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14/06/2012

KR'TNT ! ¤ 102. CULTURE ROCKABILLY / EDDIE COCHRAN

 

KR'TNT ! ¤ 102

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

14 / 06 / 2012

 

 

 

CULTURE ROCKABILLY

 

 

1970 -2010

 

 

VINCENT GIORDANO

 

 

( 2 Impasse de la Cascade / Hameau du Coteau Sud )

 

( 13 770 VENELLES )

 

 

gvincent56@free.fr

 

 

 

160 pages, format A4, avec photos couleur pratiquement à chaque page, Vincent Giordano frappe un grand coup. En auto-production – customisation intégrale – 37 euros à l'achat, faut bien que l'auteur retombe sur ses pneus – le genre de bouquins qui devient culte dès qu'il est épuisé, et que l'on regrette de n'avoir pas pris quand il était encore temps.

 

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Je ne connais pas Vincent Giordano, mais si je ne m'abuse j'ai déjà vu son pseudo ( g-vincent56 ) traîner dans des blogues de discussions. En tout cas, c'est un malin. L'on ne compte plus les livres sur le rockabilly, oui mais ( vingt-six mille sept cent quarante deux fois hélas ! ) ils sont écrits en américain. Donc peu accessibles. Si la sécurité sociale devait me rembourser tous les cachets d'aspirine que j'ai avalés après m'être crevé les yeux sur Google Books à tenter de décoder ces bibles du rock que les amerloques débitent au kilomètre, il y en aurait assez pour multiplier par deux le PIB de notre pays.

 

 

En France à part l'Encyclopédie de la Country et du Rockabilly de Michel Rose, vous avez à votre disposition... l'Encyclopédie de la Country et du Rockabilly de Michel Rose. C'est ce que l'on appelle l'embarras du choix. Très bien écrit, bourré de renseignements et de qualité, mais sorti chez Best en 1986, il commence un tout petit peu à dater... Pour résumer vous pourrez trouver tous les défauts du monde à ce bouquin de Vincent Giordano, mais de par son unicité il est appelé à devenir un ouvrage de référence.

 

 

AVANT 70

 

 

N'y va pas de main morte Vincent Giordano ! Alors que Michel Rose commençait dans les Appalaches au temps reculé des immigrants irlandais, lui d'un coup de ciseaux il coupe sec pour débuter son récit en 1970. Pour ceux qui ne connaissent pas, charitable comme pas deux, il résume l'histoire de la naissance et de la mort du rock'n'roll en trois pages. Difficile d'établir une synthèse d'un phénomène si complexe plus succincte, même si le premier enfant de la bête ne survit pas longtemps : entre le Rocket 88 de Jackie Brenston en 1951 et la première venue de Gene Vincent en Angleterre en 1959, il ne s'écoule même pas une décennie.

 

 

En fait le rock n'est jamais mort. Il a subi une éclipse. Totale, mais le croyait-on définitivement enterré sous les décibels des groupes anglais que déjà il renaissait de ses cendres. Discrètement certes, mais sûrement. Les amateurs de Rockabilly ont besoin de la mort du rock'n'roll pour asseoir la naissance du Rockabilly. Réécrivent la légende en expliquant que le rock'n'roll lui-même est né du rockabilly, cette musique instinctivement mise au point par Presley, Perkins, Vincent et Johnny Burnette entre 1954 et 1958.

 

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Ce qui est certainement vrai, mais beaucoup moins que ce que l'on veut en tirer comme conséquence. Le rockabilly reste la forme rurale du rock'n'roll, il est au rock citadin, électrifié et porteur de la violence urbaine, ce que le blues du Delta est au Chicago blues. L'un plus poignant, l'autre plus puissant, mais tous deux indépassables en leur idiosyncrasie constitutive. Vincent ne parlait jamais de rockabilly mais de rock'n'roll, et ne se gênait pas pour donner cette même appellation au rhythmn and blues d'Otis Redding comme à la pop-music des Beatles. Vaste appellation, mais il ne faut pas oublier que jusqu'au début des années 70, l'amateur de rock de base, assez curieux et ouvert, était à même de connaître les développements encore embryonnaires des futures ramification de ce qui allait devenir un genre musical – au sens biologique du terme - à part entière. C'est que les mutations de cette musique étaient encore imprégnées de leurs racines originelles... et que le cat y retrouvait toujours ses petits.

