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05/11/2014

KR'TNT ! ¤ 208.DELTA BOMBERS / JALLIES / JOHNNY ROTTEN / PATTI SMITH / EDDIE COCHRAN

 

KR'TNT ! ¤ 208

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

A ROCK LIT PRODUCTION

LITTERA.INCITATUS@GMAIL.COM

06 / 11 / 2014

DELTA BOMBERS / JALLIES / JOHNNY ROTTEN 

PATTI SMITH

DOCUMENT EDDIE COCHRAN

 

Béthune Rétro. 30 & 31 août 2014

DELTA BOMBERS

LE LIMON DES DELTAS

 

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On les guettait. Pendant le set de Marc & the Wild Ones, on en vit un apparaître. Ça nous rassurait de le voir un peu gras, comme sur la pochette de «Wolf», le second album des Delta Bombers. Andrew Himmler portait une casquette de marin breton et souriait comme un bellâtre napolitain. Il sortait d’un carton les CD des Delta Bombers pour les disposer sur une petite table de camping, au pied de la grande scène où, trois mètres plus haut, se tortillait Marc.

 

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En deux ans, les Delta Bombers auront réussi à se forger une bonne petite réputation, au point de se retrouver bombardés têtes d’affiche du samedi soir au festival rockab de Béthune. Il se dégage de ce groupe un violent parfum d’exotica, sans doute à cause - ou grâce - à leur look de chicanos bien enveloppés.

 

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Bien enveloppé ? Il faudrait plutôt parler de pachydermisme dans le cas du batteur qui vint relayer Himmler à la petite table de merchandising. L’amigo semblait en pleine forme, aussi large que haut, affublé d’une casquette de baseball bleue, de grandes lunettes à montures bleues et blanches et d’un pantacourt taille hippo. Quelques tatouages épars décoraient le gras de sa peau olivâtre. Une jeune fille aux cheveux teints en mauve l’accompagnait. Elle semblait merveilleusement assortie au gros batteur puisqu’elle mesurait 1,50 m de haut pour environ 250 kg de cellulite pure. Il s’agissait sans doute de sa girlfriend. Ils devaient partager tous les deux les mêmes vices trash et recouvrir leurs tacos de mayo au petit déjeuner. La fête de l’andouillette qui se tenait tout près à Arras leur tendait les bras, mais comme les Bombers devaient monter sur scène le soir à 22 heures, il n’était pas question d’aller baguenauder dans la région.

 

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Quand on a un peu l’habitude du rock et de ses excès, on sait que les gros sont parfois les meilleurs. Des exemples ? Leslie West, Frank Black ou Tad Doyle, pour ne prendre que les exemples les plus connus. Les gros peuvent se transformer en vraies bêtes, et peu de gens chantaient et hurlaient aussi bien que les trois pré-cités. Parmi les gros lards du rock, on trouve aussi Bob Hite et les mecs de Poison Idea qui avaient décidé de devenir obèses en bouffant comme des porcs, selon le principe établi par Marco Ferreri dans «La Grande Bouffe». Il faudrait aussi citer Fats Domino qui sur scène déplaçait son piano à coups de bide. Puis Buddy Miles, qui mieux que personne a su incarner le trash black tout en jouant avec les meilleurs guitaristes de son époque, Mike Bloomfield et Jimi Hendrix. N’oublions pas l’immense Mama Cass qui fit jaillir de sa gorge profonde des harmonies vocales séculaires, Bob Mould qui fut au temps béni d’Hüsker Dü un brin obèse, et les deux bibendums géniaux - les frères Van Conner - qui jouaient avec Mark Lanegan dans les Screaming Trees. Et qui se souvient de Tiny Wood, la baleine qui chantait dans Ultrasound, et de David Thomas, qui créa la légende de Pere Ubu avec «The Final Solution» ? C’est sans doute à cause de tous ces gens-là qu’on s’est mis à respecter les boules de graisse. Et ce n’était pas seulement parce qu’ils étaient gros qu’ils créaient des légendes.

 

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Alors forcément, le gros batteur intriguait. Un monstre pareil devait jouer comme un dieu.

On apprit plus tard dans le cours du concert que les Delta Bombers étaient en Europe depuis deux mois pour la promo de leur troisième album, intitulé «The Delta Bombers».

 

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Pochette noire, flanquée d’un Jolly Roger. Comme les Supersuckers, ils font joujou avec l’image des pirates. Attention, c’est un gros disque. Ils tapent un peu dans tout, le blues, la country et le rockab, et ils s’en sortent plutôt bien car le chanteur-leader Chris Moinichen est une sorte de force de la nature, un vrai carnassier. Avec «Grinnin’/No Shoes» qui ouvre le bal, on les voit aller sur le heavy blues comme les requins vont sur les naufragés qui saignent, avec un appétit démesuré, mais comme dirait le commandant Cousteau, on n’y peut rien, c’est la nature. Quand les Bombers tapent dans le rockab, ils le font avec une sorte de sauvagerie. «Lock The Door» estourbira plus d’une oreille. C’est chanté avec une hargne peu commune. Ça sent bon la barbe et les poux. C’est slappé et gimmické à la volée. Voilà des mecs qui savent secouer les colonnes du temple rockab. Rien qu’avec ce cut, on se console de leurs dérives bluesy. Ils rendent hommage à Marie Laveau, une sorcière de la Nouvelle Orleans dont la tombe fut rendue célèbre par Peter Fonda et Dennis Hopper, venus y prendre un trip d’acide dans «Easy Rider». Les Bombers enchaînent avec «Mississipi Bayou», histoire de bien secouer les puces du boogaloo - yeah yeahhh ! - Ils ont un vrai son, même s’ils semblent se disperser. Ils slappent «You Got To Lose» à la vie à la mort. Il s’agit d’un vieux coucou signé des deux grands Big, Big Joe Turner et Big Dix. Andrew Himmler joue un gimmick infernal en continu. Quelle finesse d’action ! Il reprend le thème dans le solo, à la Burlinson et il épate toute la galerie. Encore plus fantastique : «No Evil», chanté avec un art consommé. Ils en font un hit impénitent. Et derrière, le rockab sonne comme la casserole du diable. Andrew Himmler retrouve son aisance fantasmagorique pour le solo et sa maestria éclate enfin au grand jour. Ils reviennent au swamp-rock avec une reprise inspirée du «Run Through The Jungle» des Creedance. Vers la fin de l’album, on les voit même faire du Screamin’ Jay, mais il leur manque le goulu du boogaloo.

