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18/04/2014

KR'TNT ! ¤ 185 : GALLON DRUNK / SOUTHERNERS / ROCKIN' HELLFIRE / TWANGMASTERS / JAGUARS / LOREANN' / GANGS STORY

 

KR'TNT ! ¤ 185

 

KEEP ROCKIN' TIL NEXT TIME

 

A ROCK LIT PRODUCTION

 

LITTERA.INCITATUS@GMAIL.COM

 

17 / 04 / 2014

 

 

GALLON DRUNK / LOREANN' / SOUTHERNERS

/ ROCKIN' HELLFIRE / TWANGMASTERS / JAGUARS /

/ GANGS STORY /

 

 

BATOLUNE / HONFLEUR ( 76 )

 

 

11 – 04 – 14 / GALLON DRUNK

 

 

GALLON DRUNK PREND DU GALON

 

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Souvenez-vous. Les Gallon Drunk sont arrivés dans la mouvance des Cramps et du Gun Club. Fin des années 80, James Johnston et Max Décharné décidèrent d’entrer en résistance et de continuer à jouer du rock vaudou, même si commercialement, ils se condamnaient aux ténèbres de l’underground pour l’éternité. Ils ne voulaient pas prendre part au petit ballet minable de la Britpop orchestré par un New Musical Express finissant. Comme tous les groupes installés dans le sombre panthéon de l’underground, les Gallon Drunk cherchaient à se distinguer du lot par un son et une attitude, exactement de la façon dont avaient procédé Lux Interior, Jeffrey Lee Pierce, Graham Day et Billy Childish.

 

Bien sûr, nous autres pauvres frenchies n’avions qu’une vision limitée de ce que représentait Gallon Drunk. Il aurait fallu vivre à Candem et fréquenter les mêmes pubs qu’eux pour se faire une idée un peu plus réaliste. Pour entrer dans leur monde, nous n’avions pas d’autre choix que d’écouter les disques.

 

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S’il est une chose qui frappe quand on les écoute, c’est bien l’âpreté du son et du propos. Ils naviguent quasiment dans les mêmes eaux que Nick Cave, mais avec une dimension voodoo en plus. Et les trois quarts de leurs morceaux sont montés sur des grooves de basse.

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Leur premier album ne vieillit pas trop mal. Sur la pochette, une belle tigresse se prélasse devant le Fujuyama, les pieds posés sur un tambour vaudou. Les quatre premiers morceaux présentent un intérêt anecdotique et puis «Ruby» finit par éveiller l’intérêt, grâce à un beau groove hypnotique et à quelques accents de folie. C’est battu par Max Décharné, le pire zombie de l’underground. La chose est relativement diabolique, il faut que vous soyez prévenus. On sent bien qu’ils cherchent la petite bête. L’autre mamelle des Gallon Drunk, c’est le trash. «Draggin’ Along» en est une belle illustration, avec sa basse pouet-pouet en avant et le trash qui sort par les trous de nez. Spectaculaire. C’est une vraie expérience sonique, pour qui veut bien s’y prêter. Si on apprécie le non-conformisme, on est servi. Ils posent les bases du boost. Voilà comment naît une légende. Ils reprennent aussi le fabuleux «Please Give me Something» de Bill Allen, qui est aussi un morceau fétiche de Tav Falco. Belle reprise, car poussive et trash. Le clou du spectacle est «Gallon Drunk», l’hymne des boozards, avec de belles parties de gratouille. James Johnston bleurke, il sait y faire, ça hic ici et là, ils sont véritablement cocasses. Même les guitares titubent. Il faut le voir pour le croire.

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Quatre ans plus tard sortait un second album, «You, The Night And The Music», qui reprenait dans les grandes lignes les déclarations d’intention du premier album : groove, exotisme et furibarderie à tous les étages. «Some Fool’s Mess» est certainement le morceau le plus connu du groupe. Pur groove voodoo emmené à la basse. Ils jouent ça accroupis dans l’ombre. «Two Wings Mambo» monte d’un cran dans le voodoo. Voilà le beat le plus jungle de Londres, bardé de coups de guitares cisaillées, tribal en diable. Le zombie Max bat comme un sorcier guinéen. Il sait converser avec l’esprit de la forêt primitive. Belle pièce d’exotica. Le groove est rond et froid comme ce python endormi à l’ombre du palétuvier. Le chant est quasiment un chant de guerre incantatoire. James Johnston laisse ses gênes s’exprimer. C’est somptueux et bien tendu sur la durée. Le fait que ce soit interminable ajoute encore au charme discret de la bourgeoisie. C’est une sacrée pièce, tenace et fourbe, elle nous observe à travers une petite lucarne. Heureusement, ils reviennent à des choses plus civilisées pour le morceau suivant, «You, The Night And The Music», jazzifié de main de maître, un peu Monky sur le pourtour. «Night Tide» et «The Tornado» accrochent bien et sèment le vent dont on récoltera les futures tempêtes.

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Ambiance nocturne pour «From The Heart Of Town». Belle pochette digne du Martin Scorsese de la grande époque (Taxi Driver et la bande-son de Bernard Herrmann). Ambiance enfumée et groove de basse pour «Arlington Road», éclats hébétés de fin de nuit alcoolisée. Nous avons tous connu ces moments sublimes et incertains, coiffés par un solo de sax. «Bedlam» est un big blast impérial. On sent chez eux une volonté de percer vers le ciel. Mais on reste dans le nocturne et l’urbain. Jolie ambiance éruptive avec l’arrivée des cuivres. Les Gallon Drunk cultivent la tension, ils sont comme la braise sous la cendre, au moindre souffle, ils prennent feu. Ils sont probablement les sournois greasers de cette époque. «Loving Alone» est une pièce de kitsch imposante, mambo de Candem, étrange métissage, mais recherche de la distinction à tout crin. Ça passe par des choix risqués, mais le résultat épate. Sur «Push The Beat Out», Max le zombie bat des breaks de la retape qu’il faudrait pouvoir qualifier d’historiques.

 

Mais pour Max, ça s’arrête là. Il quitte le groupe. Idem pour Mike Delanian. Ian White remplace Max à la batterie et Terry Edwards le sax-man fait son entrée comme membre permanent.

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«In The Still Long Night» comporte aussi son joli lot de bonnes surprises. On retrouve les sales grooves qui se faufilent sous le lit, avec des cuts comme «Up On Fire». Les gens normaux appellent ces grooves des sales bêtes. Il faut rester prudent avec ce genre de groove, car il n’en finirait plus de nous tourmenter la conscience. Avec «It’s All Mine», ils nous sortent la vieille recette de l’explosivité. Voilà un morceau étrangement collant, bien pulsé à la basse. Nappes d’orgue, sax étranglé et pulsation extrême de la basse qui gargouille dans son coin comme une oie décapitée. On sent de la férocité dans les ténèbres. James Johnston ne chante pas, il murmure dans le secret de la tombe, il suggère le glauque absolu. Il plante des c’mon dans son stuff comme on plante des pic-pics en bois dans les cubes de vache-qui-rit pour préparer l’apéro du samedi soir. On trouve d’autres morceaux intéressants sur ce disque, comme «Eternal Tide (propice à toute forme de dérive), «The Big Pay-Off» (joli groove de shuffle) et «Some Cast Fire» (sacrément dense), mais rien qui puisse marquer la mémoire au fer rouge.