 

 

En les années 65-66, les rockers se la jouaient profil bas. Certes les Stones et les Animals avaient remis au goût du jour les musiques d'un Chuck Berry et de Bo Diddley, mais la plupart des fans préféraient la copie à l'original. Il y eut bien le Bird Doggin' de Gene Vincent en 1966, sublime morceau qui se permettait de faire la nique au rock anglais tout en en transcendant l'architecture mélodique. Mais il y avait peu de monde capable de comprendre cela et de toutes les manières Vincent n'avait plus la surface médiatique nécessaire pour se faire entendre d'un vaste public. C'est Elvis qui à la fin de l'année 67, avec son Big Boss Man qui secoua le cocotier. Le titre fut assez diffusé pour que l'idée d'un retour possible des pionniers fît son apparition.

 

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Ce fut ce que l'on appelle aujourd'hui le premier revival : il débuta aux Etats-Unis par le NBC show de Presley, auquel succéda la prise de conscience par un grand nombre d'auditeurs radio naïvement ignorants que la mise en épingle médiatico-politique du folk de Dylan avait occulté toute la partie immergée de l'iceberg country de la musique populaire américaine. L'aérolithe que fut le Folson Prison Blues de Johnny Cash fut responsable de cette redécouverte hallucinante des fondements oubliés du rock'n'roll. Ce premier revival finit en apothéose en 1972 par le festival de Wembley, où Little Richard en grande forme consterna par ses frasques exhibitoires la vieille garde des teddy boys, gardienne de l'orthodoxie rock'n'roll.

 

 

Il faut visionner le film de la télé britanique : The rock'n'roll Singer où l'on suit la chaotique tournée de Gene Vincent en Angleterre en l'an de disgrâce 1969. Hallucinantes séquences de répétitions avec les Wild Angels à qui Vincent apprend les subtilités de l'instrumentation rock. C'est à un véritable passage de témoin symbolique que l'on assiste, Vincent disparaît fin 71, et le mouvement Ted anglais qui sera en grande partie à l'origine du renouveau rockabilly européen, se bâtira musicalement sur cet héritage que très vite, par un respect mal compris et une grande maladresse conservatrice ils ossifieront, oubliant que si Gene parvenait à tirer le meilleur de ses accompagnateurs de rencontre ou de fortune, il ne dispensait pas un enseignement codifié destiné à rester figé jusqu'à la fin des temps.

 

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Vérité en deçà de l'Atlantique, erreur au-delà. Ce n'est pas un hasard si au début des seventies toute une partie du public va s'intéresser à de vieux rockers américains oubliés. L'on redécouvre Charlie Feathers, Ray Campi, Gene Summers et bien d'autres, un autre sentier se dessine, qui essaie de remonter le fleuve dans l'espoir de retrouver l'universelle légende de l'authenticité première. C'est cet Eldorado mythique – ce pays où l'on n'arrive jamais – qui peu à peu sera dénommé Rockabilly.

 

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APRES 1970

 

 

Comme toujours dans l'histoire du rock, l'Angleterre s'emparera du ballon la première. C'est au moment même où le british blues écrase tout sur son passage que des groupes inconnus retournent au bon vieux rock'n'roll d'antan, Wild Angels dès 1967, Houseshaker en 1969, Crazy Cavan and the Rhythm Rockers en 1970, Matchbox en 1971, Flying Saucers en 1972, groupes mythiques propulsés par les séminales personnalités de Cravan Grogan, de Graham Fenton, et Sandy Ford. Ces groupes ne commenceront à avoir une véritable notoriété qu'à partir des années 76-77, qui sont aussi celles de l'explosion punk, un groupe comme Whirlwind assurant les accointances entre les deux mouvements qui coexistent mais qui ne s'entendent guère.