 

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Leur premier album, «Howlin’», avait appâté les maraudeurs. Il bénéficiait du prestige du label californien Wild Records, ce qui facilitait encore les choses. Ils attaquaient avec un «Run & Hide» bien dru et avec un slap qui restait à l’arrière-garde d’un chant déraillé. Ils jouaient leur mid-tempo dans les règles de l’art. Ils enchaînaient avec «The Way You Love», un pur rockabilly hop chanté avec la classe d’un bopper de 56. Le bopper de 56 s’appelait déjà Chris Moinichen. Il savait se mettre à son avantage, comme par exemple dans «Nobody’s Guy», où il défonçait les portes à coups d’épaule. Ce mec vibrait de puissance. Il n’avait pas de timbre particulier, c’était un chauffeur de salle, un déplaceur de montagnes, une sorte de Raspoutine du bop. Il faisait un étrange mélange de Creedance et de bop. Et ça marchait. «Tin Can Boogie» était aussi une belle pièce de rockab endiablée. Chris Moinichen maniait le hiccup à la perfection - hey baby what you wanna do - et l’ami Himmler envoyait un solo dans l’esprit des grands prédateurs de l’ordre noir. Ils allumaient bien «Gotta Get Out» (oublié dans le track-listing imprimé au dos de l’album). Ces mecs savaient parfaitement fulminer. Ils savaient bopper un beat. Ils continuaient d’embraser les imaginations avec «The Desert», rockab sérieux et cavaleur et dans «All Through The Night», Moinichen sonnait exactement comme John Forgety. On sentait Moinichen fasciné par son légendaire compère californien. D’ailleurs, sur scène, quand il annonce «Run Through The Jungle» et lance au public : «If you don’t dig it, I don’t care !» (Si ça ne vous plaît pas, j’en ai rien à foutre).

 

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Mais le deuxième album, «Wolf», n’était pas aussi bon. Ce fut même une déception. Les Delta Bombers se dispersaient. Il s’éloignaient du rockab et tapaient dans des reprises du style «The Last Time» des Stones. Ils essayaient de pulser leur cover au slap, mais ils s’égaraient exactement de la même façon que Jack Rabbit Slim, en voulant mélanger les influences et les genres. Ils tapaient aussi dans le boogaloo avec «Witch Doctor» et reprenaient du poil de la bête en saluant Wolf par deux fois : avec le morceau titre et, en fin d’album, avec une reprise de «Smokestack Lightning», boppée avec tact. Chris Moinichen s’y montrait digne de Wolf car sa version était diablement inspirée. Peu de gens osent encore aujourd’hui s’attaquer aux classiques de Wolf. Les Delta Bombers et Left Lane Cruiser sont bien les seuls. Sur cet album, on trouvait quand même un ou deux rockabs digne de l’album «Howlin’», notamment «Who Are You», joli petit rockab secoué à l’arrache. Ils sortaient un son très particulier et bien ancré dans le sujet. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on les admire. Chris Moinichen screamait et les muchachos pulsaient. Ils semblaient jouer la carte du petit bop tout en refusant de se laisser embrigader. Comme s’ils voulaient s’émanciper. Mais les morceaux suivants manquaient singulièrement de caractère. Ils semblaient avoir perdu le fil, ce qui pour un groupe ne pardonne pas.

 

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À 22 heures précises, on était au pied de la scène. Il fallait en avoir le cœur net. Après un bon album suivi d’un album raté, on espérait qu’une prestation scénique allait nettoyer toutes les ardoises et asseoir leur notoriété. En réalité, on attendait tout de ces mecs. On voulait croire qu’ils allaient exploser le festival. On attendait d’eux qu’ils réinjectent de la sauvagerie et du trash dans le rockab et qu’ils renouent avec l’esprit originel de cet art ancien. Et c’est justement parce qu’ils étaient gros et chicanos qu’on y croyait. Alors Chris Moinichen est arrivé sur scène, avec son look de biker, ses toiles d’araignées tatouées sur les coudes, sa barbe de Raspoutine et sa guitare sèche à caisse crevée. Ils mirent en route un set foutraque et complètement hétérogène, bardé de heavy blues sans intérêt. On se demandait à quoi servait la stand-up. Chris Moinichen soufflait dans son harmo et ça sonnait un peu faux. Ils tapaient aussi dans le Diddley beat, et encore une fois la stand-up n’avait rien à faire là-dedans. Pour encore aggraver les choses, ils jouèrent des balades country légèrement ennuyeuses. On était effaré d’un tel gâchis. Mais quand ils attaquaient un vrai rockab, ils redevenaient monstrueux. Les Delta Bombers auraient pu ravager l’Europe comme les Huns. Car Chris Moinichen, c’est Attila avec la barbe de Raspoutine.