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L’album «Black Milk» est en fait la bande son du film Black Milk tourné par un cinéaste grec, Nicholas Triandafyllidis. Voilà un disque étrange, dont les morceaux sont souvent longs et entreprenants, toujours basés sur des grooves de basse. Cinq morceaux se distinguent du lot : «Blood Is Red» (Vooddo is blue, sugar is sweet and revenge is sweeter, nous dit la voix et ça part sur un groove discoïde diablement inspiré), «Can You Feel It» (avec une pure accroche garage et on part sur un long groove electro-trash de la patate chaude, vraiment dansant, plein de wha-wha et de tribal, très bien travaillé sur la durée), «At My Side» (pur jus Gallon, chanté au premier degré du sol humide de la cave, c’est cherché et c’est trouvé, à condition de ramper, bien sûr), «Hypnotised» (bombé à la basse mambo, gras et gros comme un porc tatoué de Delvoye) et «One More Time» (belle pièce de balladif mélodique influent - and it’s gone gain - puissant et terrible - and there’s nothing left to say - bien grondant, avec l’effet du danger dans le dos).

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Quand «Fire Music» est sorti, on végétait en plein dans le début du millénaire. Ce disque rôti par les torrents de lave est bourré de grooves barbares, mais on sent une certaine baisse d’inspiration. Ce n’est pas qu’on s’ennuie, n’exagérons pas, mais les mets proposés manquent un peu de sel, ce fameux salt of the earth cher à nos vieux Rolling Stones. Dommage, car le disque s’ouvre sur un véritable hit interplanétaire, «Outside Of Love», une sorte de miracle mélodique inattendu qui ramène Gallon Drunk à son rang de très grand groupe anglais. Cette chanson monumentale, d’une absolue pureté mélodique, me hantait à l’époque. Chaque fois que je montais dans le métro, elle me revenait en écho et si j’avais été romantique, elle m’aurait certainement brisé le cœur. Ce genre de beauté touche les couches les plus profondes de l’émotion, et même si le reste du disque n’est pas à la hauteur de cette merveille, on se trouve largement dédommagé de l’emplette. D’autant plus que ce double album vinyle valait une petite fortune. C’est vrai qu’à la suite, on trouve des grooves balladifs assez intenses, souvent bardés de chœurs ou de parties de cuivres, mais ça s’arrête là. On sent nos amis lancés à la recherche de passages, comme le furent jadis les navigateurs, lorsqu’ils exploraient des mers inconnues. Les Gallon Drunk hispanisent un peu les choses, comme dans «Forget All You Know» et reviennent enfin au sortilège avec «Series Of Dreams», où James Johnston monte doucement sa petite mélodie à la Mary Chain comme une sorte de mayonnaise.

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On pourrait presque dire que «The Rotten Mile» est l’album de la maturité. On y trouve des chansons énormes et inquiétantes, comme le morceau titre, qui a quelque chose de moyen-âgeux dans la violence faite à l’homme. Enterré vivant. Temps noir et maudit, groove du supplicié, pouls malade, solo écartelé. La perle de ce disque est sans doute «Down At The Harbour», que James Johnston situe en 1823, les marins embarquent - six ans après, vous souviendrez-vous de nous ? - sacrément temporel, excellence du voodoo monté sur un riff entêtant, ambiance macaotique - à bord une fille dit de tuer le capitaine et d’envoyer un message à Londres disant que nous avons disparu au bout du monde - «that we’ve fallen off the edge of the world». «Grand Canal Union» est sacrément hoché du menton. Voilà une sacrée toupie abandonnée, une belle furie de sax, une sainte horreur brutale. Ils sont enragés. C’est encore pire que Grinderman. Jamais ils ne vont se calmer, c’est ce qu’on ressent à l’écoute de «On Ward 10». C’est l’horrible morceau subliminal qui monte par la jambe du pantalon. Le genre de morceau qui ne lâche pas sa proie, même mort. «Bad Servant», c’est le punch du glauque - «Here we are/ On a mess/ In a car/ You and I/ On this night/ A bad servant and a slave/ One passed out and one betrayed». Fantastique ambiance mortifère. Le morceau idéal pour accompagner un suicide. Et puis voilà «All Hands At Sea», encore une belle image de perdition, mais cette fois c’est une stoogerie broyeuse de gorges. Digne du Gun Club, saxé dans le vent brûlant, c’est du napalm en guise de brillantine, une coulée d’extrémisme purulent - «And there’s really nothing left to say» - le sax traîne, malaise intense et les dieux vomissent. La chose est complètement dévastée.

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Tous ceux qui ont vu Gallon Drunk en concert le savent bien : Gallon Drunk est avant tout un groupe de scène. Les grooves à climats sont propices aux explosions et James Johnston passe beaucoup de temps à se rouler par terre. C’est l’un des showmen les plus spectaculaires d’Angleterre.

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L’album live «Live At Klub 007» est l’album qui colle le mieux à la réalité de Gallon Drunk. Ça démarre avec une version explosive de «The Rotten Mile», ils poussent le jeu de l’exacerbation assez loin, comme s’il n’existait plus de limite. Ils cultivent la surchauffe et le goût des domaines inexplorés. Ils traitent de l’impossibilité des choses. Dans leur version de «Some Cast Fire», on sent l’aboutissement de tout un art de la tension extrême. Ils relancent encore et encore. Ils sont maintenant les seuls à cultiver cette folie du son et à développer une passion pour le concassage des atomes. La version de «Running Out Of Time» est un pur chef-d’œuvre d’explosivité de l’intensité. «Put The Bolt In The Door» devient un heavy blues gluant. Ils transforment «Bad Servant» en énormité séculaire, ils rendent le groove furieux et embarquent l’auditoire dans la démence. Ils semblent atteindre le sommet de leur art nécrosé. Mais quand arrive le stoogien «All Hands At Sea», on recommande son âme à Dieu. C’est vraiment la seule chose qui reste à faire. Ce morceau est à la fois dévasté de l’intérieur et de l’extérieur. C’est plein comme un œuf pourri. Pas de place pour la bricole. Ça pulse dans tous les coins, nappes d’orgue, sax, folie, drumbeat, incantations de comptoir. Pas de clémence dans la démence, pas d’échappatoire, on finit aplati sous une semelle, comme le mégot qui n’avait rien demandé à personne. Cette puissance quasi-industrielle relève des couches supérieures de l’infériorité. Alarmant, quant aux conséquences de cet assaut sur la libido des tympans.

 

Leur bassman Simon Wring a cassé sa pipe en 2012. Le groupe a décidé de continuer, mais en annonçant la couleur. Leur album s’appelait «The Road Gets Darker From Here», ce qui voulait dire en gros qu’à partir de là, le ciel s’assombrissait.