 

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Comme toujours dans l'histoire du rock, l'Amérique se débrouille pour produire la même chose, en plus grand, en plus vrai, en plus authentique, avec en prime ce petit grain de démesure qui fait toute la différence. En 1981 sort le premier album des Stray Cats qui donne, ou redonne – c'est selon votre philosophie ou votre vision du rock'n'roll – ses lettres de noblesses au rockabilly.

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Mais les choses vont évoluer vitesse grand V, l'on peut dire que malgré tout leur modernisme les Stray Cats – s'inscrivent en gros dans la lignée des roots originelles. Certes ils ont un son beaucoup plus puissant qui nettoie la poussière des étagères, mais ils ne s'éloignent point trop des pères fondateurs. Ne font pas tous les jours leur salutation au soleil, mais indubitablement ils se dorent aux rayons Sun. Très judicieusement, Vincent Giordano leur impose l'appellation néo-rockabilly.

 

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Le coup de balai viendra des deux côtés, de l'Angleterre avec les Meteors qui dès 1981 acoquinent franchement le rockabilly avec le punk pour créer le psychobilly – traduisez par rockabilly psychosé et vous aurez une idée de l'hybride monstrueuse obtenue, mais aussi de des USA avec les Cramps qui ajoutent au mélange punk-rockab des éclats de garage et de psychadelic. Boisson forte. Seront mêlés aux aventures du punk new yorkais.

 

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Me demande pourquoi je vous raconte tout cela, puisque Vincent Giordano, ne suit pas cette voie ( de garage ). Il n'ignore rien de l'histoire, et cite les principaux acteurs que je viens de nommer, mais il tourne un peu avant, sur la droite, pour emprunter une autre route. Celle qui vous ramène au pays natal.

 

 

REDOUTABLE CATALOGUE

 

 

Pour la suite je vous laisse vous aventurer dans les sentiers tracés au coupe dans la jungle foisonnantes des groupes existants. Ce qui me dérange ce n'est pas le choix effectué par notre auteur. L'on ne peut citer tout le monde et certains heureux nominés me sont totalement inconnus. Autant faire confiance, Vincent Giordano s'y connaît plus qu'un brin. Je peux très bien comprendre qu'il ait classé Annita & the Starbombers et Charlie Thompson dans le courant Hillbilly Rock, Western Swing, Cajun, les prestations de ces artistes que nous avons vus à Villeneuve Saint George ( voir notre centième livraison du 31 / 05 / 12 ) correspondent plutôt bien à cet essai de classement. De même la dérivation Jumpin'Jive, Rockin'Blues, Boogie avec Mike Sanchez – avec qui Imelda May travailla durant plusieurs années – m'agrée.

 

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Tique beaucoup plus sur le gros chapitre intitulé le Rock'n'Roll Authentique qui me semble un peu fourre-tout. Faire voisiner Freddie Fingers Lee avec Jesse Garon me semble osé. Ce n'est pas Garon qui me gêne, l'ayant entendu à plusieurs reprises dernièrement sur France Inter, le gars me semble intéressant, sensible, ouvert et intelligent, mais ce n'est pas d'après moi un véritable chanteur de rock. De rythme oui, qu'il ait été traumatisé par Elvis, d'accord, mais sa carrière parle pour lui : le rock a été un moment crucial de son existence, mais sa vie et sa discographie ne sont pas rock. Manque une certaine démesure. Quant à un Jimmy Ellis je vois avant tout un faiseur qui surfe sur la mort d'Elvis. Le fait que Shelby Singleton soit à l'origine de cette manipulation commerciale n'est pas à son honneur, même si du reste il sut mettre en valeur le catalogue Sun racheté à Sam Phillips. Nul n'est parfait. Même dans le monde du rock.

 

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De même je ne mettrai jamais sur le même plan, Robert Gordon et Darrel Higham. Vincent Giordano nous explique que sont les disques de Robert Gordon qui l'ont emmené au rockabilly, il a donc une prédilection sentimentale envers lui, ce qui est son droit absolu. Toutefois le parcours d'un Darrel Higham me paraît beaucoup plus authentique. Même si ce qu'il accomplit actuellement en tant que musicien de scène d'Imelda May me paraitrait beaucoup plus rockabilly que rock'n'roll. Encore qu'Imelda est avant tout une chanteuse qui ne s'embarrasse point de frontière musicale : du blues au jazz, de la country au rock...