Signé : Cazengler, Bomber de torse

Delta Bombers. Howlin’. Wild Records 2011

Delta Bombers. Wolf. Wild Records 2013

Delta Bombers. The Delta Bombers. Wild Records 2014

De gauche à droite sur l’illustration : Jesse Alonzo (drums), Chris Moinichen, Andrew Himmler et Gregorio Garcia (stand-up).

O1 / 11 / 14 / K' FEE DU C'OING

VERT LE GRAND ( 91 )

THE JALLIES

Vous savez les filles c'est comme ça. Vous êtes chez vous, pénardos au coin du feu, tranquille comme Baptiste, prêt à relire la troisième Catilinaire de Cicéron lorsque le net clignote. Caramba ! c'est un appel au secours, sont à Vert Le Grand, le grand quoi ? et c'est vers où ? Dans quel coin ? Les questions se bousculent dans la tête. Il ne sera pas dit que vous aurez laissé les trois plus jolies nymphes de Seine & Marne, perdues au milieu de nulle part, prêtes à succomber sous l'assaut de peuplades autochtones, vraisemblablement cannibales et avides de chairs fraîches. N'ai même pas eu le temps d' alerter la teuf-teuf que la vroum-vroum du Grand Phil stoppe de ses quatre ABS devant la porte. «  Dépêche ! » qu'il me crie. Chevaliers servants en service. Tout juste le réflexe de sauter du balcon et de me faufiler dans l'habitacle par le toit ouvrant qu'il démarre en trombe. L'on roule à tombeau ouvert, mais l'on s'en fout, à cheval sur le capot l'Ange du Seigneur envoie dans le fossé les malencontreuses voitures qui croisent notre chemin. Nous ne tolèrerons aucune fraction de seconde de retard. D'habitude ce sont plutôt les filles qui nous courent après, mais pour les Jallies on fait triple et notable exception. Parce que ce sont elles. Parce ce que ce sont nous.

 

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On déboule à Vert Le Grand – comme il fait nuit c'est un vert très sombre – en trombe, le patelin est désert, l'on remonte l'artère principale sur les sombreros de roue, personne, came plat, si ! une silhouette sise sur une chaise, devant la façade d'un café, qui justement fait le coin de la rue, arriverions-nous trop tard en cette après-nuit funeste d'Halloween, serait-ce le dernier des zombies échappés du cimetière communal qui viennent de dévorer tout cru la population entière du patelin y compris nos trois pulpeuses Jallies préférées ? Mais non, notre cauchemar s'achève lorsque le supposé vampire nous sourit, c'est Julios le contrebassiste des Jallies qui prend le frais vespéral tout en dégustant un verre de digestive ambroisie.

Mission accomplie. Ne reste plus qu'à nous mettre à table, aux Jallies de jouer. Le temps de compter jusqu'à

SET

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et c'est parti. We are the Jallies qu'elles psalmodient toutes les trois ensemble. Z'ont beau, z'ont belles se trémousser les donzelles, l'effroyable réalité n'échappe pas à notre prunelle obstinée. Thomas n'est pas là, retenu par d'autres nécessités, inutile de vous raser la tête et vous asperger le crâne de cendres froides, ni de vous lamenter devant la soudaine calamité qui nous accable, les Jallies ont sorti leur as de coeur de leurs manches, nos trois Ysolde wagnériennes ont emmené Tristan que vous connaissez déjà puisqu'il les avait dépannées à l'exo 77 ( voir notre Kro 195 ) du mois de juin de cette année. Bref c'est reparti comme en 14, et l'on ne tarde pas à s'en apercevoir. Tristan c'est le seul guitariste que j'ai entendu se plaindre du manche de sa strato ( directly importé des States ) qu'il juge trop court. Trouve la piste d'atterrissage trop brève, l'aimerait que ses doigts puissent cavaler encore plus bas et plus vite sur leur élan. Phil et moi échangeons un regard surpris, avec toutes ses interventions fulgurantes et vrombissantes dont il aura parsemé la soirée, soulevant à chaque fois un tonnerre d'applaudissements appréciateurs, il nous semble difficile de faire mieux. En tout cas l'a éveillé notre curiosité et nous ne manquerons pas d'aller l'écouter le 10 novembre prochain avec son groupe de hard Ward Leonard, quand on nous promet des petites gâteries, nous ne savons pas dire non. Pour nos lectrices nous ajouterons qu'avec sa casquette, sa fine moustache et sa pointe de mousquetaire sous le menton, il dégage un charme fou.

 

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Julio possède lui aussi une casquette. A la Blue Caps. Pas vraiment fringant car il ne s'est pas couché de la nuit. Mais vu la force avec laquelle il a cogné sur ses cordes, il devrait arrêter définitivement de dormir. Energie brute. L'a toujours été partisan du swing sauvage, mais ce soir l'a outrepassé les limites de la violence autorisée en réunion, nous a descendu quelques soli d'anthologie qui ont étonné le grand Phil, pourtant habitué à traquer les partitions de la musique classique. «  Julio, un solo ! », ordonnaient les Jallies, à parole magique, réponse automatique, et shlang l'on avait droit illico à une espèce de twang-bass apocalyptique qui serait capable de vous arracher les oreilles, immédiatement suivi d'un décollage de 747 stratosphérique de la part de Tristan. Elles les avaient cachés derrière elles, mais les garçons ont su se faire entendre.