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L’album démarre avec du pur garage d’heavy doom, «You Made Me», qui sonne bien les cloches, gras et vaudou comme pas deux. En vieux fan de Gallon Drunk, on ne peut que se régaler de cette pièce fumante à la fois kitsch et criante de modernité mordante. Avec «A Thousand Years», James Johnston nous replonge dans la désespérance aggravée, dans le groove privé d’espoir. Il prend soin de fabriquer d’extraordinaires atmosphères vérolées qui nous inspirent une sorte de terreur douceâtre, et on s’y étend comme dans un cercueil, le cœur en marmelade et les yeux humides, regrettant pour de bon d’être venu au monde, car enfin, c’est prouvé, il n’est pas de vie qui vaille d’être vécue. Puis on retourne le disque pour écouter la face B et on tombe sur «Killing Time», une petite pièce tendue à l’extrême et où des péripéties soufflent sur la braise pour mieux défigurer le ciel noir de menace. La chose est encore une fois hautement atmosphérique, étrange et violente. Sax et chaos, harmonica par là-dessus, typical Gallon Drunk. Arrive enfin le groove vaudou tant attendu, «The Big Breakdown», monté sur un riff typique de John Lee Hooker. Ça ressemble à un vieux réflexe délinquant, un tic admirable de véracité combinante. Énorme et malencontreux. À se damner pour l’éternité. Écoutez ce truc, «The Big Breakdown», ça fout tout par terre. C’est incroyablement proche, dans l’esprit, de ce que bricolaient les vieux sorciers du North Mississipi Hill Country Blues. Hypnotique et vainqueur, emporté par l’harmo, dément et basique, totalement salvateur. On salue l’excellence de la démarche qui vaut toutes les surenchères du monde. La guitare sonne comme une trompette de l’apocalypse. Le joli riff se cale bien dans le mortier. On l’entend bruire d’éclats soniques. On sent l’art du fouillis dans le fouillé des fuyards. On trouve après ça un heavy-heavy blues nommé «I Just Can’t Help But Stare», plombé jusqu’à l’os. On ne s’en sortira pas. De l’autre côté de l’Atlantique, on a les Chrome Cranks. De ce côté-ci, c’est Gallon Drunk. Ils se partagent le royaume du chaos.

 

Leur dernier album vient tout juste de sortir. «The Soul Of The Hour» reste évidemment dans le même esprit que ses prédécesseurs. Ils démarrent doucement avec «Before The Fire», et une longue intro pianotée. Rien ne presse. Ils prennent leur temps. Ils ont raison, après tout. Il faut savoir donner du temps au temps. Mais ça sonne comme du Nick Cave, c’est trop sombre et trop statique. On sent qu’ils ne vont pas bien. Heureusement, ils reviennent au pouvoir avec «The Dumb Room», le heavy trash, le vrai, le blues du dirt hole. Ils veulent sonner comme les Chrome Cranks - «It’s endless, useless/ Quite our style/ Primeval/ Ice age/ Dumb.» James Johnston sait écrire des chansons. «The Exit Sign» est aussi une énormité. Ian White qui a remplacé Max Décharné bat le beurre bien droit. L’excellence de la méthode vaut tout l’or du monde. La chose se veut spectaculairement hypnotique, elle part dans le cyber-space hawkwindien à travers un nuage de zigouiguis à la Dikmik. Sur la face B, on trouve un morceau de belle pop têtue, «Over And Over», une pop revenue de tout, bien relayée par la scansion «over and over». On sent la belle allure et le port altier - «Wine on the sheets/ And the clothes on the floor» - et la chose s’enfonce dans le crépusculaire. Mais il semble au sortir de cet album que les crocs de nos amis londoniens se soient émoussés. On ne va quand même pas en faire une maladie, n’est-ce pas ?

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On se souvient de ce concert terrible à la Maroquinnerie en 2007, c’était une véritable révélation sonique. Rarement on avait vu un mec aussi démantibulé et aussi incontrôlable. Tous les morceaux étaient comme des torrents de lave qui rougeoyaient dans la nuit, comme sur la pochette de «Fire Music». James Johnston fouillait les entrailles de ses grooves et se jetait à terre pour y gratter des explosions de barrés distordus. Il passait de la guitare aux claviers, il tournoyait au cœur du cyclone, il jetait son pied de micro devant lui et le premier rang n’avait qu’à bien se tenir, il perdait son harmonica, retrouvait sa guitare, il rampait, frappait des accords ouverts à coups redoublés, il fomentait des complots contre la raison, il redonnait du sens au rock. Il réincarnait la sauvagerie du rock qu’on croyait perdue, il se noyait sous ses mèches devenues rebelles et gluantes, il encanaillait ses compos, il tirait tout le son vers le bord du gouffre. Rien ne pouvait l’arrêter. Il sombrait dans la folie, récupérait sèchement son pied de micro et il se jetait sur ses claviers comme s’il allait les détruire.

 

Un concert quelques années plus tard au Point Éphémère se révéla moins violent, mais tout aussi intense, infernal et groovy. Les parisiens ont toujours été friands de Gallon Drunk.

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Et l’atmosphère s’est encore épaissie au Batolune d’Honfleur par cette belle soirée de printemps. Ce fut pour le public clairsemé un shoot de groove d’une noirceur inconvenante, d’une intensité proche de la bestialité rituelle, celle qui provoque l’hypnose, voire la commotion. James Johnston et ses compagnons d’infortune ont ouvert leur bal des maudits avec l’interminable dérive malsaine de «Before The Fire» et refermé le chapitre de leur set brûlant avec un groove encore plus cuisant. Ils ont fait rissoler quelques titres du dernier album comme «The Exit Sign» et ce «Soul Of The Hour» totalement privé d’espoir, comme si l’espoir n’avait jamais servi à rien. Comme le groove d’ailleurs. Puis «Hanging On» et «KillingTime» tirés du dark album et surtout l’imparable «Bad Servant». Tout cela dans une spectaculaire atmosphère de fin du monde et de réinvention du rock, mais un rock plus noir et plus désespérant que jamais, gluant d’énergie malsaine et fier d’être condamné à errer jusqu’à la fin des temps dans les ténèbres de l’underground.