 

 

D'ailleurs cette dichotomie rock'n'roll / rockabilly opérée par Vincent Giordano ressemble à s'y méprendre au serpent de mer à deux têtes qui finit par se mordre la queue quelle que soit la gueule qu'en fin de compte il ouvre pour attraper son appendice caudal. A lire attentivement son livre on a l'impression que le rock'n'roll se détache du rockabilly au milieu des années cinquante pour que le rockabilly retourne au rock'n'roll dans les nineties !

 

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Rock'n'Roll / Rockabilly, les deux faces de la même guitare. Le livre possède le défaut de ses qualités. Vous y puiserez mille renseignements, mais il fonctionne un peu trop comme un dictionnaire. Il manque une mise en perspective dialectique des combos les uns par rapport aux autres et l'on accepterait avec plaisir une réflexion plus affinée sur les interconnexions des principaux courants. Mais rien ne vous empêche de vous livrer à des recherches complémentaires. Vincent Giordano vous ouvre la porte, à vous de savoir vous amuser.

 

 

CULTURE ROCKABILLY

 

 

La deuxième moitié du livre est consacrée à la Culture Rockabilly. L'on commence par se vêtir, attention le perfecto ne fait pas plus le rocker que le rockabiller. Le look n'est souvent qu'une façade. Me méfie toujours des comportements de groupe. Le rocker de base n'échappe pas au fétichisme de la marchandise qui est d'autant plus gênant que derrière tous ces vêtements et ustensiles divers je n'entrevois que trop bien les enjeux commerciaux qui tentent de me manipuler à l'excès. Les profilers du marketing ont tôt fait de métamorphoser l'esprit de rébellion qui vous anime en objets de mode. L'on vous tend un miroir payant pour que vous puissiez vous ressembler. L'on remplace le désir par le besoin. C'est à peu-près la même chose, avec un tiroir caisse au milieu. Certains rockers sont aussi à leur insu des fashion victims.

 

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La frontière entre un volontaire marquage personnel d'appartenance à un groupe social déterminé et l'enfermement de l'individu dans le rite symbolique de sa propre reproduction recouvre exactement cette inter-zone mouvante où se se rencontrent, se côtoient et s'opposent l'authenticité et la parodie. L'on n'en parle peu, mais la dimension burlesque – Edgar Poe aurait employé le terme de grotesque - est historiquement constitutive de la formation du blues et du rock'n'roll. La naïveté du rockabiller est de se croire semblable à sa propre image, sa grande force un léger décalage par rapport à celle-ci. Comme pour tout, le secret de l'affaire réside en le fait de ne pas être dupe de soi-même.

 

 

Il ne faut pas nier que le look rockab en jette. Descendre en blouson léopard d'une Cadillac rose ( qui coûte ) bonbon vous classe tout de suite un homme. Mais méfions-nous. Cela peut être aussi le signe d'un embourgeoisement rampant qui ne dit pas son nom. Ne nous laissons pas éblouir par la première calandre qui passe. Certains choisissent la bagnole, mais oublient la rue. D'où ils sortent. Ou ne sortent pas. Car c'est une constante du Système capitaliste, il récupère toutes les situations originelles et authentiques de révolte pour les transformer en produits de semi-luxe pour les enfants perdus de la petite-bourgeoisie montante.