 

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Evidemment les trois grâces en profitent, n'arrêtent pas de donner des ordres, Guitar Please ! Julio, go on the big mama ! Puisque les boys ont la rage autant les faire bosser. Mais attention, chez les Jallies les boss ce sont bien les nénettes. ( Même qu'une d'entre elles a la bosse des maths ). Et les deux malheureux s'exécutent sans tergiverser. Papotent un peu entre les morceaux pour s'échanger les instrus et les places devant les micros, mais sans exagération, quinze secondes, puis elles timbrent de leurs voix. Particulièrement en forme. Se bousculent à la caisse claire, un trop plein d'énergie à décharger apparemment, Leslie m'épate ( de chien ) sur Hound Dog, reproduit à la perfection ces inimitables dégringolades de D. J. Fontana qui ponctuent les différentes phases du morceau tout en relançant la dynamique intérieure. Pour les choeurs, vous m'excuserez mais nos trois infantes ont un minois bien moins ordinaire que les Jordanaires.

 

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Un régal de roi. Je ne parle du contenu de nos assiettes, très bon, je vous rassure – la salle est pleine, un petit groupe en tenue fifty, et une large tablée de consommateurs qui ne tarderont pas à se révéler de superbes danseurs de rock – mais de la prestation des filles. Une pêche extraordinaire. These boots are made for walking, l'on se dépêche de filer doux, A train kept a rollin', all the night long, si vous voulez m'dnoiselles ! Vanness explosive, Céline tourbillonnante, Leslie captivante, un bouquet aux mille parfum. Mais que vois-je ? Deux individus qui se préparent à s'enfuir en plein milieu du premier set ? Rattrapez-les et attachez-les au poteau de torture pour manquement grave à la beauté du monde. Pas la peine, les filles s'en chargent, coupent l'intro d'Imelda May. Z'interpellent la jeune fille «  Cindy ! Tu nous la fais ! ». Surprise 1, elle acquiesce à l'instant. Surprise 2 : elle ôte son manteau dans lequel elle était emmitouflée comme un général sud-américain dans son costume d'apparat, les soirs de réception à l'ambassade du Pérou. Surprise 3 : avec sa marinière à rayures quasi vénitiennes et son pantalon moulé, elle ressemble à une quatrième Jallies. Surprise 4 : s'empare du micro et crac sans la moindre trace de trac elle se lance dans une version carabinée de l'hymne imeldien, la voix assurée, le rythme dans la peau, le corps enfiévré et la fesse aguicheuse, elle emballe en trois minutes quarante-cinq secondes le public. Dans la poche arrière de son jean. Surprise 5 : par où l'on apprend qu'elle fait partie du groupe bellifontain Sugarfoot. Révélation 6 : Cindy n'est autre que la soeur de Leslie.

 

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Un deuxième set, dans la lignée du premier, mais ce n'est pas pour cela qu'on les laissera partir. Prisonnières ! Ne seront libérées que sous rançon. Vaness négocie, on les laisse prendre l'air dix minutes et elles reviennent pour un set 100 pour 100 rock and roll. Ce sera l'apothéose, Elvis, Johnny Burnette, Imelda May, Chuck Berry, Gene Vincent, que du lourd. Mais rien de lourdingue, du vif argent, du feu, de la flamme crépitante, Vaness survoltée la voix plus rauque and roll que jamais, Céline impérieuse galopant tel un foal ivre de liberté sur le country-blues Goin'Up The Country du vieil Henry Thomas revisité par Canned Heat, et Leslie qui nous canonne d'un Johnny Got a Boom Boom frappa-dingue. Tristan nous triture quelques incendies de forêts géants, Julios allume des contrefeux dévastateurs, et les trois nymphettes transformées en furies destructrices carbonisent le coeur de l'auditoire. Vanessa, Céline, Leslie, les derniers mots qui se sont échappées de nos âmes enfumées, juste avant le trou noir du quotidien qui nous a happés à la fin de cette brûlante soirée d'automne !

Et je m'en vais

Au vent mauvais

Qui m'emporte

Deçà, delà

Pareil à la

Feuille morte.

Verlainienne tristesse d'une vie sans les Jallies !
Damie Chad
( D'anciennes photos car les miss n'ont pas réalimenté leur FB )

LA RAGE EST MON ENERGIE

mémoire

JOHN LYDON

alias JOHNNY ROTTEN

( avec Andrew Perry )

( Seuil / Octobre 2014 / 711 pp )

 

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Faut être franc vous en avez pour votre argent ( 25 euros ) – mais l'ultime geste punk ne serait-il pas de le voler ? - plus de sept cents pages remplies à ras bord sans compter les vingt de photos dont beaucoup en couleurs, des heures et des heures de lecture, d'abord passionnantes puis ennuyeuses. Si vous ne vous sentez pas de taille à gravir cet Himalaya de mots contentez-vous du Sex Pistol, Rotten par Lydon publié en 1994 en Angleterre et en 2005 chez Camion Blanc et chroniqué dans notre cent quatre vingtième livraison du 12 mars 2014, vous y trouverez l'essentiel de la vision rottenienne du monde.

 

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Donc vingt ans après. Comme Alexandre Dumas. L'assassin revient sur les lieux du crime. Celui de son existence. Longuement. Ne peut s'en défaire. Vous pourrez le suivre à la trace. Où qu'il aille d'après ses dires vous relèverez les mêmes empreintes sanglantes. Nous fait le coup du midnight rambler, le tueur en série qui court toujours et que personne ne rattrape. A part le temps et le vieillissement. Pouvez toujours faire le fiérot au bord de la tombe en proclamant urbi et orbi que vous vous êtes débrouillé tout seul pour arriver à votre port d'attache funéraire. Mais vos déclarations sentent l'esbroufe et le carton pâte. Une vision de l'esprit. Et de ce dernier, John Lydon n'en manque pas.