 

 

Signé : Cazengler, Drunk tout court

 

Gallon Drunk. Le Batolune. Honfleur (76). 11 avril 2014

 

Gallon Drunk. Gallon Drunk. Clawfist 1988

 

Gallon Drunk. You, The Night And The Music. Clawfist 1992

 

Gallon Drunk. From The Heart Of Town. Clawfist 1993

 

Gallon Drunk. In The Still Long Night. City Slang 1996

 

Gallon Drunk. Black Milk. Everlasting Records 2000

 

Gallon Drunk. Fire Music. Sweet Nothing 2002

 

Gallon Drunk. The Rotten Mile. Fred Label 2007

 

Gallon Drunk. Live At Klub 007. Sartorial Records 2008

 

Gallon Drunk. The Road Gets Darker From Here. Rough Trade 2012

 

Gallon Drunk. The Soul Of The Hour. Cloud Hill Recordings. 2014

 

De gauche à droite sur l’illustration : Terry Edwards, James Johnston, Leo Kurunis et Ian White

 

( Voir aussi : KR'TNT ! 139 : La Glorieuse Histoire du Rockabilly de Max Décharné. )

 

 

 

ROCK 'N' ROLL PARTY N° 6

 

LES BORDES ( 89 500 ) /

 

12 – 04 – 14 / FOYER RURAL

 

 

SOUTHERNERS / ROCKIN' HELL FIRE

 

TWANGMASTERS / JAGUARS

 

 

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Les campagnes françaises débordent de bordes : ces antiques fermes isolées, éparpillées très méthodiquement sur l'ancien quadrillage romain des terres divisées en carrés - à mettre en valeur, souvent distribués aux légionnaires à la retraite – ont parfois donné naissance à de gros hameaux ou à de maigres villages. Ce préambule pour vous expliquer qu'arriver aux Bordes, en plein milieu de nulle part, dans une incertaine cambrousse sise au loin du côté de la bonne ville de Sens, exige pour les parisiens une sacrée dose de courage et par-dessus tout d'avoir le rock chevillé au corps.

 

Pas si difficile que cela, puisque à peine quitté l'axe principal de nombreuses flèches jaunes dûment orientées vous amenaient en douceur jusqu'au Foyer Rural désiré. Une orga de pro, avec les Teds aux commandes pas de souci à se faire, la logistique est au-rendez-vous, le petit doigt sur la couture de la drape-jacket. N'empêche qu'il y aurait pu y avoir deux fois plus de monde... Dommage pour ceux qui ne sont pas venus, car ils ont raté un super-concert, et pour ceux qui sont venus aussi puisque Fifi, le responsable, un peu dépité, annonce que désormais il organisera ses Rock'n'Roll Parties en Allemagne... Espérons qu'il reviendra sur cette décision qui priverait le public français de multiples grosses pointures rockabilly européennes...

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Grande salle, bar au fond, scène en face – correcte mais on aurait pu souhaiter deux mètres de plus en profondeur – trois fournisseurs de disques, des sacs pour les ladies, des babioles à blouson pour tous, le bonheur du rocker à portée de la main sur les étalages. Tout cela ne serait rien sans tous les fans qui se retrouvent ou se découvrent venant d'horizons divers, du Nord, d'Espagne, et même de chez les Loners de Lagny-sur-Marne.

 

SOUTHERNERS

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Commencer par les Southerners, c'est d'entrée mettre la barre au maximum de sa hauteur. Drapeau anglais en fond de scène – l'Angleterre étant d'origine le pays d'incubation du mouvement ted – P'tit Loup en drape jacket bleu-royal, Pascal drapé dans un rouge princier éclatant, Yves, Thierry, Michel sanglés dans leur tunique rebelle, sont tous là, invités cadeau pour l'anniversaire de Fifi. Pour les présentations, nous arrêterons-là car ils sont déjà partis sur Motorbike. Pas plus de quinze secondes pour qu'ils s'installent dans leur scansion si particulière. N'y a plus qu'à écouter.

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Une musique et des voix. P'tit Loup entonne, Pascal répond, et le dialogue débute, Yves, Thierry et Michel, parfois seuls, ou à deux ou à trois, entrecoupent, véritable choeur de tragédie grecque qui souligne les moments cruciaux de l'action. Pascal appuyé sur sa contrebasse est le dieu tonitruant de l'Olympe, sans cesse en train de menacer, le verbe haut et l'intervention vindicative. P'tit Loup est le héros sur qui pleuvent les rafales colériques de la divinité. Se donne du mal pour échapper à son destin de rocker. Les chiens de l'enfer hurlent après lui et ne le lâchent pas. Au deuxième morceau – Eileen, le tour de chant est basé sur le disque que nous avons chroniqué dans notre précédente livraison – s'est déjà débarrassé de sa redingote et de sa sousjacket – très classe en sa chemise blanche. Trop de fils sur la scène trop encombrée ne lui permettent pas une gestuelle débridée, mais tous ses mouvements sont empreints d'une élégance féline. Nous offre le chant, et la danse. Le rock and roll vécu de l'intérieur entre beauté sauvage et trépidation rythmique. Pascal est venu nous visiter, nous les simples mortels, bientôt rejoint au milieu du public, par P'tit Loup qui s'en vient implorer le tonnerre de la contrebasse, en vain car la rebelle colère du rock'n'roll n'a pas de fin... Et tous deux remontent sur l'estrade pour continuer à libérer les forces du kaos...

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Le loup-cervier ne prend même pas le temps de retrouver son souffle entre deux morceaux. Derrière sa batterie Vivi relance sans arrêt la machine. L'orchestre embraye à la seconde mais P'tit Loup est déjà aux avant-postes, et c'est reparti pour un tour de fou. Sans doute pensaient-ils finir sur leur extraordinaire version de The Train Kept A Rollin, pour laisser la place aux autres groupes, mais il est hors de question de les laisser s'échapper au bout de dix malheureux – toutefois flamboyants – morceaux. Et le public et Fifi ne leur permettent pas de se défiler si rapidement. Nous entraînent alors dans la ronde des hymnes à la gloire des Teddies boys qui mettent le feu à la salle.

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Nous laissent estomaqués. Le groupe ted dans toute sa splendeur. Violence et retenue. Maîtrise et soumission. Un des premiers groupes français qui a su garder trente après intact l'impact de la fièvre adolescente. Un métier indéniable, une entente rodée au millimètre, mais recouverts par une envie folle de tout donner comme si c'était la première fois qu'ils montaient sur scène.

 

ROCKIN' HELLFIRE

 

Des montagnes sur scène. Imposants, dans leurs sombres habillements, statiques, nul sourire sur les lèvres de tout le set, les Rockin' Hellfire ne sont pas là pour rigoler ou passer du bon temps. Viennent d'Espagne, aussi austères qu'un tableau du Greco et aussi sérieux qu'un torero avant la mise à mort. Un germain dans le lot. Pas n'importe qui, le chef, Zlatko, l'ancien rythmique de Black Raven, un groupe culte encore en exercice. Malgré son costume trois pièces gris, l'a tout gardé de la noirceur du corbeau, pas le foutraque volatile de la fable, mais celui d'Edgar Poe aux yeux brûlants d'un feu éternel, perché sur le buste pallide de Pallas – selon la traduction de Stéphane Mallarmé.

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Electricité froide. Impassibles et impeccables. Une ambiance de feu glacé. Un son lourd comme une chape de plomb. Ils alignent les morceaux comme des cercueils un jour d'exécution générale. Doivent réveiller en nous nos instincts les plus hideux, car nous devons l'avouer, nous aimons cela. Ces sueurs de suaires qui coulent en larmes de gel le long de notre moelle épinière, nous adorons. Ca nous réchauffe le coeur. Même quand ils nous joueront Broken Heart.