 

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Aujourd'hui vont au rockab toutes sortes de personnes qui ne sont pas obligatoirement attirées par la musique. Parfois l'on entrevoit le milieu rockab comme une niche écologique de survie. Toute ruche attire les riches. Les abeilles produisent du miel et les bourdons du fiel. Toutes ces contradictions ont tendance à ossifier le milieu, à le refermer sur lui-même, à en exaspérer les aspects nostalgiques, ce qui traditionnellement se traduit par un conservatisme politique en totale opposition avec la révolte initiale individuelle sur laquelle le mouvement se construit et essaime. Ainsi pour certains la bannière sudiste souvent brandie dans les concerts rockabilly – on la retrouve sur la quatrième de couverture du bouquin – est une manière de se revendiquer d'une idéologie profondément réactionnaire et suprématiste, pour d'autres elle ne saurait traduire que le rappel d'une naissance géographique et historiale particulière. Les esclaves noirs et leurs descendants ont autant participé à la richesse économique, musicale et culturelle du Sud que les colons blancs. Encore ne faudrait-il pas oublier le premier peuplement rouge.

 

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La longue séquence dédiée aux films « rock » est la plus intéressante de cette seconde moitié du book. Les pellicules présentées ne sont certainement pas des chefs d'oeuvre du septième art, mais malgré toutes leurs conventions et leurs simplifications, les bobines qui racontent la vie des stars du rock'n'roll ou qui mettent en scène les fans et les différents milieux du rock, obligent à réfléchir sur de vastes et inquiétants sujets : violence, racisme, perte de l'innocence, récupération et commercialisation... nous recommandons la très belle analyse de Violents Days ( 2004 ) de Lucie Chaufour ( voir notre sixième livraison du 10 / 11 / 09 ), enfin disponible en DVD, longtemps programmé seulement dans les festivals de cinéma.

 

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Le livre se termine sur d'inappréciables listes d'albums, de revues, de livres, de boutiques, et d'adresses incontournables. Indispensable. D'autant que comme se plaît à le répéter Vincent Giordano, les grands médias boudent la diffusion du rockabilly. Ce qui n'est pas un fait nouveau en soi, et peut-être pas un mal. Tant qu'il errera dans les marges, le rockabilly restera une musique dérangeante. La chose la plus horrible qu'il pourrait lui arriver serait d'acquérir cette respectabilité nauséabonde octroyée par le label consensuel du «  politiquement écoutable ».

 

 

Damie Chad.

 

 

 

PS : pour la prochaine édition penser à rajouter un index des noms et groupes cités avec renvoi aux pages appropriées ; en attendant, ne pas rater la photo de Billy ( tendance Elvis in Hawaï ), nous évoquions sa légendaire figure dans notre 101° livraison...

 

 

LOOK BOOKS !

 

 

 

 

LES LIEUX SOMBRES. GILLIAN FLYNN.

 

Sonatine. 480 pp. 2010.

 

 

J'ai pour règle de prendre chez mon libraire d'occase tout livre qui sort des Editions Sonatine. Je sais que je ne devrais pas, que leurs bouquins me font autant de mal que l'alcool, la cigarette, la cocke et les carottes râpées, mais je ne peux pas résister. C'est mon addiction préférée, mon moyen personnel de walker on the wild side of the USA. Car, je vous l'accorde, se dilatent pas la rate, ils ont la combine chez Sonatine, ils donnent à traduire ce qui se fait de mieux de l'autre côté de l'Atlantique.

 

 

Vous fiez pas au revers de la couverture, elle est mignonne comme tout Gillian Flynn, mais vu ce qu'elle écrit, c'est dans sa tête que l'on trouve les abysses. Chez Sonatine ils ont tout fait pour nous mettre en garde, leur couverture est mille fois plus belle que l'originale des ricains. Pas vraiment envie de mettre le pied dans cette ferme paumée au bout du monde. Ca pue l'angoisse et ça suinte de mélancolie. Une invitation au suicide.

 

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Un truc à désespérer de l'humanité. Libby Day a connu son jour de gloire a sept ans lorsque son frère a buté sa mère et liquidé ses jeunes soeurs. Un handicap légèrement traumatisant pour commencer sa vie. D'ailleurs elle se traîne comme une ombre sans peine. Elle essaie de survivre sa mauvaise conscience, celle d'avoir été épargnée par le destin, celle d'avoir été manipulée pour répondre à la justice, bref elle en veut à la terre entière. Tout en oubliant de se faire des cadeaux.