MISERE

S'attarde longtemps sur son enfance. Le moteur premier de la rage against the machine. Pas difficile de comprendre les conditions de vie du prolétariat anglais. Soit vous devenez un parfait abruti partisan d'un club de foot. C'est ce que l'on appelle la réduction au plus petit commun dénominateur. Une espèce d'auto-mutilation mentale qui coupe net l'envol de tous les possibles de votre future existence et vous vous transformez en boule de haine sauvage à l'encontre du monde entier. Vous êtes devenu un taureau de combat, mais châtré. Votre force n'est plus qu'un surplus de bêtise graissillante, que vous érigez en arme de défense absolue dont vous êtes la première victime et que vous retournez stupidement contre tous ceux qui font partie de votre classe sociale. Football et baston sont les deux seules mamelles auxquelles vous vous abreuvez. Atomiser les individus pour mieux régner, la british bourgeoisie très fortiche se frotte les mains. L'a encore quelques fers au feu pour ceux qui n'aiment pas le sport : dans ces quartiers ouvriers rien de plus facile que de provoquer et d'activer les frictions entre les différentes communautés, racisme et nationalisme sont de parfaits agents de désintégrations sociales, avec l'Etat Fort qui se pose en dernier recours : le grand frère protecteur qui vous chie dessus tous les jours pour être sûr que vous ne puissiez jamais relever votre tête au-dessus de caca ( à patte ) d'oie. Tout cela au nom de la sacro-sainte liberté individuelle qui n'est que le cache-sexe du principe intangible du droit de propriété. Soit vous comprenez cela. Clair comme de l'eau de roche. Suffit d'un peu de jugeote et de beaucoup de volonté. C'est le cas du petit John Lydon. N'en profite pas pour se perdre dans des rêves de promotion sociale à l'eau de rose. Travaille sur les chantiers avec son père. Puis dans ce que nous appellerions par chez nous des centres de loisir. Sans illusion. L'horizon est bouché. Décrypte très bien la situation. Préfère en rigoler que d'en pleurer. Rien de meilleur que de faire l'ara qui rit. Le cynisme comme coutelas d'auto-dérision. La lucidité comme laser de découpe. Vaincu mais pas dupe.

MEPRISE

 

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C'est cette boule de colère rentrée qui déboule dans la boutique de McLaren. Qui flashe sur sa gueule d'ado post-pubère aux cheveux verts. Un parfait rocker. Un amateur d'Alice Cooper. Celui-même qui accompagna Gene Vincent au festival de Toronto. Pour McLaren c'est un signe qui ne trompe pas. N'oublions pas qu'il a commencé par vendre tenues et ustensiles pour teddy boys, d'abord parce qu'il aime la primitive énergie du wild rock and roll, ensuite parce que c'est une clientèle en quelque sorte captive. Son stage auprès des Poupées de New York lui a tout de même appris que le rock pouvait se décliner autrement. Du jour au lendemain Lydon se trouve bombardé chanteur des Sex Pistols. Les plus déçus ce sont les trois mousquetaires qui n'accueillent point le nouveau d'Artagnan avec une grande joie. Auraient sans doute aimé être consultés avant. Et le nouveau venu rebaptisé Johnny le Pourri – McLaren reprend la vieille recette typically rosbeef de Larry Parnes le producteur des premiers rockers anglais - qui cache son inexpérience sous une morgue exaspérante ne fait rien pour arrondir les angles.

 

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Hiatus complet. Les Pistols proviennent du hard, McLaren a infléchi le backgroud, moins de riffs savamment assénés, beaucoup plus de speed à fond les manettes. Johnny vient d'un autre monde : l'a écouté un peu de tout, l'a fréquenté les boîtes de rhythm and blues, s'est déchaîné avec les copains dans les clubs de dance pas encore music mais déjà disco. A pris son pied sur du funk, du ska, du reggae... Johnny est par ses goûts musicaux beaucoup plus proche de l'autre grand groupe punk de l'époque qui s'ouvre et qu'il agonise de sarcasmes durant tout son bouquin, le Clash.

 

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Bref il y aura deux groupes dans les Pistols, le clan McLaren, Paul Cook, Glen Matlock, Steve Jones, et de l'autre côté Johnny Rotten, bientôt rejoint par son ami de toujours, l'inénarrable Sid Vicious. Pas franchement la grande camaraderie. Des relations de travail. Qui s'avèreront fructueuses puisque les quatre singles et l'unique 33 tours enregistrés par le groupe engendreront une nouvelle rock and roll déflagration dans le monde entier.

RETOUR EN ARRIERE

L'histoire des Pistols est trop connue pour que nous la racontions de nouveau il est beaucoup plus intéressant de s'intéresser au(x) regard(s) que John Lydon lui a porté(s) au fil des années qui ont suivi. Beaucoup de haine pour ses deux initiateurs. McLaren en premier, Lydon lui dénie toute véritable créativité. Le présente comme un frein au développement du groupe lui reprochant notamment d'avoir refusé de multiples occasions de concerts afin d'organiser la rareté de ses apparitions publiques dans le seul but de créer une aura de mystère destinée à exacerber la curiosité du public. Le groupe aurait gagné quelque argent que McLaren ne redistribuait que très parcimonieusement. Entre nous soit dit une constante dans le managering des groupes anglais, les Pistols n'étaient que des gamins mal dégrossis facilement manipulables. McLaren ne visait point un enrichissement personnel, accumulait des capitaux pour tourner le film qui deviendra The Great Rock'n'roll Swindle que Johnny ne lui pardonnera pas, d'autant que dans les procès qui suivirent la séparation du groupe McLaren prétendra que l'appellation (in)contrôlée de Johnny Rotten lui appartenait en propre. D'où la nécessité pour le don't just call Me Johnny Rotten de reprendre son patronyme de Lydon pour la suite de sa carrière artistique.