 

Terriblement anglais dans leur répertoire. Des dignitaires qui reprennent du Vince Taylor et du Johnny Kidd ne peuvent pas être absolument mauvais. Et pourtant leur Brand New Cadillac avec la poupée qui ain't never (more ) comin' back sonne comme le glas funèbre qui annonce la nuit de votre enterrement. Slatko vous mâchonne les paroles du bout des lèvres comme s'il mastiquait un chewm-gum d'angoisse pure. Pour une simple minette impertinente qui vous plante sur le trottoir, le combo vous brosse un drame humanitaire encore plus tragique que le génocide du Ruanda. Même traitement pour Shakin' All Over, la partie de jambes en l'air, il vous la transforme en séance de cour martiale, aucun souci à vous faire, vous n'en réchapperez pas.

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Ne bougent pas d'un centimètre et vous vous apercevez que la grande menace vous enveloppe. Aucun indice auquel vous pourriez vous raccrochez, ni au feutre noir de David qui lui donne l'air inquiétant d'un agent secret, ni le Johnny Cash, the man in black, qui vous tire dessus avec sa guitare, sur le t-shirt de Mariano, ni l'étole léopard cruel sur la veste de Luis le guitariste, vos poils se hérissent lorsqu'ils abordent I Fought the Law, pour sûr vous n'avez pas affaire à de minables petites frappes de bas-quartiers. Ce sont des seigneurs, des saigneurs sans pitié qui vous transpercent le corps de leurs échardes électriques.

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Rockin'Hellfire vous joue le rock comme un oratorio de mort. Ne vous ont pas trompé sur la destination finale. Visent les profondeurs infernales. Et vous les suivez sans une hésitation, sans un regret. Voyage au bout de la nuit. Le rock conçu en tant que road movie on the 666 avenue. Leur Teddy boy Boogie est repris en choeur mais avec ces enchanteurs de Hamelin, on irait au cimetière en chantant. C'est cela le Hellfire Rock'n'roll et vous ne pouvez que crier après eux I'm Comin' Home.

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Superbe prestation.

 

TWANGMASTERS

 

Changement de décor et d'époque. Le drapeau anglais reste bien collé à sa place, sur le mur de fond de scène. C'est à l'intérieur de vous que vous enlevez les voiles noirs de crêpe et de deuil que votre imaginaire avait placardé sur votre cerveau durant le set des Rockin Hellfire. Les Twangmasters eux aussi sont habillés de noir, mais ce n'est pas la même chose, leurs blue-jeans nous le confirment. Ce n'est pas la teinte dont on se pare qui colorie la vie, mais notre volonté de la peindre d'une telle ou telle autre couleur. Il fut un temps où les Twangmasters étaient quatre, mais le batteur s'est retiré. Auraient pu arrêter l'histoire à cet instant-là, ou en embaucher un nouveau. Ont préféré compter sur leur propres forces et continuer à trois. Le rock n'est-il pas une musique en perpétuelle recomposition ?

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Vêtus de noir mais très premiers Blue Caps. Paul Barton est au four et au moulin. Au chant et à la batterie. Joue debout à la Dickie Harrel, caisse claire, un tom et les deux cymbales, desquelles il ne prolonge jamais les vibrations arrêtant de la main si nécessaire le ruissellement du métal. Un son très primitif, le même que vous trouvez sur les premières versions de Chuck Berry – avec en plus le piano en moins – ce n'est pas un hasard si le set débute par Too Much Monkey Business.

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Son primal, récuré jusqu'à l'os. Ne vous servent même pas le nécessaire, seulement l'indispensable. C'est peut-être pour cela que vous ne rejetez rien. Faut entendre leur All I Can Do is Cry, pas de trémolos romantiques dans la voix, adieu à la grandiloquence narcissique du chagrin, la douleur uniquement, la jouissance de la souffrance, rien de plus. L'essentiel. Sur Crazy Legs ils parviennent à découper juste l'ossature rythmique du morceau, de véritables hyènes carnassières, inutiles de repasser après, n'abandonnent tibias et fémurs qu'après en avoir extrait la substantifique moelle.

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Il y en a un pourtant que ça fait rigoler, c'est Carl Gunther, à dada sur sa contrebasse qui s'amuse comme un gamin. Un pitre sous ses cheveux blonds coupés rasibus qui cherche à établir le contact avec le public. N'en oublie pas de bosser pour autant, d'abord il envoie une giclée de notes rondes et swinguantes qui s'éparpillent dans toutes les directions, sa manière à lui de tresser le schéma rythmique du titre tout en laissant assez d'espace pour que le Barton puisse bastonner à sa guise dans les espaces ainsi délimités. Et puis il vous regarde et se marre comme un bossu. N'en oublie pas pour autant de faire péter le mur du son sur ses cordes qu'il triture comme des élastiques géants.

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Du coup l'on en oublierait presque, malgré son imposant gabarit, Alain Wilson qui s'active sue sa lead guitar. Pas le genre de jeu à épater le touriste. Se contente d'encercler et faire tenir ensemble la production des deux précédents. Fait le lien, pose la charpente et monte les murs, tandis que les deux autres passent le crépi et posent les tuiles. Mais le gros oeuvre indispensable, il s'en charge. Le rôle du berger qui rassemble le troupeau. Faut entendre son boulot sur le Maybeline et le Long Blond Hair de Johnny Powers.

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Les titres défilent vitesse grand V, servis par la voix chaude de Paul qui les expédie sans fioritures, un Cheatin' Heart sans naïf émerveillement, un Folsom Prison sans mélodramatisation, un Blues Stay Away From Me sans mélancolie. Nous ne sommes pas au Cours Florent, The Twangmasters ne surjouent pas leurs interprétations. Ils jouent du rock'n'roll, uniquement du pure rock'n'roll, et quand vous les écoutez vous comprenez qu'il ne vous manque plus rien pour être heureux dans votre misérable existence. Pas d'emballage, pas de papier fantaisie ni de petits rubans roses, le cadeau tout seul. Superbement suffisant.

 

THE JAGUARS

 

Cinq sur scène, dont quatre rangés en rang d'oignons par-devant et le batteur par derrière. Commencent si cool qu'on ne fait pas attention à la beauté du son. Sont à la parade, l'on se croirait dans un groupe de Do Woop, se balancent en rythme et en cadence, les trois guitares et le chanteur, et une fois l'on se tourne tous ensemble vers la gauche, et attention cette fois sur notre droite, bien, tous ensemble, maintenant on recommence, et derrière son micro Dave Rivers arbore son sourire dentifrice N° 1, c'est quoi ces blaireaux, se croient à la revue de l'Alcazar, pincez-moi, je rêve. Ces jaguars seraient-ils des fauves d'opérette ?

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C'est à cet instant que votre cerveau ne répond plus. Collapsus intégral. Vos neurones ne sont plus qu'un immense vortex qui tournoie sans rémission dans votre boîte crânienne. Inutile d'appeler le docteur. C'est sans remède. Ce phénomène attentatoire porte un nom, vous êtes une victime collatérale de ce terrible virus foudroyant dont on répète avec terreur le nom dans les laboratoires de recherche médicale qui luttent sans succès depuis soixante ans contre cette mortelle pandémie, c'est le R'n'R. Surtout évitez de fréquenter les cirques et les ménageries, la virale bactérie s'attaque d'abord aux félins, mais se transmet très facilement à l'homme.

