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16/09/2010

KR'TNT ¤ 12.

 

KR'TNT ¤ 12

ROCK'N'ROLL CLANDESTZINE FLYER / N° 12 / 03 / 12 / 2009

A ROCK-LIT PRODUCTION

 

TELSTAR. NICK MORAN.

 

CON' O'NEILL / CARL BARÂT / KEVIN SPACEY / PAM FERRIS / MATHEW BAYNTON / TOM BURKE / JON LEE / RALF LITTLE / JJ FEILD / NICK MORAN / JESS CONRAD / JAMES GORDEN / JUSTIN HAWKINS / NIGEL HARMAN / NICK THOMAS-WEBSTER / ALAN SCALLY / MICHAEL CHALKLEY / ROBERT WILSON. Sortie le 25 / 10 / 2008.

 

Le GOOD MORNING ENGLAND qui relate l'histoire de la station pirate Radio Caroline a bénéficié d'une large publicité et est très vite arrivé sur les écrans français en mai 2009. Il n'en a pas été de même avec TELSTAR de Nick Moran. Les producteurs ont-ils jugé qu'un film consacré aux premières années du rock'n'roll anglais n'attireraient pas autant de monde que celui qui relate l'épopée de britannique de la période Beatles / Rolling Stones qui suivit ?

Toujours est-il que TELSTAR n'est pas sorti en France et qu'à la date de ce papier l'on ne peut se le procurer qu'en DVD anglais non-sous-titré. Ce qui limite forcément le plaisir d'écoute pour ceux qui ne maîtrisent pas parfaitement la langue d'Eric Burdon ou incidemment de Shakespeare. Ce qui est malheureusement le cas de votre serviteur. En gros je n'ai compris que quinze pour cent du film, et ait pu subodorer la moitié des dialogues. Pour le reste je me suis contenté de regarder les images et d'admirer le jeu de Con'O' Neil qui livre là une magnifique prestation.

 

Joe Meeks, vous connaissez à coup sûr. Temptation Baby de Gene Vincent est entièrement crédité, paroles et musique, à Joe Meeks. Rappelons que Gene chante ce titre en une fameuse séquence du film Live it up - uniquement scénarisé, dialogues, et chansons, par Joe Meeks - durant laquelle il tourne autour d'une locomotive, Whoah ! Whoah ! Whoah ! Temptation Baby ! Un joli petit rock bien enlevé, rapide et agréable à écouter.

 

Mais le coup de maître de Joe Meeks reste son hit fabuleux, Telstar, des Tornados. Les virulents amateurs du principe de la propriété privée, vont exiger des explications, pourquoi Joe Meeks serait-il titulaire de Telstar alors qu'il fut enregistré par les Tornados. Parce que c'est lui qui écrivit le morceau et en présida l'enregistrement. Les Tornados ne sont qu'un groupe de studio qui exécutent les idées de l'homme derrière les manettes. Pour être franc, les musicos de l'époque n'étaient pas vraiment au diapason de la créativité rock.

 

Le cerveau de Joe Meeks était une cocotte minute en ébullition permanente crachant une idée originale toutes les cinq minutes. Nous rendons grâce à son génie, mais le système mis en place par des producteurs comme Meeks et Larry Parnes, comportait ses propres limites. Le rock n'appartient plus à ceux qui le jouent et le chantent sur scène. Les chanteurs sont des clones manipulés qui ne se possèdent plus. La musique rebelle n'est plus qu'un produit manufacturé, une espèce de ready-made jetable après usage.

 

L'explosion du rock anglais de la génération Beatles s'explique en partie par le fait que les groupes eurent davantage voix au chapitre dans le choix des morceaux et bénéficièrent d'une bien plus large liberté d'interpréation et d'innovation. Le film montre très bien comment l'étoile de Joe Meeks commença à décliner lors du surgissement de ce tsunami musical qui emporta tout dans son passage.

 

Joe Meeks marque le triomphe du studio sur le rock et la main-mise de l'industrie sur la création musicale. Si le phénomène garage réussit à contourner le premier obstacle, nous sommes plus réservé sur la réelle efficacité des labels dits indépendants. La première victime du système fut d'ailleurs Joe Meeks. Un peu comme le docteur Frankestein assassiné par la créature que ses expérimentations avaient engendrée. D'abord parce que l'on ne réussit pas toutes les trois semaines un hit mondial aussi colossal que Telstar, ensuite parce que le sorcier du bidouillage pré-électronique ne commandait pas les leviers financiers de ses propres productions. Les royalties demeurèrent largement impayées jusqu'à sa mort.

 

La deuxième partie du film est la plus belle. On y voit la lente déchéance d'un homme, floué par ses patrons, lentement rejeté par l'évolution musicale de l'époque dans la catégorie des has-been, et se perdant progressivement dans la folie. L'histoire se termine mal, en 1967, Joe Meeks, non sans avoir au préalable tué sa patronne d'un coup de fusil retourne l'arme contre lui et se donne la mort... Nous sommes au-delà du rock'n'roll, Con O' Neill est étincelant de souffrance, il exprime les turpitudes de l'âme humaine avec un brio magistral qui n'incline jamais à la pitié, mais vous provoque un sacré malaise.