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La vengeance est un plat qui se mange froid. Lydon le ressort souvent du frigo. En dresse le portrait d'un homme somme toute pitoyable, un faiseur qui essaie vainement de courir plusieurs lièvres à la fois après les Sex Pistols - car la créature qu'il a créée lui échappera peu à peu - après la gloire, après le fric, après le sexe, un spectateur mais pas un acteur. Un baiseur baisé. Mais ce qu'il déteste le plus chez McLaren c'est son épouse la modiste Viviane Westwood. Ne l'épargne pas. Critique tout, ses pantalons bondage des plus calamiteux à porter, ses T-shirts déchirés qu'il aurait été le premier à avoir inventés, et son amour immodéré de l'argent. Non pas le luxe, le lucre. Une petite commerçante besogneuse qui rétame le porte-feuille du client à coups de barre. La Viviane vous avez l'impression qu'elle sort tout droit de Mort à Crédit de Céline.

 

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Prochaine victime : Sid Vicious. Avant les Pistols un garçon délicieux. Si paumé et si stupide qu'il en devenait pathétique d'innocence. Un fan transi de David Bowie, mais sans la classe et la manière. Le présente comme le cheval de Troie qu'il aurait lui-même par une erreur fatale introduit dans les Pistols. Trop d'un coup pour un cerveau aussi déliquescent et fragile que celui de Sid. Se comporte comme une rock and roll star. Incapable de jouer de son instrument ce qui par bonheur tombe pile poil dans l'idéologie punk, un terrible handicap mais pas irrémissible. Mais Sid s'entremet dans le plus mauvais des bad trips,se prend pour un héros reedien, de ceux qui marchent on the walk side, de ceux qui waiting for their man pour leur prochaine dose. Toutefois à New York Sid n'aura pas tous les jours ses vingt six dollars dans sa poche, fera des dettes... Ce qui lui vaudra deux coups de couteau de trop. Celui que la mafia  des dealers plongera dans le ventre de Nancy Spungen - sa petite amie héroïn woman au dernier degré, endormie à ses côtés - tout en ayant soin de laisser les empreintes de Sid sur le manche. Un coup monté vraiment vicieux. Sid se fait avoir comme un débutant. Se congédiera de lui-même sans le faire exprès du premier rôle qu'il avait voulu jouer sans expérience. Overdose bienvenue avant le procès. Ce que lui reproche Johnny le pourri. Pas la dose létale, mais le fait de se prendre pour le chanteur du groupe qu'il avait quitté. Lydon se sent trahi par son ami. L'aime trop pour lui pardonner. Un coeur pur mais sacrilège qui lui a planté un poignard ( le N° 2 ) dans le dos. Ambivalence des sentiments.

 

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Tête de turc : the Clash. Musicalement je ne peux que lui donner raison. Entre Pistols et Clash toute la différence entre le siamois qui ronronne sur votre canapé et le tigre altéré de sang dans la jungle birmane en train de dévorer un petit enfant innocent. Mais Johnny n'insiste point trop sur ce point qu'il partage avec moi. Quel honneur pour lui ! Ce qu'il déteste chez le Clash c'est son message politique révolutionnaire. N'y croit pas. Méfiance de prolo à qui on l'a servi tant de fois qu'il se méfie. De belles paroles par devant qui n'empêchent pas de remplir le coffre-fort par derrière. Lydon est un individualiste. Ne mise pas une livre sur l'efficience de l'action collective. Le punk qui tire son épingle double du jeu. Tout seul. Comme un grand.

TOMBE PIL

 

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Le passif des Pistols ne sera pas de la petite bière. La police ne supporte pas les paroles d'Anarchy in the UK, et le pouvoir politique son God Save The Queen iconoclaste. Descentes policières incessantes dans son appartement, hystérie médiatique à son encontre, la situation n'est pas évidente à supporter. Johnny Lidon s'en remettra difficilement. Mais sûrement. Crée son nouveau groupe Public Image Limited. Un nouveau son, une nouvelle musique. Surprend tout le monde. Du punk pur et dur l'est passé à un truc novateur dans la lignée de Van Der Graaf Generator et Captain Beefheart... C'est le grand message de Johnny Lydon. Le punk n'est pas une orthodoxie. Se moque des imbéciles qui s'affublent de T-shirts déchirés parce Johnny Rotten s'habillait ainsi. Le blouson clouté n'est pas le punk. Tout au plus un symbole qu'il est stérile d'exhiber à chaque coin de rue... Le punk est synonyme de liberté. Faites-le vous-même, yes mais surtout n'en faites qu'à votre tête. Une barrière punk n'est qu'une palissade qu'il est nécessaire d'abattre au plus vite avant qu'elle ne devienne un mur infranchissable et coercitif. Inutile de l'implanter dans votre cerveau.

 

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Avec PIL, Rotten franchira tant bien que mal les eighties. L'est un survivant. L'a su rebondir mais l'élastique a tendance à se transformer en corde molle... Vit sagement en couple avec la femme de sa vie Nora Foster, tous deux recueilleront les jumeaux de sa fille Ari Up l'ex-chanteuse du groupe punk les Slits.