 

 

A court d'argent, elle est contactée par une association de passionnés des tueurs en série et des crimes étranges... La voici donc obligée – pour satisfaire cette clientèle avide de sensations fraîches – de remonter la piste sanglante. Ne va pas y trouver que son bonheur. C'est réglé comme du papier à musique, un chapitre sur l'enquête à rebours de Libby qui remonte vers l'enfance et vers l'horreur - à moins que ce ne soit l'horreur de l'enfance – et un chapitre du jour du crime qui suit de près, minute par minute, les fatidiques agissements de Ben... Un mec sympa qui écoute Slayer, Venon et autres groupes de hardrock satanistes. Que voulez-vous tout le monde ne peut pas apprécier le rockabilly ?

 

 

Vous ai résumé les trente premières pages. A vous de jouer. La face sombre de l'Amérique vous saute très vite à la gueule. Attention, elle mord.

 

 

Damie Chad.

 

 

MAUVAISES INTENTIONS 3.

 

Autour du procès antiterroriste pour 6 camarades en mai 2012.

 

Antirépression & Luttes / Police & Justice.

 

HTTP://INFOKIOSQUE.NET/MAUVAISES_INTENTIONS

 

 

 

Faut pas croire qu'il n'y a que dans les thrillers des amerloques que le monde n'est pas beau. En notre douce France, ce n'est pas mieux. En plus on n'est pas dans un roman, mais dans la vraie vie. Tout de suite, ça fait très mal.

 

 

Ne voilà-t-il pas que la police – censée protéger la veuve et l'orphelin – s'amuse à peaufiner dans l'ombre des dossiers compromettants sur les citoyens au-dessus de tout soupçon. Nous admettons qu'ils sont jeunes, qu'ils portent un regard critique sur notre société si égalitaire, qu'ils dénoncent les camps de rétention ( à ne pas confondre avec les camps de concentration et ne faites pas les mauvais esprits en insinuant qu'il faut un début à tout ), qu'ils manifestent leur mauvaise humeur au nom du droit imprescriptible des individus à vivre librement leur vie du mieux possible là où ils le peuvent, bref ils ne correspondent pas au portrait robot du mouton docile auquel l'on voudrait en haut-lieu que ressemble le consommateur de base.

 

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Donc voici nos jeunes gens déférés devant la justice afin de répondre de faire partie de la nouvelle arlésienne, la terrible mouvance anarcho-autonome, cette organisation fantôme à visée terroriste dont aucun de nos prévenus ne s'est jamais déclaré. Personne d'autre non plus. Mais il est bien connu qu'il n'y a que l'intention qui compte. Elle peut être bonne, mais dans le cas qui nous préoccupe, selon la police et la justice ( ces deux institutions d'élite qui se sont faites admirablement remarquer par leur courage et leur acuité politique durant la sombre période de l'Occupation ) elle serait très mauvaise.

 

 

D'ailleurs à toutes fins utiles on a pris garde de les jeter quelques mois en prison, mais le dossier se dégonflant au fur et à mesure que les trois ans d'instruction peinaient à rassembler des éléments compromettants il a fallu les relâcher, la mort dans l'âme. Le procès s'est déroulé fin mai. A l'heure actuelle où nous écrivons l'on attend... le jugement.

 

 

La brochure est parue avant le procès. Nous ne saurions que vous en recommander la lecture. Il est important de connaître la réalité sociale et politique dans laquelle l'on vit. Notre démocratie s'empare de tous les attributs des sociétés de contrôle et de surveillance. L'état n'est plus le garant des libertés, se pose de plus en plus en monstre froid, cynique et manipulateur. Le Léviathan de Hobbes jette son masque protecteur. Il aiguise ses dents et a besoin de faire quelques exemples. On le comprend : depuis quelque temps dans toute l'Europe la colère sourd, les citoyens se réveillent peu à peu de l''asthénie généralisée qui prévalait jusqu'ici.

 

 

Question subsidiaire : l'esprit rebel-rock est-il une mauvaise intention ?

 

 

Damie Chad.

 

 

 

DIRECTLY FROM ALBERT LEA

 

 

 

19° AFFICHE EDDIE COCHRAN

 

 

 

PAR ELOÏSE ADAMS

 

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