneries. La première génération ne fut qu'un feu de paille, très vite cernée par les majors et les institutions. Tous ces pionniers auront un mal fou à embrayer lorsque éclatera la vague anglaise. La deuxième génération, invisible pour les béotiens qui consiste en ces reprises survitaminées des classiques du rock par tous les groupes de la grande époque, ainsi que la troisième génération des Stray Cats et des Cramps sont beaucoup mieux traitées dans les encarts latéraux. Un article intelligent qui demanderait à être articuler sur un bien plus grand nombre de paramètres...

 

 

Pour le reste, vous êtes assez grand, Gibson, Fender, Eko, guitares jazz et basses de quoi faire une ample moisson de documentations des plus précises. Un article nous laisse rêveur : le vintage aurait-il tendance à devenir une passion monétaire, n'est pas encore coté en bourse mais un commissaire-priseur se lance dans la course, encore un effort et la Gretsch d'Eddie Cochran finira dans un coffre climatisé à côté des Tournesols de Van Gogh. L'on n'arrête pas le progrès, ni la course au profit.

 

 

Vous n'êtes pas content ? Ah, c'est parce qu'aucune damoiselle n'a remarqué votre Vintage N° 8, sur votre serviette de bain. Ecoutez-moi bien, d'abord il ne faut pas croire tout ce que l'on vous dit, ensuite vintage c'est aussi un simple synonyme de hasbeen. A bon entendeur salut.

 

 

Damie Chad.

 

 

P. S. : pour ceux qui s'obstinent et veulent retenter leur chance : le N° 8 de Vintage Guitare, est livré avec en sus le N° 251 de Guitarist ( & Bass). Nous déclinons toute responsabilité, si même après avoir visionné le CD de démonstration, vous vous faites traiter de Ringarist !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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