SURVIE

Faudra en passer par les fourches caudines de la reformation. En 1996, puis en 2003, en 2006, en 2007, et en 2008. Un non-sens. Que John Lydon assume très bien. Les Sex Pistols ont marqué l'histoire du rock. Leur trajectoire météorique a été trop rapide. Serait injuste qu'ils ne puissent pas rattraper le temps perdu. Un concept encore opératoire qu'il suffit de tirer de sa gaine protectrice de plastique pour lui redonner vie. Un peu à l'image de ces scorpions que l'on congèle dans les laboratoires et qui réchauffés reprennent tout de go leurs scorpionistes activités comme si de rien n'était. Se vantera d'avoir ainsi donné de bien meilleurs concerts qu'en 1976 et 1977. Pourquoi pas après tout. En trente ans un musicien ne peut que s'améliorer. Mais au niveau de l'impact sur le public c'est à mi-chemin entre radio nostalgie et le pet de lapin. Moi je prie chaque jour pour que Led Zeppelin ne se reforme pas.

 

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Quelques disques entre temps. Mais Rotten a déplacé ses activités. Lui qui a tant accusé les média rentre dans la combine. Pas vraiment le commando infiltré dans la citadelle pour la faire sauter. Plutôt le bourdon qui s'engraisse au coeur de la ruche. Sans se priver de remarques désobligeantes sur le parfum de la récolte. J'ai écrit récolte, pas révolte. On lui pardonnera sa participation aux documentaires sur les araignées, tout compte fait il y a sur notre planète davantage d'aragnophobes que sexpistolophobes, mais pour le reste, les talk shows, les émissions de télé-réalité et sa participation à I'm a Celibrity... une espèce de Kho Lanta éliminatoire qu'il abandonnera en cours de route pour on ne sait quelle raison, vraisemblablement la bonne : la fatigue, l'on reste plus que dubitatif. Nous y avons échappé. Tout cela s'est déroulé en Angleterre et en Amérique et nous n'y avons pas eu accès. Mais que Johnny Rotten le révolté puisse se balader en toute impunité sur le petit écran nous atterre quelque peu. Dilue son personnage dans l'espace d'entertainment généralisé qu'est devenue la télévision. Celui qui à longueur de pages se targue d'avoir violemment secoué le cocotier de l'abrutissement généralisé, devienne trente années plus tard une figurine interchangeable du bébête show médiatique à vocation décervelante, nous semble s'être embarqué dans une démarche peu rock and roll...

CARACTERE

L'image publique a beau être limitée, elle n'en sort pas grandie. Ce dont Johnny Rotten semble se moquer éperdument. Fait ce qu'il veut. Si ça ne vous plaît pas éteignez votre poste. Et allez vous faire foutre ailleurs. Ne faites pas chier Johnny Rotten. Circulez, il n'y a rien à voir. Pour vous. Les autres vous pouvez rester. Sur la route de sa vie, le doute ne s'immisce point. L'a sans cesse raison. C'en devient fatiguant. Même s'il a des aspects sympathiques, par exemples ses vitupérations à l'encontre de la peste brune et démagogique du racisme ou de l'emprise culpabilisatrice du catholicisme qu'il étend à l'ensemble de toutes les religions. Mais ce qu'il y a d'insupportable dans le bouquin c'est qu'il s'excuse de tout. Ainsi quand il décrit le contenu titre par titre de ses disques avec PIL ou en solitaire, c'est de l'autosatisfaction programmée du début à la fin. S'il relève un défaut c'est pour nous assurer que c'est ce dernier qui donne son charme au morceau. Je ne doute pas donc je pense que Johnny Rotten et Johnny Lydon ont toujours raison. S'est piégé tout seul, s'est enfermé dans sa propre carapace de protection. Une méthode que l'on devrait employer pour réconcilier les schizophrènes avec eux-mêmes. Comme quoi le rock and roll mène à tout, à condition d'en sortir.

Mais surtout n'oubliez pas : never mind the bollocks ! Prix de consolation pour le futur que avez espéré en vain. Comme d'autres attendent Godot. Comme quoi la prophétie irréalisable est toujours d'actualité et Johnny Rotten un vieux sage qui vous tire la langue. Que voulez-vous de plus de la part d'un maître guru ? Ni dieu, ni maître. Si vous êtes déçus c'est que vous rêviez de quelque chose qui ne viendrait pas de vous, la gueule ouverte. Craignez ! C'est ainsi que l'on crève.

Damie Chad.

GLANEURS DE RÊVES

PATTI SMITH

( Gallimard / Septembre 2014 )

 

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Une fille qui a vécu avec Fred Sonic Smith, guitariste émérite et rythmique de MC 5 mais aussi du Sonic's Rendez-Vous Band en compagnie de Ron Asheton, le batteur des Stooges, ne peut pas être tout à fait mauvaise. L'a aussi partagé une torride passion avec Allen Lanier le clavier du Blue Öyster Cult, preuve que la demoiselle a du goût. Nous a también pondu deux ou trois albums assez déglingués pour nous plaire. Rien à redire. En plus elle n'est pas du tout la godiche de service, dès qu'elle prend la plume. De ses recueils de poèmes je ne dirais rien, ne maîtrisant qu'un maladroit idiome de base d'une exceptionnelle pauvreté qui ne me permet pas de goûter aux subtilités de la langue d'Edgar Poe. Par contre respect total pour le premier tome de son autobiographie Just Kids sortie en 2010 ( voir KR'TNT ! 31 du 12 / 10 / 10, nous y présentons aussi deux autres de ses livres ) dans laquelle elle remémore ses premières années d'artiste new yorkaise en compagnie du photographe Robert Mapplethorpe.