 

Les amateurs de beau sexe risquent d'être déçus. Le film fut annoncé comme un super medley de sexe et de rock'n'roll. ( Un peu de pills drug aussi ). Mais les jolies filles sont plus que rares. Les goûts de Joe Meeks le portaient vers les hommes. A une époque où l'homosexualité ne bénéficiait pas des libertés qu'elle a depuis acquises. Une partie des dérèglements mentaux de Meeks proviennent aussi de ses démêlés avec la police. Mais la médaille de l'indignation possède aussi ses revers pas très roses. Meeks profite quelque peu de sa situation de producteur pour induire chez les jeunes postulants chanteurs ce que nous appellerons pudiquement des penchants gays. La vie d'une rock star n'est pas toujours très gaie en ses débuts. Bref davantage de cul que de sexe.

 

Côté rock qu'y a-t-il à voir au juste dans ce film ? Une seule véritable vedette brevetée d'époque, Jess Conrad ,qui ne joue pas son propre rôle – celui-ci est tenu par Nigel Harman – mais celui de Larry Parnes. Conrad est un véritable rescapé des années soixante, il a poursuivi jusqu'à ces toutes dernières années une carrière de haut niveau, accrochant son nom à la saga des Sex Pistols. Mais apparaissent aussi le guitariste Ritchie Blakmore qui deviendra une des pièces maîtresses du groupe de hard rock Deep Purple, Clem Cattini qui traversa tout le rock anglais derrière la batterie, un peu comme Big Jim Sullivan à la guitare. Jimmy Page qui ne connaissait pas encore John Bonham pensa à lui pour l'installer derrière les fûts de Led Zeppelin, c'est dire le savoir faire du monsieur qui dans le film semble posséder un cerveau aussi aigu que sa grosse et encombrante bedaine.

 

Citons encore Geoff Goddard qui de son piano électrique plaqua des accords célestes sur les guitares des Tornados et composa plusieurs morceaux pour Meeks, notamment le fameux Just like Eddie, hommage à Cochran, chanté par Burt Heinz. Billy fury ne fait qu'une rapide apparition, Lord Sutch enregistre un semblant de scopitone déguisé en Jack l'Eventreur et semble ne devoir son succès qu'aux mises en scènes imaginées par Meeks. N'oublions pas Mitch Mitchell qui malgré ses déconvenues avec maître Meeks acquerra l'immortalité rock'n'rollienne en devenant le batteur du Jimi Hendix Experience.

 

Mais si je tenais à voir ce film c'était avant tout por Carl Barât interprétant le rôle de Gene Vincent. Ou plutôt le rôle de Gene Vincent interprété par Carl Barât. Je n'ai jamais vraiment accroché aux Libertines qui au début des années 2001 s'imposèrent dans la lignée des Strokes et des Hives. Beaucoup portent ce groupe aux nues et décrètent qu'il marqua un retour de la pop anglaise vers le rock. J'ai eu beau me forcer, les Libertines sonnent vraiment trop pop à mes chastes oreilles.

 

Mais c'est tout de même Carl Barât le chanteur des Libertines qui eut le redoutable privilège d'incarner Gene. Le parcours chaotique des Libertines permet à Carl Barât de revendiquer cette prétention. Mais le résultat est un peu décevant. Carl Barât ne joue pas Gene Vincent, il joue le rôle de quelqu'un qui imite Gene Vincent. Sachez goûter la différence ! Pas franchement mauvais mais pas authentique. Pourtant il ne manque pas de documents d'époque sur You Tube !

 

Il faut dire que le scénario n'aide pas. Gene Vincent se retrouve bombardé, l'on ne sait pas trop pourquoi, au milieu du film. Bien sûr l'on entend Be Bop a lula en fond d'écran, l'on voit ses affiches de concert collées sur le mur du studio, et l'on assiste à deux morceaux en direct live, dont notamment Temptation Baby, mais il disparaît aussi mystérieusement qu'il est apparu. C'est un peu la cerise sur le gâteau qui est restée collée sur le carton emballage et qui ne produit pas l'effet attendu.

 

Remarquons qu'au moins en cela Nick Moran contribue à propager la légende maudite de Gene Vincent qui ne bénéficia jamais de la part de tous ceux qui exploitèrent son talent et sa renommée de l'aide entière qu'il était en droit légitime de recevoir. Et cela va jusqu'aux bonus, assez longs, qui interviewent les acteurs durant le tournage. Evidemment pas un mot sur la séquence de Vincent. Qu'à cela ne tienne, vous croyez vous rattraper avec les moments scéniques du film promis in extenso dans ces mêmes bonus. Carl Barât et Gene Vincent doivent faire partie des malus, car l'on n'en zieute pas un seul dixième de seconde ! Faudra vous contenter de la copie initiale coupée et entrecoupée de plans adjacents.

 

Sur ce, le film vaut tout de même le détour. Regardez-le et keep le early british rokin' jusqu'à la prochaine fois !

 

DAM CHAD.

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