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Vous servent très vite un instrumental pour que vous puissiez vous rendre compte de l'ampleur du désastre. Très sixties, un son à la Shadows comme les Shadows n'ont jamais été capables d'en fournir. Normal, l'ont légèrement survitaminé. Vous repérez très vite, sur votre gauche, le coupable, je vous donne son nom Andy Wren, non il ne joue pas de la lead guitar, il vibratophone à la folie, un véritable maniaco-bigsbryseur, vous fait avaler des couleuvres d'acier suédois par centaines, ces maudits reptiles s'échappent de sa guitare et s'en viennent pondre des myriades d'oeufs empoisonnés dans votre cerveau malade. Ah, vous vouliez du rock and roll, eh bien en voici. Et puis pour se foutre de votre gueule ils entonnent tous en choeur She-she-she Litlle Sheila pour soutenir Mister Dave Rivers qui les embarque dans une mélopée infernale, son sourire de Monsieur Loyal du Rock'n'roll toujours aussi épanoui sur ses lèvres.

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Les Jaguars s'amusent. Mais à coups de griffes. Vous déchirent tout du long, vous broient les os sous prétexte de vous mordiller amicalement, vous éviscèrent sans plus de prudence, vous laissent retomber tout pantelant, avant de revenir vous retaper à grands coups de barre de fer sur les incisives. Tous méchants. Même Eddy Gentry sur sa batterie. Une mine inquiète, toujours en train de s'assurer de ce que font les autres, mais un véritable psychopathe du caisson. Le gars têtu qui n'en démord jamais. Un méthodique. L'a divisé son champ d'action en quatre ou cinq secteurs. S'occupe de chacun d'eux, mais à chacun son tour. L'un après l'autre, change systématiquement de zone à chaque nouveau morceau, mais alors il ne la lâche plus, la bombarde et la pilonne sans pitié. Le genre Attila qui fait bien attention à ce qu'après un concert pas un poil de chacal ne repousse sur la peau de ses toms. N'épargne aucun centimètre carré. Comment voulez-vous que les guitares ne se sentent pas soutenues dans leurs méfaits harmoniques avec un tel exemple !

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Nick Grammon est à la rythmique, c'est le plus jeune, Dave le laissera chanter à deux reprises. Encore un à qui sa maman n'a jamais appris à dire s'il vous plaît, vous tisse des murs de flammes de quinze mètres, ratiboise sec et ne jette jamais d'eau sur l'incendie qu'il vient d'allumer. Tony Casey est à la basse. Soi-disant. Parce qu'il ne s'en sert pas pour planter un bulbe de tulipe tous les vingt centimètres. Serait plutôt du genre plante rampante et carnivore qui s'entrelace à tout ce que produisent ses trois congénères. Basse Fender à manche très long, comme un jour sans pain, et il a une faim à dévorer le monde.

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L'est vrai que sur sa lead, Andy Wren donne le mauvais exemple. Avec une leçon en prime. Démonstration gratuite. Ecoutez et vous comprendrez. Comment au tournant des années soixante le rock est-il passé du son guitare claire à la Hank Marvin à ce qui deviendra l'urgence métallique des premiers grands groupes anglais. Des Shadows aux Who, du surfin' à l'électricité. Ou comment l'on a scié les barreaux de la cage et lâché le fauve en liberté. Sans surveillance. Andy Wren n'a pas été le guitariste des Avengers pour rien. Ne devaient pas y avoir beaucoup de puristes dans l'assistance car je n'ai entendu personne crier au loup. Les Jaguars ont laminé le public. Et vous n'aviez pas intérêt à vous rendre car ces maudites bestioles n'étaient pas d'humeur à faire des prisonniers.

 

Little Sister, Matchbox, School of Rock'n'roll, Johnny B. Goode, les titres se succèdent, un déluge de feu et d'acier sans fin. Le moins effrayé de tous, c'est Dave River, un elfe, un feu follet qui survole les flammes de l'enfer avec une facilité démoniaque. Pas le moindre signe d' essoufflement, jerke autour du micro, se jette à terre tout en continuant à chanter comme s'il était assis dans une bergère Louis XV. Très british, en somme.

 

Des gentlemen ? Non beaucoup mieux, des rockers. Merci Fifi.

 

Damie Chad.

( des centaines de photos sur les facebooks d'Edonald Duck et Petite Grenouille )  

 

 

 

LE CESAR / PROVINS

 

12- 04 – 2014 / LOREANN'

 

 

Parfois la vie vous a un de un ces goûts de revenez-y, pas du tout vérolé. Me pointe de bonne heure – contrairement à mon habitude – sur le marché de Provins because ma journée est chargée en évènements divers lorsque, devinez le nom de la personne que j'aperçois en premier, avec sa guitare, sur la terrasse du César. Loreann' ! Pour ceux qui ne connaissent pas reportez-vous à la précédente livraison N° 184. Marx disait que l'histoire ne se répète pas mais que parfois elle bégaie. Me semble revenir dans le passé de l'Humanité, juste d'une semaine, ce n'est pas grand chose, mais c'est juste un début.

 

Bref Loreann', ses cheveux blonds, sa guitare folk, sa voix ensorceleuse, rien que pour moi. Des standards américains, rien que pour moi, par exemple une version de Mister Tambourine Man susurrée d'une manière à vous rendre jaloux. Et comme la dernière fois, le même phénomène de remplissage de la terrasse, les clients en veine de générosité qui lui offrent à boire et son chapeau qui n'arrête pas de recueillir les euroïques piécettes... Et l'ami Richard qui revient s'asseoir à mes côtés.

 

Nouveauté, Démocrite avait raison, l'on ne trempe jamais les lèvres dans le même verre de Jack. D'un deuxième étui, cette fois elle extrait une Epiphone – le modèle copié tout droit ( enfin presque ) sur la Gretsch d'Eddie Cochran. Tout de suite le récital vous prend une autre ampleur. Rien à dire, l'électricité est une découverte qui a plus fait pour le bonheur des hommes que l'invention des bombes à fragmentation. Du coup il y a même Jackie La Gratte, une figure folklorique de la cité, qui s'en vient fredonner J'avais Deux Amis du grand-père Schmall, dédié à Eddie Cochran et Buddy Holly. Décidément quand l'on prend les rockers par les sentiments...

 

Loreann' a repris son instrument et entreprend de ré-enchanter notre univers, le pire c'est qu'elle y réussit et que je dois me défiler, le devoir m'appelle, suis obligé de m'arracher après une ultime poignée de titres talentueux. Le lendemain Richard me raconte qu'il est resté et qu'ils ont beaucoup parlé guitare. Normal, il est prof de guitoune à ses heures gagnées sur la cruauté du monde. Un dernier coup d'oeil à la silhouette de Loreann', sûr qu'on la reverra, elle chante trop bellement pour ne pas l'écouter.

 

Damie Chad.