Glaneurs de Rêves est paru aux Etats-Unis en 1992, cette traduction française plutôt tardive reprend la deuxième édition augmentée de fragments inédits de 2011. Petit format, quatre-vingt pages de textes si l'on ôte les nombreuses photos, en petits caractères mais avec pas mal de blanc entre les paragraphes. Vite lu, forte impression.

Au départ ce devait être un livre de souvenirs d'enfant. Certes l'on y retrouve le père, la mère, et les soeurs, plus les successives habitations de la famille. Mais ce n'est qu'un cadre dont la fillette s'évade souvent. Pas le genre fugueuse, on the road again, d'abord elle est trop petite, ensuite il est facile de prendre la poudre d'escampette en restant assis sur une chaise ou immobile devant un carré d'herbe. Le mur de la réalité n'est pas bien haut et vous semblerait-il dépasser l'Empire State Building que ce n'est que du simili-toc. Un pas en avant et il se traverse encore plus facilement qu'un poussin qui sort de l'oeuf. Bien qu'il ne soit nul besoin de briser la mince coquille, le passage se fait par transcapillarité, une osmose pratiquement instantanée, l'on regarde avec les yeux, mais on voit avec l'esprit. Los bambinos sont souvent sujets à ces stases d'immobilité qui entrouvrent les portes du réel et permettent de pénétrer de l'autre côté du rêve éveillé empli de bruit et de fureur que l'on appelle l'existence, mais qui n'est que la face sombre de cette dimension que Rilke en ses derniers poèmes nommait l'Ouvert.

 

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Certains paragraphes sont de magnifiques poèmes en prose, mais parfois Patti Smith se transporte plus après dans sa vie, et les fulgurantes clairières heidegerriennes qu'elle nous décrit se transforment en lourdes et chaotiques fantasmagories surréalistes. L'est sûr que si l'on veut accéder à l'innocence des dieux il ne faudrait point grandir. Point dégénérer. C'est le côté rimbaldien à la petite semaine de notre chère Patti, l'Arthur des Ardennes prenait un peu de haschich et les cheminées d'usines se métamorphosaient dans ses illuminations en palais de mille et une nuits ainsi que nous le raconte Ernest Delahaye en ses souvenirs. Des édifices un tantinet kitch si l'on y zieute d'un peu près, dont on retrouve des fac-similés dans les illustrations des albums enfantins, mais ce sont les ricains qui ont inventé Disney et ses parcs d'attractions, n'est-ce pas ?

Difficile de parler de l'enfance sans impair. Les gros sabots de l'adulte n'hésitent pas à piétiner les verts paradis baudelairiens. Ce n'est pas de leur faute. Excusez-les sans les accuser. Le lait maternel est doué de mille vertus, il transporte aussi les pires saloperies. Patti nous l'avoue benoîtement : c'est sa mère qui lui a appris à prier. Pire que la mamouchka de Sid Vicious qui offrait des doses d'héroïne à son fils pour son anniversaire. Pourquoi inoculer tant de poison dans la tête d'une enfant ? La christologique culpabilité est pire que l'ivraie, vous avez beau l'arracher «  Jesus died for somebody's sins. but not mine » elle revient au galop... Chez Patti Smith cela se traduit par une idéologie fleur bleue de pacotille assez déplaisante... Le vieux fond puritain de l'amerloque moyen qui ressort comme une crise d'acné sur la figure des jeunes filles en fleurs. Le problème, c'est que Patti Smith n'est plus une adolescente depuis longtemps.

N'empêche que c'est très bien écrit. Si par hasard vous ne vous sentez pas d'humeur ultra-littéraire, prenez plutôt votre console de jeux. Ça console, et puis les bœufs d'abattoir seront bien gardés.

Damie Chad.

PS : Pour ceux qui aiment les bêtes : lire la pathétique histoire de Bambi, la chienne fidèle ( but Who Killed Bambi ? )

DOCUMENT EDDIE COCHRAN

( Trouvé sur Gazette & Heraid /

Rubrique : Courrier des Lecteurs )

( First published Sunday 2 November 2014 )

I was very sorry to learn that the Association of the Friends of St Martin’s Hospital, Bath, was disbanded through lack of support and wish to express my appreciation of the tremendous contribution that the members made towards the welfare of patients and staff over a number of years and also their help in fundraising for the hospital.

Some of this work will continue and the above was replaced by the Sirona Foundation Trust, St Martin’s Hospital, Clara Cross Lane, Bath BA2 5RP.

 

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I am sure your readers may not know about the Eddie Cochran Project. It is based at St Martin’s Hospital.

Apart from his outstanding memorial stone (which was very expensive), there is also a very nice sun dial, placed at the back of the old chapel, where fans from all over the world place lovely flowers next to his stone.

This new address is where all rock ’n’ roll fans and other interested people can make a donation in memory of this great star.

We know that Eddie Cochran would be very proud of his fans and would support this campaign for this famous old hospital.

All the money given to the hospital is spent on the wards for the care of the older people. I would like to thank all the people who have made donations to this hospital over many years.

The Eddie Cochran memorial plaque, which was placed at Rowden Hill, Chippenham, is also very important for all of his fans and is another part of the project.

 

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The release of one of the best teenage films, Untamed Youth (1957) starring Mamie Van Doren with Eddie Cochran in a prominent role, is about kids picking cotton near Bakersfield, California.

The song Cotton Picker, still unreleased in this country, is from that movie and was released some years ago to American television by Warner Brothers

Eddie Cochran was killed in a car crash on April 17, 1960, but his music and films are still in great demand.

Peter Morgan, Woodend, Kingswood, Bristol.

 

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