 

GANGS STORY

 

YAN MORVAN – KIZO

 

 

( La Manufacture de Livres – 2012 )

 

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Avant tout un gros et beau bouquin de photos. Qui était déjà paru au début du millénaire aux Editions Marval, spécialisées dans les livres ( évidemment ) photos. Les vues de Yan Morvan étaient-elles alors accompagnées de commentaires ? Nous n'en savons rien. Toujours est-il que cette nouvelle mouture est illustrée d'un récit de Kizo, ex-membre de la Mafia Z, gang de la ville de Grigny qui regroupait des jeunes du quartier de la Grande-Borne. Le mot récit semble un peu mal approprié – Kizo ne raconte ni hauts faits de guerres ni anecdotes significatives, il sait rester discret et ne nous livre que l'écume des apparences indéniables. Ses interventions se limitent à quatre introductions qui n'excèdent pas six pages pour la plus longue.

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On ne peut pas dire que Yan Morvan publie ce livre par hasard. C'est après avoir fortuitement rencontré Johnny, un rocker charismatique de Montreuil, qu'il s'est retrouvé voici près de quarante ans à photographier les rockers français dès 1975, à l'époque ses photographies étaient parues aux Editions Jean-Claude Simoëns en 1977 dans Le Cuir et Le Baston, avec un commentaire assez politico-moralisateur de Maurice Lemoine. Ce livre est aujourd'hui qualifié comme le premier ouvrage français qui s'intéressait aux rockers français. Ce qui n'est pas tout à fait vrai puisqu'en 1975 Ken Pate nous avait offert l'inoubliable Roquette Rockers... Quoi qu'il en soit Le Cuir et Le Baston ouvrit la porte de Paris-Match à Yan Morvan. Un grand professionnel, à la personnalité un peu borderline, se trouva ainsi mis sur les rails... Beaucoup de ces premières photos se retrouvent d'ailleurs dans Gangs Story.

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Car Gangs Story ne débute vraiment qu'en 1975. Certes, dans sa monographie Kizo remonte aux premiers Blousons Noirs des années 60 mais à cette époque là Yan Morvan était encore trop jeune...

 

ROCK' N' GANGS

 

Les mauvais garçons ont toujours fait phantasmer. Les jolies filles, mais aussi les petits bourgeois et les poules mouillées. Se présentent comme le rêve réalisé de multiples projections de volontés de puissances qui resteront soigneusement cadenassées à double-tour et avec chaînes ( à vélo ) dans la robinetterie intérieure de nos méandres cervicaux. Il ne reste que très peu de témoignages sur les premières bandes de blousons noirs en France, on ne les connaît pratiquement que par les reportages effectués par la grande presse d'époque, hostile bien entendu, à ces fils perdus du prolétariat. Ils avaient pourtant trouvé leur boussole, la musique - largement dispensée à tue-tête par les enceintes des auto-tampons et des chenilles des fêtes foraines, ils se reconnaîtront dans les idoles maudites du rock'n'roll - Gene Vincent, Vince Taylor, Eddie ( don't forget him on this April 4 th ) Cochran... Les bandes d'alors sont un délicieux ramassis exubérant d'enfants de prolétaires, gitans, narvalos et arabes, qui pressentent qu'ils seront les exclus des trente glorieuses qui se profilent à l'horizon... A peine nées elles vivent déjà dans la nostalgie d'un âge d'or américain qui ne durera pas longtemps et qui ne s'est pas vraiment déployé en France... D'un niveau social très limité elles seront assez fortes pour créer la première french-rock mythologie mais incapables de créer les codes écrits et artistiques facilement transmissibles d'une véritable contre-culture... Ces bandes fonctionnent en milieu clos, en réseau fermé d'auto-initiation individuelle et familiale.

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Le rock est une condition nécessaire de survie mais pas suffisante. Insensiblement l'on passera des bandes de blousons noirs aux rockers animés par un esprit de résistance à l'évolution d'une musique qui est déjà en train de changer et de brouiller ses propres codes. Les rockers seront d'instincts conservateurs, ce qui plus tard se transformera en l'adoption d'une idéologie réactionnaire. Mais il reste encore bien des étapes à franchir pour en arriver là : des faits significatif et quelque peu contradictoires se déroulent au milieu des années 60 aux USA.

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L'explosion hippie avec son idéologie petite fleur bleue – du moins telle qu'elle est présentée sur les médias nationaux est en totale opposition avec la violence revendiquée du premier rock'n'roll. Idées pas si courtes que cela pour qui prend la peine de s'y pencher, mais cheveux longs et tenues négligées. A mille lieues du bon goût gominé des rockers. Mais les hippies ne sont pas les seuls à arborer des looks hirsutes. Les reportages sur les Hells Angel's d'Amérique dont on causera de plus en plus à la fin de la décennie ( Atlamont, articles fascinés dans Match, Easy Riders ) apportent une nouvelle esthétique. Les Hell's Angels descendent tout droit de L'Equipée Sauvage – et il est difficile de refuser une telle caution originelle – ces anges de l'enfer sont bien les enfants du rock, ils en portent le blouson emblématique, même s'ils ne sont pas spécialement fixés sur les pionniers, ils ont une prédilection affichée pour un rock and roll hard et violent. Evidemment ne sont pas tout lisses sur eux, arborent des tignasses emmêlées et ont les mains souvent empreintes de cambouis... Le livre commence à cette époque lorsque la bande de Répu et celle de Crimée se fixent sur l'est de la capitale. Ces premiers Hells Français imposeront leur marque de fabrique sur tous les mouvements de jeunesse qui suivront : la multiplication des motos-clubs de bikers certes, mais surtout cette idée qu'une bande se doit de construire sa propre économie de survie... Les hippies sont de grands consommateurs de drogues, un marché libre de toute intrusion réglementaire est à la portée de main de qui saura s'en saisir.

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Les premiers rockers ont affaire à une forte concurrence. D'autant plus qu'une scission s'établit à l'intérieur du mouvement. Autour des années 76-77 arrivent sur le marché français des tas de compilations jusque-là introuvables. Au lieu de refourguer un inédit d'Eddie Cochran au milieu de onze titres que l'on possède déjà en six exemplaires, les majors, et puis de plus petits labels qui sautent sur l'opportunité, sortent des catalogues américains tous les petits pionniers dont on connaissait le nom mais que l'on n'avait pratiquement jamais entendus. Le mouvement rockabilly des années 80 prendra racine sur cette manne musicale inespérée. Sera dans un premier temps porté par les groupes de jeunes qui repassent la barre symbolique des sixties : les Fifties entendent montrer au monde entier qu'ils font une croix sur l'évolution du rock. Ne portent plus obligatoirement le blouson de cuir noir – tout de même un peu morbide – se vêtent de sweaters colorés, verts et rouges. Les mexicaines à talons biseautés et à bouts pointus sont délaissées en faveur des creepers two tones... Disques ou sapes, tout cela coûte de l'argent, les Fifties sont dans l'ensemble d'un milieu social plus élevés que les premiers rockers. Ce phénomène est aussi l'indice que le rock'n'roll est en train d'être adopté par des couches de plus en plus larges de la jeunesse...

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Mais l'époque est propice aux changements. En Angleterre le mouvement Teddy prend de plus en plus d'importance. Ne s'agit pas uniquement de fringues et de looks, de nombreux combos opèrent un retour vers le rock des pionniers et le rockabilly, ils en accélèrent légèrement la cadence jusqu'à créer un effet hypnotique qui plonge les auditeurs dans une nouvelle addiction... En France les milieux rock tendent de plus en plus l'oreille vers ce mouvement qui possède sa propre organisation, ses us et coutumes, ses signes de reconnaissance, ses réseaux, ses concerts...

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Mais les rockers n'en croient plus leurs yeux. Jusque alors s'ils étaient la dernière roue de la charrette sociale, ils détenaient au moins une place de premier, en commençant par la fin. Ce qu'il y a de pire n'équivaut-il pas à ce que le monde offre de meilleur ! A un niveau symbolique, sûrement. Et voici qu'ils se font doubler sur leur gauche. Grâce aux lois du regroupement familial promulguées par Valéry Giscard d'Estaing, les cités se remplissent de travailleurs africains... Une nouvelle génération de kids encore plus fracassée que le lumpen-prolétariat national commence à apparaître. Les bandes de rockers l'ont mauvaise. Ne font pas contre mauvaise fortune, bon coeur. Au contraire, elles se rétractent sur elles-mêmes et recherchent dans la seule histoire qu'elles connaissent des barrières de protection. Se définissent comme les petits-blancs américains du Sud qui subirent la concurrence déloyale des salaires allouées à la main d'oeuvre noire des esclaves libérés de la servitude. Vikings et Rebelles se ceignent de l'étamine sudiste et ne tardent pas à adopter une idéologie pour le moins racisante. La bourgeoisie peut continuer à dormir sur ses deux oreilles, tant que les pauvres se bastonnent entre eux, elle a encore de beaux jours à couler...

 

HIP'N'GANGS

 

Les gamins des cités ne sont pas plus bêtes que les autres. Même si la population s'est modifiée et provient en grande partie de l'Afrique Noire. Une nouveau style de bandes de jeunes est en train de proliférer. Encore une fois on copie l'Angleterre où des mouvements similaires à ceux qui viennent de se passer en France se sont déroulés. Dans les suburbs de London, les Skins à têtes rasées – un contre-courant du mouvement mods - ne supportent plus la forte prédominance de l'émigration étrangère – jamaïcaine notamment – dans leurs quartiers. Les fils de prolos, la boule à zéro, les Doc Martin aux pieds, organisent la chasse aux noirs ou aux pakistanais. Ratonnent sec à coups de battes de base-ball.

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Ici, autour du Golf-Drouot, des groupes informels de Black Panthers qui écoutent du rock'n'roll noir ( Little Richard, Esquerita, Rhythm'n'Blues, James Brown... ) se lancent à la poursuite des Rebelles... qui sont remplacés par une nouvelle génération de jeunes gens, des bandes de skins qui ne s'inscrivent plus dans la tradition d'écoute des pionniers... Mais très vite apparaissent de nouvelles troupes qui décident de chasser de Paris, les redoutables bandes de Skinheads français qui se sont rapidement accoquinées avec les groupuscules d'extrême-droite. Dans les années 80, la donne change, les bandes ethnicisées des cités délaissent totalement le rock au profit du Hip-Hop et du Rap. Ducky Boys, des Black Dragoons, pourchassent les skins et les obligent à raser les murs. Se surnomment les Redskins car en ces années-là le mythe de la révolution est encore vivace et positivement connoté. Ils ont gagné la guerre, même si les braises sont toujours brûlantes. La mort de Clément Méric en juin 2013 dans une bagarre opposant militants antifas et skins d'extrême-droite est là pour nous rappeler que l'incendie peut reprendre à tout moment.

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Kizo ne cache pas sa sympathie pour les Redskins, l'on peut dire qu'il fait partie de cette mouvance idéologique - antiraciste, antifasciste – même si son engagement ultérieur nous montre qu'il n'est pas dupe des travers de son propre camp. Car le combat ne cessa pas faute de combattants. Les bandes de redskins alliées dans leur lutte contre les skins se trouvèrent fort dépourvues après leur victoire. N'avaient plus qu'à rentrer chez elles... où elles s'ennuyèrent comme des rats morts. Quand on n'a plus d'ennemis, il faut vite s'en créer d'autres... Faute de mieux les bandes organisèrent la guerre des gangs. Au début just for fun, ensuite pour défendre leur territoire, ensuite pour réglementer tous les trafics imaginables sur la zone impartie...

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Kizo en sa prime jeunesse se donna sans compter dans la lutte fratricide qui opposa les bandes de Grigny de Corbeil et d'Evry. Il est revenu de cette violence gratuite – pas si gratuite que cela car les bénéfices engrangés ( drogues, prostitution, voitures volées, etc... ) forment de nos jours une véritable économie parallèle, dont on ne sait où se perdent les ramifications... Les quartiers tenus par les bandes sont aujourd'hui les plus calmes. Le commerce n'aime guère les affrontements qui obligent la police à intervenir et à fourrer son nez un peu partout... Imaginez que par hasard vous tombiez sur un flic et un journaliste intègres, jusqu'où remonterait le scandale ? Parviendrait-on à l'arrêter avant ? Le blanchiment d'argent sale demande tant de complicités ! Kizo déplore cette évolution, il essaie d'entraîner les jeunes de sa cité à pratiquer le sport...

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Le livre ne porte aucun jugement moral. Il égrène les faits. Ceux qui sont connus. Pour le reste ( tout le reste ) il les tait. Aujourd'hui histoire semble faire une pause. Mais l'eau qui dort est la plus menaçante. L'on se retrouve assez loin du début. Entre les bandes de blousons noirs désargentées des années 59 – 62, adeptes d'une petite délinquance qui n'a jamais été le moyen d'un véritable enrichissement personnel, et l'iceberg monétaire qui se profile sous les circuits parallèles des cités, il existe un véritable fossé. Pour la suite j'imagine que d'autres mafias doivent contempler le magot avec envie. Je ne pense pas par exemple que la série d'éliminations systématiques qui secoue actuellement les quartiers chauds de Marseille soient uniquement dues à de jeunes imbéciles qui jouent aux têtes brûlées. Combats de pieuvres redoutables et d'eaux profondes, les cervelles qui commandent les retors tentacules sont hors de portée. Du moins de la nôtre.

 

Yan Morvan est revenu à plusieurs reprises sur le sujet. Notamment en 1994, il fréquente ainsi Gui George sans se douter qu'il tient dans son viseur un des plus célèbres serial-killers français. Toutes ces photos sont dans le livre. Je vous laisse découvrir leur intransigeante netteté. A voir. Et à méditer.

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Cette guerre des Gangs raconte l'institutionnalisation – quelque part étatique pour ceux qui savent lire entre les lignes de nos deux antépénultièmes paragraphes – de la violence du rock'n'roll. Le système capitaliste est d'une très grande perversion. Vous retourne toujours le cran d'arrêt avec lequel vous l'agressiez dans le dos. En vous laissant croire que c'est vous qui avez porté le coup !

 

Damie Chad.